Le 1er février 2003, la navette spatiale Columbia revient sur Terre, après une mission scientifique en orbite de seize jours. Quelques minutes avant l'atterrissage, l'appareil et ses sept astronautes sont désintégrés alors qu'ils entrent dans l'atmosphère. Depuis 1986 et la destruction de la navette Challenger, qui a explosé lors du décollage, la NASA n'avait plus rencontré d'incident. La commission d'enquête, chargée d'éclaircir les causes de l'accident, a conclu que la destruction de la navette était due à la perte d'un morceau d'isolant : un bloc de mousse qui a frappé l'aile gauche de la navette durant son décollage, condamnant l'équipage à une mort certaine lors de son entrée dans l'atmosphère.
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00:00 [Générique]
00:21 Salut à tous, merci d'être fidèles au rendez-vous des docu-réalités de Direct 8 et de notre émission La Minute de Vérité.
00:27 Les désastres ne se produisent pas comme cela par hasard, ils sont le résultat d'une succession d'événements.
00:32 C'est ce qui s'est produit le 1er février 2003 lorsque la navette spatiale américaine Columbia s'est désintégrée avec 7 membres d'équipage à bord.
00:39 C'est lors de la rentrée atmosphérique que le drame s'est produit.
00:42 Que s'est-il vraiment passé ? Voici la réponse avec votre Minute de Vérité tout de suite sur Direct 8.
00:51 Les 7 astronautes de la navette Columbia ont terminé leur mission de routine et s'apprêtent à faire leur rentrée dans l'atmosphère terrestre.
00:58 Le contrôle de mission s'attend à un retour sans problème.
01:01 Mais 16 minutes seulement avant l'atterrissage, c'est la catastrophe.
01:05 L'équipage perd le contrôle de l'orbiteur qui se désintègre dans le ciel texan. Il n'y a aucun survivant.
01:12 Les États-Unis sont en état de choc. C'est la 2e catastrophe du genre en 17 ans.
01:19 Grâce à la simulation informatique, nous allons vous montrer précisément ce qui a entraîné la destruction de Columbia.
01:25 Les catastrophes sont rarement le fruit du hasard.
01:29 Elles résultent souvent d'un enchaînement d'événements malheureux que nous allons tenter de reconstituer dans cette Minute de Vérité.
01:36 États-Unis, Floride.
01:48 Centre spatial Kennedy.
01:50 16 janvier 2003.
01:53 7 heures du matin.
01:56 Des astronautes triés sur le volet s'apprêtent à embarquer à bord de Columbia pour la mission STS-107, le 113e vol du programme des navettes de la NASA.
02:06 Lancée en 1981, Columbia, la 1re navette à être allée dans l'espace, est la doyenne de la flotte.
02:15 Elle va décoller pour sa 28e mission dans moins de 4 heures.
02:19 L'équipage est composé de 7 membres.
02:24 William McCool, athlète de renom et pilote d'essai de l'US Navy.
02:31 Ellen Ramon, un colonel de l'armée de l'air israélienne, le 1er astronaute de son pays.
02:37 David Brown, médecin de l'air de l'US Navy et pilote de chasse.
02:42 Mike Anderson, lieutenant colonel de l'US Air Force.
02:46 Kalpana Chalwa, institutrice de vol et scientifique.
02:49 Laurel Clark, dont ce sera le 1er vol dans l'espace.
02:53 Capitaine de frégate de l'US Navy, cette spécialiste de la plongée travaille avec les Navy SEALS.
02:59 Elle est mariée avec John depuis 12 ans et ils ont un garçon de 8 ans.
03:05 Elle a posé sa candidature au moment où elle était enceinte et elle est allée aux entretiens à son 6e mois de grossesse.
03:11 Elle était énorme. Je n'arrêtais pas de la taquiner en lui disant qu'elle n'avait aucune chance.
03:15 Mais elle a tenu bon, ses entretiens se sont bien passés et au cycle suivant elle a de nouveau posé sa candidature et elle a été prise.
03:23 Et enfin, Ray Casbund, 45 ans, sera le commandant de la mission.
03:30 Avec sa femme Evelyn, ils doivent fêter leur 21e anniversaire de mariage moins d'un mois après son retour.
03:36 Pour Rick, aller dans l'espace est le rêve de toute une vie.
03:40 La 1ère fois qu'il a su qu'il voulait devenir astronaute, il avait 4 ans. Il s'est fixé ce but tout petit.
03:46 Rick est l'étoile montante du programme des navettes.
03:50 La NASA l'a nommé commandant à la suite de son 1er vol.
03:53 Mais il a dû attendre longtemps avant d'assumer cette fonction.
03:56 En effet, la NASA a repoussé cette mission pas moins de 13 fois.
04:00 7h05. Cela fait plus d'une heure que le plein a été fait en vue du lancement.
04:07 Le réservoir orange contient près de 2 millions de litres d'hydrogène et d'oxygène liquide.
04:12 Mais avant que le commandant Husband puisse conduire son équipage sur le pas de tir, il doit sacrifier une tradition pour le moins excentrique.
04:22 Rick Cirfos, un ami de Rick Husband, a lui aussi été commandant à bord de Columbia.
04:28 On a un jeu de cartes qui ressemble au blackjack.
04:32 Et le commandant doit y jouer avec le directeur des opérations au vol.
04:36 L'équipage ne peut pas embarquer tant que le commandant n'a pas perdu la main.
04:41 Ça se perpétue depuis des années.
04:51 7h30.
04:53 Les astronautes quittent les quartiers de l'équipage pour monter dans le minibus qui va les conduire à la navette.
05:00 Rick Husband se concentre sur la tâche dangereuse qui les attend.
05:08 Dans le minibus, pendant qu'on se rapproche du pas de tir, on commence à penser aux choses sérieuses.
05:17 À ce qu'on va devoir faire et quand, ainsi qu'à l'enchaînement des tâches qu'il faudra effectuer l'une après l'autre.
05:23 7h53.
05:25 Rick Husband s'installe dans son siège dans le poste de pilotage.
05:29 Après deux ans d'attente, il doit se concentrer sur les 8 minutes 30 les plus dangereuses de toute la mission, le lancement.
