• il y a 2 ans
L'invité des Matins de France Culture.
Comprendre le monde c'est déjà le transformer(07h40 - 08h00 - 24 Octobre 2023)
Retrouvez tous les invités de Guillaume Erner sur www.franceculture.fr

Catégorie

🗞
News
Transcription
00:00 Les Matins de France Culture, Guillaume Erner.
00:05 Comment faisons-nous pour vous informer qui sont ces journalistes qui aujourd'hui mènent
00:12 un travail absolument acharné au péril de leur vie ? On va en reparler dans quelques
00:18 instants pour vous informer sur le conflit qui accourt au Proche-Orient.
00:23 Ici même dans ce studio, Eric Biegala.
00:25 Bonjour Eric, vous êtes journaliste à la rédaction internationale de Radio France.
00:29 Vous avez commis un article sur le site de France Culture, un article qui a été publié
00:35 le 3 octobre mais je sais qu'il était prêt avant.
00:38 C'est un article où il était question d'Israël sur le pied de guerre.
00:42 Je ne dirais pas que vous aviez tout prévu mais enfin vous aviez eu un certain nombre
00:49 d'analyses qui se sont révélées parfaitement exactes puisque vous écriviez notamment "le
00:54 niveau perçu de la menace extérieure semble aujourd'hui sans précédent".
00:58 On va revenir sur la manière dont vous avez réussi à vous informer et dont vous continuez
01:03 à vous informer et à nous informer chaque jour sur cette guerre qui accourt au Proche-Orient.
01:09 Et puis sur place, Alice Froussard, bonjour.
01:12 Bonjour.
01:13 Alice, vous êtes actuellement en Cisjordanie, vous êtes à Ramallah.
01:17 Mais j'aimerais tout d'abord que l'on évoque la mémoire d'un homme, Rochdi Sarraj,
01:23 car nous sommes aujourd'hui en deuil.
01:26 Vous avez travaillé avec lui.
01:27 Il travaillait donc avec nous et cet homme est mort à Gaza.
01:32 Expliquez-nous, Alice Froussard, quelques mots sur cet homme et sur les raisons pour
01:38 lesquelles nous sommes en deuil aujourd'hui.
01:40 En fait, ce qu'il faut savoir c'est que les fixeurs, normalement, ce sont des invisibles.
01:46 Mais sans eux, notre couverture journalistique, elle ne serait absolument pas ce qu'elle
01:50 est, particulièrement à Gaza.
01:52 Rochdi Sarraj, c'était un journaliste, il était avant tout un reporter, un caméraman,
01:58 un réalisateur.
01:59 Et il donnait à voir la vie quotidienne de Gaza.
02:03 Mais voilà, c'était aussi le fixeur avec lequel nous, nous travaillions à Radio France.
02:07 Parce qu'à Gaza, en fait, nous n'avons pas grand-chose sans lui.
02:10 C'est lui qui nous obtient le fameux permis qui nous permet d'entrer dans l'enclave
02:14 côtière.
02:15 C'est lui qui vient nous chercher au checkpoint, qui va nous guider d'un bout à l'autre
02:18 de la bande de Gaza.
02:19 Nous, entre guillemets, on arrive avec des idées de reportage.
02:22 Lui va les affiner, on va en parler avec lui.
02:24 Il va voir, identifier des contacts.
02:27 Nous, on va en avoir d'autres.
02:28 Et voilà, Rochdi, en fait, comme tous ces journalistes gazaouis, il était aussi celui
02:34 qui était à Gaza toute l'année.
02:36 Nous, on n'y allait que par petite période.
02:39 Et c'est lui qui, justement, dans ces périodes de guerre, au moment où les journalistes
02:44 internationaux ne peuvent pas entrer, c'est lui qui informe aussi, comme tous les autres
02:48 journalistes, en premier, qu'il ne quitte pas le terrain, qu'on ne va plus compter
02:55 le temps passé dans des hôpitaux à interviewer des familles de victimes, des familles de
02:59 survivants, qu'il va filmer ce qui se passe sur le terrain, que nous, nous ne pouvons
03:06 avoir accès, malheureusement, seulement que par téléphone.
03:08 Donc effectivement, les journalistes à Gaza font ça, font leur travail de journaliste,
03:14 mais le vivent en même temps, avec toute cette idée en tête de devoir raconter la
03:19 mort d'un ami ou d'un confrère.
03:21 Et justement, parce que tout le monde se connaît, malheureusement, c'est lui qui a été tué
03:27 ce dimanche.
03:28 Quel rapport avec le risque avait-il ? Et j'ai presque envie aussi de vous poser la
03:33 question à vous, Alice Froussard, qui êtes sur le terrain en ce moment même au Proche-Orient.
03:38 En fait, à Gaza, les fixeurs, forcément, c'est un collègue, c'est un journaliste,
03:45 mais ça devient aussi des amis, puisqu'on passe beaucoup de temps ensemble sur le terrain.
03:49 On pouvait y aller parfois pour des périodes d'une semaine, une semaine et demie.
03:54 Et c'est-à-dire qu'on passe du temps avec notre fixeur à partir du moment où on va
03:59 arriver, traverser, entrer justement dans cette enclave côtière, jusqu'au moment où
04:05 on va en sortir.
04:06 C'est-à-dire qu'il y a aussi des moments où on travaille, où on est en interview,
04:10 il y a tous ces moments où on est ensemble, où on va se balader quand il y a des pauses.
