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Intervention de Jean-Marc Gaulier, paysagiste-Conseil de l’Etat et architecte paysagiste (agence Urbicus) - « Le paysage, un marqueur de santés ».

Dans le cadre des travaux de la Journée internationale du paysage du Conseil de l'Europe lancée en octobre 2022 sur le thème « Paysage et santé », l’Institut Polytechnique UniLaSalle de Beauvais a organisé en partenariat avec le Ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires une conférence le 13 mars 2023 sur le thème « Paysage en santé, santé dans le paysage ». Cette conférence a vocation à diffuser dans l’enseignement supérieur, et à ses étudiants, une culture du Paysage, à croiser les regards sur la qualité du cadre de vie comme marqueur sensible et déterminant des santés des populations.

Elle a reçu le concours de : Zoran Radovic, Conseiller - Projets internationaux et enseignant sciences politiques et droit, Institut Polytechnique UniLaSalle Beauvais, Hassan Younès, Enseignant-Chercheur Nutrition et Santé, Institut Polytechnique UniLaSalle Beauvais, Maguelonne Dejeant-Pons, Docteur en Droit et ancienne Secrétaire de la Convention du Conseil de l’Europe sur le Paysage, Gilles Rudaz, Collaborateur scientifique à l’Office Fédéral de l’environnement, référent pour la Suisse de la Convention du Conseil de l’Europe sur le Paysage, Emilie Fleury-Jägerschmidt, Chargée de connaissances et sensibilisation au Bureau des paysages et de la publicité du Ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires et référente pour la France de la Convention du Conseil de l’Europe sur le paysage, et de Jean-Marc Gaulier, paysagiste-Conseil de l’Etat et architecte paysagiste (agence Urbicus), avec la participation de Romane Valignat, apprentie au Bureau des Paysages et de la publicité du Ministère.
Transcription
00:00 Bonjour à tous, Jean-Marc Gaullier.
00:03 Je suis donc paysagiste-concepteur,
00:07 c'est le terme officiel en France.
00:09 Si j'étais suisse, on dirait architecte-paysagiste.
00:12 Et donc, je suis effectivement, en même temps,
00:18 paysagiste-conseil de l'État.
00:20 Donc, je travaille à l'État,
00:24 et je suis en train de travailler
00:27 avec l'État, donc je travaille avec Émilie,
00:30 ensemble de ses collègues, sur les liens, finalement,
00:34 entre paysages, environnement,
00:37 politiques d'aménagement, agriculture, etc.
00:41 J'ai mis cette petite image en introduction,
00:46 qui est une démarche paysagère
00:50 qu'on mène avec mon agence,
00:53 pour vous montrer ce qu'est le travail des paysagistes.
00:57 En fait, on est urbanisme-coordinateur
01:01 dans une grande zone d'activité,
01:04 en l'occurrence, une zone d'activité portuaire,
01:07 qui se pose la question à la fois de son impact
01:11 dans le territoire, de son acceptabilité
01:15 et de sa qualité d'acteur économique dans le territoire.
01:21 Donc, tout notre travail, dans le fond,
01:23 c'est de faire en sorte que, dans le cadre d'une économie,
01:26 une économie industrielle,
01:28 les enjeux sociaux et environnementaux
01:31 soient remontés et pris en compte,
01:35 et que l'acteur économique soit aussi un acteur
01:38 de l'environnement et du social.
01:40 Donc, effectivement, Émilie disait,
01:43 elle a mis la barre assez haute,
01:45 mais que nous étions un peu en phase exploratoire
01:51 sur ces questions santé et paysage.
01:53 Je crois qu'effectivement, on peut dire
01:55 que c'est relativement exploratoire,
01:57 parce que je crois qu'il y avait une question
01:59 d'un étudiant tout à l'heure.
02:02 Même s'il y a des...
02:03 C'était cité par Gilles Rudaz,
02:05 on pourrait citer les cas suisses,
02:08 des cas en Catalogne.
02:11 Il y a en Catalogne la démarche 3/30/300,
02:16 que j'expliquerai peut-être si j'ai le temps.