05:38 Le lancement est de loin la phase la plus risquée.
05:42 La quantité d'énergie qu'on essaie de maîtriser est absolument phénoménale.
05:46 Donc c'est normal d'avoir peur.
05:48 Personne n'est plus conscient de ce danger que les familles des astronautes.
05:52 J'étais sûre que tout irait bien, mais j'avais tout de même peur après ce qui était arrivé à Challenger.
05:58 En 1986, la navette Challenger a explosé 73 secondes après le décollage, provoquant la mort de ses 7 membres d'équipage.
06:07 La cause de l'accident, un défaut sur un des propulseurs d'appoint à poudre, a été corrigée dans les 3 ans qui ont suivi.
06:15 Mais cette catastrophe a jeté une ombre sur tous les lancements ultérieurs de navettes.
06:20 10h38, H-31 secondes avant le décollage de Columbia.
06:27 Le contrôle de mission enclenche la phase finale de la séquence de lancement.
06:31 Le commandant Husband passe la main à l'ordinateur de vol de la navette.
06:37 6 secondes avant le décollage, les ordinateurs allument les moteurs principaux.
06:45 Désormais, il est trop tard pour tout arrêter.
06:49 3, 2, 1, allumage des propulseurs et décollage de la navette Columbia.
06:56 10h39, lors de la phase de décollage, les moteurs de Columbia brûlent une quantité astronomique de carburant,
07:03 de quoi remplir un bassin olympique de natation toutes les 30 secondes.
07:06 Le lancement est une expérience vraiment grisante.
07:10 Comme si une main géante vous prenait et vous poussait très violemment en vous secouant dans tous les sens.
07:16 Commence ensuite la phase du lancement que tout le monde redoute le plus.
07:21 L'ordre d'accélération donné par le contrôle de mission.
07:24 A ce moment-là, l'ordinateur de bord augmente la vitesse de l'engin spatial à 12 000 km/h.
07:31 C'est la vitesse qu'il doit atteindre pour s'arracher à l'atmosphère terrestre.
07:36 Et c'est à ce moment précis du lancement que Challenger avait explosé.
07:40 L'ancien contrôleur de mission, Jim Oberg, sait à quel point l'équipage et le personnel au sol sont tendus à cet instant.
07:48 Lors des vols suivants, lorsque ces tendres retentissaient, les gens se souvenaient.
07:52 Ils avaient été entraînés à avoir peur.
07:54 Et ils avaient peur.
07:57 Le contrôle de mission transmet l'ordre par radio à Rick Husband.
08:03 - Columbia, ici Houston. Accélération. Accélération.
08:07 La navette atteint sa vitesse de sortie. Près de dix fois celle du son.
08:20 A 43 km d'altitude, elle largue ses deux propulseurs d'appoint.
08:30 10h47, l'ordinateur de vol de la navette coupe les moteurs principaux.
08:34 La phase la plus dangereuse de la mission est terminée.
08:37 Columbia et son équipage sont dans l'espace.
08:40 - 3, 2, 1, maintenant.
08:44 Bienvenue dans l'espace.
08:48 Une fois la navette à 280 km d'altitude, c'est le soulagement au sol.
08:54 Tout s'est déroulé comme prévu.
08:58 Mais 24h plus tard, les techniciens de la NASA qui procèdent aux vérifications de routine sur la vidéo remarquent quelque chose.
09:05 Quelques instants après le décollage, un morceau de mousse isolante se détache du réservoir externe et frappe l'aile de la navette.
09:15 Il se désintègre en une pluie de débris.
09:18 Les responsables de la NASA font une évaluation des dégâts.
09:23 La mission serait-elle compromise avant même de commencer ?
09:28 17 janvier 2003.
09:30 Columbia tourne en orbite à la vitesse incroyable de 28 000 km/h.
09:35 Le vol se déroule sans incident.
09:40 Sous le commandement de Rick Osbond, les 6 astronautes se préparent pour la mission à venir.
09:48 Mais sur Terre, les ingénieurs de la NASA sont inquiets.
09:53 D'après la vidéo, un morceau de mousse s'est décroché et est allé frapper l'aile de la navette.
09:57 Ils doivent évaluer les dégâts qu'elle a subis.
10:01 De tels incidents ont eu lieu lors de presque tous les lancements sans qu'ils prêtent à conséquence.
10:07 Jim Oberg, qui a travaillé pour la NASA pendant 22 ans, en a souvent été témoin.
10:14 Que des trucs se détachent d'un réservoir, c'est courant.
10:19 Pour désigner ces expulsions de mousse, on parle non pas d'un problème de sécurité, mais d'un problème de maintenance.
10:25 La NASA annonce en effet un problème de maintenance qui devra être vérifié au retour de la navette sur Terre
10:32 et ne prend aucune mesure particulière.
10:35 Les astronautes entament leur mission.
10:43 Ils effectuent 79 expériences scientifiques,
10:47 visant à analyser les effets de la gravité zéro sur les cellules humaines.
10:50 Les résultats devraient permettre d'élaborer des traitements contre des maladies comme le cancer et l'ostéoporose.
10:56 Mais l'équipage profite aussi du privilège que représente un voyage dans l'espace.
11:00 Un plaisir rare, que Rick Syrfos n'est pas près d'oublier.
11:04 « Quel effet ça fait d'être dans l'espace ?
11:08 Mon sourire est assez large ? C'est absolument incroyable.
11:11 Le plus étonnant, c'est de voir la surface de la Terre.
11:15 Le plus étonnant, c'est de voir notre planète depuis là-haut.
11:18 C'est quelque chose d'unique, d'incroyable. »
11:21 31 janvier 2003.
11:27 Après 16 jours dans l'espace, les expériences touchent à leur fin.
11:31 Les astronautes sont ravis.
11:34 La mission est un franc succès et le retour est prévu pour le lendemain.
11:38 Personne n'est plus impatient que leur famille.
11:44 Le 1er février 2003, les astronautes enfilent leurs combinaisons
11:47 pour résister au nombre élevé de jets qu'ils vont encaisser
11:50 lors de la rentrée dans l'atmosphère et attachent leurs ceintures
11:53 dans les sièges du poste de pilotage.