04:16 Il y a aussi tous ces moments de vendredi, quand la bande de Gaza est complètement à
04:19 l'arrêt, où finalement on en profite aussi pour parfois on rencontre sa famille, on fait
04:26 du montage ensemble.
04:27 C'était vraiment plus qu'un fixeur.
04:30 Et je pense que beaucoup de journalistes vous le diront, partout dans le monde, il y a forcément
04:36 des fixeurs avec lesquels on a beaucoup plus d'affinités que d'autres.
04:40 Et souvent, plus on passe de temps avec quelqu'un, plus on devient proche.
04:45 Aussi parce qu'il y a une relation de confiance à avoir.
04:48 Puisque finalement, ce fixeur, il est aussi responsable de votre sécurité, entre guillemets.
04:55 Mais vous aussi, vous êtes responsable de la sienne.
04:57 Et c'est en ça que c'est dur d'imaginer qu'on a perdu justement notre fixeur.
05:05 Et je pense pouvoir parler au nom de mon collègue de Radio France, Frédéric Métézo, et en
05:10 mon nom, que ça va être très dur d'imaginer retourner à Gaza avec un autre fixeur.
05:17 Justement, quand vous dites que vous êtes dépendant de votre fixeur, particulièrement
05:22 à Gaza, Alice Froussard, comment fait-on pour informer sur Gaza, sachant que le Hamas
05:29 est une organisation terroriste, totalitaire, qui n'a pas vocation à mener ses opérations
05:37 de manière transparente ?
05:39 Justement, c'est en ça que la relation aussi, à la fois avec notre fixeur, est importante.
05:45 Puisqu'il faut que ce soit quelqu'un de confiance, il faut pouvoir tout lui dire.
05:50 Et c'est en ça que travailler avec Roujdi, qui était journaliste, qui était avant tout
05:56 journaliste avant d'être au Gaza, oui, on peut lui demander de faire tel ou tel sujet.
06:02 Après, tout est une question de savoir comment on va travailler sur ce sujet, comment on
06:10 va en parler différemment, comment on va essayer d'utiliser des petites techniques
06:17 pour mettre en valeur l'information, pour ne pas prendre de risque pour nous, mais aussi
06:23 pour lui, puisque finalement, nous, journalistes occidentaux, nous rentrons ensuite, nous sortons
06:29 entre guillemets de la bande de Gaza, eux restent au quotidien.
06:33 Donc nous aussi, nous ne devons pas les mettre en danger si on doit faire des sujets qui
06:39 peuvent être problématiques pour eux.
06:41 C'est déjà arrivé par le passé que des fixeurs aient des pressions de la part des
06:46 autorités, et c'est ce qu'il faut que nous, nous devons éviter qu'ils en aient.
06:53 Et il y a des sujets sur lesquels on va signer avec notre fixeur, d'autres pour lesquels
06:59 on ne va absolument rien dire du fait qu'ils aient travaillé avec nous, puisque ça pourrait
07:03 les mettre en danger.
07:04 - Eric Biégala, vous qui êtes actuellement dans ce studio avec moi, vous suivez la part
07:14 militaire de l'actualité depuis de nombreuses années pour Radio France et pour France Culture.
07:21 Comment avez-vous réussi à vous informer sur ces usines souterraines pour missiles
07:26 longues portées qui existent à Gaza et sur lesquelles vous avez écrit avant le 7 octobre,
07:33 autrement dit, toutes ces informations confidentielles, comment avez-vous réussi à les collecter ?
07:38 - Alors, ce ne sont pas forcément des informations vérifiées.
07:43 Il se trouve qu'un mois avant le 7 octobre, donc au tout début septembre, j'avais été
07:49 invité par l'association de la presse israélo-européenne avec un certain nombre d'autres reporteurs
07:59 et spécialistes un petit peu des France à faire un tour des institutions sécuritaires.
08:06 C'était d'aller sur les différents fronts où ce qui pouvait commencer à ressembler
08:12 à des lignes de front au-dessus de Naples, au-dessus de Djenine, en Cisjordanie, mais
08:17 aussi sur le front nord face au Hezbollah, face au Hamas à Gaza.
08:23 Et donc on a pu rencontrer un certain nombre de spécialistes de la sécurité d'Israël.
08:31 Ce sont d'anciens agents de renseignement, ce sont des militaires d'actifs, des militaires
08:38 des ingénieurs qui vont concevoir les systèmes antimissiles, énormément de gens qui eux
08:44 ont cette information et que l'on retransmet.
08:48 Mais ce n'est pas d'informations vérifiées.
08:50 Des usines, on ne l'a pas vue.
08:52 - Mais diriez-vous, Eric Biegala, que ces gens que vous avez rencontrés un mois avant
08:56 le 7 octobre s'attendaient, pensaient possible, une offensive depuis Gaza ?
09:01 - Depuis Gaza, non.
09:02 Je pense que c'était la chose à laquelle ils s'attendaient le moins.
09:06 Quand on était devant Gaza, on avait en face de nous une barrière de sécurité et
09:10 un mur souterrain qui empêchait les infiltrations par tunnel.
09:13 Le mur, c'est quand même 60 mètres de profondeur.
09:16 Il était bardé de capteurs, etc.
09:18 Et les militaires qui étaient là, comptaient là-dessus pour empêcher toute infiltration.
09:24 Ils ne s'attendaient pas du tout à ce qu'il y ait entre 2500 et 3000 types en armes qui
09:28 passent par-dessus.
