Un monde en doc - Police : faut-il revenir à plus de proximité avec les citoyens ?

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2003, Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur supprime la police de proximité instaurée par la gauche en 1998…
Juillet 2023, des émeutes éclates après la mort de Nahel et une question revient notamment dans le débat public, faut-il rétablir cette police de proximité ? Quelles autres formes peut-elle prendre, avec notamment la « police de sécurité du quotidien » crée par Emmanuel Macron, mais aussi avec la gendarmerie ou la police municipale ?
Et plus globalement, quel lien entretenons-nous avec les forces de l’ordre ? Qu’en attendons-nous ? Quel doit être le rôle de la police aux yeux des citoyens ?
Protéger… Sécuriser… Mais aussi rassurer ? Echanger ? Rebecca Fitoussi et ses invités ouvrent le débat.
Année de Production : 2023

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Transcript
00:00 L'autre police, la force de la proximité de François Rabaté et Sébastien Rocher.
00:04 Documentaire qui, vous l'avez vu, dresse la liste des différentes formes de police qui font aujourd'hui de la proximité
00:10 en lieu et place d'une police qui a existé entre 1998 et 2003 et que certains regrettent.
00:16 Est-ce le cas de nos invités ici présents ? Cela fait partie des questions que nous allons leur poser.
00:21 Jérôme Durin, bienvenue à vous.
00:22 Bonjour.
00:23 Vous êtes sénateur socialiste de la Saône-et-Loire, vice-président de la Commission des lois.
00:27 Le 1er mai dernier, dans le cadre d'un débat sur nos forces de l'ordre, vous avez suivi une brigade de la Brave,
00:33 brigade de répression de l'action violente, et les caméras de public Sénat étaient là et vous ont accompagné.
00:38 Brice Hortefeux, bienvenue à vous également.
00:40 Vous êtes député européen, ancien ministre de l'Intérieur sous le mandat de Nicolas Sarkozy.
00:45 Virginie Malochet, bienvenue à vous.
00:46 Vous êtes sociologue chargée d'études senior à l'Institut Paris Région et spécialiste des questions de sécurité locale.
00:53 Denis Jacob, bienvenue à vous également. Vous êtes secrétaire général du syndicat Alternative Police CFDT.
00:59 Merci beaucoup à tous les quatre d'être ici.
01:01 Et commençons tout de suite par cette question posée dès le début du film,
01:05 question qui plane d'ailleurs au-dessus du débat public dès qu'il y a des tensions dans notre société,
01:10 dès qu'il y a des émeutes.
01:11 Était-ce une erreur de supprimer la police de proximité, Jérôme Durin ?
01:16 Oui, c'était une erreur.
01:18 On le regrette et on ne cesse de se rendre compte des effets de cette suppression.
01:25 Un syndicaliste d'unité SGP Police FO disait, ce sont des mouvements lents dans la police.
01:34 Et ce qu'on casse, on met beaucoup de temps à le reconstruire.
01:37 On l'a vu avec ce qui s'est passé sous la présidence Sarkozy,
01:40 avec la suppression de 9000 potes de policiers.
01:43 On achève à peine de réparer ça.
01:46 Et donc, ce qui s'est passé pour les effectifs de policiers,
01:49 ce qui s'est passé pour la police de proximité,
01:51 il faut là aussi prendre le temps de le reconstruire.
01:54 On en a besoin aujourd'hui, notamment pour améliorer le rapport entre la police et la population,
01:59 qui est au cœur finalement de tous les mots dont on parle dans le débat public autour des questions de sécurité.
02:05 Bris sorte-feu.
02:07 Écoutez, je ne suis pas tout à fait en accord avec ce que je viens d'entendre.
02:12 Je le dis de manière très nuancée.
02:15 Vous savez, les mots sont très agréables.
02:17 La sonorité, ça compte bien sûr dans une démocratie.
02:21 Proximité, accessibilité, apaisement de la société.
02:25 À un moment donné, il faut gratter un peu plus loin,
02:28 avoir le courage de regarder ce qui s'est passé.
02:31 La police de proximité, et c'est normal que vous en soyez ce leader,
02:34 je ne veux surtout pas remettre en cause le sens de votre engagement,
02:38 mais la police de proximité, c'est une invention du Parti Socialiste et de Lionel Jospin,
02:45 créée par Lionel Jospin, qui a été décidée lors d'un congrès du Parti Socialiste,
02:50 qui est un congrès qui s'est tenu à Villepinte.
02:53 Et c'est une époque où la gauche, à juste titre d'ailleurs,
02:57 se posait la question de savoir comment prendre un virage, disons, sécuritaire.
03:04 Prenant en compte, c'est-à-dire, l'évolution des naincances de notre société,
03:08 des aspirations de notre société, et ainsi de suite.
03:11 Et donc, ils ont imaginé ce dispositif.
03:14 Dispositif, je vais le préciser, qui effectivement a été remis en cause
03:19 par Nicolas Sarkozy et les ministres de l'Intérieur qui lui ont succédé jusqu'en 2012.
03:24 À partir de 2012, on est entré dans le grand flou,
03:27 parce qu'on avait les mots pour dire qu'on allait y revenir,
03:30 puis finalement, on ne l'a pas tellement fait.
03:32 – Ce que je comprends sous texte, c'est que vous nous dites
03:33 que le Parti Socialiste a créé cela, finalement, comme un instrument politique.
03:37 – Oui, bien sûr, c'est normal d'ailleurs, ça c'est pas la chose…
03:39 – Quelque chose qui a du fond.
03:40 – C'est tout à fait normal.
03:41 Moi, ce que je dis, simplement, vous savez,
03:43 c'est pour ça que je dis, à un moment donné, les mots sont importants, bien sûr,
03:46 mais ce qui compte, c'est les résultats.
03:47 La vérité, c'est que le bilan de cette police de proximité,
03:51 et là aussi, je suis aussi nuancé par ma réaction par rapport à mon interlocuteur,
03:56 c'est que le bilan a été très mitigé.
04:00 Quand je vous le dis, j'étais sarkoziste,
04:02 j'étais ministre de l'Intérieur sarkoziste, peut-être que ça peut être suspect,
04:05 mais vous avez la personnalité qu'il a mise en place,
04:09 qui était un haut fonctionnaire de police, Patrice Bergogno,
04:11 directeur général de la police nationale, vous vous en souvenez,
04:15 qui donc appliquait, qui était très engagé lui-même,
04:17 qui a donc appliqué la politique,
04:19 et lui-même a dit que le bilan était extrêmement mitigé.