02:19 Plein de mondes, plein d'institutions,
02:21 plein d'acteurs se posent la question
02:23 de la relation entre santé et paysage.
02:26 Moi, ce que je voudrais essayer de démontrer aujourd'hui,
02:32 c'est que, surtout le paysage,
02:35 l'approche par le paysage,
02:37 c'est-à-dire la méthode qui consiste à s'appuyer
02:40 sur le paysage pour travailler les questions de santé,
02:44 mais aussi les questions d'aménagement
02:46 pour les questions de politique publique au sens large,
02:50 est une des rares méthodes
02:52 qui permet de se réapproprier globalement
02:56 la question de l'humain dans son territoire.
02:59 Je crois que vous l'avez pressenti
03:00 dans tout ce qui a été dit précédemment.
03:04 Le paysage est en elle-même, l'approche paysagère,
03:08 est en elle-même une approche globale et transversale.
03:14 Donc...
03:15 Presque tout le monde, je dirais, pour paraphraser Molière,
03:24 dont le bourgeois d'Antilles, M. Jourdain,
03:26 disait que tout le monde faisait de la prose et des vers
03:30 sans le savoir.
03:31 Moi, je crois que tout le monde fait du paysage sans le savoir.
03:36 Je pense que vous, étudiants dans les filières agricoles,
03:40 alimentation, etc.,
03:42 quelque part, vous faites du paysage sans le savoir.
03:45 Donc, je ne reviens pas sur la définition de la santé
03:49 qui a été précédemment énoncée.
03:53 Moi, je noterais qu'à peu près tout le monde,
03:58 donc l'OMS en tête,
04:00 parle de la question de la santé et de l'urbanisme,
04:03 parle de la question de la santé et de l'environnement,
04:07 parle de la question de la santé et de l'alimentation,
04:10 de la santé et des espaces verts.
04:12 Je pourrais rajouter de la santé et des espaces naturels.
04:16 Et sauf preuve du contraire,
04:18 parce qu'on est dans une démarche exploratoire,
04:20 je n'entends explicitement personne
04:23 parler de questions de santé et de paysage,
04:26 strictement de paysage.
04:28 On parle, je le redis, de santé et d'espaces verts,
04:31 de santé et d'espaces naturels,
04:34 mais pas spécifiquement de paysage.
04:39 Alors, ces petites images que je montre,
04:41 qui sont extraites pour l'une du plan national
04:44 santé et environnement du gouvernement français
04:47 ou d'une image de l'OMS
04:50 sur les espaces verts urbains et la santé,
04:53 le paradoxe, c'est qu'elles montrent des images de paysage.
04:57 Donc, je veux souligner ce point-là,
05:01 parce que le paysage,
05:04 au-delà des définitions qu'on a présentées tout à l'heure
05:08 et que je vais remontrer,
05:10 est avant tout une perception.
05:12 C'est une façon de faire image
05:15 d'une perception d'un territoire
05:17 et d'un homme, d'une femme, d'un humain dans le territoire.
05:22 Et dans le fond, dans la définition qu'on évoque,
05:27 il y a l'idée que c'est une perception des populations,
05:30 donc que c'est une perception populaire.
05:33 Dans cette démonstration que je veux faire aussi,
05:37 il y a, à mon sens,
05:39 ce qu'imposait tout à l'heure la question
05:41 de qui étaient les acteurs du paysage.
05:43 À mon sens, les premiers acteurs du paysage,
05:46 ce sont les populations.
05:48 Et la réappropriation de la perception du territoire
05:53 et la revendication par les populations
05:56 d'une forme de qualité du paysage
05:59 est une dimension démocratique quand même assez puissante,
06:03 puisque c'est une façon de restituer, de rendre aux populations
06:07 une perception qui est finalement très aisée.
06:10 Il n'y a pas besoin d'avoir fait de grandes études
06:13 pour lire et regarder un paysage.
