100% Sénat - Emeutes : les inspections générales auditionnées

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00:00 [Générique]
00:09 Quel est le profil de ceux qui ont commis des violences urbaines
00:13 après la mort du jeune Naël dans un contrôle routier ?
00:16 Un rapport des inspecteurs généraux de la justice et de l'administration
00:21 dresse leur portrait robot.
00:22 Ces inspecteurs ont été auditionnés par les sénateurs
00:25 de la mission d'information du Sénat sur les émeutes de juin 2023.
00:29 Une audition à suivre tout de suite dans 100% Sénat.
00:32 Il nous a semblé important de vous décrire d'abord
00:37 la méthodologie que nous avons suivie dans ces travaux
00:42 car elle vous donnera toute la mesure de cette photographie
00:47 à un instant T que révèle notre rapport.
00:50 Tout d'abord, la mission a sollicité bien entendu
00:53 les services statistiques des deux ministères
00:56 qu'il s'agisse du ministère de l'Intérieur
00:58 ou du ministère de la Justice
01:00 à partir des applicatifs dont chacun dispose.
01:05 Ces données statistiques nationales
01:09 ne sont pas des données interconnectées
01:13 de sorte qu'il faut savoir qu'il n'est pas possible statistiquement
01:18 de suivre une procédure à partir de son début
01:23 par les forces de sécurité intérieure
01:26 et puis jusqu'à son achèvement par la justice.
01:30 Donc nous avons dû évidemment procéder
01:35 et apprécier ces données de façon séparée.
01:38 Par ailleurs, il n'existe pas,
01:41 si on doit définir la nature des infractions
01:44 qui devaient rentrer dans notre périmètre d'examen
01:48 et de ces statistiques,
01:49 il n'existe pas, et vous le savez pertinemment,
01:52 d'infraction de violences urbaines.
01:54 Il s'agit d'un panel d'infractions
01:57 qui nous sommes inspirés des faits antérieurs
02:02 de violences urbaines pour définir le panel
02:04 sur lequel nous voulions nous pencher
02:06 avec une liste quand même de près de 500 types différents
02:12 d'infractions, d'un code dit natif,
02:15 que nous avons regroupé en 10 grandes catégories d'infractions
02:19 en faisant des agrégats d'infractions
02:22 pour que notre rapport soit plus lisible.
02:25 Mais vous comprenez bien que cette méthodologie
02:28 impose peut-être moins de finesse
02:32 que nous l'aurions voulu
02:36 et qu'elle implique également
02:38 de ne pas pouvoir faire toujours la part des choses
02:42 entre par exemple un vol aggravé,
02:45 puisqu'il est aggravé par différentes circonstances,
02:48 mais on ne sait pas précisément avec quelle finesse.
02:53 Nous avons ensuite procédé et complété
02:57 ces exploitations de données statistiques
03:00 par l'exploitation de 395 dossiers de majeurs
03:07 définitivement condamnés au 31 juillet 2023.
03:11 C'est-à-dire que nous avons fait le choix
03:13 d'examiner inconcrètement dans 32 tribunaux judiciaires hexagonaux
03:19 les dossiers de condamnés définitifs,
03:23 donc sur cet échantillon.
03:25 Pourquoi des condamnations définitives au 31 juillet ?
03:29 Il s'agissait donc, pour nous, nous avons débuté
03:32 nos travaux fin juillet, début août,
03:35 il s'agissait donc d'avoir véritablement
03:38 des faits non contestables
03:40 et comme je dis, des personnes définitivement jugées.
03:46 Cette étude a été faite avec l'examen des dossiers
03:51 sur la base d'une grille d'analyse
03:53 portant le standardisé, systématisé, pardon,
03:58 qui va nous permettre ensuite d'analyser justement
04:02 les profils notamment et les motivations
04:04 que nous vous exposerons.
04:06 Et nous avons circonscrit bien sûr
04:09 ces faits aux faits commis entre le 27 juin
04:14 et le 7 juillet 2023, qui était la période visée
04:17 par notre lettre de mission.
04:21 Donc, analyse statistique avec les limites
04:27 que je vous ai indiquées,
04:28 analyse inconcrète d'examens véritablement
04:34 et d'un échantillonnage sur 32 tribunaux judiciaires hexagonaux.
04:39 Et 83 entretiens d'acteurs judiciaires et associatifs
04:45 pour compléter ce qui était une analyse vraiment statistique
04:50 et des dossiers, mais par des appréciations
04:53 de ceux qui ont été directement confrontés à ces événements.
04:57 Nous vous présentons donc une photo à un instant T,
05:01 celui de la rédaction de notre travail,
05:04 puisque vous le comprenez nécessairement,
05:07 nous l'avons limitée dans le temps,
05:08 et puis, vous le savez, le travail des forces de sécurité intérieure,
05:12 le travail des tribunaux judiciaires,
05:14 s'est bien évidemment poursuivi,
05:17 que ce soit pendant... Il était en oeuvre pendant nos travaux,
05:20 et il s'est poursuivi au-delà.
05:22 Des interpellations ont encore lieu
05:26 et ont eu lieu ces derniers jours.
05:29 J'ajoute évidemment aussi que les dossiers
05:31 qui étaient en cours, par exemple à l'instruction,
05:34 les informations judiciaires qui étaient ouvertes,
05:37 ne nous étaient pas accessibles,
05:38 et donc ce sont des dossiers qui seront envisagés,
05:42 dont l'analyse pourra être faite ultérieurement.
05:45 Ces précisions apportées sur notre méthodologie,
05:51 j'en viens à vous présenter tout d'abord,
05:55 en quoi ces violences urbaines nous sont apparues atypiques,
06:00 atypiques par leur étendue géographique et leur densité.
06:05 Un nombre en effet considérable d'infractions
06:10 a été constaté, concentré dans le temps,
06:14 mais plus étendu géographiquement que jamais.
06:19 Du 27 juin au 7 juillet, donc cette période d'examen,
06:22 58 297 infractions ont été constatées,
06:27 réparties sur 66 départements, 516 communes,
06:33 dont 23 en zone gendarmerie.
06:37 Nous avons, sans pouvoir faire un comparatif complet,
06:43 mais nous avons quand même constaté que cela contrastait
06:47 significativement avec l'épisode de violences urbaines
06:51 qui pouvait être le plus rapprochable de nos événements,
06:54 c'est-à-dire celui de 2005, puisqu'en 2005,
06:58 25 départements avaient été touchés,
07:01 un peu plus de 200 communes concernées.