09:29 - Alice Poussard, vous êtes actuellement à Ramallah en Cisjordanie.
09:33 Peut-être quelques mots sur ce que vous voyez aux alentours, sur la situation à Ramallah
09:39 parce qu'il faut informer sur Gaza, mais aussi bien sûr sur la Cisjordanie, sur les
09:44 colonies, les territoires occupés ?
09:45 - Alors nous, justement, pour le moment, on n'a pas accès à Gaza.
09:52 Donc effectivement, pour faire entendre un petit peu la voix des Palestiniens, on a décidé
09:58 d'être aussi en Cisjordanie, puisque c'est un autre front en ce moment d'Israël, où
10:05 comme le disait Eric, ce front était connu, en tout cas le nord de la Cisjordanie.
10:11 Pour le coup, là l'ambiance est quand même très particulière.
10:16 Nous, en tant que journalistes étrangers, on a le droit de se déplacer, d'aller par
10:22 exemple du territoire israélien au territoire palestinien en Cisjordanie.
10:26 Il y a aussi sur ces routes, on peut voir justement ces colonies israéliennes dans
10:34 le territoire de la Cisjordanie, c'est-à-dire qu'il va y avoir des petites enclaves avec
10:39 des barrières, protégées par des soldats, où vivent des colons israéliens au milieu
10:46 de villages palestiniens, sur des terres palestiniennes.
10:49 - Et donc vous circulez librement ?
10:51 - Alors nous, puisqu'on est journalistes, en fait on a le droit de se déplacer.
10:56 On a le privilège d'être journaliste étranger, d'avoir à la fois un passeport français,
11:02 d'avoir une carte de presse israélienne qui nous permet de circuler sur tout le territoire
11:07 et d'avoir une voiture avec une plaque israélienne.
11:12 Ce qui nous permet de passer les barrages de soldats, ce que les palestiniens ne peuvent
11:18 pas faire en ce moment puisque les villes sont fermées, en tout cas les principales
11:23 villes palestiniennes et les routes sont fermées.
11:24 Ce qui nous permet de faire notre travail de terrain.
11:27 - Il y a eu Alice, depuis le début de cette guerre, de nombreux morts en Cisjordanie,
11:35 de nombreux palestiniens.
11:36 Est-ce que ça veut dire que vous assistez à des accrochages, à des échanges de tir
11:41 chaque jour ?
11:42 - Alors des échanges de tir chaque jour, nous pas forcément, mais en tout cas ce que
11:48 je peux vous dire c'est qu'on a beaucoup couvert d'enterrements.
11:52 Encore hier on a dû aller dans un camp de réfugiés à côté de Ramallah parce qu'il
11:57 y avait eu des affrontements avec l'armée israélienne dans ce camp de réfugiés de
12:01 Jalazoun la veille.
12:02 Nous nous sommes déplacés à Djenin dans le nord de la Cisjordanie pour faire un reportage
12:07 à la base sur le camp de réfugiés en solidarité avec Gaza.
12:11 Mais finalement nous nous sommes retrouvés dans des manifestations le soir avec mon collègue
12:16 Alexandre Abergel qui était pour les moyens techniques.
12:19 - On avait effectivement entendu votre reportage.
12:25 Merci beaucoup.
12:26 Alice Froussard qui est aujourd'hui notre correspondante en Cisjordanie.
12:33 Eric Biegala, on se retrouve dans une vingtaine de minutes pour comprendre comment se fabrique
12:38 l'information.
12:39 6h39, les matins de France Culture.
12:45 Guillaume Erner.
12:46 8h21, comment faire pour vous apporter l'information la plus exacte, la plus précise, la plus
12:52 vérifiée possible sur ce conflit qui est à court entre Israël et le Hamas.
12:56 Nous sommes en compagnie de mon camarade Eric Biegala.
12:58 Vous êtes journaliste à la rédaction internationale de Radio France.
13:01 On vous doit un article hélas prophétique le 3 octobre publié sur le site de France
13:08 Culture.
13:09 Israël sur le pied de guerre tous azimuts où vous évoquiez notamment les tunnels de
13:13 Gaza.
13:14 Et nous accueillons Vincent Coccase, journaliste de Check News à Libération.
13:19 Eric, je vous ai appelé au lendemain du 7 octobre pour savoir si on avait des informations
13:25 précises sur la nature des massacres perpétrés par le Hamas.
13:30 On savait qu'il y avait beaucoup de morts, même si le bilan a été revu à la hausse
13:34 pendant quelques jours.
13:35 Mais ce que je voulais savoir c'était le mode opératoire et le type d'exaction perpétré
13:41 par le Hamas parce qu'un mort n'égale pas un mort.
13:45 Ce que je veux dire par là c'est que la manière dont les morts étaient perpétrées
13:50 fournit une indication sur la stratégie poursuivie par le mouvement terroriste.
13:55 Et à l'époque, que savait-on ? Comment a-t-on réussi à s'informer précisément
14:01 sur ce qui s'est produit, notamment dans ces kibouts à la frontière ?
14:04 Alors, ce qui se passe c'est qu'en fait on a eu tout de suite, mais vraiment tout
14:09 de suite, énormément d'images diffusées par le Hamas, directement.
14:13 Et ça s'est retrouvé sur les réseaux sociaux, sur X Twitter, assez rapidement.