11:56 8h10, heure de la côte Est.
12:01 Le centre spatial Johnson de Houston donne le feu vert à la navette
12:05 pour rentrer dans l'atmosphère.
12:08 Leroy Kane est directeur de vol au contrôle de mission.
12:12 Jim Oberg ne sait que trop bien ce qui se passe dans sa tête à ce moment-là.
12:15 « Avant la rentrée, la tension monte.
12:19 Peut-être pas autant que lors du lancement, mais presque.
12:22 Car si quelque chose arrive à ce moment-là,
12:26 c'est presque aussi dangereux qu'au décollage. »
12:29 8h15, Rick Osbund entame une série de manœuvres
12:35 pour mettre Columbia dans la bonne position pour la rentrée.
12:40 « Le commandant place la navette comme ceci
12:42 pour rentrer dans l'atmosphère avec un angle d'attaque de 40 degrés.
12:45 Et elle avance comme ça. »
12:48 8h44, tandis que la navette de 100 tonnes
12:54 perce l'atmosphère à 28 000 km/h,
12:57 la friction fait monter la température de ses ailes à 1 400 degrés.
13:01 Sa seule protection, c'est son bouclier thermique en tuile céramique.
13:08 L'énergie et les gaz surchauffés qu'elle dégage
13:10 offrent un spectacle impressionnant aux astronautes.
13:13 « On dirait un haut fourneau. »
13:18 « C'est un rougeoiement rose-oranger de gaz ionisé très chaud.
13:22 Et le commandant est à 30 cm de ce spectacle.
13:26 C'est impressionnant. »
13:29 Les astronautes plaisantent,
13:32 tandis que la fusée fonce à travers l'atmosphère
13:36 et se déplace.
13:38 « C'est étonnant, il fait vraiment clair.
13:41 Oui, je n'aimerais pas être dehors. »
13:44 8h54, le moral est bon.
13:47 Apparemment, l'atterrissage se présente bien.
13:50 Mais les spécialistes qui analysent les données transmises par Columbia
13:54 remarquent une anomalie.
13:57 Quatre capteurs de température du flanc gauche de la navette tombent en panne.
14:01 « On vient de perdre quatre transducteurs de température du côté gauche.
14:05 Les capteurs hydrauliques. »
14:07 « Quatre transducteurs. »
14:10 Ayant déjà supervisé cette rentrée,
14:13 l'Heroïken sait que la perte d'un ou plusieurs capteurs
14:16 n'indique pas nécessairement un problème grave.
14:19 « Tout paraît bon. Tout est normal. »
14:22 « Les indications sont stables, rien d'anormal. »
14:25 « D'accord. »
14:27 Il existe beaucoup de raisons simples susceptibles d'expliquer cette panne,
14:30 sans pour autant conclure qu'il y a danger pour l'équipage.
14:34 Tout le reste semblant normal,
14:36 le contrôle de mission n'informe pas l'équipage.
14:39 8h55.
14:44 Columbia est désormais visible depuis la terre.
14:48 Chris Valentine est un passionné des fusées.
14:51 Avec son fils et son frère,
14:54 ils se sont levés de bonne heure pour voir Columbia survoler les côtes californiennes.
14:57 Voici ce qu'ils ont filmé.
15:01 « Regarde la traînée. C'est superbe. »
15:03 « Il y a 7 personnes là-dedans. »
15:07 « Wow. »
15:09 C'est alors qu'il remarque quelque chose.
15:12 « Regarde les morceaux qui se détachent. »
15:15 « Qu'est-ce que c'est ? »
15:17 « Je ne sais pas. Regarde ça. »
15:19 « Check that out. »
15:21 Dans le poste de pilotage,
15:23 Rick Husband et son équipage ignorent tous les dégâts subis par la navette.
15:27 8h59.
15:29 Privé d'image de Columbia,
15:32 le contrôle de mission est dans la même situation.
15:35 « J'ai des signes de traînée. »
15:37 « Reçu. »
15:39 C'est alors que d'autres capteurs deviennent muets.
15:42 « Je viens de perdre la pression côté gauche et droit sur deux pneus. »
15:46 « En voyant les capteurs disparaître les uns après les autres,
15:49 le contrôle de mission est en train de se terminer. »
15:52 « Je vais me faire un petit déjeuner. »
15:55 Le déjeuner est un déjeuner.
15:56 « Je vais me faire un petit déjeuner. »
15:58 Le déjeuner est un déjeuner.
16:00 « Je vais me faire un petit déjeuner. »
16:02 Le déjeuner est un déjeuner.
16:04 « Je vais me faire un petit déjeuner. »
16:06 Le déjeuner est un déjeuner.
16:08 « Je vais me faire un petit déjeuner. »
16:10 Le déjeuner est un déjeuner.
16:12 « Je vais me faire un petit déjeuner. »
16:14 Le déjeuner est un déjeuner.
16:16 « Je vais me faire un petit déjeuner. »
16:18 Le déjeuner est un déjeuner.
16:20 « Je vais me faire un petit déjeuner. »
16:23 Le déjeuner est un déjeuner.
16:24 « Je vais me faire un petit déjeuner. »
16:26 Le déjeuner est un déjeuner.
16:28 « Je vais me faire un petit déjeuner. »
16:30 Le déjeuner est un déjeuner.
16:32 « Je vais me faire un petit déjeuner. »
16:34 Le déjeuner est un déjeuner.
16:36 « Je vais me faire un petit déjeuner. »
16:38 Le déjeuner est un déjeuner.
16:40 « Je vais me faire un petit déjeuner. »
16:42 Le déjeuner est un déjeuner.
16:44 « Je vais me faire un petit déjeuner. »
16:46 Le déjeuner est un déjeuner.
16:48 « Je vais me faire un petit déjeuner. »
16:50 Le déjeuner est un déjeuner.
16:52 « Columbia, ici Houston, vérifiez HF. »
16:54 « Columbia, ici Houston, vérifiez HF. »
17:03 La navette reste muette.
17:06 9h.
17:18 À la Cape Kennedy en Floride, on attend Columbia qui doit atterrir 16 minutes plus tard.