07:04 Cet épisode de violences urbaines de 2005 avait d'ailleurs
07:08 concerné essentiellement d'abord des agglomérations urbaines,
07:13 et puis en leur sein des quartiers dits sensibles,
07:17 rattachables, notamment au label "quartier prioritaire
07:22 de la politique de la ville" ou "quartier de reconquête républicaine".
07:26 Celui de 2023 ne nous a pas paru aussi significativement marqué
07:34 par ses caractéristiques sociodémographiques ou économiques,
07:38 étant précisé que nous n'avons pas pu,
07:41 dans le délai qui nous était importi,
07:44 faire d'analyses spécifiques liées aux quartiers,
07:47 justement, reconquête républicaine ou aux quartiers politiques
07:51 de la ville, puisqu'il s'agit d'une analyse
07:53 qui est faite par les services statistiques
07:57 du ministère de l'Intérieur, une fois par an,
08:00 avec des géolocalisations des lieux où ça se produit,
08:03 en lien avec l'INSEE.
08:05 Donc cette étude sera certainement faite,
08:07 mais nous ne la vions pas à notre disposition
08:10 comme élément de comparaison.
08:12 Nous n'avons pas non plus pu analyser exactement
08:17 les causes de l'extension géographique qu'on a aperçue
08:21 par rapport à 2005.
08:23 Il faudra certainement la compléter avec l'étude
08:26 sur l'évolution des déplacements des populations.
08:29 En revanche, dans les dossiers examinés par la mission,
08:33 la moitié des personnes condamnées a été condamnée
08:38 pour des faits commis dans sa commune de résidence.
08:42 L'autre moitié s'est déplacée pour aller les perpétrer ailleurs
08:47 à l'aide soit d'un véhicule personnel,
08:49 soit de transport en commun, ou à pied,
08:52 ce qui limite quand même le déplacement.
08:57 Les infractions qui ont été commises sur cette période
09:05 sont essentiellement des atteintes aux biens.
09:09 En tout cas, elles ont été majoritaires,
09:12 75 % des infractions.
09:15 Néanmoins, ces émeutes se singularisent par un nombre
09:19 significatif d'atteintes aux personnes dépositaires
09:23 de l'autorité publique.
09:24 Nous sommes à pratiquement, à l'époque où nous avons examiné,
09:27 faits à 2 000 faits, et de violences à l'encontre des élus
09:31 et personnes cherchées de missions de service public.
09:36 S'agissant de la cinétique de ces violences,
09:40 de leur déroulement sur l'ensemble du territoire hexagonal,
09:44 que nous avons seul examiné dans le temps qui nous était imparti,
09:48 cette cinétique est relativement homogène.
09:51 Elle s'inscrit et elle se décrit de la façon suivante.
09:53 Dès la soirée du 27 juin, on va apercevoir
09:57 des tirs d'engins pyrotechniques et de projectiles incendiaires,
10:00 notamment à l'encontre des forces de l'ordre,
10:03 des forces de sécurité, et avec une surreprésentation
10:07 de ces violences dans la première couronne de l'Ouest francilien,
10:13 avec évidemment Nanterre comme épicentre.
10:16 La première nuit, voire les deux premières nuits,
10:19 sont des nuits relativement complexes à gérer
10:26 pour les forces de sécurité intérieure,
10:28 dont l'objectif prioritaire a été la sauvegarde des biens
10:33 et des personnes. Objectif prioritaire,
10:35 et qui a pris le pas nécessairement sur la judiciarisation des faits.
10:40 Nous développerons ensuite les conséquences
10:43 sur l'examen que nous avons fait des dossiers.
10:46 Le pic des infractions, on a pu nous dire, par exemple,
10:50 que certains commissariats ont été comparés à Fort-Alamo
10:55 tant ils étaient pris et encerclés.
11:00 On nous a parlé de nuit d'enfer,
11:02 enfin les forces de sécurité intérieure qui sont intervenues
11:06 sur ces deux premières nuits.
11:07 Le pic des infractions a été constaté entre le 29 juin et le 2 juillet,
11:13 avec notamment des vols après effraction de magasins
11:17 qui se situent là, après ces deux nuits,
11:21 à partir du 29 juin, 29-30 juin, et ensuite une forte décrue.
11:27 Cette forte décrue très significative,
11:30 ces causes telles que nous avons pu les mettre en évidence
11:34 sont apparues diverses.
11:36 Il est évident que la stratégie de rétablissement de l'ordre
11:41 menée par les forces de sécurité intérieure
11:44 a été particulièrement efficciante.
11:49 La réponse judiciaire également apportée, rapide et cohérente,
11:54 et sur laquelle un certain nombre de chefs de juridiction
11:57 n'ont pas hésité à communiquer,
11:59 nous est apparue comme étant une des causes,
12:02 tout comme les actions qui ont pu être prises
12:05 par les autorités locales,
12:07 telles que l'arrêt des transports en commun en fin d'après-midi
12:11 ou en début de soirée.
12:13 D'autres facteurs ont été évoqués,
12:15 mais de façon plus contrastée,
12:20 le manque de munitions après quelques jours,
12:24 la lassitude, la perspective de départ en vacances
12:28 pour certaines familles,
12:30 le rôle des familles également
12:32 ou le rôle de réseaux délinquants plus structurés.
12:36 Mais les appréciations ont été plus contrastées.
12:41 Voilà décrit rapidement
12:44 à la fois l'étendue géographique tout à fait atypique
12:48 de ces violences urbaines, leur densité,
12:51 et je passe la parole à mon collègue
12:53 pour vous présenter la réponse judiciaire,
12:56 réponse judiciaire qui a conduit
12:58 à cette condamnation à bref délai.
13:01 Merci.
13:04 Effectivement, il nous a été demandé
13:07 de faire à la date du 31 juillet
13:11 un bilan des condamnations
13:15 qui étaient intervenues à ce moment-là.
13:17 Comme ma collègue vous l'a indiqué,
13:21 la situation...
13:24 Nous étions à moins d'un mois après les émeutes.
13:28 La situation a pu évoluer depuis
13:30 et c'était vraiment les premières données
13:33 et les premières réponses pénales
13:35 qui avaient été données par les juridictions.
13:37 Une autre précision est que la lettre de mission
13:40 nous avait demandé et avait délimité
13:44 le périmètre de notre mission envers les majeurs.
13:49 Il nous était demandé donc d'analyser
13:52 la situation des majeurs condamnés,
13:55 d'analyser leur profil.
13:56 Nous y reviendrons tout à l'heure.