04:23 Et ce qui apparaît très simplement,
04:26 et là, pardon, ça balaye tout ce que vous venez de dire,
04:28 d'une phrase, je suis désolé de vous le souligner,
04:32 c'est que c'est très simple, sous Jospin,
04:34 la délinquance générale a augmenté,
04:38 sous Sarkozy, de 2002 à 2011,
04:42 la délinquance globale a baissé, les crimes et délits ont baissé de 17%.
04:46 - Je vous laisserai répondre...
04:48 Je laisserai répondre Jérôme Durin, si vous le voulez bien.
04:50 - Ce ne sont pas des réponses, ce sont des chiffres, c'est totalement objectif.
04:54 - Et il a le droit d'y répondre, je termine juste le tour de table,
04:56 pour avoir l'avis, l'opinion de nos interlocuteurs,
04:59 ici présents, sur cette police de proximité.
05:01 Est-ce une erreur d'avoir supprimé la police de proximité ?
05:04 N'était-ce qu'un outil politique au bilan très mitigé ?
05:07 - De là où je vous parle, en ma qualité de sociologue,
05:09 j'ai envie de vous dire que tout est question de point de vue,
05:11 et puis ce que vous venez de dire,
05:12 et ce que vous venez de dire l'illustre assez bien,
05:15 finalement on l'a vu dans le documentaire aussi,
05:18 tout dépend de la vision, de la définition qu'on se donne du rôle de la police.
05:23 Moi je n'ai pas à me prononcer là-dessus,
05:25 mais je crois que, enfin, on est tous d'accord autour de la table
05:29 pour dire que le rôle des policiers,
05:31 c'est d'interpeller, c'est de réprimer si nécessaire,
05:33 enfin c'est leur job, il n'y a pas de sujet là-dessus,
05:35 tout le monde est d'accord.
05:36 - Si je peux m'excuser, je partage votre sentiment,
05:40 je pense que c'est plus global que ça.
05:42 Le rôle, c'est d'identifier le délinquant,
05:47 l'interpeller, le déférer et le faire condamner.
05:52 C'est les quatre.
05:53 Et quand il y a un des quatre éléments de la chaîne qui ne fonctionne pas,
05:57 c'est là où tout d'un coup la société prend peur.
05:59 - Alors pardon, je file en amont,
06:01 avant votre cas de point, il y a aussi prévenir.
06:04 Prévenir dans le sens où c'est éviter que des méfaits soient commis,
06:07 éviter qu'il y ait des victimes.
06:09 Et de ce point de vue-là, il me semble que interpellation,
06:11 investigation, bien sûr que c'est le rôle de la police,
06:15 mais reconnaître que la prévention fait aussi partie
06:18 et pleinement partie du job, pour le dire comme ça,
06:21 ça me paraît, de ce point de vue-là,
06:23 demandons au premier concerné, Denis Jacob, policier lui-même.
06:26 - La police, son action, c'est prévention, dissuasion, répression.
06:32 Il faut les trois.
06:33 Pour autant, par rapport à ce que disait le directeur général de la gendarmerie,
06:38 le reportage l'aborde, un peu l'opposition police-gendarmerie.
06:42 Je rappelle quand même que 85% des faits de délinquance
06:45 sont en zone police.
06:47 Donc on n'aborde pas la question de la prévention
06:50 et de la proximité de la même manière.
06:52 Moi, je voudrais faire un petit rappel,
06:54 comme M. le ministre l'a fait, historique,
06:56 la police de proximité, elle n'est pas née avec Lionel Jospin.
07:00 Elle existait déjà avant.
07:01 - C'est-à-dire, elle existait dans les faits ?
07:03 - Oui, j'étais îlotier.
07:04 J'étais îlotier au cœur de la ville
07:07 dans laquelle il y avait des commissariats de quartier,
07:10 dans les années 90.
07:12 Tout a été démantelé pour diverses raisons
07:15 et on a mis un terme à l'îlotage.
07:18 Ensuite, il y a eu la police de proximité de Lionel Jospin.
07:21 - Que vous regrettez ou pas, vous ?
07:23 - Ce n'est pas une question de la regretter.
07:25 Elle a été faite de manière inadaptée.
07:28 C'est-à-dire que la police de proximité, c'est utile,
07:31 c'est complémentaire au reste de l'action de police.
07:33 Mais on a voulu aller vite,
07:35 on l'a généralisé partout,
07:37 alors qu'on aurait dû le faire de manière chirurgicale,
07:39 là où il y en avait besoin.
07:41 Je rappelle quand même que quand la police de proximité
07:44 est supprimée par Nicolas Sarkozy,
07:46 on est aussi dans un contexte très particulier.
07:49 Je rappelle qu'en 2001, deux policiers se sont fait tuer.
07:52 Il y a un mouvement de mécontentement,
07:55 puisqu'en 2001, on a fait un grand mouvement
07:57 de manifestation policière,
07:58 tous syndicats confondus,
08:00 on était plus de 30 000 dans la rue à l'époque.
08:02 Il y a un contexte de mécontentement policier
08:05 où il y a une demande justifiée et légitime des collègues
08:09 de dire "nous avons besoin de plus de moyens
08:12 pour pouvoir avoir la capacité de lutter
08:15 contre la délinquance et la criminalité".
08:17 Et c'est de là qu'on est arrivé,
08:19 avec la politique de Nicolas Sarkozy,
08:21 qui était plus axée sur la police sécuritaire,
08:24 répressive, avec,
08:26 et M. le ministre s'en souvient très bien,
08:27 un plan quand même pluriannuel sur 8 ans
08:30 de 2 milliards et demi.
08:31 Donc il faut le rappeler quand même.
08:33 Ça, c'était attendu par les policiers.
08:35 Parmi les trois piliers, vous avez parlé de la prévention.
08:37 Est-ce que c'est comme ça qu'on vous présente les choses
08:38 quand vous devenez policier ?
08:39 Est-ce qu'on vous dit "vous ferez aussi de la prévention" ?
08:41 Est-ce que ça fait officiellement partie
08:42 des piliers de la police ou pas ?
08:43 Ça fait partie du pilier de la police, bien évidemment,
08:46 mais c'est une pédagogie globale
08:48 que l'on a en école de police.
08:50 En tous les cas, je parle de l'école,
08:52 parce que je commence à avoir un peu d'ancienneté dans la maison.
08:55 Ça fait 35 ans que je suis fonctionnaire de police.