06:15 Encore faut-il se l'autoriser et se réapproprier,
06:18 dans le fond, un droit à donner un avis
06:22 sur ce qu'est et devient son territoire.
06:26 Alors, sur ces questions-là,
06:29 je vais passer vite sur cette diapo parce que le temps passe,
06:32 mais le quatrième plan santé et environnement
06:37 aborde ces questions-là et les décrit plutôt...
06:40 Plutôt que de décrire une relation paysage et santé,
06:43 décrit plutôt une relation écologie de la santé,
06:46 qui est une façon, dans le fond,
06:48 de comprendre les interdépendances entre les écosystèmes,
06:52 les pratiques socioculturelles,
06:55 et la santé, qu'elle soit humaine, animale ou végétale.
07:00 Donc ça reste quand même,
07:02 même si c'est déjà une avancée importante,
07:06 puisqu'on voit qu'on cherche à être plus global,
07:10 c'est quand même une avancée importante,
07:12 mais à mon sens, insuffisante,
07:15 en regard de ce que pourrait apporter, effectivement,
07:18 une approche par le paysage,
07:21 puisque, à nouveau, je le redis pour moi,
07:25 pour un certain nombre d'entre nous,
07:28 le paysage est la seule démarche, dans le fond,
07:32 qui permet de comprendre,
07:35 de façon aussi bien scientifique que populaire, dans le fond,
07:41 la situation de l'humain
07:45 dans son territoire au sens large,
07:48 sachant que, finalement, le territoire,
07:52 c'est à la fois l'environnement, le cadre de vie
07:55 et l'espace vital, l'espace économique,
07:58 et que, en fond, comprendre le paysage,
08:02 c'est pouvoir se situer dans le paysage,
08:05 se situer dans le territoire,
08:08 le décrire et s'y relier.
08:11 Donc cette définition
08:17 par la Convention du Conseil de l'Europe sur le paysage,
08:24 qui rappelle que le paysage est une perception,
08:28 donc il y a quand même une dimension culturelle importante
08:32 dans cette définition,
08:34 elle résulte,
08:37 le territoire résulte de l'action de facteurs naturels, humains,
08:41 et de leurs interrelations.
08:43 Cette phrase-là est très importante,
08:46 puisqu'elle fait référence précédemment au préambule,
08:49 et on voit bien que, Magdalen l'a rappelé,
08:52 ce préambule rappelle tous les enjeux de développement durable,
08:58 de la convention et d'équilibre.
09:01 Donc moi, j'en déduis, et je m'appuie dans ma démonstration
09:05 sur l'idée que le paysage résulte des interrelations
09:09 entre l'environnement, l'économie et le social,
09:12 qui sont les trois piliers du développement durable,
09:16 et que donc cette approche permet d'avoir une vision globale,
09:21 une vision holistique entre ces trois piliers,
09:27 et on voit bien que l'intersection
09:30 entre le social et l'environnemental,
09:33 c'est le vivable, c'est la question de la santé,
09:36 donc il y a une relation évidente,
09:39 qu'entre le social et l'économie, c'est l'équitable,
09:43 c'est la lutte contre les inégalités et la solidarité,
09:47 qui peut aussi évidemment être un facteur de bien-être,
09:50 voire de santé,
09:52 et que les relations entre l'environnement et l'économie,
09:54 c'est le viable.
09:55 C'est l'idée qu'on ne va pas être des prédateurs infinis
10:01 de nos espaces et de notre territoire.
10:04 Si le paysage résulte,
10:07 et pour moi c'est une forme d'évidence,
10:10 non pas d'une lecture photographique, artistique,
10:17 culturelle des paysages,
10:19 ça c'est la perception du paysage,
10:22 le paysage lui-même est une résultante
10:26 de ces équilibres entre les piliers du développement durable.
10:30 Et donc, à l'inverse, un paysage de qualité,
10:35 un paysage en santé, on pourrait dire,
10:38 cette question de la qualité du paysage a été évoquée tout à l'heure,
10:41 est un paysage qui équilibre,
10:44 à des degrés divers,
10:47 ces trois piliers du développement durable.