13:58 Il nous est quand même apparu important
14:01 de faire le bilan des mineurs et des majeurs
14:04 qui avaient été identifiés au 31 juillet
14:07 et dont l'éparqué avait été saisi.
14:10 Il apparaît qu'à cette date-là,
14:13 un peu plus de 4 000 auteurs,
14:15 mineurs et majeurs confondus,
14:17 liés aux violences urbaines,
14:19 mis en cause pour l'une des 500 infractions
14:22 que ma collègue a rappelées,
14:25 avaient été identifiés par les forces de l'ordre
14:29 et l'éparqué avait été saisi de ces procédures.
14:33 Ce qui concernait un peu plus de 5 000 faits,
14:36 tous confondus.
14:38 À cette date-là, 84 %,
14:42 ce qui est un chiffre extraordinairement élevé,
14:44 avaient été poursuivis devant une juridiction de jugement
14:47 et un tiers, un peu plus d'un tiers,
14:51 avaient été condamnés à la date du 31 juillet.
14:55 Alors, ces chiffres sont néanmoins à prendre avec précaution
14:59 puisque nous ne sommes partis que des procédures
15:02 qui avaient été transmises au parquet
15:05 et enregistrées par l'éparqué.
15:08 Je dirais que les procédures
15:10 avec des dates de poursuites plus lointaines,
15:12 il nous avait été indiqué notamment
15:14 que dans certains ressorts,
15:16 des émeutiers étaient convoqués fin 2023,
15:19 voire début premier trimestre 2024.
15:21 Et les procédures, par exemple,
15:23 pour lesquelles aucun auteur n'a pu être identifié,
15:26 eh bien, viendront progressivement,
15:29 seront progressivement transmises au parquet
15:32 et viendront bien évidemment
15:36 modifier les pourcentages
15:38 que nous avons calculés et notés dans notre rapport.
15:45 Il nous a été demandé de nous intéresser
15:49 essentiellement, enfin exclusivement aux majeurs
15:51 et donc nous avons analysé,
15:54 à partir des données que le service statistique
15:56 du ministère de la Justice nous a communiquées,
15:58 la nature des peines qui avaient été prononcées
16:01 pour ceux qui avaient été jugés à cette date-là.
16:07 Je dirais que, sans surprise,
16:09 60% d'entre eux avaient été condamnés
16:12 à une peine d'emprisonnement ferme.
16:14 Par définition, ils ont été jugés
16:17 selon des procédures dites rapides,
16:19 soit de comparution immédiate,
16:21 soit de comparution sur reconnaissance préalable
16:25 de culpabilité sur des fermants.
16:28 Et parmi ces peines d'emprisonnement ferme
16:31 qui ont été prononcées,
16:33 un peu plus de la moitié ont été immédiatement incarcérées.
16:36 Pour les autres, 20% ont bénéficié
16:39 d'un aménagement de peine à l'audience
16:41 et pour les autres, ces peines d'emprisonnement ferme,
16:46 donc ils ont été condamnés devant un juge
16:49 de l'application des peines en vue d'examiner
16:51 les modalités de cet aménagement.
16:53 Quant au moyen de ces peines d'emprisonnement,
16:56 qui étaient de 9 mois,
16:58 ce qui est inférieur à la moyenne, je dirais,
17:01 annuelle constatée qui est de 12 mois,
17:04 sachant néanmoins que les juridictions correctionnelles
17:07 sont appelées à juger aussi des faits
17:10 punis de peines supérieures,
17:13 comme des trafics de stupéfiants
17:15 ou des infractions en bande organisée,
17:17 et commises aussi sur des périodes beaucoup plus longues.
17:20 Donc je dirais que cette indication est à relativiser.
17:24 Concernant les peines d'emprisonnement ferme
17:26 et les incarcérations immédiates,
17:28 là encore, la proportion est plus élevée que la moyenne,
17:31 mais je dirais que le champ de comparaison,
17:35 le champ des infractions que nous avons pris en compte
17:40 est très atypique puisqu'il ne tient absolument pas compte
17:43 des autres infractions jugées
17:46 selon des modes de poursuites plus classiques
17:48 ou plus longs par les tribunaux.
17:52 Nous noterons également qu'au-delà des peines d'emprisonnement ferme,
17:58 pour les 40 % d'auteurs condamnés à une autre nature de peine,
18:02 20 % d'auteurs, en plus des 60 % qui ont été condamnés
18:12 à une peine d'emprisonnement ferme,
18:14 ont été condamnés à une peine qui entraîne un suivi
18:17 par l'administration pénitentiaire,
18:19 que ce soit un sursis probatoire, un travail d'intérêt général,
18:22 une détention à domicile sous surveillance électronique
18:25 ou une peine de stage, sachant que dans ces cas-là,
18:29 c'était des stages de citoyenneté qui majoritairement ont été prononcés.
18:35 Je redonne la parole à ma collègue pour la suite
18:39 et notamment le profil de ces condamnés.
18:42 Alors, le profil de ces condamnés, vous avez compris,
18:49 limité aux auteurs condamnés de façon définitive au 31 juillet.
18:54 Dans ce que nous avons pu observer, dans ce panel représentatif,
18:59 mais également sur les données statistiques
19:01 et avec les limites que nous vous avons indiquées sur la méthodologie.
19:05 J'ajoute que pour définir ce profil que je vais vous présenter,
19:10 on va vous parler notamment, par exemple, de leur diplôme,
19:16 de leur situation familiale ou de leur situation d'emploi.
19:21 Il s'agit d'éléments qui figurent dans les dossiers,
19:24 mais qui résultent de données déclaratives de la part des intéressés
19:29 qui ne reposent pas sur une vérification faite par les forces de sécurité intérieure
19:34 au moment des interpellations, au moment des garde à vue.
19:37 On peut vérifier la nationalité, on ne vérifie pas
19:40 si monsieur ou madame qui déclarent avoir le bac a réellement ou pas le bac.
19:47 Donc le profil que nous vous présentons est un profil avec ses limites
19:52 et susceptible d'évoluer puisqu'on vous a dit qu'on n'a pas pu appréhender
19:59 tout ce qui est encore en cours, à la fois à l'instruction,
20:02 à la fois dans les enquêtes sur notamment les prélèvements d'ADN
20:05 qui ont pu être réalisés, les exploitations de téléphones.
20:09 Tout ça va compléter notre démarche.