17:22 Evelyn Hesbund et ses enfants ont hâte de retrouver Rick.
17:26 « On était très excités. »
17:28 « On avait pris le petit déjeuner et on était partis. »
17:31 « C'était une belle journée qui démarrait, tout se passait bien. »
17:35 Pourtant, à 60 km d'altitude, la navette est en train de se désagréger.
17:42 « Columbia, ici Houston, vérifiez HF. »
17:45 « Columbia, ici Houston, vérifiez HF. »
17:48 « Columbia, ici Houston, vérifiez HF. »
17:50 9h18.
18:15 Des témoins oculaires au Texas et en Louisiane
18:17 repèrent un amas d'objets lumineux
18:19 laissant derrière eux une traînée de vapeur dans le ciel du petit matin.
18:23 Il y a près de 46 secondes que le contrôle de mission a perdu contact avec la navette.
18:28 « Configuration des systèmes de bord a changé avant la coupure. »
18:31 « Tout semble bon. »
18:33 « Tout semble bon. »
18:35 Ne recevant plus aucune donnée,
18:37 Leroy Kane craint que Columbia ne connaisse de graves problèmes.
18:40 Il ignore encore tout de ce qui est arrivé.
18:44 9h03.
18:46 À Hempile, dans l'est du Texas,
18:49 le shérif de Sabine County, Tom Maddox, feuillette son agenda.
18:53 « Tout d'un coup, le bâtiment a tremblé. »
18:56 « Les cinq lignes téléphoniques arrivant à mon bureau se sont mises à sonner. »
19:05 « J'ai décroché la première. »
19:10 « Et on m'a averti qu'un avion venait de s'écraser dans le nord du comté. »
19:14 « J'ai décroché la deuxième. »
19:18 « Et on m'a signalé un crash dans le sud du comté. »
19:21 « J'ai décroché la troisième. »
19:25 « Et on m'a dit qu'un train avait déraillé dans l'ouest du comté. »
19:28 Le shérif Maddox s'empresse de vérifier la source du bruit signalé dans l'est de l'État ce matin-là.
19:34 9h12.
19:38 La terrible nouvelle parvient enfin à la salle de contrôle qui était jusque la coupée du monde.
19:43 Un employé de la NASA a appelé pour avertir l'équipe qu'il a vu des images de la désintégration de Columbia à la télévision.
19:52 Les sept astronautes seraient décédés.
19:55 « Le directeur de vol se sent comme un officier qui a vu un de ses hommes abattus. »
19:59 « Ou comme un pilote de ligne qui a perdu des passagers après un atterrissage d'urgence. »
20:03 « Pendant votre service, quelqu'un est mort. »
20:07 Effondré, Leroy Kane donne l'ordre de lancer les procédures d'enquête.
20:11 « Fermez les portes. »
20:13 « Reçu. »
20:15 Mais tout danger n'est pas encore écarté.
20:19 En effet, les débris de la navette continuent de tomber du ciel.
20:22 Dans l'est du Texas, Jack Martin et Ken Griffin sont en train de pêcher sur le lac réservoir de Toledo Bend.
20:34 « D'abord, on a entendu un grondement comme une explosion ou un truc qui passerait le mur du son. »
20:38 « Mais ça a duré et duré. »
20:40 « Puis on a entendu un sifflement comme quelque chose qui tombait. »
20:44 « On n'avait aucune idée de ce que c'était. »
20:47 « Ça faisait de plus en plus de bruit. »
20:49 « On s'est dit on est dans le pétrin. »
20:52 « S'il s'était tombé sur son bateau, on coulait. »
21:02 Mais ce que Jack et Ken ont vu n'est qu'un des 84 000 morceaux qui retombent sur Terre.
21:06 Se montent la zizanie un peu partout au Texas et en Louisiane.
21:09 « On a eu énormément de chance que personne n'ait été blessé, compte tenu de la quantité de débris. »
21:21 À 13 heures, la NASA annonce officiellement la désintégration de Columbia
21:28 et le président Bush s'adresse à un pays en état de choc.
21:32 « Ces astronautes connaissaient les dangers et les ont affrontés en connaissance de cause.
21:36 Leur courage, leur audace et leur idéalisme font qu'ils nous manqueront d'autant plus. »
21:42 C'est la deuxième navette que la NASA perd en 17 ans.
21:48 Le désastre de Columbia ébranle tout le programme des navettes.
21:52 Pour quelle raison le 113e vol a-t-il aussi mal tourné ?
21:59 En retraçant le fil des événements et en analysant en détail l'enquête qui a été faite,
22:03 nous allons vous révéler ce qui s'est vraiment passé.
22:06 La simulation informatique va nous emmener là où aucune caméra ne peut aller, au cœur de la catastrophe.
22:19 Leroy Ken lance l'enquête en ordonnant de fermer les portes.
22:26 « Fermez les portes, reçu. »
22:29 « Fermez les portes, ça veut dire ne spéculez pas, ne communiquez pas.
22:33 Revenez à votre pupitre immédiatement et écrivez ce que vous avez fait, vu et pensé.
22:39 Consignez vos souvenirs pour que par la suite quelqu'un les exploite,
22:43 afin de comprendre ce qui s'est vraiment passé. »
22:46 Dans les trois heures qui suivent, l'administrateur adjoint de la NASA
22:52 demande à l'amiral en retraite, Al Gehman, d'assumer la direction de l'enquête.
22:56 « J'ai demandé si ma nomination avait reçu l'aval de la Maison Blanche et on m'a répondu par l'affirmative.
23:02 Je voulais être sûr d'avoir le soutien du gouvernement. »
23:05 Gehman réunit une équipe de douze experts pour constituer la commission d'enquête sur l'accident de Columbia, la CAIB.
23:12 Une de ses premières tâches consiste à analyser les spéculations qui font déjà la une de la presse.
23:17 Des terroristes auraient-ils provoqué cet accident ?
23:22 « Le risque que quelqu'un puisse influer sur un vol une fois la nabette dans l'espace est très faible.
23:27 Lors du décollage, c'est en revanche quelque chose qu'on prend très au sérieux,
23:31 a fortiori sur un vol comme celui-ci avec un Israélien à bord.
