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00:00 A 7h45 vous avez la parole, ce matin on parle égalité hommes-femmes, enfin plutôt inégalité,
00:04 Théo Hedges.
00:05 Oui, avec ce symbole, ce matin, ST Micro à Krol condamné à 800 000 euros d'indemnité
00:10 pour discrimination salariale envers 10 femmes qui dénonçaient des évolutions de carrière
00:15 moins rapides que leurs collègues hommes.
00:16 Voilà, donc venez témoigner ce matin, venez nous raconter votre parcours.
00:20 Est-ce que vous gagnez aujourd'hui autant que vos collègues hommes ? Est-ce que vous
00:23 trouvez que les choses avancent ou est-ce que vous trouvez que justement ce n'est pas
00:25 le cas ? 04 76 46 45 45.
00:28 Et on en parle avec notre invitée ce matin, bonjour Séverine Loharne.
00:31 Bonjour, merci de m'inviter.
00:33 Merci d'être avec nous ce matin, vous êtes sociologue de formation, professeur HM Grenoble
00:37 École de Management où vous dirigez la chaire Femmes et Renouveau Économique.
00:41 Depuis le début de la semaine, les femmes travaillent gratuitement, c'est le constat
00:46 si l'on regarde les écarts de salaire, 15,4% d'écarts à temps de travail égal,
00:51 c'était 15,8% l'an dernier, ça n'évolue vraiment pas vite.
00:55 Alors ça n'évolue pas vite dans le monde de l'entreprise, ça n'évolue pas vite comme
01:00 on le verra peut-être dans le monde de l'entrepreneuriat, ça veut dire que l'entrepreneuriat n'est
01:04 pas la solution, ça s'explique.
01:07 Alors la petite différence d'une année à l'autre, elle n'est peut-être pas significative,
01:12 donc je ne vais pas m'attarder dessus, d'un point de vue statistique, pour moi c'est
01:15 un non-sujet.
01:16 En revanche, sur la tendance, non, ça n'évolue pas vite et il ne faut pas s'étonner parce
01:22 que vous avez un baromètre qui a été soumis au ministère de l'égalité femmes-hommes
01:28 et dans ce baromètre justement, on s'étonne et on s'alarme que des jeunes générations
01:34 reviennent à des mouvements et à des pensées dites masculinistes, à savoir que les 18-24
01:42 ans considèrent que c'est un non-sujet, que ce n'est pas un problème.
01:45 Donc ça n'est pas qu'un problème de réglementation ?
01:47 C'est un problème psychologique.
01:48 C'est un problème sociologique.
01:49 Alors comme le disent des historiens, des inégalités femmes-hommes et en particulier
01:56 dans le monde de l'économie, vous en avez et vous en avez eu surtout dans tous les pays
02:00 dits développés et dans les pays capitalistes.
02:02 Donc quand vous regardez notamment les préparations, qu'est-ce que fait la femme au sein de la
02:10 société, on a encore la vision et le stéréotype, en particulier en France, que l'on n'a
02:16 pas par exemple au Québec, qu'on n'a pas dans d'autres pays du monde et qu'on n'a
02:20 pas nécessairement en Afrique, qui considère que la femme doit être la personne qui aura
02:25 cette charge mentale de l'éducation des enfants, etc.
02:28 Donc l'égalité au sein de l'entreprise, c'est très très lent.
02:31 Rappelons-nous que le tout…
02:33 Mais ça reflète les inégalités au sein de la société.
02:37 Exactement.
02:38 On va retrouver au standard quelqu'un qui casse les codes, dirons-nous, Sophie Cattuogno,
02:42 elle est dirigeante d'entreprise, assassinage d'entreprise de métallurgie, ACS Steel.
02:47 Bonjour Sophie.
02:48 Oui, bonjour.
02:49 Merci d'être avec nous ce matin.
02:51 Vous êtes, je le disais, dirigeante d'entreprise dans la métallurgie.
02:55 Vous êtes, j'imagine, mais c'est peut-être un cliché, l'une des rares femmes du secteur.
02:59 Alors malheureusement, ce n'est pas un cliché, vous avez raison.
03:03 On n'est pas nombreuses dans ce domaine-là et tout particulièrement dans la métallurgie.