20:13 Ce profil, sans pouvoir être extrêmement détaillé et ne faire qu'un seul profil,
20:22 mais nous est apparu néanmoins comme, sur le plan sociodémographique,
20:27 relativement homogène, et je vais me risquer à vous donner ce profil tel qu'il est,
20:34 tel qu'il nous apparaît, à savoir un homme de nationalité française,
20:40 je préciserai les pourcentages, moyenne d'âge 23 ans, célibataire, sans enfants,
20:50 hébergé souvent par ses parents, ayant un diplôme de niveau secondaire,
20:57 maximum baccalauréat, plutôt en activité, et voilà pour le profil sociodémographique.
21:08 Des petits points de précision, j'ai dit de nationalité, donc des hommes,
21:12 91% d'hommes de nationalité française, 71% sont de nationalité française,
21:19 75% sont nés en France.
21:22 Les statistiques que nous avons ne répertorient que la nationalité et le lieu de naissance.
21:30 Donc nous ne pouvons donner que des éléments à la fois sur la nationalité, sur le lieu de naissance.
21:36 87% de célibataires, pas d'enfants à charge, 61% ont un emploi, une activité professionnelle,
21:48 suivie d'une formation, donc en fait 39% se déclarent chômeurs ou sans activité.
21:53 Voilà pour le profil sociodémographique.
21:57 Nous avons ensuite révélé un profil judiciaire que nous avons qualifié de plus contrasté,
22:04 parce que nous avons bien conscience de la façon dont les choses peuvent être envisagées,
22:11 puisque 57% de ces auteurs condamnés définitifs au 31 juillet, 57% sont sans antécédent judiciaire,
22:22 évidemment 43% en désantécédent judiciaire.
22:26 Donc voilà pourquoi nous avons choisi ce qualificatif de contrasté,
22:33 puisque la majorité n'est pas si significative que ça.
22:38 Dans ceux qui sont déjà condamnés, bien sûr les condamnations, au vu de leur jeune âge,
22:45 puisque je vous ai dit 23 ans de moyenne, datent ou remontent à un an ou à 18 mois auparavant.
22:52 Et dans les personnes condamnées, 10% des condamnations étaient prononcées avec la mention de la récidive légale.
23:02 Donc ils étaient en état de récidive légale au sens juridique, ça ne veut pas dire de la réitération,
23:08 peut-être certains étaient en réitération, c'est-à-dire recommencer des faits,
23:11 mais la récidive légale c'est une notion juridique de même infraction ou d'infraction similaire,
23:19 donc 10% étaient en état de récidive légale.
23:23 Voilà pour la présentation des personnes majeures condamnées définitivement au 31 juillet.
23:30 Comme l'a dit mon collègue, nous n'avions pas directement dans notre lettre d'admission l'examen du profil des mineurs.
23:37 Néanmoins, nous devions appréhender les mineurs lorsqu'ils étaient en coaction avec des majeurs.
23:43 Les mineurs bénéficient, vous le savez, d'une procédure de jugement qui est différente de celle des majeurs
23:50 et qui s'inscrit dans une temporalité également différente.
23:55 De sorte que nous avons peu de mineurs définitivement condamnés au 31 juillet.
24:02 Donc le profil que je vais vous présenter des mineurs, qui représentait quand même 28% des auteurs au total,
24:09 se base sur des données statistiques nationales et puis sur quelques éléments qui ont pu être issus d'une enquête aussi
24:19 qui a été réalisée par la Protection judiciaire de la jeunesse, ce n'est pas nous qui l'avons réalisé,
24:25 mais sur des données déclaratives.
24:28 Et on retrouve quand même les grands traits de ce qu'on a vu pour des majeurs, à savoir 96% de garçons,
24:38 81% de nationalité française, 59% sont âgés entre 16 et 17 ans.
24:47 Peut-être la particularité, c'est que 36% des mineurs sont des franciliens,
24:53 c'est-à-dire vraiment une part significative qui ont agi dans la couronne francilienne
25:03 et plutôt concernés par, pour 23%, par des atteintes aux biens.
25:11 S'agissant des antécédents judiciaires, nous n'avions pas ces éléments dans les statistiques analysées
25:20 puisque, je vous l'ai dit, il n'y avait peu d'auteurs définitivement condamnés.
25:26 Il faut juste retenir qu'à peu près 70% sont sans antécédents judiciaires,
25:32 d'après les données déclaratives qui ont été faites au moment de leur déferment
25:37 devant les services de la Protection judiciaire de la jeunesse.
25:41 Voilà pour ce profil des majeurs, donc avec des éléments plus conséquents,
25:47 et des mineurs avec les quelques petits éléments que nous avions dans notre lettre de mission.
25:53 Alors je poursuis si vous voulez bien sur la question des motivations des auteurs des violences urbaines.
26:02 C'était un sujet qui nous était imparti par la lettre de mission,
26:08 et sur laquelle nous avons effectivement travaillé, mais je dirais dans des conditions
26:13 qui permettent de discerner les principales motivations,
26:18 mais en tenant compte du fait qu'on a travaillé sur les déclarations faites par les auteurs interpellés
26:26 et qu'on a retrouvées dans les différentes procédures que nous avons étudiées,
26:30 c'est-à-dire des déclarations faites dans une stratégie de défense,
26:34 avec parfois, malgré l'interpellation en flagrant délit, la négation de la participation au fait qu'il aurait été imputé.
26:42 Nous avons travaillé également à partir des entretiens, des nombreux entretiens que nous avons conduits
26:48 avec les magistrats, tant du parquet que du siège,
26:52 qui eux ont eu face à eux les personnes mises en cause et qui ont pu en tirer aussi des éléments de motivation.
27:00 Et puis nous avons bénéficié des premières analyses du renseignement territorial à la suite de cet épisode.
27:09 On peut conclure quelques axes majeurs.
27:13 D'abord, par rapport à l'événement déclencheur de ces violences urbaines, qui est le décès du jeune Nahel à Nantais,
27:20 on a moins de 8% des condamnés qui font référence à cet événement pour justifier de leur comportement dans le cadre des émeutes.
27:34 En second point, les contestations qui apparaissent à travers les attaques contre les forces de sécurité
27:46 ou les destructions de bâtiments publics ne sont pas revendiquées par les auteurs des faits.
27:54 C'est quelque chose qui paraît plutôt dans la pratique habituelle de certains d'entre eux.
28:07 Troisième point, la majorité, la totalité ou quasi-totalité des condamnés n'exprime aucune revendication d'ordre idéologique ou politique
28:21 qui soit susceptible de motiver une forme de colère et une expression de la violence.
28:31 On constate toutefois que ces actions, et quand on voit les déclarations des mises en cause,
28:41 ces actions dénotent un rapport très décomplexé des auteurs des faits par rapport à l'expression de la violence.