23:34 Quelqu'un aurait-il pu s'approcher en douce, armer d'un missile et tirer lors de la phase de décollage ?
23:40 On ne peut pas dire que c'est impossible. »
23:43 C'est une des premières théories que l'amiral Gehman doit envisager.
23:48 « Nous avons enquêté sur les services de sécurité du centre Kennedy et sur les gens qui pouvaient s'approcher de la navette.
23:54 Nous avons constaté que la sécurité était très efficace et que cette cause était improbable. »
24:00 Gehman constitue ensuite une équipe d'experts chargés d'analyser chaque seconde de la phase de rentrée.
24:07 Il se concentre rapidement sur les indications de température inhabituelles envoyées par la navette quelques minutes avant la catastrophe.
24:16 Et il fout une découverte capitale.
24:18 Certains capteurs ont transmis des températures anormalement élevées avant de devenir muets.
24:23 Détail important, toutes ces données provenaient de la même zone.
24:28 « Elles venaient de la soute de train, là où le train d'atterrissage vient se loger en profondeur dans l'aile. »
24:35 Lors de la rentrée, le contrôle de mission avait considéré ces données comme de simples anomalies.
24:42 Mais l'équipe de Gehman constate qu'il ne s'agissait en aucun cas d'une coïncidence.
24:46 Il ne peut y avoir qu'une seule explication à ces températures élevées.
24:50 Des gaz surchauffés ont dû entrer dans la soute de train gauche.
24:54 Ces éléments conduisent à une conclusion surprenante.
24:57 Il devait y avoir une fissure dans le bouclier thermique de la navette.
25:01 « Ce ne pouvait pas être un trou de la taille d'un rivet, ni une petite fissure.
25:06 Ce n'était pas juste un petit bout d'isolant qui manquait.
25:10 Car une quantité de chaleur énorme est entrée dans l'aile. »
25:13 Les enquêteurs pensent que des gaz brûlants ont traversé l'isolation pour s'engouffrer dans la soute de train
25:19 et ont peut-être mis le feu à un joint défectueux entourant les trappes du train d'atterrissage.
25:24 Pour en être sûr, ils ont besoin de beaucoup plus de données.
25:28 Mais celles-ci n'ont pu être enregistrées qu'à bord de Columbia.
25:32 L'enregistreur de vol des navettes ne consigne en général que de maigres informations concernant la rentrée.
25:39 Mais celui de Columbia était unique en son genre.
25:41 Il avait été configuré pour enregistrer un maximum de renseignements en vue d'une analyse ultérieure.
25:48 Le problème, c'est qu'il n'était pas dans un caisson de protection.
25:52 « Ce n'est pas comme un enregistreur d'avions de ligne, ce n'est pas une boîte noire.
25:57 Il n'est pas conçu pour résister à un accident ou à un incendie.
26:01 Mais ça enregistre des milliers d'événements survenant à bord
26:04 et nous savions qu'il nous serait très utile si nous arrivions à le retrouver.
26:08 »
26:09 Les enquêteurs doutent cependant qu'il ait pu résister à une chute de 60 km.
26:14 Pourtant, il représente la meilleure chance qu'ils ont de découvrir ce qui a provoqué la disparition de Columbia.
26:21 Ils mettent donc sur pied une opération de grande envergure pour récupérer le plus de débris possible de la navette.
26:33 Ils enrôlent 25 000 personnes à travers tous les Etats-Unis pour passer au peigne fin,
26:42 les zones du Texas et de la Louisiane où les débris sont tombés.
26:46 Mais au bout de six semaines, toujours aucune trace de l'enregistreur.
26:52 C'est l'impasse.
26:55 Sans données supplémentaires, les enquêteurs ne peuvent pas affirmer
26:58 que des gages chauds se sont engouffrés dans la navette lors de la rentrée.
27:02 Leur meilleure chance d'élucider le mystère leur échappe.
27:05 Puis, ils ont une idée.
27:08 Les fouilles permettant de trouver de plus en plus de débris,
27:11 ces derniers peuvent-ils fournir un schéma de référence pour estimer
27:15 où un objet de la taille et du poids de l'enregistreur de vol aurait pu atterrir ?
27:19 Des logiciels de pointe se chargent de ces calculs.
27:23 « On a calculé où l'enregistreur devait se trouver,
27:27 et il s'est avéré que c'était une zone qui avait déjà été fouillée. »
27:32 Les calculs indiquent qu'il devrait se trouver dans la région de Hemphill.
27:36 Les enquêteurs y renvoient donc une équipe de fouilles.
27:42 Ils pensent que l'équipe précédente a pu passer à côté de l'enregistreur sans le voir,
27:46 dans cette région dense et marécageuse.
27:48 John Sabertail, un Indien d'Amérique, pompier professionnel,
27:52 est venu du Montana pour participer aux recherches.
27:55 Mais au bout de trois semaines exténuantes, il est au bord du découragement.
27:58 « C'était dur, c'était dur. »
28:00 « J'étais fatigué et je voulais rentrer chez moi. »
28:02 « On n'avait rien trouvé après la première semaine,
28:05 et je me demandais à quoi je servais au milieu des ronces. »
28:08 Après des semaines de recherche, c'est de nouveau l'impasse.
28:12 « En sortant d'un bosquet, j'ai vu une zone dégagée. »
28:18 « Et il était là, comme si on l'avait jeté parce qu'on n'en voulait plus. »
28:24 « J'ai couru et j'ai su, en voyant la bande magnétique flotter,
28:29 dans la pluie. »
28:30 « J'ai quelque chose. »
28:32 « Quelqu'un a dit, c'est la boîte noire. »
28:34 « Donc je me suis dit que c'était une trouvaille importante. »
28:38 Chose incroyable, l'enregistreur semble intact,
28:42 malgré une chute de 60 km sans caisson de protection.
28:46 « Ils l'ont trouvé au milieu d'une clairière, en bon état. »
28:50 « Un miracle. »
28:52 C'est effectivement un don du ciel pour les enquêteurs.
28:57 La bande magnétique intacte a gardé la trace des données enregistrées par 800 capteurs.