03:07 Qu'est-ce qui vous a poussé vers ce métier, vers ce secteur ?
03:09 Alors moi, c'est une histoire familiale puisque j'ai racheté l'entreprise familiale qui
03:15 a été créée par mon père il y a 22 ans.
03:18 J'ai carrément changé de métier puisqu'à la base, j'étais banquière.
03:22 Et puis, mon histoire personnelle a fait que je suis partie travailler avec mon père pour
03:27 quelques mois et ces quelques mois se sont transformés en 10 ans à ses côtés parce
03:32 que je suis tombée amoureuse de l'industrie, de la métallurgie.
03:34 Et j'ai fini par racheter cette entreprise donc il y a 8 ans.
03:39 Est-ce qu'on imagine quand on est une jeune fille qu'on peut devenir dirigeante d'entreprise
03:45 ou ça il y a encore une barrière ?
03:46 Alors dirigeante d'entreprise, oui on peut parce que je pense que ça c'est en nous quand
03:54 on a une envie d'être patron.
03:57 Moi ça fait depuis que je suis toute jeune que j'ai cette envie et que j'ai ça en moi.
04:01 Donc oui, même quand on est jeune fille.
04:03 Après, je ne vais pas vous cacher que mes ambitions n'étaient pas forcément dans la
04:06 métallurgie quand j'avais 20 ans.
04:09 Ça ne me faisait pas forcément rêver.
04:10 Et puis après, on devient adulte et puis on apprend à connaître un métier et on en
04:15 tombe amoureux.
04:16 Je vais vous demander une petite réaction Séverine Lelorne.
04:18 Dans un instant, merci en tout cas Sophie d'avoir témoigné ce matin au micro de France
04:22 Bleu Isère.
04:23 7h51, aussi à vous de témoigner au 04 76 46 45 45 pour nous parler de votre parcours,
04:31 votre témoignage.
04:32 Est-ce que vous gagnez autant que vos collègues hommes ? Est-ce que vous trouvez que les choses
04:36 avancent ou est-ce que ce n'est pas le cas ? Nous vous attendons.
04:39 Donc allez-y, appelez-nous maintenant pour pouvoir profiter de ce moment pour témoigner
04:42 04 76 46 45 45.
04:44 Séverine Lelorne, professeure à Grenoble École de Management, est notre invitée ce
04:47 matin.
04:48 Madame Lelorne, vous avez entendu le témoignage de Sophie Cattonio.
04:51 Qu'est-ce que vous en pensez ? Est-ce que face aux écarts de salaire, au fond, la création
04:55 d'entreprises peut être une solution pour les femmes ?
04:57 Alors certainement pas.
04:59 On sait très bien, la Scherffer a réalisé une étude pour Boucheta Boîte qui est une
05:05 entreprise qui regroupe et qui crée du réseau pour des femmes qui sont monosalariées.
05:11 Donc on travaille sur des femmes monosalariées et on a pu mettre en évidence 1500...
05:16 Monosalariées, c'est-à-dire ?
05:17 Ça veut dire je crée moi-même mon propre emploi, mon entreprise.
05:20 On a pu mettre en évidence le chiffre suivant, moins de 1500 euros par mois.
05:25 C'est le chiffre d'affaires maximal ou médian qu'une entreprise gérée par une femme monosalariée
05:35 en France peut avoir.
05:36 Derrière ce chiffre, s'il faut retenir, surtout 800 euros.
05:40 800 euros, c'est le chiffre d'affaires moyen que ces femmes réalisent par mois.
05:44 Et c'est plus faible que les hommes qui sont monosalariés ?
05:47 Oui, en moyenne, trois fois moins.
05:49 D'accord.
05:50 Mais les activités sont différentes.
05:53 Comme je vous disais tout à l'heure, dans la société, on a des logiques genrées.
05:57 Donc les goûts se font de manière genrée.
06:00 Des femmes qui vont plus vers les métiers du soin, par exemple, du care ?
06:04 Le soin peut rapporter, notamment le soin à la personne.
06:08 Mais si vous êtes sur de l'aromathérapie ou sur des activités qui vous demandent pas
06:13 mal de temps, évidemment vous ne faites pas d'économie d'échelle sur ces activités-là.
