“Je n’avais jamais vu de lesbienne africaine à la télé”
Mariana Benenge raconte comment elle a fait la paix avec sa sexualité sans représentation de femmes lesbiennes non-blanches. Elle milite pour une représentation positive et pointe également du doigt les thérapies de conversions dont peuvent être victimes les personnes LGBTQI+.
Mariana est ambassadrice de l’association OASIS RD CONGO qui milite pour une société tolérante et inclusive sur le continent africain.
Mariana Benenge raconte comment elle a fait la paix avec sa sexualité sans représentation de femmes lesbiennes non-blanches. Elle milite pour une représentation positive et pointe également du doigt les thérapies de conversions dont peuvent être victimes les personnes LGBTQI+.
Mariana est ambassadrice de l’association OASIS RD CONGO qui milite pour une société tolérante et inclusive sur le continent africain.
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00:00 donc je voulais vraiment pas.
00:01 J'étais en mode genre non je suis pas,
00:02 je ne ressens pas une lesbienne,
00:03 j'ai pas les cheveux courts,
00:05 je suis pas blanche,
00:06 c'est pas possible, c'est pas pour nous.
00:07 Et la vérité m'a rattrapée.
00:09 Je pense que c'est vraiment au lycée
00:11 que j'ai commencé vraiment à me dire
00:13 ok, je ressens des choses bizarres
00:15 pour des femmes, comment je vais faire ?
00:17 Et en fait il n'y avait pas beaucoup de représentations,
00:19 j'ai commencé à parler avec des copines,
00:21 ben elles étaient tous hétéros,
00:22 donc c'était dur,
00:23 donc il y avait toujours des mots un peu homophobes etc.
00:25 Du coup je me disais c'est pas possible
00:27 et aussi le fait que je sois africaine,
00:29 j'avais jamais vu de lesbienne africaine à la télé.
00:32 J'ai toujours vu des personnes blanches
00:34 dans les séries etc.
00:36 Et même en tant que lesbienne,
00:37 c'était pas quelque chose qui était pris au sérieux.
00:39 On avait l'impression que quand tu es lesbienne,
00:41 c'est une passade en fait,
00:42 c'est quelque chose qui peut changer,
00:44 évoluer, c'est pas sûr.
00:45 Puis c'est très récemment que j'ai vraiment fait mon coming out.
00:47 D'abord à mes amis qui étaient quand même au courant,
00:50 ma famille ensuite,
00:51 et finalement la Madré.
00:53 Oui j'ai eu des histoires d'amour secrètes
00:56 que j'arrivais pas à out
00:58 et j'ai brisé le cœur de plein de femmes
01:00 parce que justement j'étais pas en accord avec.
01:02 Je pensais que c'était que des envies sexuelles,
01:04 je pensais pas que c'était des envies amoureuses.
01:05 J'étais là moi genre
01:06 "Non j'aime juste être avec des femmes,
01:07 mais je veux pas être en couple avec elles,
01:09 c'est bizarre, je suis hétéro."
01:11 Tu te regardes vraiment dans le miroir,
01:12 tu te dis "Mais non je peux pas en fait,
01:14 c'est pas moi,
01:16 je peux pas être de celle-là,
01:17 j'ai déjà trop de choses à gérer."
01:20 Et ces aventures-là m'ont juste permis aussi
01:23 de m'accepter au fur et à mesure.
01:24 Et à l'ancienne j'allais sur un site internet,
01:27 c'était n'importe quoi, j'allais sur un site,
01:29 j'essayais de trouver, y avait pas de photos,
01:30 donc on se parlait avec des femmes,
01:32 on était en mode genre
01:33 "Où tu es ? Envoie-moi une photo."
01:34 Enfin c'était super compliqué de faire les rencontres entre femmes
01:37 et encore plus entre femmes racisées,
01:39 c'était genre...
01:40 Ça a été des moments durs,
01:41 ça a été des moments de pleurs,
01:42 j'étais vraiment en colère
01:43 de me rendre compte du manque de représentativité
01:46 des relations lesbiennes, africaines, noires,
01:49 asiatiques même, nord-africaines,
01:51 enfin tout ça, ça m'a juste mis en colère
01:54 et j'étais comme une petite souris
01:56 en essayant de trouver des informations à gauche à droite.
01:58 Je pense que la représentation,
02:00 mais surtout la représentation positive
02:01 est importante parce que c'est celle qui construit
02:05 un peu notre subconscient et aussi notre amour propre.
02:07 La série qui m'a fait vraiment aimer encore qui je suis,
02:10 c'est Harlem.
02:11 J'ai vu cette série, j'ai dit "Mais genre, waouh !"
02:13 C'est des femmes noires qui sont beaux aussi,
02:15 elles ont des carrières de fous,
02:16 elles ont des histoires d'amour de malades,
02:18 il y en a qui sont queer et que ça dérange personne.