14:19 Je me souviens, j'ai été réveillé pour éventuellement partir sur place, il devait
14:23 être 8h30, quelque chose comme ça, et je n'ai pas décroché de mon téléphone portable
14:28 pendant les heures que finalement ce n'est pas moi qui ai été, c'est mon collègue
14:31 Omar Ouamane.
14:32 Et on voyait des images assez hallucinantes qui avaient été tournées par le Hamas, par
14:40 des gens qui étaient des témoins directs.
14:42 Je me souviens, l'une des premières images que j'ai vues c'est quatre personnes, on
14:47 va dire deux couples de personnes âgées qui devaient être dans un abribus, je pense
14:51 que c'était à Sderot, je ne suis pas absolument certain, je n'avais pas pu vérifier exactement
14:56 l'endroit à cette époque-là, et ces personnes avaient été manifestement passées par les
15:01 armes alors qu'elles attendaient le bus.
15:03 Donc c'était une agression typique et manifeste contre des civils menées par des hommes en
15:11 armes qui venaient de la bande de Gaza, Sderot c'est à 1500 mètres au nord de la bande
15:16 de Gaza, c'est la ville principale.
15:18 Et des images comme ça, il y en a eu des dizaines et des dizaines pendant les deux
15:22 ou trois heures qui ont suivi.
15:23 Et comme elles viennent du Hamas, on se dit qu'elles ne peuvent pas être fausses ?
15:27 Elles ne sont pas censées desservir le Hamas, malheureusement, on voyait bien qu'il s'agissait
15:36 essentiellement de prendre un parti par les armes, absolument n'importe qui, c'est-à-dire
15:42 des policiers, le poste de police de Sderot a été assiégé et en partie pris, mais
15:48 également tout ce qui était véhicule civil, tout ce qui était passant dans la rue, tout
15:52 ce qui était... et on a commencé à avoir aussi des images qui arrivaient des kiboutz.
15:57 Et là, il s'agissait simplement de passer par les armes absolument tout ce qui pouvait
16:02 s'y trouver.
16:03 Dans cette actualité terrible, hier, Israël, et même plus précisément encore l'armée
16:07 israélienne a convié les médias étrangers à visionner les images de ces tueries.
16:12 Et là aussi, c'est particulièrement important, Vincent Kocas, puisqu'il y a déjà eu,
16:17 et là j'ai du mal à le dire, mais malheureusement il faut le dire, il y a eu une question qui
16:23 s'est posée pour savoir s'il y avait eu des bébés décapités.
16:27 Vous avez travaillé sur cette question qu'on aurait préféré bien sûr ne jamais se poser,
16:32 Vincent Kocas.
16:33 C'est une des spécificités de ce conflit, c'est-à-dire que dès les premiers jours,
16:37 les premières heures, on a effectivement eu ce flot d'images terribles.
16:39 Nous, on a dû s'en saisir pour faire le tri entre ce qui était vrai ou pas.
16:42 Et assez vite s'est posée la question de ce nombre qui est sorti dans la presse internationale
16:47 de 40 bébés morts, qui a assez vite devenu 40 bébés décapités, dans ce qui bout de
16:52 Kfar Aza, qui est très proche de la frontière avec Gaza.
16:56 Aujourd'hui, c'est un chiffre qui n'est plus repris, y compris par la communication
17:00 israélienne.
17:01 Il y a eu un raté, il y a eu un chiffre qui a été donné peut-être un peu vite à l'antenne
17:05 d'une chaîne d'info en continu, Y24 News en l'occurrence.
17:08 Le problème, c'est qu'il y a vraiment eu des bébés qui ont été tués, il y a vraiment
17:12 eu un massacre dans ce qui bout, mais simplement le chiffre n'était pas le bon.
17:16 Nous, notre travail, c'est aussi de faire le tri entre les chiffres qui sont bons ou
17:19 pas, avec toute l'horreur que ça charrie derrière, puisque un seul bébé tué, un
17:24 seul bébé décapité, c'est déjà une abomination, c'est déjà un problème.
17:28 Le souci qu'il y a eu, c'est aussi que le fait que ce chiffre faux ait circulé a
17:31 été brandi par le Hamas et par des soutiens du Hamas, comme la preuve qu'Israël mettait
17:36 en scène les massacres et permettait au Hamas de balayer tous les massacres en disant "il
17:41 n'y a pas eu de massacre de civils", etc.
17:43 Alors que par ailleurs, on avait des images qui le prouvaient.
17:46 Mais alors, aujourd'hui, que sait-on sur ces massacres ? Sait-on par exemple si ces
17:52 tueurs du Hamas avaient des consignes particulières ? Parce que ça, c'est particulièrement
17:57 important.
17:58 Est-ce qu'on leur avait dit d'exercer la plus pure cruauté ? Est-ce que cela faisait
18:04 partie de leur feuille de route ?
18:06 Alors, on a retrouvé, il y a des documents qui circulent, qui auraient été retrouvés
18:10 sur les combattants du Hamas.
18:11 C'est encore très difficile à authentifier de manière définitive.
18:14 En tout cas, dans ce qu'on voit, nous, on a pu déjà documenter de façon très précise,
18:20 géolocaliser, vérifier, grâce à des mises images, des crimes de guerre.
18:23 Donc, à la limite, consigne ou pas, le mode opératoire prouve qu'il y avait une volonté
18:29 de tuer un très grand nombre de civils, puisque dès les premières minutes de l'attaque,
18:34 ce sont des civils qui ont été ciblés de façon totalement volontaire.
18:38 Il n'y a aucun doute là-dessus.