28:49 Ça paraît sans limite, sans barrière en termes de valeur, y compris lorsqu'il s'agit d'agressions physiques
29:02 à l'encontre des personnes dépositaires de l'autorité publique.
29:06 Sur la question des pillages, puisqu'on a eu énormément de magasins pillés,
29:14 c'est quelque chose qui est un peu nouveau dans l'histoire des violences urbaines en France,
29:19 on est très clairement sur de l'opportunisme.
29:24 Il faut quand même souligner que parmi les personnes interpellées pour lesquelles nous avons étudié les dossiers,
29:30 on n'a pas forcément les casseurs.
29:33 Les casseurs étaient, d'après ce qu'on a pu apprendre des magistrats interviewés, plutôt bien organisés.
29:41 Mais on a des gens qui suivaient ou qui ont été rameutés sur telle ou telle grande surface en disant
29:47 "on peut y aller et on peut se servir".
29:49 Donc c'est vraiment de l'opportunisme.
29:52 Et pour certains, ils revendiquaient un besoin d'adrénaline, voire ils se disaient poussés par une ambiance festive.
30:00 Enfin, il faut quand même noter ce qui a été dit par ailleurs, notamment par la presse ou par certains analystes.
30:08 La majorité des personnes condamnées étaient quand même très reliées aux réseaux sociaux.
30:13 Alors soit dans des boucles qui les ont incitées à rejoindre des lieux d'affrontement ou des lieux de pillage,
30:21 soit tout simplement sur des réseaux sociaux sur lesquels il y avait des postes nombreux
30:27 qui mettaient en valeur, entre guillemets, l'expression de la violence dans tel ou tel quartier.
30:36 Ce qui nous remonte également, et ce qui apparaît, c'est qu'on a très clairement parmi ces jeunes majeurs
30:45 qui ont été interpellés et condamnés un déficit d'ancrage citoyen.
30:52 Et certains travailleurs sociaux que l'on a pu interviewer ou pour lesquels on a eu des remontées intéressantes
31:02 nous disent que beaucoup d'entre eux étaient inconnus de leurs dispositifs d'accompagnement social.
31:07 Donc on peut supposer, je dis bien on peut supposer, que depuis 2005, et peut-être à cause de l'épisode Covid,
31:15 on a un certain nombre de jeunes gens qui sont passés sous les radars de la prise en compte et de l'accompagnement,
31:22 alors qu'en temps, je dirais, plus classique, ils auraient pu être pris en compte.
31:28 Donc on est sur des motivations qui, je pense, ne vous étonneront pas, qui sont diverses,
31:36 mais qui sont très minoritairement liées à l'événement déclencheur de cet épisode.
31:42 Je reprends la parole, peut-être pour un petit propos conclusif avant de répondre, bien évidemment,
31:51 à toutes vos questions, car nous avons essayé d'être ramassés dans notre présentation,
32:00 et donc on n'a pas tout développé de nos travaux.
32:05 Pour préciser qu'effectivement les motivations qui vous ont été présentées peuvent varier aussi sur les territoires,
32:14 parce qu'on avait centré quand même notamment autour de la revendication, autour du décès de Nahel,
32:20 était beaucoup plus forte à Nanterre ou dans, comme je l'ai dit, dans la couronne de l'Ouest francilien,
32:29 qu'à Saint-Brieuc ou à Marseille.
32:33 Ces propos, l'ensemble de nos travaux, devraient être complétés par une étude, une recherche,
32:42 puisque le troisième item de notre lettre de mission était de nous attacher,
32:48 nous ne pensions pas le développer précisément, mais de nous attacher aux conditions juridiques et opérationnelles
32:57 dans lesquelles les chercheurs pourraient avoir accès aux données pénales liées à ces violences urbaines.
33:04 Donc nous avons dans une troisième partie de notre rapport développé l'ensemble de ces éléments
33:12 qui sont à la fois juridiques, techniques et opérationnels.
33:16 On pourra bien sûr l'indiquer.
33:19 Et donc cette étude devrait pouvoir peut-être compléter cette photographie que nous, nous vous présentons à cet instant T.
33:27 Et cette étude, évidemment, sera plus à distance et plus à temps des faits directement observés.
33:36 Merci Madame. Merci Messieurs.
33:43 Alors, certains ont demandé la parole, je pense en particulier à François Bonhomme, qui a souhaité s'exprimer.
33:50 Merci Monsieur le Président. Merci Mesdames et Messieurs de ces propos qui viennent nous éclairer
33:55 sur les conditions dans lesquelles cette émeute assez hors norme s'est déroulée, s'est déclenchée.
34:01 Je pense qu'on apprend beaucoup de choses à la fois sur les profils et le mode opératoire.
34:06 Moi, je voulais revenir sur un élément particulier.
34:09 Vous avez noté, entre guillemets, l'ambiance festive.
34:15 Et je crois qu'il y a une des singularités, ça a été quand même, j'allais dire, l'alliance des réseaux sociaux et des mortiers d'artifices.
34:24 Et je voulais savoir, dans vos analyses, si vous aviez des préconisations, des analyses particulières sur l'usage totalement détourné
34:33 qui a été fait à ce moment-là des mortiers d'artifices et notamment leur rôle dans le déclenchement d'incendies,
34:38 puisque une des formes particulières de ces émeutes, ça a été la multiplicité des incendies, que ce soit de voitures, mais plus encore de bâtiments.
34:46 Et vous avez même noté que vous aviez fait le choix, le choix du ministère public, de sauvegarder les biens et les personnes, évidemment,
34:58 qui a pris le pas sur la judiciarisation.
35:01 Donc on voit bien qu'il y a eu un effet retard, pour les raisons qu'on peut comprendre aisément, sur la judiciarisation,
35:07 parce qu'il y avait cette multiplication d'incendies qui a non seulement occupé les forces de l'ordre et les pompiers,
35:16 qui ont été en plus l'objet d'un ciblage particulier en tant qu'autorité publique.
35:21 Et donc les mortiers d'incendies, sans doute, un de ce monde opératoire qui a été vraiment largement développé et qui s'est propagé,
35:31 puisque en quelques clics et en quelques euros, on pouvait, malgré la réglementation, se procurer ce type d'armes par destination.
35:39 Donc je voulais savoir si vous aviez des préconisations particulières, ou en termes de réglementation ou autre, sur l'usage qui a été fait de ces mortiers d'artifice.
35:49 Merci, monsieur, madame. Une autre demande, je propose qu'on la prenne, madame Dumont.
35:53 Merci, monsieur le Président. Merci, madame, messieurs, pour la qualité de votre rapport et des éléments que vous avez bien voulu nous partager, nous faire partager.