08:57 Donc j'ai vu évoluer la police, l'émission de police.
09:01 J'ai vécu toutes les réformes successives qu'on a vécues,
09:04 parce qu'on en a quand même eu quelques-unes.
09:07 La prévention, on nous l'apprend
09:09 dans la relation qu'on a avec la population.
09:13 Mais aujourd'hui, la police nationale,
09:15 elle n'est plus dans une démarche de police de proximité.
09:18 Et le comparatif qui est fait aujourd'hui
09:20 avec la police belge tronque le débat.
09:25 C'est un exemple très intéressant.
09:26 Et si vous permettez, on y viendra juste après avec un extrait.
09:28 Jérôme Durin, je vous laisse répondre.
09:29 Oui, sur la question qu'a abordée le ministre Ortefeu,
09:36 on est passé quand même dans une logique
09:38 qui était extrêmement quantitative, la politique du chiffre.
09:40 Et puisque vous m'ameniez sur la question des comparatifs de chiffres,
09:45 il y a eu à l'époque une mise en place d'indicateurs
09:47 qui ont été très contestés et abandonnés d'ailleurs sur la délinquance.
09:51 Et cette focalisation sur le chiffre,
09:54 sur la quantité de délits et de personnes arrêtées,
09:58 elle nous a un peu fait oublier tout ce qu'il y a dans le documentaire.
10:01 Une dimension beaucoup plus qualitative.
10:03 Qu'est-ce qui se passe dans la société aujourd'hui ?
10:05 Si on arrête avec l'histoire et si on regarde la société aujourd'hui ?
10:07 On a une tension assez marquée entre la police et la population.
10:12 Certaines parties de la population, mais globalement la population.
10:16 Et on a une police qui est souvent un petit peu à distance
10:19 et qui est vue comme, j'allais dire, la police du prince contre...
10:22 Ce n'est pas la police des citoyens en tout cas,
10:23 ce n'est pas comme ça que c'est vécu.
10:25 Donc quand on entend parler dans le reportage de présence,
10:28 de contact, de redevabilité, j'ai noté,
10:31 de transparence, de visibilité, de discernement,
10:35 ce n'est pas inintéressant quand même pour des citoyens dans une république
10:38 de sentir qu'on est en communauté de valeur avec les policiers.
10:41 Sauf que ce que vous dites, on ne peut plus l'appliquer.
10:43 Tout ce que vous venez de dire, tout ce que vous avez cité.
10:46 Pourquoi ? Parce qu'aujourd'hui, le fait d'avoir quitté la cité en tant que policier,
10:52 et ça date d'avant la police de proximité de Jospin,
10:55 on y était de manière pérenne.
10:56 Moi j'y travaillais du matin jusqu'au soir.
10:59 On en est sortis et on a laissé le terrain à certains noyaux durs de délinquance.
11:03 Donc il faut le refaire.
11:04 Donc aujourd'hui, pour y revenir, on ne va pas y aller la fleur au fusil.
11:08 Ça, c'est le monde des bison-ours.
11:10 On brise.
11:10 Et aujourd'hui, bien évidemment qu'il faut essayer de reconquérir ces terrains-là
11:16 par une présence de la police,
11:18 mais si on croit un seul instant que ce sera par la seule action de la police,
11:22 on se trompe.
11:23 Je le dis depuis des années,
11:24 tant qu'on n'accompagnera pas la mission de police
11:26 avec un plan interministériel de politique sociale,
11:29 de politique économique, de politique de la ville,
11:31 on ne réglera rien.
11:32 On attend aujourd'hui de la police qu'elle règle tout,
11:35 ce qui n'est pas possible.
11:36 – Brice Hortefeux, je vous laisse répondre.
11:37 – Oui, mais c'est exactement…
11:39 Pardon, je partage ce sentiment.
11:41 En réalité, Nicolas Sarkozy avait sorti une phrase,
11:44 c'est celle-ci qui avait fait un peu polémique,
11:46 c'est "les policiers ne sont pas des travailleurs sociaux".
11:48 Mais effectivement, chacun l'avait dit dans son déplacement à Toulouse,
11:51 vous vous en souvenez, il ne savait pas tellement plus
11:53 au directeur des parties frontales qu'il n'a pas bien vécu,
11:56 mais pourtant c'est ça la réalité.
11:57 Et parce que s'il y a nécessité de prévention,
12:01 vous évoquez le mot, mais pardon, d'abord,
12:03 dans mon esprit, je n'ai pas changé d'avis,
12:06 la première des préventions, c'est la certitude de la sanction.
12:08 C'est ça la première des préventions.
12:11 Mais bien sûr qu'il y a d'autres éléments qui doivent accompagner,
12:13 mais ce n'est pas le rôle du policier.
12:16 J'entends ce que vous dites,
12:17 il ne faut pas se fixer trop sur les résultats, les agrégats.
12:23 D'abord, je vous en remercie parce que moi ça me rajeunit,
12:25 parce que quand vous parlez politique du chiffre,
12:27 ça me rappelle ces quelques années que j'ai beaucoup aimé
12:30 quand j'étais ministre de l'Intérieur,
12:32 où je m'évertuais à dire,
12:33 mais non, ce n'est pas la politique du chiffre,
12:35 c'est la politique du résultat.
12:36 Ce que l'on veut, c'est donner des résultats à nos concitoyens.
12:39 Alors quand vous parlez de police de proximité,
12:41 vous savez, on a un exemple, vous le connaissez, j'imagine,
12:44 c'est ce qu'a décidé Paris, la ville de Paris.
12:47 La ville de Paris a redéployé 3 400 agents.
12:51 – C'est très présent dans le documentaire,
12:52 c'est cette police municipale, on va y venir, vous avez raison.
12:55 – Résultat, non mais attendez, résultat, quand on voit le résultat,
12:59 je serais honnêtement, vous savez, j'ai passé l'âge des polémiques
13:02 et cette étape de ma vie publique,
13:04 franchement si c'était bien, je dirais c'est bien,
13:05 c'est tout, il n'y a rien de compliqué.
13:07 Mais quel est le résultat ?
13:09 Vous apercevez que vous avez une augmentation des vols avec violence
13:12 de plus de 24%, 24,6%.
13:16 Vous apercevez que vous avez une augmentation des cambriolages
13:20 de plus de 25%.
13:22 Vous apercevez que tous les agrégats de cambriolage, plus de 9%.
13:26 Donc vous dites, c'est peut-être très sympathique,
13:29 peut-être que c'est agréable, mais ce n'est pas ça.
