On parle de la lutte contre le harcèlement scolaire dans les établissements des PO avec le référent du dispositif PHARE au collège perpignanais la Garrigole.
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00:00 7h46, on s'intéresse ce matin à la lutte contre le harcèlement scolaire dans les établissements des Pyrénées-Orientales.
00:06 Tanguy Bocconi, nous recevons ce matin le référent du dispositif PHAAR au Collège de Perpignan, au Collège de la Garrigole.
00:13 - Bonjour Jordi Sébastien. - Bonjour.
00:15 - Alors vous êtes également professeur d'EPS au sein de ce Collège perpignanais, la Garrigole, c'est dans le quartier de Saint-Assisque,
00:21 où vous avez développé depuis trois ans le dispositif PHAAR. Alors en quoi est-ce que ça consiste ?
00:26 Comment ça se passe concrètement quand un élève est victime de harcèlement dans votre établissement ?
00:30 - Alors il y a trois étapes. La première étape c'est une situation diagnostique pour évaluer le type de harcèlement.
00:38 Si c'est des faits graves, le chef d'établissement prend des sanctions disciplinaires et ensuite il fait appel à l'équipe PHAAR
00:46 pour essayer de résoudre sur le terrain ces situations d'intimidation.
00:50 Donc on est une équipe de professeurs et de personnel administratif pour tenter de résoudre ces problèmes de harcèlement.
00:58 Et sur le terrain concrètement, il y a trois étapes. Une première étape où on évalue avec l'élève victime et sa famille la gravité des faits.
01:06 Et ensuite on s'appuie sur les intimidateurs et des groupes de témoins pour tenter de trouver des solutions
01:14 pour que cet élève harcelé se sente mieux dans le collège. Et ça passe par des entretiens individuels qui durent maximum deux minutes
01:23 et que l'on rencontre toutes les semaines jusqu'à ce que la situation s'apaise entre les intimidateurs et la victime.
01:30 - Alors on va essayer d'expliquer, il y a un changement de philosophie en fait dans ce dispositif PHAAR.
01:35 C'est-à-dire qu'il n'y a plus de confrontation directe comme ça pouvait se faire avant entre le harceleur et le harcelé.
01:40 Ça ne marchait pas ça en fait ?
01:42 - Alors effectivement, lorsqu'on le mettait en confrontation directe, il y avait une stigmatisation de l'élève harcelé
01:50 et finalement les résultats n'étaient pas bons. Donc on s'appuie sur des recherches scientifiques sur la méthode de la préoccupation partagée
01:58 où l'idée en fait c'est d'amener tout un groupe à se préoccuper du bien-être d'un élève.
02:04 - C'est ça qui change en fait ? Il y a une dynamique de groupe ?
02:07 - Il y a un changement de posture en tout cas par rapport à l'élève harceleur.
02:11 C'est-à-dire que nous en tant que référent, on ne va pas chercher à savoir les faits
02:15 et on va plutôt changer la posture de l'intimidateur qui trouve des solutions par lui-même
02:21 pour que la personne se sente au mieux dans ce collège.
02:24 - Oui parce que les faits en fait souvent c'est des broutilles ou c'est des choses un peu sans cognitats.
02:28 Au final l'important c'est de faire arrêter la pratique du harcèlement en fait.
02:32 Et c'est difficile de trouver le début et la fin et on perd énormément de temps par rapport à ça.
02:37 - Vous êtes combien d'adultes à participer à ce groupe ?
02:40 - On est 7 et on espère cette année recruter de nouvelles personnes,
02:44 de nouveaux collègues du collège pour venir nous aider
02:47 puisqu'effectivement ça prend pas mal de temps pour résoudre une situation.
02:51 - Mais vous avez beaucoup de cas à traiter, c'est si courant que ça à La Garigole ?
02:56 - Pour vous donner un ordre d'idée, l'an dernier on était sur 15 situations de harcèlement.
03:01 - Sur toute l'année ? - Sur toute l'année, effectivement.