18:39 Alors, bien entendu, Eric Biegala, dans cette guerre, la guerre médiatique a cours.
18:44 Le fait de rappeler pour l'armée israélienne hier la nature des massacres perpétrés par
18:49 le Hamas, et aussi une manière de peser, de contrebalancer, je ne sais pas quel verbe
18:55 utiliser, mais enfin, on voit bien que tandis que Gaza est bombardée avec des enfants qui
19:00 meurent, il est aussi important pour Israël de rappeler l'événement originel.
19:06 Et ça, comment faites-vous, vous Eric, qui travaillez sur ces sources, pour savoir si
19:12 l'armée israélienne ne vous délivre pas de fausses informations à la matière ?
19:16 L'armée israélienne, mais comme toutes les armées, il faut partir d'un principe.
19:21 À la guerre, tout le monde ment.
19:22 Vous ne pouvez rien prendre pour argent comptant.
19:24 Alors, on peut mentir simplement par omission.
19:27 C'est en général ce qui se passe avec les institutions, les forces armées occidentales,
19:33 où on ne dit pas tout, où on ne dit pas complètement tout.
19:36 On peut aussi mentir par fabrication.
19:39 Les Russes sont les grands spécialistes de ces choses-là.
19:41 Ils sont capables de nous monter des histoires, mais totalement hallucinantes, qu'on débunk,
19:45 c'est-à-dire qu'on déchiffre assez facilement finalement.
19:49 Mais il y a de tout.
19:51 Le spectre est très très large.
19:52 Donc, il ne faut pas prendre ces images quand elles vous sont données.
20:00 Parce que plusieurs fois, d'ailleurs, des autres éditeurs nous ont dit qu'on sait
20:06 qu'il y a eu tel ou tel massacre puisqu'on a les images, on nous envoie ces images, mais
20:09 ces images, malheureusement, elles ne veulent dire pas grand-chose.
20:13 Et puis des fois, elles sont tout simplement trafiquées.
20:16 Oui, c'était ça que je pensais.
20:17 Oui, elles sont trafiquées dans le sens où tout simplement le nombre d'images qu'on
20:20 a en ce moment, soi-disant de Gaza et qui sont en fait des images qui viennent de la
20:24 guerre de Syrie.
20:25 Le tremblement de terre en Turquie.
20:27 Le tremblement de terre en Turquie.
20:28 L'opération en Afrique, l'Asselefrêt.
20:29 Donc, voilà, une image, si elle n'est pas authentifiée, ça ne signifie rien.
20:34 Vincent Kocas, l'autre épisode particulièrement marquant dans cette guerre, c'est le bombardement
20:41 de l'hôpital où le tir de roquette, puisque c'est ça la question qui s'est posée.
20:45 Est-ce qu'aujourd'hui, on est sûr à 100% qu'il s'agit d'une roquette lancée
20:51 par le djihad islami qui aurait explosé sur le parking de cet hôpital ?
20:57 Alors à 100% non, parce qu'il nous manque un élément déterminant pour attribuer l'explosion.
21:02 C'est des bris de projectiles au sol.
21:05 Le Hamas a indiqué il y a très peu de temps qu'il n'y avait plus aucune trace de projectiles,
21:10 qu'ils s'étaient dissous comme du sel dans l'eau.
21:11 C'est une citation d'un responsable du Hamas, ce qui n'est pas très crédible.
21:15 Tous les experts militaires interrogés disent que ce n'est pas comme ça que ça se passe.
21:19 On trouve toujours des bouts de projectiles, etc.
21:21 Mais quand vous dites le Hamas, vous avez M.
21:23 Hamas au téléphone ?
21:24 En l'occurrence, c'est un responsable du Hamas qui est cité par le New York Times,
21:28 qui les a interrogés spécifiquement sur cette question du projectile, parce qu'encore
21:31 une fois, elle est déterminante.
21:32 Reste qu'on a quand même certains éléments, notamment des vidéos, plusieurs vidéos,
21:36 des vidéos de vidéosurveillance, des images de chaînes de télévision, des images au sol.
21:41 On a beaucoup, beaucoup travaillé sur ces vidéos et elles sont compatibles avec un
21:45 tir de roquette raté.
21:47 Les images qu'on a au sol du cratère, pour le coup, ne sont pas compatibles avec une frappe
21:52 aérienne, c'est-à-dire la taille du cratère, le type du cratère d'une frappe aérienne
21:55 israélienne.
21:56 Ça, pour le coup, on peut à peu près l'exclure aujourd'hui.
21:58 Ce qui veut dire que ce ne sont pas les Israéliens ?
22:01 C'est un peu plus compliqué que ça, puisque le cratère pourrait être compatible, par
22:05 exemple, avec un tir d'obus, un tir d'artillerie, ce qui n'est pas pareil qu'une frappe aérienne.
22:08 Mais est-ce que le fait que le Hamas dise qu'il n'a rien retrouvé, est-ce que ça n'est
22:14 pas en soi une manière d'avouer qu'effectivement c'est un tir raté du djihad islamique ?
22:20 C'est un élément important, mais par ailleurs, sur le djihad islamique, ça c'est une communication
22:24 de Tsaïl, l'origine du tir, pour le coup, on n'en sait encore pas grand-chose, puisque
22:29 l'armée israélienne a indiqué dans un premier temps que la roquette avait été tirée depuis
22:32 un cimetière, juste derrière l'hôpital, et ça aujourd'hui s'est fortement remis
22:35 en cause.
22:36 - Et avec Biégala ?