13:32 – Le film met en avant l'exemple de la police belge de proximité
13:36 et je vais vous donner la parole Virginie Malochet après cet extrait.
13:38 On l'appelle là-bas la police locale, elle a été décidée en 98
13:41 suite à des dysfonctionnements mis au jour par l'affaire Dutroux,
13:44 elle a pris effet en 2001.
13:47 Et sa mission depuis plus de 20 ans, c'est justement d'être sur le terrain
13:50 au plus près du citoyen et dans une logique d'enracinement local.
13:54 Est-ce le bon modèle ? Vous allez me le dire juste après cet extrait
13:56 qu'on a choisi et qu'on a écourté.
13:58 – Tout va bien ? – Oui, ça va.
14:00 – Oui ? – Oui.
14:02 – Je vais dormir, ça va.
14:04 – Vous pouvez dormir, je voulais être sûr que tout le monde va bien.
14:07 Et vous êtes de passage chez nous ?
14:09 – Euh… Oui.
14:11 – Consommer des boissons alcoolisées ?
14:13 – Non. – Non ?
14:14 Les amis derrière, ils sont endormis là aussi ?
14:16 – Je sais pas, c'est pas…
14:18 – C'est le permis de conduire monsieur, le permis de conduire,
14:20 pas les papiers de la voiture, juste votre permis de conduire à vous.
14:23 – Oui, c'est aussi…
14:25 – C'est aussi un papier comme ça ? – Oui.
14:27 – Ok.
14:29 Vous pouvez venir avec moi un instant ?
14:31 On va aller jusqu'à la camionnette là-bas s'il vous plaît.
14:33 [Musique]
14:35 – Virginie Mélecher, qu'avez-vous pensé de cet exemple belge
14:37 qui est frappant effectivement, vu de France où les policiers ne font pas cela ?
14:41 – Alors, ça dépend. Ça dépend où ? Ça dépend lesquels ?
14:44 Et on parle là de l'exemple belge, plus précisément de l'exemple
14:47 du secteur de Paul Bruno, parce que le… comment dire,
14:50 ce cas de figure Paul Bruno n'est pas forcément révélateur,
14:54 significatif de la manière dont fonctionnent toutes les zones pluries,
14:58 communales, belges, parce qu'il y a de la diversité là encore,
15:00 et c'est probablement tant mieux.
15:02 C'est vrai aussi dans nos polices françaises au pluriel,
15:05 puisqu'on parlait des polices municipales également,
15:08 et probablement que l'on y reviendra.
15:11 Qu'il s'agisse de ce cas belge, puisque vous posez la question
15:14 de savoir si ça peut nous inspirer, ou des autres programmes,
15:18 des autres expériences de ce type.
15:20 Je vais dire rapidement, police de proximité,
15:22 mais le terme est tellement miné, connoté maintenant…
15:25 – Oui, il est très connoté.
15:26 – …pour le dire, mais disons une police, voilà,
15:28 ancrée dans les territoires et tournée vers la population,
15:31 pour le dire rapidement, plusieurs questions à se poser.
15:34 La première, c'est effectivement, vous la souleviez,
15:37 celle de l'efficacité du modèle.
15:39 Mais là encore, pour se prononcer là-dessus,
15:42 tout dépend des objectifs… – Qu'on se fixe.
15:45 – Exactement. Là-dessus, à l'échelle internationale,
15:48 les évaluations disponibles à ce sujet, que nous disent-elles ?
15:52 Globalement, qu'effectivement, si l'on prend le critère
15:57 taux de délinquance, pour le dire comme ça,
15:59 il n'y a pas forcément d'incidence notoire.
16:02 En revanche, ça dépend des cas de figure, mais globalement,
16:05 en revanche, ce type de police-là joue très positivement
16:10 sur le sentiment d'insécurité, et ce n'est pas que pour être
16:13 une police plus agréable, quand les gens se sentent
16:16 davantage en sécurité, ils investissent aussi plus
16:18 l'espace public, ils s'y sentent plus à l'aise,
16:21 et cela en soi, ça concourt aussi à la sécurisation,
16:24 au contrôle social, classique, informel, pour le dire comme ça.
16:27 Et puis aussi, ça peut jouer positivement sur le niveau
16:30 de satisfaction professionnelle des policiers.
16:33 – On est presque sur des effets psychologiques, en fait,
16:35 assez peu mesurables, compliqués à mesurer.
16:37 – Ça peut se mesurer, il y a des dispositifs méthodologiques
16:40 qui permettent de le faire, mais surtout, ça joue positivement
16:42 sur l'image que les gens ont des forces de l'ordre,
16:46 ont de la population, et ça en soi, c'est important.
16:48 On pourrait dire, ah bah tiens, c'est qu'une opération de com',
16:50 après tout. Pas que, parce que si l'on considère
16:54 que précisément, l'amélioration de l'image de la police,
16:57 l'amélioration du rapport police-population, pour le dire comme ça,
17:01 ça a aussi des effets qui sont bénéfiques sur les conditions
17:04 d'intervention. – Ce n'est pas un petit sujet.
17:06 Jérôme Durain, je vous donne la parole ensuite, Denis Jacob.
17:08 – Oui, la police, la sécurité, c'est un service public,
17:11 on se plaint beaucoup des autres services publics,
17:13 l'éducation, la santé, c'est aussi un service public
17:15 dans lequel il y a des fonctionnaires qui ont droit
17:17 d'avoir des conditions de travail satisfaisantes,
17:19 et il y a aussi des usagers qui ont droit de se sentir
17:21 bien traités par ce service public-là.
17:23 Et je pense que quand on parle de l'autre police,
17:25 parce que c'est comme ça que vous avez amené le débat,
17:27 l'autre police, ça veut dire qu'on se pose des questions
17:29 par rapport à la police actuelle, donc on cherche autre chose.
17:32 Alors, est-ce que c'est la police municipale ?
17:33 Je pense qu'on y reviendra tout à l'heure.
17:35 Est-ce que c'est autre chose ? En tout cas, la demande sociale,
17:39 et parfois la demande des fonctionnaires de police eux-mêmes,
17:41 qui ne sont pas toujours satisfaits, je peux peut-être citer un syndicaliste
17:43 qui disait, en une époque on était dans les quartiers
17:45 où on avait envie d'y retourner, ce n'est pas possible,
17:47 ce que vous avez dit d'ailleurs à l'instant,
17:49 ce n'est peut-être pas possible pour l'instant,
17:51 mais moi je pense que c'est souhaitable.