03:04 Et grâce à ce protocole, à cette méthode, je pense qu'on a résolu environ 11 cas de situation de harcèlement.
03:10 - 11 sur 15 ? - Voilà.
03:12 - Et ça marche mieux qu'avant donc ? - Ah ça marche mieux qu'avant oui.
03:14 - D'accord, et pour les 4 restants qu'est-ce qui s'est passé ?
03:16 - C'est des situations qui sont là depuis l'école maternelle et qu'on a du mal à dénouer.
03:22 - Ah oui à ce point, c'est-à-dire que ça se prolonge jusqu'au collège avec les mêmes victimes ?
03:26 - Avec les mêmes victimes, qui se prolongent dans l'établissement et à l'extérieur de l'établissement.
03:31 Donc c'est des situations qu'on a du mal à décortiquer et on a du mal à trouver des solutions.
03:36 - Ah oui c'est enraciné quoi, vraiment. - C'est enraciné.
03:38 - Donc votre but en fait, c'est d'intervenir le plus tôt possible pour éviter que les situations se cristallisent.
03:44 Parce qu'après ça suit l'élève tout au long de sa scolarité parfois.
03:49 - Voilà, c'est pour ça effectivement que nous en tant que référents, on intervient également dans les écoles primaires
03:53 pour sensibiliser les élèves par rapport à ce harcèlement.
03:57 On emmène des élèves ambassadeurs pour qu'ils présentent comment ça se passe au collège
04:01 et comment ils peuvent remédier à ces situations d'intimidation.
04:04 - Alors aujourd'hui Sébastien, professeur de PAS et référent phare au collège perpignanais de la Garigole,
04:10 ça c'est côté établissement scolaire, mais les parents ils ont un rôle à jouer aussi, on va en parler,
04:14 mais vous vous appuyez aussi sur les élèves, vous avez des élèves ambassadeurs c'est ça ?
04:17 - Alors effectivement, on forme tous les ans une trentaine d'élèves ambassadeurs volontaires
04:22 de différents niveaux, qui sont là pour nous alerter lorsqu'ils rencontrent des situations de harcèlement au sein de l'établissement.
04:30 - Et ils sont nombreux à être volontaires les élèves aussi, vous les sentez partie prenante,
04:33 est-ce qu'il y a un changement de mentalité par rapport à ça ?
04:35 - Alors oui.
04:36 - C'est que les générations précédentes, bon, on regardait un peu ailleurs,
04:39 parce qu'on se disait celui qui harcelait finalement si c'est lui c'est pas moi,
04:42 puis il y en avait qui font simplement de regarder ailleurs,
04:44 est-ce qu'il y a une prise de conscience, est-ce que ça change, est-ce que ça commence à bouger ?
04:48 - Je pense que oui, effectivement, puisqu'on a 35 élèves à peu près qui se sont portés volontaires l'an dernier.
04:53 - De tous niveaux ?
04:55 - De tous niveaux, de tous niveaux, et c'est des élèves qui généralement ont été victimes de harcèlement
05:00 à un moment donné de leur scolarité, et qui viennent vers nous pour nous aider dans cette lutte contre le harcèlement.
05:07 - 7h51, Jordi Sébastien est notre invité.
05:14 Le professeur d'EPS est référent du dispositif anti-harcèlement phare au collège La Gargole, collège de Perpignan, Tanguy Bocconi.
05:21 - Alors Jordi Sébastien, on a parlé de ce qui se passe à l'intérieur du collège,
05:24 comment ça se passe avec les familles ?
05:26 Parce que forcément elles ont leur rôle à jouer dans cette lutte contre le harcèlement scolaire.
05:30 - Alors effectivement, quand il y a une situation de harcèlement qui est avérée au sein de l'établissement,
05:35 il y a une discussion, il y a un entretien avec les familles,
05:39 c'est un peu la difficulté parce que cette méthode prend du temps,
05:43 et nécessite de la patience de la part des familles pour nous faire confiance
05:48 et attendre que la situation s'apaise en utilisant cette méthode de préoccupation partagée.