22:37 - Alors, on a, en termes d'image, on a un truc qui pour nous est du pain de bénie,
22:41 c'est qu'au moment où l'explosion et l'incendie se déclarent sur l'hôpital, on a un direct
22:48 tourné par Al Jazeera, donc en fond, c'est tourné de nuit, donc on a simplement la
22:54 silhouette de Gaza City, et puis on a très distinctement un objet volant, pas vraiment
23:04 identifié, mais enfin quand même pas loin, ça ressemble beaucoup à toutes les roquettes
23:08 qui sont en train de partir de Gaza, qui volent beaucoup plus lentement qu'à l'habitude,
23:12 qui commencent à avoir un parcours un petit peu erratique, on distingue très nettement
23:16 sur ces images, qui sont encore une fois en direct, il n'y a pas de montage, il n'y
23:19 a rien du tout, l'objet est explosé, changé de direction, finalement il y a une espèce
23:26 de gerbe de flamme, et cinq secondes plus tard, vous avez deux explosions au sol, et
23:30 là l'opérateur a le bon goût et le réflexe de zoomer complètement sur le deuxième
23:35 truc, et on reconnaît, parce que là on peut géolocaliser l'endroit, et c'est effectivement
23:41 cette cour d'hôpital.
23:42 Donc il y a quelque chose qui, cinq secondes après l'explosion, ou disons la destruction,
23:47 la désagrégation en vol d'un missile parti de Gaza, d'un missile ou d'une roquette
23:52 partie de Gaza, quelque chose qui explose au sol.
23:54 Alors ça, là déjà il y a une véritable indication.
23:57 Le lendemain, effectivement, on a des images en plein jour de ce qu'il y a sur le parking,
24:01 c'est clair, c'est net, c'est précis, c'est pas une bombe qui est tombée, il y
24:04 a vingt véhicules qui sont sur ce parking, il y en a quinze qui sont brûlés, trois
24:08 qui sont vraiment détruits, donc il y a eu un vrai choc cinétique.
24:12 On avait un petit peu l'habitude de regarder ce que font, ce que produisent les explosions
24:15 de charges militaires.
24:16 Il y a eu une charge militaire qui a explosé, c'est parfaitement clair, on voit les traces
24:20 au sol, on peut tout à fait distinguer l'angle de tir avec ces traces au sol, ça c'est
24:26 des trucs qu'on apprend à faire sur le terrain, on appelle ça de la trajectographie.
24:30 Et il y a quand même un faisceau d'indications assez lourd qui pointe vers un objet tiré
24:40 depuis la bande de Gaza qui aurait fait explosion.
24:42 Vincent Kocas, depuis lors sur ces listes WhatsApp, il faut savoir qu'il y a beaucoup
24:46 de listes WhatsApp, des listes de correspondants étrangers, des listes qui sont constituées
24:51 dans un sens ou dans l'autre, parce qu'on voit qu'il y a toujours une orientation
24:56 dans ce conflit entre Israël et le Hamas.
24:58 On m'a fourni obligément une carte de la bande de Gaza avec 550 impacts de roquettes
25:06 lancées depuis Gaza qui auraient explosé sur le territoire.
25:10 Comment savoir par exemple s'il y a effectivement eu 550 roquettes qui ont été lancées par
25:17 le djihad islamique, par le Hamas et qui auraient explosé sur la bande de Gaza ?
25:21 Ça fait partie de la multitude de données qui est publiée depuis quelques jours et
25:26 qui demande si on veut vérifier à chaque fois un travail de fourmis qu'on n'est
25:30 presque pas en mesure de fournir.
25:32 Pour vérifier 550 tirs de roquettes ratés, on devrait s'y mettre, les dix journalistes
25:38 de Check News à Libération, pendant deux mois dessus si on voulait aboutir à quelque
25:41 chose.
25:42 Donc évidemment c'est quelque chose qui est très difficile à faire et sur ça
25:45 on n'a pas la capacité humaine et le temps de faire ça.
25:49 Là par exemple nous on travaille avec un collègue sur les hôpitaux qui ont vraiment
25:52 été touchés par des frappes aériennes à Gaza, ce qui a été un peu occulté par
25:57 l'histoire d'Al-Ali, parce qu'il y a des hôpitaux, beaucoup d'hôpitaux
26:00 qui ont été touchés par des frappes israéliennes à Gaza et rien que ça, c'est un travail
26:04 extrêmement difficile alors qu'on parle d'une dizaine ou d'une vingtaine d'hôpitaux.
26:08 Ce qui complique encore la chose, c'est que les bilans de ces frappes vincent-cocaze
26:14 à Gaza sont donnés par le ministère de la Santé de Gaza.
26:18 Est-ce que ce ministère, est-ce que l'on peut croire aveuglément ce qu'il dit ?
26:23 On a fait un article précisément sur ce sujet.
26:25 Peut-on encore faire confiance aux chiffres donnés par le Hamas ?
26:28 Jusqu'à ce conflit, c'était considéré comme une source relativement fiable sur les
26:31 bilans humains.
26:32 C'est-à-dire que c'était des chiffres qui étaient corroborés par des agences de
26:35 l'ONU, etc.
26:36 Et donc, à quelques unités près, généralement, la presse israélienne, l'ONU reprenait des
26:41 chiffres assez proches.
26:42 Est-ce que les choses ont changé ?
26:44 Les choses ont changé, puisque aujourd'hui, on n'a quasiment plus aucun moyen de vérifier
26:48 les chiffres qui sont donnés par des sources indépendantes sur place.