06:17 A moins d'avoir une journée de 48 heures, ce qui n'existe pour personne.
06:21 Évidemment, vous ne pouvez pas vendre une prestation à des tarifs énormes, sauf avoir
06:25 une expertise fantastique et avoir bien réfléchi.
06:28 En même temps, les femmes ont tendance à tout investir, comme on parle de reconversion
06:33 professionnelle, ce que notre témoignage disait.
06:38 Une reconversion professionnelle, quand la plupart du temps elles se reconvertissent,
06:42 elles investissent tous leurs sous dans la reconversion.
06:45 C'est-à-dire, je veux travailler par exemple les bénisteries, j'étais une femme du monde
06:49 de la tech.
06:50 Et finalement, elles n'investissent que trois jours pour la création de l'entreprise,
06:55 les trois jours de formation CCI.
06:56 Heureusement que ces trois jours sont là, mais évidemment, ce n'est pas suffisant
07:00 pour travailler sur la proposition de valeur, sur le modèle économique et s'assurer qu'on
07:04 aura des revenus suffisants pour vivre.
07:06 Avec 800 euros de chiffre d'affaires par mois, ce n'est pas possible.
07:09 Ça veut dire qu'il faut faire quoi ? Il faut pousser les femmes vers des métiers,
07:13 vers des secteurs plus rémunérateurs.
07:14 Et comment on fait ?
07:15 Pas spécialement.
07:16 Ça veut dire surtout d'avoir un bon positionnement.
07:19 Ça veut dire tout simplement de les inviter à avoir une vision rétrospective.
07:24 C'est-à-dire de se dire, j'ai envie de travailler dans l'activité du coaching,
07:28 dont acte.
07:29 Du coup, pourquoi on devrait imposer à des femmes d'aller dans un endroit et pourquoi
07:32 pas un homme ?
07:33 Si on a une attitude logique, ce n'est pas normal.
07:36 En revanche, ce que l'on peut faire, c'est dire, hé, maintenant on est dans une logique
07:41 de plein emploi, pratiquement.
07:43 Il y a des métiers en tension.
07:44 5% quasiment, en ce qui les rapproche, en tout cas 5% de chômage.
07:47 Donc plutôt que de se dire, j'ai un ras-le-bol, je vais créer mon entreprise, réfléchir
07:52 sur les moyens et les raisons pour lesquelles on quitte l'entreprise.
07:55 Puisque l'entreprise, en France, l'entrepreneuriat, c'est une activité surtout voulue et ce
08:02 n'est pas une activité subie.
08:03 Ce n'est pas de l'entrepreneuriat par défaut.
08:05 Donc dans ces cas-là, réfléchissons avant de se lancer et réfléchissons sur est-ce
08:10 que j'aurai les moyens pour vivre et est-ce que c'est correct pour moi ?
08:13 Et vous pensez que les hommes se posent davantage cette question que les femmes ?
08:16 On sait statistiquement que les femmes créent une entreprise avec 3 000 euros d'économie,
08:22 d'investissement.
08:23 Un homme va mettre 10 000 euros.
08:24 En moyenne.
08:25 On sait que l'entrepreneuriat masculin, sociologiquement, c'est un entrepreneuriat qui est certes voulu
08:32 parce que ça m'intéresse, parce que je veux le faire, mais c'est aussi la culture inconsciente
08:38 du fait que je suis un homme, donc je suis le père de famille, donc je dois gagner beaucoup
08:42 de sous.
08:43 Chez la femme, évidemment, on a cette culture-là, mais beaucoup moins et on a tendance à le
08:49 perdre lorsqu'il y a un ras-le-bol salarial, lorsqu'il y a un ras-le-bol avec son entreprise.
08:54 Et là on va se dire, tant pis, je lâche tout et je vais faire autre chose qui va m'épanouir
08:59 en première.
09:00 Et donc l'argent ne devient pas premier.
09:01 Et on espère que les femmes, en tout cas, qui nous écoutent ce matin, vous auront entendu,
09:05 il y a des mentalités à changer, on l'entend chez les hommes et chez les femmes.
09:08 Merci beaucoup Séverine Lenoirne d'avoir été notre invitée ce matin.
09:12 Vous pourrez réécouter cette interview d'ores et déjà sur francebleu.fr