05:55 - Est-ce que le dialogue passe ? Il n'y a pas du déni parfois de la part des parents des élèves harceleurs ?
06:00 C'est difficile d'admettre que son gamin peut être un peu nocif pour d'autres enfants ?
06:06 - Alors nous, dans le protocole PHAAR, nous n'avons pas d'entretien avec la famille des harceleurs, des intimidateurs.
06:14 Nous appuyons que sur l'élève harceleur pour le faire changer de posture.
06:19 En revanche, si c'est d'effet grave, le pôle administratif prend le relais et convoque les familles.
06:26 Effectivement, les familles souvent dénient cette situation de harcèlement et considèrent ça comme un jeu.
06:34 C'est la difficulté que nous avons rencontrée.
06:37 - On a beaucoup parlé de dialogue, de concertation, mais il y a aussi des sanctions quand il n'y a pas d'autre solution.
06:43 Ça, ça existera encore, au bout d'un moment, il n'y a plus trop de choix.
06:47 - Oui, bien sûr, dans la première étape diagnostique, si les effets sont graves,
06:51 c'est le pôle administratif qui prend le relais, le chef d'établissement qui prend le relais pour effectuer des sanctions disciplinaires.
06:57 - Et c'est le harceleur qui est déplacé maintenant ?
07:00 - Oui, le but, c'est que ce n'est pas l'élève victime de changer d'établissement.
07:08 - Sinon, il y a double panne.
07:10 - C'est vraiment la personne harceleur qui doit avoir des sanctions disciplinaires.
07:15 - Est-ce que vous avez également des cas de harcèlement sur les réseaux sociaux, de cyberharcèlement ?
07:21 - Oui, le cyberharcèlement, on en a énormément, on en a à notre connaissance.
07:26 - C'est beaucoup plus le point de vue.
07:28 - On essaie de le traiter de la même manière que le harcèlement.
07:31 Et surtout, on essaie, nous, en tant que référent du dispositif phare,
07:36 de faire de la prévention par rapport au cyberharcèlement.
07:39 - Comment vous faites ? Vous leur en parlez en classe ?
07:41 - Il y a des journées consacrées à la prévention du cyberharcèlement.
07:47 Et c'est des vidéos que l'on passe à tous les niveaux de classe.
07:51 Et un débat est organisé au sein des classes.
07:54 - Ça sera ma dernière question. Le ministre de l'éducation nationale rencontre en ce moment les syndicats.
07:59 Il y a un grand plan qui est annoncé jeudi.
08:01 Je ne vais pas vous demander d'avoir une boule de cristal que vous n'avez pas.
08:03 Mais selon vous, qu'est-ce qu'il serait urgent de faire pour améliorer un petit peu la lutte contre le harcèlement ?
08:09 Vous qui êtes les mêmes dans le Cambouis, c'est quoi les mesures les plus urgentes pour vous ?
08:13 Qu'est-ce qui vous aiderait à en faire ?
08:15 - La question est difficile.
08:17 - Si vous aviez le choix, s'il y avait des possibilités d'amélioration, ça serait lesquelles ?
08:21 - Mettre une personne-ressource à temps plein sur l'établissement pour lutter contre ce harcèlement.
08:29 - Parce que ça n'existe pas aujourd'hui.
08:31 - Ça n'existe pas. Les enseignants le font sur leur temps, au volontariat.
08:37 - Donc il faudrait plus de moyens et notamment au moins une personne référente dans chaque établissement.
08:42 - Voilà, une personne référente nous permettrait de poursuivre ce travail d'équipe au sein du collège.
08:48 - C'est une piste à explorer. Merci beaucoup.
08:52 - Jordi Sébastien, professeur d'EPAS et surtout référent du dispositif phare au sein du collège perpignanais.
08:58 - La garigole à Saint-Assis, que vous étiez notre invité ce matin. Merci.
09:01 - Merci à vous. Au revoir.