26:51 Alors, par exemple, si on retourne à cet hôpital, à cet hôpital qui aurait été
26:55 touché par une roquette lancée depuis Gaza, le Hamas avait donné un bilan très précis,
27:02 peu après l'événement, 471 morts.
27:06 Aujourd'hui, très sincèrement, on n'en sait pas grand-chose.
27:09 On a des sources d'enseignement qui sont très divergentes sur le bilan.
27:12 Certaines sources d'enseignement parlent de 10 à 50, d'autres d'une fourchette de
27:17 100 à 300, si je ne dis pas de bêtises.
27:19 Donc là, on est dans le flou autour de ce bilan, et avec un bilan donné par le Hamas
27:23 très différent, mais qui évidemment a été très vite remis en cause, puisqu'ils ont
27:27 immédiatement accusé l'armée israélienne d'une frappe aérienne, alors qu'on sait
27:30 pour le coup que ça, a priori, ce n'est pas le cas.
27:31 Comment fait-on, Eric Biegala, pour croire, ne pas croire, essayer de confronter avec
27:37 la réalité ce que, par exemple, on sait sur la manière dont Israël mène la guerre
27:44 contre le Hamas à Gaza ?
27:45 On essaye de vérifier.
27:47 Pour reprendre cet exemple qui est assez parlant, le Hamas parle de 471 morts et de centaines
27:55 de blessés.
27:56 On sait, parce que là, les images le montrent, qu'il n'y a pas eu d'explosion sur l'hôpital.
28:02 Les bâtiments sont intacts.
28:05 Il y a même des hauvents en petite tôle ondulée qui n'ont même pas été soufflés.
28:08 Ce n'est pas une explosion très importante.
28:11 Il y avait du monde sur ce parking et sur les deux pelouses qui sont adjacentes.
28:15 J'ai mesuré, ça aussi on le fait, ça fait à peu près 1900 m² au grand grand maximum.
28:22 Vous mettez là-dessus 471 personnes, plus les centaines qui ont été blessées, plus
28:28 20 véhicules, ça veut dire que vous avez pratiquement une personne debout par mètre
28:32 carré.
28:33 Ce n'est pas plausible.
28:34 Ce n'est pas impossible totalement, mais c'est difficilement plausible.
28:37 D'autant qu'effectivement, il y avait beaucoup de réfugiés sur les deux pelouses adjacentes,
28:43 sauf qu'ils n'étaient pas là en permanence.
28:46 On a des images satellites prises par Maxar de la veille, il n'y a personne sur les pelouses.
28:53 Les gens venaient peut-être simplement la nuit, en se pensant un peu plus à l'abri
28:59 en étant dans l'enceinte de l'hôpital.
29:01 C'est possible aussi.
29:02 Mais le chiffre de 471 morts et plusieurs centaines de blessés ne paraît pas plausible
29:09 à cet endroit.
29:10 Il y a aujourd'hui toute une série de questions qui se posent, rendues compliquées par l'utilisation
29:15 de l'intelligence artificielle qui est à peu près capable de tout fabriquer.
29:20 Sur la question des otages, là aussi, il y a un certain nombre d'interrogations.
29:25 Par exemple, il y a eu un certain nombre de vidéos circulant sur les otages.
29:31 Était-elle toute vraie, Vincent Coquart ?
29:33 Non, assez vite, on s'est rendu compte qu'il y avait des vidéos.
29:35 En fait, avant même l'IA, l'intelligence artificielle, il est très facile de sortir
29:39 une vidéo de son contexte.
29:40 On en parlait tout à l'heure sur les vidéos de Syrie qui ont été présentées à tort
29:43 comme des images de Gaza.
29:44 Là, c'était des vidéos tout à fait anodines d'un homme qui parlait arabe à une fillette.
29:48 Et ça a été présenté comme une petite fille israélienne qui avait été enlevée.
29:53 Alors qu'en fait, on a retrouvé la date de la vidéo qui date plutôt de fin septembre
29:57 que début octobre, qui est antérieure à l'attaque et qui n'a donc rien à voir
30:02 avec le conflit.
30:03 Mais elle a été vue des millions de fois, reprise par des très gros comptes américains
30:07 et israéliens.
30:08 Donc tout ça participe à un flou parce qu'une fois qu'on a vu ces images, elles
30:11 créent un choc parce qu'elles sont évidemment souvent très impressionnantes.
30:15 Le fait qu'elles soient débunkées dans un deuxième temps ne suffit pas toujours
30:18 à corriger les faits qu'elles ont eus dans un premier temps.
30:22 Toujours dans le travail de vérification, de contextualisation, Eric Biegala a eu une
30:26 question extrêmement difficile.
30:28 Ces bombardements israéliens, lorsqu'ils tuent des civils, bien souvent l'armée
30:35 israélienne explique que ces civils ont été utilisés de manière directe ou indirecte
30:39 comme des boucliers humains par le Hamas.
30:41 Que sait-on à ce sujet ? Est-il possible d'enquêter ou de savoir la réalité de
30:47 ces faits ?
30:48 C'est sûr que le Hamas utilise la population gazaouie.
30:54 En bouclier humain, on peut parler de ça effectivement.
30:58 Si on se cachait dans des tunnels qui sont juste sous des mosquées ou sous des hôpitaux,
31:06 et qu'Israël va essayer de détruire les infrastructures, ils vont viser d'abord
31:11 ce qu'il y a au sol, par exemple la mosquée, et ensuite ce qu'il y a en dessous avec
31:15 des bombes spéciales qui peuvent exploser.