36:04 Moi, je souhaiterais avoir quelques éléments de précision sur les stages de citoyenneté. Monsieur, vous avez parlé de stages de citoyenneté auxquels devaient se soumettre les personnes.
36:17 Pouvons... Alors, avez-vous un retour sur l'effectivité de ces stages de citoyenneté ? Ont-ils été effectués ? De quelle nature étaient-ils ?
36:29 Et est-il prévu un suivi des personnes qui ont effectué ces stages de citoyenneté ? Est-ce que ça a apporté ses fruits ?
36:39 Est-ce que ce sont des gens qui, après, se remettent dans le bon chemin ? Voilà. Merci de ces précisions.
36:49 Merci. Pour l'instant, je n'ai pas d'autres... Ah, allons-y.
36:54 Oui, merci. J'ai une demande de précision. Vous avez parlé de la désescalade, d'une part, quand il y a eu la désescalade sur le rôle des familles et des parents,
37:10 mais vous avez aussi parlé des réseaux de délinquance plus structurés. Je voudrais avoir des précisions sur ce que vous entendez par là
37:19 et quel est le rôle possiblement, effectivement, de ces réseaux criminels qui existent, et sur...
37:25 Ou dans l'incitation, au départ, de ces émeutes, ou pas, ou à l'inverse, dans le fait qu'ils aient joué un rôle pour le retour de l'ordre,
37:35 et dans ce cas, quelles sont leurs motivations sur ces interventions-là. Et puis, si vous pouvez nous donner plus d'éléments sur les différences
37:45 que vous avez un petit peu mentionnées sur les zones très urbaines et notamment franciliennes, parce qu'il y a des particularités sur l'île-de-France,
37:52 par rapport à d'autres zones, et notamment par rapport aux émeutes de 2005, le fait qu'il y ait beaucoup plus de petites communes et de moyennes communes
37:59 qui ont été touchées. Et est-ce que vous avez des éléments par rapport aux motivations ou aux profils sociaux qui peuvent expliquer ça ?
38:08 Merci, madame Narassi. Monsieur Bourji et madame Arriba.
38:13 Merci beaucoup, monsieur le Président. Madame, messieurs, je voulais vous remercier pour la qualité et les précisions chirurgicales que vous venez de nous présenter.
38:22 Effectivement, ils viennent confirmer ce que j'avais observé dans mon département à travers la lecture quotidienne de la PQR,
38:30 qui rendait compte des comparitions immédiates qui avaient eu lieu, et on s'est rendu compte que finalement, il y a beaucoup de délinquances par opportunisme.
38:38 Et les chiffres que vous avez communiqués viennent l'objectiver, le confirmer, puisqu'effectivement, je crois que c'est 6%, seulement 8% des mises en cause
38:48 qui font référence à la mort du jeune Nahel. La deuxième chose que j'avais observée, c'était le ciblage d'un certain type de commerce
38:57 qui revenait de manière récurrente, à savoir de la captation de produits de marque destinés à des publics, on va dire, générationnels.
39:06 Ce que je voulais aussi avoir comme précision, vous l'avez indiqué, à savoir la mobilisation via les réseaux sociaux et via les boucles,
39:16 je voulais avoir, si c'est possible, des précisions sur la nature des boucles, parce que j'ai vu mention de ces boucles dans les articles de presse.
39:24 S'agit-il de boucles d'élèves qui fréquentent les mêmes lycées ou les mêmes universités ? S'agit-il de boucles de jeunes qui habitent la même commune
39:33 ou le même quartier ? Ou s'agit-il de boucles à caractère communautaire ? J'aimerais bien avoir des précisions sur la nature des boucles,
39:39 parce qu'autant les réseaux sociaux, c'est public, on sait très bien comment ça fonctionne, mais la nature et les caractéristiques des boucles
39:49 m'interpellent et m'intéressent beaucoup plus que tout le reste.
39:53 Merci, M. Bourget. Mme Laurence Arribet.
39:57 Merci, M. le Président. Je voudrais vous remercier pour l'intérêt de ce que vous nous avez dit. J'aurais deux questions.
40:05 Une question en prolongation de ce qui vient d'être posé sur les variations territoriales, puisque vous les avez évoquées,
40:12 mais ça serait intéressant d'aller un peu plus loin. Est-ce que vous avez des éléments là-dessus ?
40:17 Et la deuxième question, c'est est-ce que l'étude que vous avez faite et vos travaux permettent d'aller plus loin dans le croisement
40:28 entre les motivations et la nature des peines qui ont été infligées ? Et est-ce qu'on peut faire une gradation entre banalisation de la violence
40:43 et de l'agression, et puis des choses qui sont peut-être moins graves, comme la notion d'opportunisme que vous avez soulignée ?
40:54 Est-ce qu'il y a possibilité dans vos... Parce que vous n'avez pas pu tout détailler, mais est-ce que vous avez les outils
41:00 qui permettraient éventuellement à des chercheurs, après, d'aller un peu plus loin dans le travail ?
41:06 Merci, madame. Alors, pour les réponses, dans l'ordre que vous souhaiterez.
41:12 Je peux commencer un peu sur les mortiers, mais après, tu continueras. Le stage de citoyenneté, peut-être pas très...
41:20 Alors, pour reprendre peut-être dans l'ordre, et effectivement, d'abord dire qu'il ne nous était pas demandé de procéder à des recommandations
41:31 sur notamment tel ou tel point que nous observerions. Néanmoins, s'agissant des mortiers d'artifice ou autres matériels pyrotechniques,
41:44 comme je l'ai indiqué, il a été noté que, dès le premier soir, ces outils étaient utilisés, ce qui laisse supposer qu'ils sont, à ce moment-là, à disposition.
41:58 Nos auditions et l'examen des dossiers que nous avons réalisés sur ce point laissent apparaître à la fois des réseaux d'approvisionnement,
42:13 soit via Internet et des achats, même avec des prix cassés, vous l'avez indiqué, des promotions,
42:23 ou bien des déplacements à l'étranger, en Belgique ou en Pologne, pour s'approvisionner. Ce qui, peut-être mon collègue pourra compléter,
42:35 a pu laisser supposer des liens avec des réseaux de délinquance plus structurés qu'initialement évoqués. Ces mortiers sont diffusés dans ces réseaux sociaux,
42:55 effectivement, enfin, où ils sont en vente. Les motivations, à ce moment-là, pour les utiliser ne sont pas véritablement développées, en tout cas, sur les réseaux.