17:53 Et que de toute façon, avec d'autres acteurs de la société,
17:56 on doit reconstruire une place pour la police,
17:58 où on n'est pas simplement sur cette espèce de rhétorique
18:02 autoritaire, martiale, interpellation, ce que disait un peu Nicolas Sarkozy,
18:07 en raillant la police de proximité.
18:09 Et aujourd'hui, quand on voit les sujets, les refus d'obtempérer,
18:13 l'affaire Nahel, les policiers qui sont victimes de violences,
18:16 les questions de contrôle d'identité, dont on se dit,
18:19 est-ce que les gens...
18:20 Vous vous dites, une telle police retisserait un lien entre la population ?
18:23 Il faut retisser un lien, et il y a une dimension qualitative,
18:25 une dimension relationnelle, la police de la République,
18:28 la police des citoyens, dans laquelle ils se reconnaissent,
18:30 et vis-à-vis de laquelle ils sont considérés.
18:32 Parce que le film met en avant l'exemple belge,
18:34 mais il n'y a pas que la Belgique qui a une police de proximité.
18:37 Il y a l'exemple londonien.
18:38 Les forces de l'ordre anglaise sont souvent qualifiées
18:40 de meilleures polices du monde, d'ailleurs.
18:42 La Metropolitan Police, définie ainsi par son ancien chef,
18:45 Bernard Hogan-Ow, nos agents de quartier,
18:47 ceux qui connaissent les rues de leur quartier,
18:49 les noms de nombreuses personnes de leur district,
18:51 sont notre arme principale.
18:53 Ils sont nos yeux et nos oreilles.
18:55 Une police de proximité londonienne, là aussi.
18:57 C'est une nécessité de pouvoir reconquérir des endroits
19:00 où on intervient aujourd'hui, que pour intervenir
19:04 et mettre un terme à un acte de délinquance,
19:07 de criminalité, et ensuite repartir.
19:09 Bien évidemment que c'est important.
19:11 Mais moi, je ne suis pas satisfait de ce qui a été montré
19:14 dans ce documentaire.
19:15 C'est un peu le prisme dogmatique et très partial
19:19 de prendre en exemple la police belge,
19:23 en la prenant comme...
19:25 - La panacée.
19:26 - La panacée pour la France.
19:27 - Disons-le.
19:28 - La police locale de la Belgique,
19:30 ce n'est ni plus ni moins que la police municipale en France.
19:34 Je rappelle qu'en 1998, la police fédérale,
19:37 la gendarmerie belge et la police locale a fusionné.
19:42 Et de cette fusion, ils ont refait deux branches,
19:44 la police fédérale et la police locale.
19:47 La police locale en Belgique, elle est sous l'autorité des élus.
19:50 Elle n'est pas sous l'autorité de l'État.
19:52 Donc c'est la police municipale en France.
19:54 Et là, on dit, en fait, ça, il faudrait que ce soit
19:57 la police nationale qui le fasse.
19:59 Non, plus aujourd'hui, plus dans le contexte actuel.
20:02 - Donc il faut des polices municipales partout ?
20:04 Ils sortent peu.
20:05 - Non mais je complète juste parce que vous avez parfaitement raison.
20:08 C'est que les formes de la délinquance
20:10 ont aussi considérablement évolué.
20:12 Les moyens technologiques, l'armement qui est utilisé.
20:15 On n'est plus dans l'époque, précisément des années 2000.
20:19 Ça a complètement changé.
20:20 Et d'ailleurs, déjà dans les années 2000,
20:22 un des défauts de la police, j'allais dire,
20:25 je ne sais pas si c'est pour schématiser,
20:27 mais c'est qu'elle était dans la journée.
20:31 La nuit, elle n'existait pas.
20:33 On ne voyait pas de bleu la nuit.
20:35 C'était donc...
20:37 La société, heureusement, elle n'est pas figée.
20:40 Et donc elle a considérablement changé.
20:42 Et c'est pour ça que je vous dis,
20:44 on sera obligés inéluctablement d'arriver à un schéma
20:48 dans lequel il y aura police locale,
20:50 c'est-à-dire police municipale pour l'essentiel,
20:53 et la police d'Etat qui sera la police d'intervention et d'interpellation.
20:56 - Moi, j'entends que vous êtes d'accord.
20:57 Ça fait consensus, cette idée de deux polices,
20:58 une locale, une nationale.
20:59 Mais alors, pourquoi pas de police municipale partout ?
21:01 - Vous avez un sujet très important, si je peux me permettre,
21:03 et on en discutait tout à l'heure avec monsieur le sénateur,
21:05 et on est en phase,
21:07 le rôle de la police municipale en France.
21:10 Aujourd'hui, elle est présentée comme une force supplétive
21:13 à la police nationale.
21:14 Demain, elle doit être identifiée
21:16 comme la vraie troisième force de sécurité intérieure en France.
21:20 Et aujourd'hui, qui est en premier contact de la population
21:24 dans certains quartiers en France ?
21:26 Ce n'est plus la police nationale, c'est la police municipale.
21:29 Mais après, il y a le débat de la police municipale
21:32 que l'on a en fonction des communes.
21:34 - Et qui la paye et qui la finance.
21:36 - Il y a un élément, je vais le compléter,
21:39 parce que là aussi, pardon, juste une phrase,
21:41 ça évolue, vous avez raison, il y a la police nationale,
21:44 il y a la police d'Etat, il y a la police municipale,
21:47 et n'oubliez pas maintenant, la branche qui existe aussi,
21:49 c'est la sécurité privée.
21:51 Il faut naturellement en tenir compte,
21:53 parce que la proximité...
21:55 - Et pourquoi se développe-t-elle ?
21:57 - Parce que précisément, parce que la société a évolué.
21:59 Donc la société a bougé, les fonds de délinquance,
22:02 vous voyez bien, on le voit tous, on fait nos courses,
22:05 il y a des polices privées.
22:07 Donc c'est quelque chose, là aussi, qui est inéluctable.
22:10 - M. Romdurin ?
22:11 - Sur ces sujets, moi, je suis un sénateur socialiste,
22:14 un homme de gauche, et je crois qu'on aborde,
22:17 aujourd'hui, dans ma famille politique,
22:19 ces questions sans candeur, sans naïveté.
22:21 - C'est vrai.
22:22 - Sans candeur, sans naïveté.
22:23 Quand j'étais avec les...
22:25 - La Brave.