02:20 Et en fait l'histoire aussi n'est pas autour de ça,
02:22 l'histoire est autour juste de l'amour
02:24 et je pense que les gens oublient souvent ça,
02:25 qu'être homosexuel, ce n'est pas juste une sexualité,
02:28 on parle aussi d'amour, de sentiments.
02:29 Le hashtag #AfricanLesbianExists,
02:31 c'était un t-shirt que j'ai fait
02:34 pour juste de base montrer qu'on existe
02:36 et nous mettre en lien,
02:37 parce qu'on est tellement invisibilisés.
02:39 Je voulais le partager aussi
02:41 parce que j'ai eu la chance d'être dans la ballroom scene,
02:43 la communauté du voguing,
02:44 où c'est ok, on est soutenus,
02:46 mais je suis dans d'autres communautés aussi
02:47 où c'était plus compliqué pour eux d'accepter.
02:49 J'ai perdu certains amis, surtout Bledar du coup,
02:52 mes potes, mes potes du Congo,
02:53 certains ne me parlent plus par rapport à ça
02:55 parce qu'ils ne comprennent pas,
02:56 ils ne comprennent pas mon choix.
02:58 Ils se disent "mais c'est du gâchis".
03:00 J'essaie d'expliquer mais il y en a pour qui
03:02 c'est vraiment trop loin pour eux.
03:03 J'ai aussi, aujourd'hui, vivant en France,
03:06 j'ai ces privilèges qui font que je peux parler
03:08 de mon homosexualité,
03:09 je peux parler d'être lesbienne,
03:10 je sens que j'ai trop de répercussions.
03:12 Si je parle du Congo, de la RDC,
03:14 il n'y a pas des lois anti-LGBT,
03:16 mais il n'y a aucune loi qui spécifie quand même la protection.
03:19 Donc tout ce qui est stigmatisation, violence,
03:21 ça se passe encore.
03:22 Si je dois donner un conseil un peu à toutes les petites lesbiennes
03:26 qui m'ont regardée et qui m'ont envoyé des messages et d'autres,
03:29 si vous trouvez quelqu'un que vous pensez
03:31 qu'il peut vous comprendre, à qui parler,
03:33 dites-lui, vraiment.
03:35 Il faut en parler parce que tant que tu n'en parles pas, tu souffres.
03:37 Il y a encore des pays d'Afrique,
03:39 ou même en Europe, même partout en vrai,
03:41 où il y a encore des thérapies de conversion.
03:43 Les gens pensent qu'ils vont nous guérir,
03:45 mais on n'est pas malades du tout en fait.
03:47 Ce qui me trigger, c'est souvent les questions toujours
03:51 de "tu n'as pas encore rencontré le bon mec,
03:53 tu as fait... tu sais quoi ?"
03:55 Les gens qui vont prendre plaisir à dire que
03:57 "c'est depuis que je suis en Europe que je suis devenue lesbienne".
03:59 C'est ça qui me fait mal parce que
04:01 je pense à toutes les petites qui sont comme moi au Congo.
04:03 Je sais par exemple qu'au fond, là aujourd'hui,
04:05 ma mère, je lui ai parlé, mes soeurs lui ont parlé,
04:07 on a essayé, etc.
04:08 Elle est ouverte à me soutenir aujourd'hui,
04:10 mais je sais quand même qu'au fond d'elle,
04:12 j'ai l'impression qu'elle attend que je change
04:13 parce qu'elle pense aux enfants,
04:14 elle pense plutôt à ça, la vie de famille,
04:16 et que ce n'est pas possible aussi,
04:18 à cause du manque de représentation,
04:19 de s'imaginer une vie de famille avec deux femmes.
04:22 Et c'est ce que j'allais dire vraiment à toutes les personnes
04:24 qui comptent faire leur coming out ou pas,
04:26 selon comment ils se sentent protégés ou pas,
04:28 de vraiment te dire que souvent ton parent,
04:30 il le sait au fond.
04:31 Et quand ils/elles ne le savent pas,
04:34 ils le savent quand même au fond.
04:35 Et en fait, c'est ce qui va faire que
04:38 ils auront plutôt peur de ta sécurité,
04:40 de ce que les tantes vont dire.
04:41 Je suis ambassadrice d'une asso qui s'appelle Oasis Congo.
04:44 Ils font quelque chose qui est trop bien,
04:45 ils font des groupes de parole,
04:46 mais c'est super dur en fait déjà de
04:48 donner confiance aux personnes de la communauté LGBT là-bas.
04:51 Avec l'asso Oasis Congo,
04:52 on a fait une cagnotte dans laquelle vous pouvez donner votre aide.
04:55 Faites les choses par amour, avec amour, pour l'amour.
04:58 And African lesbians exist !
05:01 Y a pas de problème ma chérie, je dois te suivre.
05:06 Peu importe, je dois te suivre ce que tu fais mon amour.
05:09 Chacun ses sentiments, chacun aime de sa façon.
05:13 Je ne te juge pas ma chérie.
05:15 Je veux que tu tombes bien,
05:18 je veux que tu sois bien,
05:20 et en bonne santé.