10:51 Donc, dernière étape du raisonnement,
10:54 le paysage, finalement, est un marqueur,
10:58 un indicateur de la qualité du développement durable d'un territoire.
11:03 Pour illustrer ce propos,
11:05 il suffit de regarder.
11:07 Et le premier travail des paysagistes,
11:11 qu'ils soient architectes paysagistes ou paysagistes concepteurs,
11:15 c'est de regarder et de révéler les paysages.
11:19 Vous verrez que dans ma conclusion,
11:21 ça devrait être aussi, finalement,
11:23 une préoccupation de chacun des citoyens que nous sommes.
11:27 Donc, cette lecture des transformations,
11:30 quand l'environnement défaille, si je puis dire,
11:34 la lecture du paysage, que ce soit des glaciers
11:37 ou des érosions de traits littoraux,
11:40 montre par le paysage, de façon extrêmement concrète,
11:45 ce déséquilibre des paysages.
11:50 Sur les questions d'urbanisme,
11:53 le paysage est aussi un révélateur de la qualité du cadre de vie.
11:57 Alors, j'ai mis...
11:59 Je ne sais plus, je crois que c'est une favela au Brésil
12:01 et une cité-jardin en Ile-de-France.
12:04 Je crois qu'il n'y a pas besoin d'être urbaniste à Bac +6
12:09 pour comprendre par une lecture du paysage
12:12 que sans doute il y a une relation entre la santé et le paysage.
12:16 Les cités-jardins elles-mêmes étaient, au XIXe siècle,
12:20 proposées par des acteurs économiques, les entreprises,
12:24 pour faire habiter les populations ouvrières.
12:28 Donc, on voit bien que la dimension économique est toujours sous-jacente.
12:31 Et puis, Magdalene en parlait tout à l'heure,
12:33 j'ai remis une image de paix et de guerre,
12:36 et le paysage, évidemment, aussi, est un révélateur évident,
12:40 malheureusement évident,
12:42 des conséquences de nos actions sur le paysage.
12:48 Puisqu'on est dans un contexte qui est le vôtre,
12:51 j'ai remis une image d'agriculture,
12:54 et on voit bien qu'un paysage déséquilibré,
12:59 c'est-à-dire relativement appauvrissant des sols,
13:03 sans doute relativement, entre guillemets,
13:08 asséchant, polluant en termes d'intrants,
13:12 et une image, peut-être encore un peu rêvée,
13:15 mais qui existe encore, relativement préservée à cet endroit,
13:18 d'un bocage, qui est exactement un paysage agricole,
13:22 qui fait un bon équilibre entre l'économie,
13:26 un modèle agricole particulier, je dirais,
13:29 je ne vais pas rentrer dans le détail,
13:31 un environnement, on sait que le bocage
13:33 favorise la biodiversité, la gestion de l'eau, etc.,
13:37 la protection contre l'érosion,
13:39 et on voit bien là deux paysages qui sont révélateurs
13:42 de deux pratiques agricoles.
13:43 Et puis j'ai remis une image
13:45 de paysages strictement économiques,
13:48 commerciales, pour être précis,
13:50 donc qui renvoient à nouveau à l'économie et à l'urbanisme.
13:53 D'un côté, une rue commerçante d'une ville,
13:57 comme on en connaissait ou on en connaît quelques fois encore,
14:01 bien qu'elle disparaisse, et ça fait aussi
14:03 l'objet d'action importante de l'État
14:07 pour revitaliser les centres-villes,
14:09 et à l'opposé, ce paysage des zones commerciales
14:13 déséquilibrée, c'est-à-dire que, dans le fond,
14:18 où la voiture, l'enseigne et les enjeux financiers
14:24 prennent le dessus sur, évidemment, l'environnement
14:27 et la qualité de cadre.
14:29 Donc on voit bien dans ces exemples
14:31 que sur ces trois piliers du développement durable,
14:37 bien souvent, c'est l'économie qui devient prédatrice,
14:42 dans le fond, du paysage,
14:44 ou qui génère, en tout cas, un paysage déséquilibré,
14:48 qui devient prédatrice du territoire
14:51 et qui génère un paysage déséquilibré.