22:26 - La Brave, le 1er mai, je ne vais pas vous dire
22:29 que face aux manifestants et aux Black Blocs,
22:31 il faut des policiers de proximité
22:33 qui viennent parler de la pluie et du beau temps.
22:35 Donc là-dessus, il faut qu'on soit très clair.
22:37 Ce qui est important dans les débats de ces dernières années,
22:40 c'est l'évolution vers le continuum de sécurité.
22:43 C'est la loi sécurité globale,
22:45 où on nous a expliqué qu'il y avait police, gendarmerie,
22:49 police municipale, forces de sécurité privées.
22:52 Le problème, c'est la question qui a été très bien posée,
22:55 c'est à quoi servent les polices municipales ?
22:57 Est-ce qu'on peut accepter, dans un État comme le nôtre,
23:00 que certaines fonctions régaliennes soient dévolues
23:02 à des polices municipales, qui existent ou qui n'existent pas ?
23:05 Ma voisine s'est documentée sur ces choses-là,
23:08 qui sont armées ou qui ne le sont pas,
23:10 dont les doctrines d'emploi sont différentes
23:12 d'un endroit à l'autre.
23:13 Certaines sont très axées sur une dimension répressive.
23:16 Je pense à certains coins du sud de la France,
23:19 au bord de la Méditerranée, où on a des polices municipales
23:22 qui sont quasi la police nationale, dans leur conception.
23:24 Donc il faudra en définir les contours précisément
23:26 et les harmoniser ?
23:28 En tout cas, c'est une vraie question.
23:29 Est-ce que, devant le service public de la sécurité,
23:32 on a le droit d'avoir une même exigence
23:34 partout sur le territoire national ?
23:35 Oui. Est-ce que les polices municipales
23:37 s'emparent de ce sujet-là ?
23:39 Mais si elles le font, elles le font à la place de la police nationale.
23:42 Elles font autre chose.
23:44 Et ce sujet-là n'est pas abouti.
23:46 Par exemple, la question de la déontologie.
23:48 Si on a des policiers municipaux
23:50 qui font comme les polices nationales,
23:52 la police nationale,
23:54 est-ce que les obligations déontologiques,
23:55 elles doivent s'appliquer à eux ?
23:56 Et où est-ce que c'est contrôlé, ça ?
23:58 Alors, on l'a vu dans le reportage avec Jacques Toubon,
24:00 qui intervient sur ce sujet pour la Ville de Paris.
24:02 Mais c'est tout un champ qui reste à éclaircir.
24:04 À quoi ça sert ?
24:05 Comment c'est organisé ?
24:07 Quelles obligations ?
24:08 Et ça, c'est un choix politique global.
24:09 Virginie Malochet ?
24:10 Oui, il faut rebondir là-dessus,
24:11 parce qu'il se trouve que ça fait 25 ans
24:13 que je bosse sur les polices municipales,
24:15 et ça fait 25 ans que j'entends dire
24:17 que les polices municipales,
24:18 c'est la seule vraie police de proximité.
24:20 La référence, si vous voulez,
24:22 à la police de proximité,
24:24 dans le monde des polices municipales,
24:26 c'est les maires.
24:27 Toute étiquette politique confondue,
24:28 comme chez une majeure partie des agents,
24:30 cette référence, elle est fédératrice.
24:32 Elle est consensuelle.
24:33 Mais elle est devenue tellement consensuelle
24:35 qu'elle nous dit finalement plus grand-chose
24:37 de la manière dont on emploie,
24:39 effectivement, ces polices locales,
24:42 ces polices municipales.
24:44 Ceci étant, là encore,
24:46 si on essaie de regarder les choses
24:48 d'une manière un peu générale,
24:50 je vais le dire comme ça,
24:52 si l'on s'en tient à la définition classique,
24:54 commune de la police de proximité,
24:56 celle qui est véhiculée dans le reportage,
24:58 alors là, le constat, c'est effectivement
25:00 que la tendance, c'est celle d'un glissement
25:04 vers un modèle,
25:05 c'est pas du tout un jugement de valeur de ma part
25:07 que de le dire comme ça,
25:08 mais vers un modèle qui est plus interventionniste
25:10 et répressif.
25:11 Il n'y a pas que moi qui le dis,
25:12 la Cour des comptes,
25:13 les récents rapports parlementaires sur le sujet.
25:15 Ce glissement-là,
25:17 il est encouragé par le législateur.
25:19 Accroissement continu des prérogatives
25:22 des policiers municipaux depuis, allez,
25:24 1999 maintenant.
25:26 C'est évidemment pas sans incidence
25:28 sur la nature du rapport avec le public.
25:30 Donc ce que je veux simplement dire,
25:31 c'est que c'est pas parce que ces polices-là
25:33 sont locales qu'elles jouent forcément
25:35 la carte de la police de proximité
25:37 dans cette redéfinition du travail de sécurité.
25:39 - Si je me permets de répondre à vos arguments,
25:41 il faut rappeler que s'il y a des prérogatives élargies
25:44 aux polices municipales,
25:46 elles restent dans leur cadre,
25:47 de leur qualification d'agent de police judiciaire adjoint.
25:50 Donc c'est quand même limité.
25:53 Je le rappelle, ils sont sous l'autorité
25:54 d'un officier de police judiciaire de la police nationale.
25:56 Donc c'est quand même limité,
25:58 mais il faut reconnaître le travail de la police municipale,
26:00 c'est d'ailleurs ce que les agents demandent.
26:02 Sur la proximité,
26:04 la différence entre un policier municipal d'aujourd'hui
26:08 et le policier national d'hier,
26:10 c'est que tous les deux,
26:12 au départ, étaient issus de la cité.
26:16 Moi, quand j'étais îlotier,
26:18 la plupart de mes collègues résidaient sur la commune.
26:21 Demandez aujourd'hui à un policier national
26:23 de résider sur la commune où il travaille.
26:25 Mais là, c'est la femme, les enfants agressés.
26:28 Je ne vais pas refaire le débat.
26:29 Aujourd'hui, on cache aux enfants
26:31 le fait de dire qu'on est papa et maman policier.
26:33 Parce qu'à l'école, ça va se savoir,
26:36 et tout ce qu'il peut y avoir derrière.
26:38 Aujourd'hui, les policiers municipaux
26:40 sont les policiers nationaux d'hier
26:43 qui sont pour la plupart issus de la commune, de la ville.
26:47 Aujourd'hui, allez demander à des policiers du 93
26:52 de faire de la police de proximité
26:54 alors que ça tourne tous les 3-4 ans.