29:01 C'est une véritable mine de renseignements.
29:06 Cela confirme qu'il y avait bien un trou dans le bouclier thermique
29:12 et que c'est par là que les gaz brûlants sont entrés.
29:15 En revanche, ce trou ne se trouvait pas là où ils croyaient.
29:25 « Ça nous a montré que les données transmises en provenance de la soute de train,
29:28 lorsque la température a commencé à monter à bord de la navette, étaient erronées. »
29:33 « La chaleur était entrée bien plus loin. »
29:37 « Nous nous étions complètement trompés et nous cherchions au mauvais endroit. »
29:41 Le trou dans le bouclier thermique n'était pas à côté de la soute de train,
29:45 mais sur l'avant de l'aile gauche.
29:47 Qui plus est, les enquêteurs parviennent à déduire à quel moment le trou a été fait,
29:51 à savoir bien avant la rentrée.
29:55 « Nous sommes arrivés à la conclusion que la toute première indication d'une élévation de la température
29:59 était survenue très très tôt dans le vol,
30:02 dès qu'il n'y a plus d'atmosphère à proprement parler.
30:05 Ça nous a convaincus, sans l'ombre d'un doute,
30:11 que le problème datait d'avant la rentrée dans l'atmosphère.
30:14 En d'autres termes, la navette a entamé sa rentrée avec ce défaut. »
30:18 Les enquêteurs se confondent sur le fait que la température
30:23 a été élevée à la même température que la navette.
30:25 Les enquêteurs se concentrent alors sur l'incident survenu lors du lancement
30:29 et considéraient jusque-là comme insignifiant.
30:32 La NASA avait constaté sur la vidéo que 82 secondes après le décollage,
30:37 un morceau de mousse isolante s'était détaché du réservoir et avait percuté la navette.
30:42 Les spécialistes analysent la séquence image par image
30:46 pour voir si l'incident a provoqué des dégâts.
30:48 Mais ce n'est pas chose facile.
30:51 Une était à l'oblique, les images de la deuxième étaient floues
30:54 et la seule ayant filmé l'arrachement de l'isolant se trouvait à 42 km.
30:59 Ces images ne sont donc pas assez nettes pour déterminer l'endroit précis de l'impact de la mousse
31:03 et si celui-ci a provoqué des dégâts.
31:06 Pour résoudre ce problème, le KEB fait appel à un spécialiste de la NASA,
31:13 le chef de la mission vers Mars, Scott Bard.
31:19 Quand on regarde les données non traitées, on voit une pluie de particules.
31:22 Certains voyaient un morceau, d'autres deux, d'autres trois
31:28 et personne n'était d'accord sur la taille exacte du plus gros morceau.
31:32 Le seul moyen de clore la discussion, c'était d'améliorer la qualité des images
31:38 en enlevant le flou et le grain de l'image.
31:41 Ce travail prend deux mois et Bard a hâte de voir le résultat.
31:48 Mais sa patience est récompensée.
31:50 Cette séquence en boucle de 17 images montre la taille de la mousse,
31:58 son point d'impact et sa vitesse.
32:01 Environ 800 km/h en vitesse relative par rapport à la navette.
32:05 Ce morceau pesait un peu plus de 700 grammes et faisait la taille d'une petite mallette.
32:15 C'est un grand pas en avant pour l'enquête.
32:17 Les images montrent clairement la mousse frappant le bord d'attaque de l'aile gauche.
32:22 A cet endroit, l'aile est recouverte de tuiles isolantes en carbone-carbone renforcé,
32:30 un composite qui résiste à des températures allant de -160 à +1650 degrés.
32:41 En revanche, il n'est pas conçu pour apporter une quelconque résistance structurelle.
32:45 Ce morceau de mousse a-t-il pu perforer une des tuiles ?
32:49 Certains responsables de la NASA ne cachent pas leur scepticisme,
32:55 comme Ron Dietmore, le directeur du programme lors de cette conférence de presse.
32:59 À l'heure actuelle, il ne nous semble pas concevable qu'un débris puisse être la cause
33:03 de la disparition de Columbia et de son équipage.
33:08 Il doit y avoir une autre raison.
33:10 Scott Bard, lui, est convaincu d'être sur la bonne piste.
33:15 Lors de l'enquête, en examinant les moindres données,
33:20 nous nous sommes dit qu'il fallait un banc d'essai pour montrer ce qui se produirait
33:24 au cas où 700 grammes de mousse percuteraient la navette à 800 km/h.
33:34 En aéronautique, cette machine est surnommée un "canon à poulet".
33:37 Elle permet de simuler les impacts d'oiseaux sur les avions.
33:42 Lors de cet essai, on projette un poulet sur un 747.
33:48 On va acheter un poulet, on le propulse à plusieurs centaines de km/h
33:53 et on regarde ce qui se passe.
33:56 On a utilisé le même matériel, mais modifié.
34:01 Pour qu'il corresponde à nos besoins.
34:04 E. Bard et son équipe ont utilisé le canon pour envoyer un morceau de mousse
34:08 de la taille d'une mallette sur une tuile de carbone-carbone renforcée
34:12 similaire à celle de Columbia.
34:15 Mais il n'est pas facile de faire sortir ces éléments de la NASA.
34:19 Ces tuiles coûtent dans les 800 000 dollars pièce.
34:23 Donc la NASA se montrait réticente à nous en confier pour notre essai.
34:28 Mais à force d'insister, E. Bard finit par avoir gain de cause.
34:31 Reste à savoir par quelles tuiles commencer.
34:35 Les renseignements fournis par l'enregistreur de vol et les images
34:39 suggèrent que le point d'impact le plus probable se trouve entre les tuiles
34:43 numéro 6 et numéro 9.
34:46 L'équipe de E. Bard commence donc par la 6.
34:50 L'essai a lieu le 30 mai.
34:54 [Bruit de tirs]
34:57 [Bruit de tirs]
35:01 [Bruit de tirs]
35:05 Spectaculaire, le choc n'occasionne cependant que quelques fissures.
35:09 [Bruit de tirs]
35:13 On est loin du trou béant qui aurait causé la perte de Columbia.