14:54 Donc pour revenir, dans le fond,
14:58 aussi à la question qui a été posée tout à l'heure
15:02 de qui agit et comment on agit,
15:05 je crois que tout le monde doit agir.
15:07 Alors il y a quelques professionnels,
15:09 dont les paysagistes.
15:10 Une liste a été faite tout à l'heure
15:12 de tous ceux qui agissent sur le paysage.
15:16 Les agriculteurs agissent sur le paysage,
15:19 les industriels, tout le monde agit sur le paysage.
15:21 Les paysagistes essayent d'agir sur le paysage
15:24 en répondant à une commande politique, la plupart du temps,
15:27 qui consiste à réintégrer
15:32 ces trois dimensions de développement durable
15:34 dans les projets citoyens
15:37 que mènent la plupart du temps les collectivités
15:40 ou les entreprises.
15:41 Donc ici, comment un quai parisien,
15:44 qui est un espace portuaire, économique,
15:47 avec des péniches qui débarquent des matériaux,
15:51 devient un espace partagé ?
15:53 Comment cet espace partagé
15:54 n'est plus entièrement dévolu à la voiture ?
15:57 Comment il devient un lieu de mobilité alternative
16:00 et comment il reste un espace perméable ?
16:03 Ça, c'était une image avant-après,
16:05 pour ceux qui n'avaient pas noté.
16:07 Ensuite, d'autres exemples de travaux
16:12 sur le paysage au sens de l'aménagement.
16:15 Dans une ville nouvelle,
16:17 il y a 30 ans, on gérait l'eau dans des grands tuyaux,
16:21 qu'on rejetait dans d'autres grands tuyaux,
16:23 finalement, ils finissaient dans les fleurs.
16:26 Et là, le tuyau devient une rivière à ciel ouvert.
16:30 Donc c'est comment à la fois l'urbanisation,
16:32 le modèle économique du développement d'une ville nouvelle,
16:36 génère non plus du technique par le tuyau,
16:41 mais de l'environnement et du paysage,
16:43 en venant fabriquer une rivière
16:45 qui est en même temps un élément structurant de la ville
16:49 et un élément de confort et d'urbanité d'un espace.
16:52 Et puis une dernière image sur ces questions
16:56 de paysage et d'environnement,
17:00 pour montrer la tentative, dans le fond,
17:03 que peuvent faire les paysagistes.
17:05 Dans le logement social, un espace sur dalle,
17:09 dans une banlieue de l'île de France,
17:12 où on garde des voitures.
17:14 En dessous, il y a un parking, on garde des voitures en dessous,
17:17 on garde des voitures en dessous.
17:18 Le logement social, qui est totalement déserté,
17:21 parce qu'il devient invivable,
17:23 le projet, c'est comment, sur la dalle,
17:26 on réintègre à la fois de la qualité d'identité,
17:30 parce que ça a été dit tout à l'heure,
17:33 le paysage, c'est aussi la perception
17:36 de son propre territoire
17:38 et de sa propre image individuelle dans le territoire.
17:42 Et la fierté qu'on a ou qu'on n'a pas, d'ailleurs,
17:46 à habiter ce territoire,
17:48 ça fait partie de ces questions du logement social,
17:50 la biodiversité, la récupération de l'eau, etc.
17:56 Alors, pour conclure...
17:59 dans cette présentation,
18:02 moi, je voulais faire un appel, dans le fond,
18:05 un appel à vous, étudiants,
18:10 sur des filières, effectivement,
18:12 où vous êtes sans doute au bout d'une chaîne,
18:15 à partir de l'agriculture
18:18 et de la production de l'alimentation.
18:21 Je pense que vous êtes potentiellement
18:23 des acteurs du paysage.
18:25 Moi, je pense que c'est une chose très importante,
18:27 un message fort à faire passer,
18:31 que les pratiques, en fond,
18:33 toutes nos pratiques ont des conséquences sur le paysage.