26:56 Tous les 3-4 ans, ils viennent, ils partent.
26:58 C'est un vrai sujet pour la police nationale.
27:01 La police de proximité en tant que telle a disparu.
27:04 Mais finalement, et le film nous le confirme,
27:06 on a sur le territoire toutes sortes d'entités
27:08 qui font de la proximité.
27:10 Il y a la police de sécurité du quotidien,
27:12 dont on n'a pas encore parlé, lancée par Emmanuel Macron en 2018.
27:15 Cette police municipale dont vous parlez,
27:16 réinstaurée à Paris en 2021.
27:18 Et puis, il y a l'annonce présidentielle
27:20 il y a quelques jours de brigades, de gendarmerie.
27:23 238 brigades de gendarmerie.
27:25 Vous me donnerez votre avis dans un instant.
27:26 Mais la gendarmerie, qui elle, nous le dit clairement dans le film,
27:28 elle fait de la proximité.
27:30 Ecoutez.
27:31 Parce que la gendarmerie fait de la police de proximité.
27:34 En fait, on nous a demandé de faire de la sécurité du quotidien.
27:37 Ça a vraiment été une impulsion forte du ministre.
27:39 On est exactement là-dedans.
27:41 Il y a un lien de confiance nécessaire
27:43 si on veut que l'action de la gendarmerie
27:45 soit considérée comme légitime auprès de la population.
27:48 Et pour ça, il faut être auprès des gens.
27:50 Et en fait, on a construit toutes les modalités d'action
27:53 et l'accomplissement de nos missions
27:55 sur cette notion de proximité.
27:56 Le gendarme, il doit être dehors.
27:58 Il doit être au contact, il doit être sur le marché.
28:00 Il doit être au contact des élus.
28:01 - Gris sortes-feu et la gendarmerie
28:04 fait de la proximité, le revendiquent.
28:06 - Oui, mais ça a été rappelé en début d'émission.
28:09 La situation en police-gendarmerie n'est pas la même.
28:13 Moi, j'ai eu l'honneur d'être le premier ministre de l'Intérieur.
28:17 C'est le hasard du calendrier, très honnêtement.
28:19 Mais premier ministre de l'Intérieur
28:21 à avoir directement sous mon autorité
28:23 la police et la gendarmerie.
28:25 Avant, c'était une autorité d'emploi.
28:27 J'avais symboliquement installé
28:29 le directeur général de la gendarmerie
28:31 dans les locaux du ministère de l'Intérieur.
28:33 Ils ont toujours naturellement...
28:35 Ils sont dans les Moulinots.
28:37 Mais ils étaient symboliquement installés.
28:39 Donc j'ai pu voir...
28:41 Vous l'avez rappelé en début d'émission,
28:43 l'essentiel des faits de délinquance
28:45 se font en zone police.
28:47 Mais l'essentiel du territoire
28:49 est en zone gendarmerie.
28:51 Donc il y a une répartition qui est très différente.
28:55 - Le modèle n'est-il pas duplicable ?
28:57 Est-ce qu'on ne peut pas reproduire
28:59 ce que fait la gendarmerie dans les territoires
29:01 où la densité de population est moindre ?
29:03 Leur méthode, leur façon de faire ?
29:05 - Je pense que la distinction qui existe
29:07 aujourd'hui est une distinction utile
29:09 car ce sont des actions
29:11 qui sont complémentaires.
29:13 Il y a ces deux forces régaliennes
29:15 qui sont complémentaires
29:17 mais parce qu'elles ont des champs d'application,
29:19 des territoires d'application qui sont différents.
29:21 - Aucune inspiration possible de l'une vers l'autre ?
29:23 - Moi je suis l'élu d'un département rural,
29:25 je suis sénateur de Saône-et-Loire.
29:27 Donc il est vrai que l'essentiel des crimes et des lits
29:31 est commis dans les unités urbaines,
29:33 en zone police.
29:35 L'essentiel de la population
29:37 est aussi en zone police.
29:39 Il ne faut pas présenter les zones gendarmerie
29:41 comme des endroits où il ne se passe rien.
29:43 On a de la violence routière,
29:45 on a des stupéfiants,
29:47 on a des violences intrafamiliales,
29:49 on a toutes sortes de violences
29:51 intrafamiliales, on a toutes sortes de criminalités.
29:53 - Et la délinquance écologique.
29:55 - Et la délinquance écologique.
29:57 Donc il y a tout ça en gendarmerie.
29:59 Mais ce qui fait que ça marche en gendarmerie
30:01 sur la dimension proximité,
30:03 c'est précisément ce que vous disiez tout à l'heure monsieur,
30:05 c'est qu'il y a une immersion des gendarmes
30:07 dans leur terrain de vie.
30:09 Parce qu'une gendarmerie,
30:11 c'est des bureaux,
30:13 mais c'est aussi un espace pour les familles.
30:15 Les gendarmes, ils habitent le territoire
30:17 où ils travaillent.
30:19 Ils sont immergés comme les policiers dont vous parliez tout à l'heure.
30:21 - A une autre époque.
30:23 - Et donc ça crée quand même un lien,
30:25 un lien très particulier avec la population,
30:27 parce qu'on les voit, parce qu'on les connaît,
30:29 parce qu'ils sont là, et le référentiel
30:31 n'est quand même pas le même.
30:33 - Gendarmerie, oui, en France, elle est réputée
30:35 comme étant plus enracinée,
30:37 pour le dire comme ça, et plus proche de la population
30:39 que la police nationale, globalement.
30:41 Et traditionnellement, c'est vrai
30:43 qu'il y a un maillage territorial,
30:45 une culture professionnelle
30:47 des modes opératoires qui sont
30:49 plus propices, pour le dire comme ça,
30:51 à la proximité. Et ce coeur de métier
30:53 historique de la gendarmerie,
30:55 centré sur le contact,
30:57 l'insertion locale, comme vous disiez,
30:59 la proximité, il est quand même
31:01 contrarié ces derniers temps,
31:03 ces dernières années,
31:05 pour plein de raisons qui tiennent d'abord
31:07 à l'évolution des territoires
31:09 couverts par la gendarmerie,
31:11 parce qu'après tout, dans certaines
31:13 zones périurbaines, il n'y a pas grand-chose
31:15 qui est renvié par rapport à certaines
31:17 zones urbaines. En tout cas, les raisons
31:19 pour lesquelles ce coeur de métier
31:21 historique est aussi un peu
31:23 bousculé, en tout cas pour lesquelles la gendarmerie
31:25 s'en éloigne, ce sont des raisons
31:27 qui tiennent aussi au changement
31:29 interne à la gendarmerie, précisément,
31:31 vous évoquiez ce rattachement fonctionnel
31:33 au ministère de l'Intérieur,
31:35 je mets plein de guillemets, une forme de "policiarisation"
31:37 des missions de la gendarmerie,
31:39 des restructurations des implantations
31:41 territoriales,
31:43 parce que s'il y a aujourd'hui cette annonce
31:45 de 238 nouvelles brigades,
31:47 dont une marge partie sont
31:49 des brigades mobiles, soit dit en passant,
31:51 mais en tout cas,
31:53 s'il y a cette annonce-là, c'est bien pour répondre à des
31:55 attentes, à des besoins qui remontent
31:57 de la part des élus locaux,
31:59 et pour d'une certaine manière retricoter ce qui a pu
32:01 être détricoté antérieurement.