43:12 Je reviendrai sur les réseaux sociaux, mais peut-être pour les mortiers, Pascal.
43:19 Sur les mortiers, on a une réglementation qui en interdit le commerce, bien évidemment. La difficulté, c'est qu'on passe au-dessus de la réglementation,
43:33 puisqu'on va les commander à l'étranger sur Internet et on les reçoit par colis postals. Donc on est sur un schéma qui s'apparente à un schéma de trafic de matières dangereuses.
43:45 La difficulté pour les services enquêteurs sera de travailler sur la question des mortiers à des périodes spécifiques de l'année, avant le 14 juillet, avant le 31 décembre.
43:56 Ceux d'entre vous qui sont originaires de l'Est, de la France, peuvent connaître le problème. Donc ce sera un enjeu. Voilà. Ce sera un enjeu, la réglementation étant ce qu'elle est.
44:06 Il va falloir travailler là-dessus. Les services, d'après ce qu'on dit, travaillent là-dessus. Mais c'est beaucoup plus complexe que d'interdire simplement la commercialisation.
44:19 Après, sur l'usage des mortiers, on est quand même sur une escalade, notamment dans l'affrontement avec les forces de sécurité intérieure.
44:29 Et c'est quelque chose qui était un peu nouveau en termes de densité, pas en termes d'effectivité ou de réalisation.
44:38 Mais sur cet épisode, la densité des attaques de policiers ou gendarmes aux mortiers a été quand même très forte et plus forte que jamais.
44:51 Et par rapport effectivement à ce qu'on pouvait qualifier de délinquants peut-être plus chevronnés, de réseaux déjà constitués, sur lesquels qui avaient été à l'œuvre dans la fourniture de ces engins pyrotechniques,
45:06 qui, même si des prix étaient cassés, sont relativement onéreux, on a eu aussi un certain nombre de témoignages d'approvisionnement, de mise en main de ces engins pyrotechniques,
45:20 notamment entre les mains de mineurs qui arrivaient sur les lieux et auxquels les majeurs distribuaient ces engins pyrotechniques,
45:29 sachant que dans un certain nombre de procédures, d'ailleurs, ils ont été utilisés... Enfin, véritablement, le mineur ne savait pas s'en servir. C'était évident.
45:43 Voilà. Donc c'est vrai que ces profils plus chevronnés seront certainement à évaluer.
45:55 Ça rejoint un peu la question des réseaux sociaux. Alors là encore, on vous l'a dit, nous avons consulté les dossiers, nous avons vu les dossiers, nous avons les auditions des personnes.
46:07 Ce sont des déclarations. Donc nous ne faisons qu'avec le matériau qui nous a été soumis, qui peut être, comme on l'a dit, aussi parfois orienté par des motifs de défense
46:21 au moment où les personnes sont présentées. Sur ces boucles, on a observé les deux, c'est-à-dire des boucles vraiment de proximité, des copains qui sont du même quartier,
46:36 du même endroit, qui s'ennuient, qui savent pas quoi faire et qui vont... Alors puisque j'ai dit que la moitié des personnes avait comme il est fait dans leur commune,
46:44 la moitié se sont déplacées. Mais par exemple, si je vous livre des verbatims, voilà, lundi, comme je vivais dans une ville très calme, il ne se passait rien à ma vie,
46:53 j'ai donc voulu aller dans une ville où il se passait des trucs, prendre des vidéos et regarder. Donc en fait, ils sont 8 ou 10 là, dans cette...
47:01 C'est une toute petite commune rurale, alors on reviendra sur... Et ils s'ennuient et ils vont aller se déplacer dans la ville où, semble-t-il, il y a plus d'activités.
47:13 Donc des réseaux, des petits groupes là, c'est plutôt WhatsApp du coup qui est utilisé. Et puis ensuite, des réseaux sociaux utilisés parce qu'ils font la promotion des violences,
47:29 de ce qui se passe, parce qu'ils sont vécus également comme facteurs de valorisation par ces jeunes qui voient le moyen de se retrouver extrêmement valorisés.
47:44 Si je prends encore des verbatims, voilà, j'étais matrixée, j'étais dans une matrix Wahoui, dans un engrenage, j'avais des milliers de commentaires.
47:55 Donc c'est quelque chose qui valorise. Ou j'ai des vidéos de gens qui tirent des feux d'artifice. J'ai toujours voulu être reporter.
48:04 Voilà. Donc on a les deux. Ensuite, pour répondre plus finement à votre question, je crois qu'on n'a pas pu avoir ce détail, de savoir si on était dans quelque chose de plus...
48:21 Vous avez, je crois, utilisé le terme de communautaire. Ça ne nous a pas été indiqué. En tout cas, un engrenage de valorisation et de lutte,
48:34 enfin de surenchère entre groupes, entre villes, entre communes. Voilà. Il fallait montrer ce qu'on avait pu faire ou ce qu'on savait faire. Voilà.
48:46 Quand on parle des réseaux sociaux, on nous a cité aussi les chaînes d'information en continu. Et puisque là aussi, certains disent...
48:58 Bon, je vous lis pas le... C'est extrêmement vulgaire. Donc je vous le lis pas. Mais voilà, on nous a dit autant passer à faire quelque chose,
49:06 autant passer sur... avec le nom d'une chaîne en continu pour dire combien c'était valable.
49:13 (...)
49:23 Nous sommes arrêtés au prononcer de la condamnation, puisque certaines venaient à peine d'être prononcées, dont nous avons pris connaissance.
49:33 La peine de stage de citoyenneté nécessite du temps, enfin pas nécessairement très long, mais plusieurs semaines, le temps qu'il soit mis en œuvre.
49:41 Donc pour nous, ça a été hors champ de notre périmètre. Mais dans notre rapport, nous avons néanmoins souligné d'une part...
49:50 On a utilisé le terme de réancrage dans la citoyenneté d'un certain nombre de condamnés. Et pour nous, effectivement, la peine de stage de citoyenneté
49:58 nous apparaissait être comme quelque chose, enfin un outil et une sanction pédagogique à ce titre-là. En revanche, nous avons aussi indiqué que
50:10 peut-être faudrait-il adapter le contenu de certains stages. Donc ça, ça dépend, je dirais, des ressorts des tribunaux, puisque le contenu est défini
50:22 essentiellement localement, et peut-être effectivement trouver une réponse ou un contenu qui soit spécifiquement adapté au profil de ces émeutiers.
50:32 Alors ça existe déjà. Tant la Protection judiciaire de la jeunesse que l'administration pénitentiaire, par exemple, proposent des stages ciblés sur les auteurs de rodéos urbains.