35:17 Et certains membres de la NASA s'empressent d'enterrer la théorie du morceau de mousse.
35:22 [Bruit de tirs]
35:24 Ces commentaires m'ont fait comprendre qu'il était très important de procéder à un autre essai
35:28 pour montrer par la voie expérimentale qu'il y avait un lien entre la mousse et l'accident
35:33 afin que les ingénieurs le comprennent dans leur tête, mais aussi dans leur cœur.
35:40 Trois semaines plus tard, l'équipe chargée d'analyser l'enregistreur de vol fait une découverte.
35:48 L'ordre dans lequel les capteurs de chaleur sont tombés en panne
35:51 permet de reconstituer avec précision la circulation de la chaleur dans l'aile.
35:56 Et il montre sans le moindre doute que le trou est apparu dans la tuile numéro 8.
36:01 Hubbard peut alors refaire son expérience de manière très précise.
36:05 Il implore la NASA de lui confier une tuile numéro 8.
36:08 Et le 7 juillet, il fait disposer le canon pour expulser le bloc de mousse selon l'angle adéquat.
36:15 Si aucun trou n'apparaît, l'enquête se retrouvera au point de départ. L'enjeu est de taille.
36:20 Le test sur la tuile 8 a été pour moi un moment chargé d'émotion.
36:27 Je n'oublierai jamais cette journée.
36:31 On sentait qu'on allait peut-être trouver la clé du mystère.
36:35 Et donc pourquoi cette personne avait péri.
36:40 [Musique]
36:48 [Toc toc]
36:54 3, 2, 1, 0
36:58 [Explosion]
37:01 [Bruit de choc]
37:05 [Bruit de choc]
37:09 Le bloc de mousse de 770 grammes percute la tuile à 800 km/h.
37:15 [Bruit de choc]
37:23 Il fait un trou de 25 cm de diamètre dans le carbone, carbone renforcé.
37:29 Tout le monde est sous le choc.
37:33 [Musique]
37:35 Quand le canon a tiré et que le trou est apparu,
37:39 tous ceux qui étaient présents, journalistes et ingénieurs, ont retenu leur respiration.
37:44 J'ai discuté avec un des ingénieurs, une jeune femme qui nous aidait depuis le début.
37:50 Et elle avait les larmes aux yeux.
37:53 Elle a dit "C'est donc ce qui s'est vraiment passé, n'est-ce pas ?"
37:59 J'ai dit "Oui, c'est ce qui s'est vraiment passé." C'est comme ça qu'ils sont morts.
38:03 En plus des données de l'enregistreur, cet essai vient clore la démonstration des enquêteurs.
38:10 Ils peuvent désormais reconstituer l'enchaînement des événements qui a conduit Columbia à la catastrophe.
38:15 [Musique]
38:23 16 janvier 2003
38:28 Décollage de la navette Columbia qui va procéder à des recherches scientifiques américaines et étrangères.
38:33 Les experts ont désormais la certitude que c'est un morceau de mousse de la taille d'une mallette
38:38 qui s'est détachée du réservoir et qui a perforé l'aile de la navette Columbia.
38:42 [Musique]
38:46 1er février 2003, 50 minutes avant la catastrophe.
38:51 Le contrôle de mission donne le feu vert à l'équipage pour la rentrée.
38:57 Ce que personne ne sait, c'est que le bouclier thermique conçu pour protéger la navette est défectueux.
39:03 [Musique]
39:08 H - 16 minutes. Columbia rentre dans l'atmosphère terrestre à près de 28 000 km/h.
39:14 Les bords d'attaque de ses ailes atteignent la température de 1 400 degrés.
39:19 "C'est étonnant, il fait vraiment clair. On dirait un haut fourneau."
39:25 H - 9 minutes. L'enregistreur de vol montre que le trou béant dans l'aile provoque un effet de traînée sur le flanc gauche.
39:32 Des gaz extrêmement chauds, environ 4 400 degrés, s'engouffrent dans la structure.
39:39 Les capteurs thermiques indiquent des pics de température.
39:43 H - 6 minutes. Les capteurs tombent en panne les uns après les autres, détruits par les gaz brûlants.
39:52 Le contrôle de mission suppose qu'il s'agit d'un problème de fonctionnement des instruments.
39:57 Des témoins oculaires sur Terre voient des morceaux du bouclier se détacher.
40:02 "Regarde les morceaux qui se détachent. Qu'est-ce que c'est ?"
40:06 H - 2 minutes. La fournaise commence à consommer la structure de l'aile gauche alors que Columbia survole le Texas.
40:14 [Musique]
40:20 Le contrôle de mission lui signale les problèmes de capteurs.
40:23 Sa dernière communication est coupée.
40:27 Et tous les systèmes de Columbia tombent en panne.
40:32 La fusion de l'aile rend l'engin spatial très instable.
40:37 Il commence à faire des lacets, puis se met à se désagréger.
40:47 "Rick était pilote, et les pilotes ont une faculté étrange à pouvoir séparer les choses.
40:52 À ce moment-là, il voulait ramener la navette au sol.
40:57 Je sais qu'en ces derniers instants, il était très concentré et qu'il essayait de voir ce qu'il pouvait faire pour résoudre le problème."
41:06 Malheureusement, il ne peut absolument rien faire pour sauver son appareil.
41:12 La navette spatiale se désintègre dans le ciel texan.
41:16 C'est cette membre d'équipage périsse.
41:20 "Cette photo a été prise le jour de l'atterrissage.
41:25 Pour moi, elle est très importante car je n'ai eu que plusieurs semaines après la mort de Rick.
41:30 Si vous regardez bien, vous voyez qu'il ne reste que 11 minutes avant l'heure d'atterrissage prévue.
41:37 À ce moment-là, Rick était déjà sûrement mort.
41:43 Cette photo est la dernière de nous trois avant qu'on apprenne qu'on allait avoir une vie différente."
41:50 L'événement responsable de la disparition de Columbia a eu lieu lors du lancement, 17 jours avant la rentrée.
41:59 Les enquêteurs n'ont plus qu'une énigme à élucider.
42:03 Pourquoi la NASA ignorait-elle que la navette volait avec un trou béant dans son aile gauche ?