31:17 Des bombes perforantes.
31:18 Des bombes perforantes, on peut parler même probablement de bombes thermobariques parce
31:22 que c'est ce qu'il y a d'idéal pour aller taper ce qui est enterré et ce qui
31:28 est confiné.
31:29 Mais il y a aussi tout simplement des bombardements qui sont faits, d'abord des bombardements
31:37 qui ratent leur cible, c'est tout bête, et donc qui tombent sur la maison d'à
31:40 côté.
31:41 Parce qu'il y a plein d'éléments.
31:44 J'ai été témoin direct d'ailleurs, parce que j'étais dessous, d'un bombardement
31:47 qui a tapé une colonne AMI, un bombardement américain, c'était en Irak, tout simplement
31:55 parce qu'on l'a su après, le GPS du pilote était mal étalonné et s'est trompé de
31:59 route.
32:00 Donc ça arrive ce genre de choses.
32:02 Et puis après, tout simplement, vu les charges qui sont tirées par l'aviation israélienne,
32:09 ce sont des bombes de 500 à 1000 kilos, un seul coup au but peut détruire vraiment
32:13 tout un bâtiment.
32:14 Vous pouvez bien imaginer que quand vous êtes dans la rue adjacente, il faut passer
32:18 aussi.
32:19 Il faut avoir en tête que Gaza, là c'est des bombardements sur des zones extrêmement
32:23 denses en population.
32:24 Donc même si on cible de façon très précise une cible militaire, les bâtiments autour
32:28 n'en ressortent pas indemnes.
32:30 On est sur une population de plus de 2 millions d'habitants, sur une petite zone très urbaine
32:35 notamment autour de Gaza City, donc forcément il y a des morts civiles quand il y a des
32:40 frappes qui rasent des bâtiments, voire des bouts de quartiers entiers.
32:43 Ça veut dire que pour toutes ces raisons, Eric Bielgala, ce conflit est plus difficile
32:48 à documenter que les précédents ?
32:50 Il est difficile à documenter parce qu'on n'est pas sur place déjà, c'est le premier
32:54 truc.
32:55 Je le répète, à la guerre tout le monde ment.
32:57 La seule chose dans laquelle vous pouvez vraiment avoir confiance, c'est ce que vous voyez,
33:01 ce dont vous êtes le témoin.
33:02 Et des fois même…
33:03 Plus difficile que le conflit russo-ukrainien ? Alors une Ukraine, on est sur place, il
33:08 y a des correspondants qui peuvent évoluer.
33:11 Vincent Kocaz ?
33:12 C'est très différent dans la façon de couvrir ces deux conflits, puisque le conflit
33:16 Ukraine-Russie était plus "classique" dans le sens où ce sont encore des armées
33:22 qui s'opposent.
33:23 Là, encore une fois, dès les premières heures, ce sont des victimes civiles majoritairement
33:27 qui ont été décomptées.
33:29 Ce sont des massacres, ce sont des bombardements qui tuent des civils.
33:31 Donc c'est très différent, on a beaucoup moins d'éléments militaires sur lesquels
33:37 s'appuyer.
33:38 Et évidemment, le fait de n'avoir personne sur place, encore une fois, on ne peut pas
33:40 corroborer un certain nombre de choses.
33:42 Un mot de conclusion, Eric Bielgala ?
33:44 Alors, la guerre, c'est un flux d'informations, c'est un flux d'activités, c'est quelque
33:52 chose que quand on le couvre, ce n'est pas quelque chose qui est arrêté, c'est
33:56 toujours en évolution.
33:57 Donc c'est intéressant d'avoir des médias de flux, comme la radio par exemple, ou la
34:04 télévision d'information.
34:05 Nous, par ailleurs, on a la possibilité de ne pas se tromper sur une image, puisqu'on
34:09 ne les montre pas.
34:10 Donc au moins, on ne peut pas être sur l'image.
34:12 Pas sur une image, mais on peut se tromper sur certaines choses.
34:14 Mais justement, rien ne nous interdit de revenir dix minutes plus tard en disant "le papier
34:17 que j'ai fait là tout à l'heure, on va peut-être le bémoller un petit peu".
34:21 Ça a été particulièrement fait, ça, Vincent Cocasse, qu'on a accusé un certain nombre
34:24 de titres de presse, le New York Times par exemple, d'avoir mis au moment du bombardement,
34:30 de l'attaque de l'hôpital Al Arab.
34:34 Aujourd'hui, on considère que celle-ci est le fait d'une roquette lancée depuis Gaza.
34:40 Le New York Times avait mis la photo d'un autre hôpital.
34:43 D'une frappe aérienne, pour le coup.
34:45 Là, le New York Times, ils ont une politique de correction qui est très claire.
34:48 Ils sont revenus dessus.
34:49 Ils ont expliqué qu'il y avait eu un raté.
34:51 Ils ont dit désormais, on dira de façon plus précise ce qu'on sait et ce qu'on ne sait
34:53 pas.
34:54 Donc ils sont revenus dessus.
34:55 Merci Vincent Cocasse.
34:56 On vous retrouve donc sur CheckNews, le site de vérification d'informations de libération.
35:03 Merci Eric Bielyalab, où on vous retrouve, bien dans les journaux de la rédaction de
35:08 France Culture.

Recommandations