50:42 Donc on est sur une autre dimension, mais on est capable d'adapter le contenu des stages à certains types d'infractions.
50:49 Et effectivement, il nous est apparu important de souligner qu'il y avait peut-être un contenu spécifique à réintroduire sur tout simplement ce qui est vivre dans la nation.
51:03 Alors, il y avait une question qui était proche aussi, qui était sur l'adéquation, le croisement, je crois, entre les motivations et la nature des peines.
51:15 Donc, nous avons fait des croisements. Alors nous n'avons pas fait ce croisement spécifiquement, mais ce qui nous est apparu, alors deux points.
51:27 Ce qui nous est apparu, le premier, c'est que la peine était surtout, je dirais, corrélée à la nature et à la gravité de l'infraction.
51:35 C'est ce qui nous a vraiment, je dirais, paru le plus évident. Et le deuxième point, je crois que ma collègue vous l'a indiqué, c'est que les motivations faisaient aussi partie de la stratégie de défense.
51:51 C'est-à-dire que très clairement, nous avons pris avec quand même beaucoup de précaution ce qui était avancé, puisque ce qui se sont exprimés, c'était essentiellement dans les procès-verbaux d'enquête, d'audition,
52:04 mais aussi dans les déclarations à l'audience et peut-être aussi dans les déclarations qu'ils avaient faites auprès des services en charge des enquêtes de personnalité.
52:12 Bien évidemment, ils mesuraient les enjeux de ce qu'ils disaient. Et donc, je dirais que les motivations nous paraissaient quand même assez aseptisées ou atténuées par rapport à ce qui pouvaient peut-être être les réelles motivations.
52:25 C'est pour ça que je pense que ça a probablement moins joué que la nature des faits.
52:33 Peut-être que je complète pour répondre à Mme la sénatrice sur la variation territoriale. Nous avons effectivement détaillé dans le rapport la proportion d'infractions selon les communes et indiqué que 7% des infractions...
52:52 Je l'ai dit dans mon propos au liminaire, 23% sont en zone gendarmerie, ce qui pour nous est beaucoup plus significatif qu'en 2005.
53:01 Donc sur le nombre de communes concernées, nous, nous, c'en est. Évidemment, nos facteurs, zone gendarmerie, zone police.
53:09 7% des infractions ont été commises dans des communes rurales, 15% dans des unités urbaines de moins de 50 000 habitants, 8% dans des unités urbaines d'entre 50 000 et 100 000 habitants et 70% dans des unités urbaines supérieures à 100 000 habitants.
53:29 Donc on reste évidemment avec une proportion importante sur les unités urbaines les plus importantes. Je l'ai dit, l'Ouest francilien, mais aussi des communes rurales et des tout petites communes.
53:44 Et c'est pour ça que nous sommes allés... Quand je vous ai dit qu'on avait fait un panel sur 32 tribunaux judiciaires hexagonaux, nous nous sommes intéressés aux tribunaux aussi dans des villes qui n'avaient pas connu, notamment en 2005, de telles violences.
54:01 Et donc de plus petits tribunaux, de plus petites communes qui ont été concernées. Nous sommes allés voir les dossiers, les réponses pour nos travaux.
54:15 Nous l'avons indiqué aussi, je crois que ma collègue l'a rappelé, nous avons aussi observé ces deux phases, si vous voulez, ce qu'on a appelé la cinétique des événements.
54:26 Et effectivement, très clairement, il y a eu une première phase avec un nombre important d'infractions, d'atteintes à l'autorité publique, d'atteintes aux forces de l'ordre, de dégradations de biens publics,
54:39 qui ont été majoritairement constatées, et effectivement au cours des premières nuits. Et on a assisté à un basculement, probablement à partir du 30 juin,
54:49 qui a été le 30 juin, le 1er juillet, les journées où le plus grand nombre d'infractions ont été commises, où les faits se sont étendus sur le territoire national,
54:58 et où les atteintes aux biens, c'est-à-dire en clair les vols aggravés et les dégradations de biens, ont pris le dessus et sont devenues extraordinairement dominantes.
55:12 Votre question, c'était le rapport entre les deux. On n'a pas nécessairement, à travers le prisme, qui a été le nôtre, c'est-à-dire quand même très limité,
55:29 ceux qui ont été identifiés et condamnés au 31 juillet. Nous en avons vu qui avaient participé à tous les types d'événements,
55:40 mais je dirais que pour nous, les données étaient vraiment trop éparses pour qu'on puisse en tirer des conclusions.
55:49 Ce qu'on constate néanmoins, c'est que le profil est rigoureusement le même. C'est-à-dire que ceux qui ont pu tirer au mortier, par exemple,
55:58 contre des forces de l'ordre, ceux qui ont été appréhendés dans des magasins en train de voler, pour nous, il n'y avait pas véritablement de différence,
56:08 que ce soit dans la situation sociale, que ce soit aussi dans la situation pénale. Ce qui, pour nous, est d'ailleurs probablement une des difficultés
56:21 ou une des énigmes des motifs du passage à l'acte et de la nature de tel ou tel mode d'action qui a été retenu.
56:34 Comme le rappelait ma collègue, il y a une étude recherche sociologique qui est en cours, qui va aller beaucoup plus en détail,
56:42 justement sur le profil des motivations, qui je pense va être aussi très intéressée par l'étude dont vous avez fait état,
56:49 et qui probablement nous fournira des clés d'explication beaucoup plus fortes. Mais pour nous, je dirais qu'il n'y avait pas véritablement
56:57 de catégorisation vers l'une ou l'autre infraction. Je ne sais pas si j'ai répondu à votre question.
57:04 Je peux répondre peut-être. S'agissant des mineurs, alors non, comme on l'a indiqué, ça ne rentrait pas directement dans notre lettre de mission.
57:16 Nous n'avions que la coaction, les mineurs en coaction. Et comme pour avoir un profil et déterminer un profil des auteurs,
57:27 nous sommes limités à des auteurs définitivement condamnés.
57:31 Des émeutiers jeunes, 23 ans en moyenne, qui vivent encore chez leurs parents, ont une activité et qui majoritairement n'ont pas d'antécédent judiciaire.
57:40 Voilà le portrait robot dressé par un rapport des inspecteurs généraux de la justice et de l'administration qui était auditionné au Sénat.
57:49 60% de ceux qui ont participé aux violences urbaines de juin dernier ont été condamnés à une peine de prison ferme.
57:56 C'est la fin de cette audition. Merci à vous de l'avoir suivie. Très bonne suite des programmes sur Public Sénat.
58:02 [Musique]

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