18:38 Et cette image, ici, je ne sais pas si vous la voyez bien,
18:43 est extraite d'un bouquin incroyable,
18:45 qui est un livre de Paul Duvignaux,
18:47 qui s'appelle "La synthèse écologique",
18:50 qui est un bouquin des années 70,
18:52 donc extrêmement précurseur.
18:55 Vous rentrez dans ce bouquin,
18:57 ça parle énormément d'écologie,
19:00 mais il y avait cette image qui est intéressante,
19:02 parce que c'est une image, à gauche,
19:05 du modèle qu'on a vécu,
19:07 qui est du modèle aménagiste,
19:10 où on a rasé les bocages,
19:15 coupé les forêts,
19:17 laissé s'éroder les collines,
19:19 fait des infrastructures routières titanesques,
19:22 installé des lignes à haute tension dans tous les sens,
19:25 produit, on le voit, des crâtiers, des usines.
19:28 Ça, voilà, c'est tout le travail depuis 50 ans.
19:33 Et puis, à côté, l'image, certes,
19:37 présentée comme ça, un peu rêveuse,
19:40 de ce qu'aurait été ce paysage,
19:41 si un autre modèle économique et de pensée globale
19:47 s'était développé,
19:48 où on aurait gardé les boisements,
19:51 les bocages, les rivières, etc.
19:54 Et donc, cette comparaison est intéressante,
19:56 parce que d'abord, elle dit une chose,
19:59 c'est que tous, en tant que citoyens,
20:01 il faut qu'on apprenne à lire les paysages.
20:05 Il est quand même assez paradoxal, je trouve,
20:09 que personne ne se plaigne
20:12 de la disgrâce de certains paysages,
20:14 si on les fréquente, les zones commerciales,
20:18 les autoroutes, les zones d'activité.
20:22 À une certaine époque, les entrées de villes chaotiques,
20:26 on accepte ça avec une espèce d'évidence
20:30 que je trouve, moi, en bout de 30 ans d'expérience,
20:33 à proprement parler, scandaleuse, si vous voulez.
20:35 Et puis, en parallèle, on magnifie les beaux paysages.
20:38 Donc, on s'autorise à massacrer le territoire du quotidien.
20:43 Je m'excuse, je fais un peu de la caricature,
20:45 mais pour mieux me faire comprendre.
20:48 Et en disant, regardez, j'en valorise d'autres.
20:50 Donc, je pense que l'enjeu que je vais faire passer aujourd'hui,
20:53 c'est que tout paysage, dans le fond, a une valeur,
20:57 parce qu'il a des conséquences sur notre environnement immédiate
21:02 en tant que riverain, habitant, citoyen de ce paysage.
21:07 Et donc, il y a un enjeu, dans le fond,
21:09 à se réalphabétiser là-dessus,
21:12 à apprendre à se dire, on a le droit de faire des paysages,
21:15 ça fait partie de la définition de la Convention,
21:17 c'est-à-dire que le paysage,
21:19 c'est la lecture du territoire par les populations,
21:22 et que se ressaisir de ce sujet-là,
21:25 c'est se redonner un pouvoir citoyen
21:28 et un droit à dire, donner un point de vue
21:32 sur des politiques d'aménagement.
21:34 Donc, voilà, vous, dans votre filière,
21:37 moi, dans la mienne, Émilie, dans la sienne,
21:40 chacun est un acteur,
21:42 et il n'y en a pas qui sont en charge,
21:43 et tout le monde est en charge de cette question-là.
21:46 Je crois que j'ai fini, je remets ma petite image,
21:49 et je vous remercie de nous avoir, avec Émilie,
21:53 un petit peu incités, dans le fond,
21:58 à essayer de développer ces questions-là.
22:00 On les survole un petit peu aujourd'hui.
22:02 Et voilà le message que je voulais essayer de vous faire passer.
22:05 Merci à vous.
22:06 Merci.
22:07 (Applaudissements)
22:09 [SILENCE]

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