32:03 Très rapidement, un dernier tour de table avec vous tous,
32:05 avec cette question qui fera office de conclusion,
32:07 comment retisser un lien
32:09 entre la police et la population ?
32:11 Très brièvement,
32:13 c'est en ne comptant pas uniquement sur la seule
32:15 action de la police, là où on doit
32:17 retisser ce lien avec
32:19 la population, reconquérir
32:21 les terrains par des actions, je le dis
32:23 très librement,
32:25 de répression pour éradiquer
32:27 les noyaux durs de délinquance qui
32:29 pourrissent ces quartiers où la grande
32:31 majorité de la population n'aspire qu'à une chose,
32:33 c'est à y vivre
32:35 comme n'importe quel citoyen ailleurs en France,
32:37 et d'avoir un véritable plan Marshall
32:39 de reconquête des quartiers
32:41 par une politique de la ville,
32:43 une politique sociale, une politique économique,
32:45 parce qu'effectivement, le policier,
32:47 il ne peut pas tout faire.
32:49 D'abord, une première réalité,
32:51 c'est que l'immense majorité
32:53 de la population
32:55 soutient la police et soutient
32:57 la gendarmerie. Donc on dit, bien sûr,
32:59 qu'il faut retisser, mais il y a une adhésion.
33:01 Et, deuxième
33:03 élément, pour que
33:05 la population reconnaisse
33:07 la police et la gendarmerie,
33:09 il faut qu'elle obtienne des résultats. Vous savez,
33:11 quand vous êtes cambriolé aujourd'hui,
33:13 vous avez en réalité
33:15 92 chances sur 100 qu'on n'interpelle
33:17 jamais celui,
33:19 ou jamais en tout cas dans l'année qui suit,
33:21 qu'on interpelle celui qui est
33:23 le responsable du cambriolage. On fait évoluer
33:25 le résultat, et bien vous verrez
33:27 tout de suite que la population sera extrêmement reconnaissante
33:29 si le taux d'élucidation progresse.
33:31 Mais pour avoir confiance, il faut
33:33 qu'il y ait des résultats. Donc j'en reviens,
33:35 c'est une fois la politique du résultat.
33:37 - Thierry Rondurant. - Oui, je ne suis pas d'accord avec ça, parce que je pense que
33:39 ce qui peut retisser le lien entre la police et la population,
33:41 c'est par répondre à une crise de l'efficacité.
33:43 Et d'ailleurs,
33:45 ce qui s'est passé avant l'été, ou les difficultés
33:47 dont on a parlé, qui ont par exemple
33:49 généré le Beauvau de la sécurité, je pense à l'affaire
33:51 Michel Zecler, ça n'a rien à voir avec l'efficacité.
33:53 C'est parfois peut-être un peu trop d'efficacité.
33:55 Donc il y a un sujet de formation.
33:57 La formation, ça a été dans le dernier
33:59 mandat un truc un peu compliqué quand même.
34:01 On l'a baissée en termes de temps,
34:03 après on l'a augmentée.
34:05 Il y a un problème de recrutement, parce que les effectifs
34:07 qu'il faut reconstituer, c'est un vrai sujet.
34:09 Le niveau de recrutement est un problème aussi.
34:11 Et il y a quelques symboles sur lesquels il faut jouer.
34:13 C'est pas vrai partout sur tous les territoires
34:15 de la République, mais dans certains territoires
34:17 de la République, je pense au contrôle
34:19 d'identité, je pense au refus d'obtempérer.
34:21 Il y a des symboles qui doivent rapprocher
34:23 la police de la population, et ça il faut qu'on y travaille
34:25 tous. - Virginie Malochet.
34:27 - Oui, en travaillant sur l'adhésion
34:29 des policiers des agendas base,
34:31 parce que c'est d'eux dont tout dépend
34:33 quand même dans l'affaire, en tout cas des agents
34:35 de police de voie publique, je parle de ce que je connais,
34:37 pas des autres métiers policiers,
34:39 sur leur adhésion précisément
34:41 à une orientation
34:43 davantage tournée vers la population.
34:45 Et pour travailler à cette adhésion,
34:47 je rebondis sur ce que vous disiez, il faut évidemment
34:49 tenir compte des difficultés réelles
34:51 du métier, et de la manière
34:53 dont les policiers vivent leur métier, parce qu'il y a aussi
34:55 beaucoup une question de rapport.
34:57 Il y a évidemment des enjeux d'évolution,
34:59 de la délinquance, de la violence,
35:01 que je ne nie pas, mais il y a aussi beaucoup une question
35:03 de rapport au public,
35:05 à l'environnement, et c'est cela
35:07 qu'il s'agit de travailler en premier lieu. Il y a encore
35:09 des policiers qui sont très intégrés dans leur quartier,
35:11 qui vivent bien, qui passent partout,
35:13 c'est pas pour autant qu'ils laissent passer les choses,
35:15 et heureusement, et ceux-là généralement
35:17 ne se sentent pas menacés dans leur environnement,
35:19 et créent les conditions
35:21 d'une intervention plus
35:23 apaisée, ce n'est pas qu'un mot,
35:25 plus apaisée et donc plus efficace aussi en termes d'action.
35:27 – On s'arrêtera sur ces mots, merci,
35:29 merci beaucoup à tous les quatre d'avoir participé à cet échange,
35:31 merci à vous de nous avoir suivis comme chaque semaine,
35:33 émissions et documentaires à retrouver
35:35 sur notre plateforme publicsena.fr,
35:37 à très vite sur Public Sénat, merci.
35:39 [Musique]

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