42:12 C'est la dernière question à laquelle ils doivent répondre.
42:15 En effet, la NASA a su dès le lendemain du lancement qu'un morceau de mousse s'était décroché.
42:21 Comment se fait-il que personne n'ait remarqué le trou qu'il avait provoqué ?
42:25 Les enquêteurs font alors une découverte troublante.
42:28 Les ingénieurs s'étaient bien souciés des conséquences de cet impact.
42:32 Et ils avaient demandé aux responsables de la NASA qu'on prenne des photos satellites de l'aile de la navette.
42:37 La direction de la NASA n'a pas donné suite.
42:42 La demande de photos a été soumise à la direction, qui s'est empressée de l'oublier.
42:51 Elle a même tout fait pour étouffer cette requête.
42:58 Les chutes de mousse sont des incidents fréquents et n'avaient jamais provoqué de problèmes majeurs par le passé.
43:04 Mais Al Gehman découvre une deuxième raison qui a incité les responsables à minimiser l'impact du projectile.
43:10 Une enquête de grande envergure risquait de retarder une mission importante en direction de la Station Spatiale Internationale
43:16 et mettre ainsi en péril l'achèvement de sa construction.
43:20 Le Congrès avait décrété que si la construction de l'ISS n'était pas terminée à temps,
43:26 il supprimerait son financement, ce qui mettrait un terme au programme.
43:30 L'importance du planning et des coûts était telle que le pauvre gars qui a dit
43:35 "il y a peut-être un trou dans l'aile de la navette" n'a eu aucun poids.
43:39 Il n'a pas pu se faire entendre.
43:41 Ces révélations posent une nouvelle question.
43:44 Si des photos satellites avaient révélé le danger représenté par le trou dans l'aile de Columbia,
43:49 la NASA aurait-elle pu sauver l'équipage ?
43:52 En envoyant un autre orbiteur en mission de sauvetage,
43:56 et en effectuant un certain nombre de sorties extravéhiculaires particulièrement risquées,
44:00 en théorie, on aurait pu secourir l'équipage.
44:04 Pour cela, il aurait fallu lancer une deuxième navette,
44:07 l'arriver à Columbia et évacuer les sept astronautes.
44:11 Plus facile à dire qu'à faire.
44:14 Ça aurait été une tentative très risquée pour sauver l'équipage.
44:18 Mais si on avait su que la navette avait un problème, on aurait agi.
44:23 On ne serait pas resté dix jours les bras croisés.
44:27 On aurait fait quelque chose.
44:32 Le résultat de l'enquête constitue un choc pour les familles des astronautes.
44:36 J'étais convaincue qu'il s'agissait d'un simple accident,
44:40 et qu'il était inévitable.
44:43 Le compte-rendu m'a donc vraiment perturbée,
44:46 car il est devenu limpide qu'on aurait pu faire quelque chose.
44:49 Et ça, j'ai beaucoup de mal à l'admettre.
44:52 Plusieurs personnes ont émis des jugements profondément erronés.
45:00 Et ces erreurs ont conduit à cet événement.
45:02 Lorsqu'on analyse un accident, il faut prendre en compte
45:06 les erreurs humaines et les fautes de jugement,
45:09 et essayer de les rectifier.
45:12 C'est mon espoir et mon rêve pour les futurs vols habités.
45:16 Le compte-rendu de la commission d'enquête a été communiqué le 26 août 2003.
45:21 Profondément critique, il faisait également des propositions
45:25 pour remettre le programme des navettes sur les rails.
45:29 Notre rapport était sans équivoque.
45:31 Nous avons dit en substance, il faut réparer le problème de la mousse,
45:35 avant de voler à nouveau.
45:39 Mais nous avons aussi ajouté,
45:42 l'administration n'est pas assez fiable pour diriger ce programme.
45:45 Il faut en changer.
45:49 L'administrateur de la NASA, Shono Keefe,
45:53 accepte sans réserve les conclusions du compte-rendu.
45:57 Message reçu.
45:59 Fort et clair.
46:02 Nous devons examiner les procédures, les systèmes,
46:05 et notre façon de travailler pour améliorer les conditions de sécurité,
46:09 et dans le même temps promouvoir l'exploration et la découverte
46:12 au nom du peuple américain.
46:15 La NASA revoit son organigramme pour encourager ses employés à tous les niveaux
46:19 à exprimer leurs inquiétudes concernant la sécurité.
46:23 L'enregistrement vidéo des lancements est amélioré
46:26 et ordre est donné de prendre des photos satellites
46:28 de toutes les navettes une fois en orbite.
46:31 Les ingénieurs éliminent les zones les plus vulnérables d'isolation en mousse
46:35 pour être sûrs que des morceaux volumines ne se détacheront plus
46:38 lors des lancements à venir.
46:41 Pour les familles des astronautes, l'idée que ceux qu'elles aimaient
46:44 ont au moins pu accomplir leur rêve est en quelque sorte un réconfort.
46:47 Mon épouse était une femme ordinaire,
46:50 qui faisait des choses extraordinaires.
46:54 Elle était une femme qui avait une grande énergie.
46:56 Ça se voit sur toutes les images, elle a un sourire fendu jusqu'aux oreilles.
47:00 Elle faisait ce pour quoi elle s'était entraînée toute sa vie.
47:04 Rick aurait vraiment voulu voir le programme continuer.
47:07 Il aurait pensé qu'il n'y a rien de plus glorieux
47:10 que de vouloir retourner sur la Lune ou d'aller sur Mars.
47:13 C'est ce qui l'a motivé pour devenir astronaute.
47:17 Il n'aurait pas voulu voir ce programme s'arrêter à cause de tout ça,
47:22 mais il aurait aussi voulu voir la NASA en tirer le son.
47:24 La catastrophe de Columbia a constitué pour la NASA une forte crise,
47:28 mais le programme des navettes a désormais repris.
47:31 Il se poursuit en hommage à l'équipage courageux de Columbia
47:35 et à tous les autres astronautes qui ont perdu la vie
47:38 au nom de la découverte et de l'exploration.
47:41 de la région.
47:42 [Sous-titres réalisés par la communauté d'Amara.org]