La rapporteure générale de la commission des affaires sociales du Sénat, Elisabeth Doineau (Union centriste), s'est exprimée au premier jour des débats sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2024, le 13 novembre 2023.
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00:00 La situation a toutefois évolué depuis le 16 octobre.
00:03 Par exemple, compte tenu en particulier
00:05 des perspectives d'exécution de 2023,
00:08 l'ondam pour 2024 peut désormais sembler optimiste,
00:12 et c'est pour cette raison que nous vous proposerons
00:14 de supprimer l'article 43.
00:17 Ces similitudes institutionnelles par rapport à il y a un an
00:21 ne doivent pas masquer 2 profondes évolutions
00:24 qui font de ce PLFSS un PLFSS de rupture.
00:29 La 1re rupture, c'est l'abandon affiché
00:32 non seulement de l'objectif de retour
00:34 de la sécurité sociale à l'équilibre,
00:37 mais même d'un simple objectif de stabilisation du déficit.
00:41 Le déficit a atteint 40 milliards d'euros en 2020
00:45 du fait de la crise sanitaire,
00:47 ce qui était inévitable et parfaitement normal,
00:50 la France ayant eu recours,
00:52 ayant connu la pire récession économique
00:55 depuis la 2de guerre mondiale,
00:57 alors qu'il fallait en plus assumer le coût direct
01:00 de la crise sanitaire, et vous l'avez rappelé,
01:02 monsieur le ministre de la Santé et de la Prévention.
01:05 On peut aussi considérer que le point de départ actuel,
01:08 c'est-à-dire de 8,8 milliards d'euros en 2023,
01:12 est aussi pour l'essentiel normal le produit intérieur brut
01:16 ayant été réduit par la crise de manière durable,
01:19 voire pérenne,
01:21 ce qui explique l'essentiel de ce déficit.
01:24 Ce qui est sans doute moins normal,
01:27 c'est qu'à partir de ce point de départ de 8,8 milliards d'euros,
01:30 la situation se dégrade fortement,
01:33 l'augmentation du déficit se poursuivant
01:35 pour atteindre 17,5 milliards d'euros en 2027.
01:40 C'est une différence majeure
01:42 par rapport à la situation des années 2010,
01:45 où après la crise des dettes souveraines,
01:47 le déficit était passé de plus de 25 milliards d'euros
01:50 à un quasi-équilibre avant la crise sanitaire.
01:54 Il y a là comme un aveu d'impuissance
01:57 l'idée assumée que l'on transmet aux générations futures
02:01 la dette sociale.
02:03 Schématiquement, la branche maladie
02:05 actuellement déficitaire d'environ 10 milliards d'euros
02:08 le resterait jusqu'en 2027.
02:11 La branche vieillesse verrait quant à elle
02:13 son déficit exploser,
02:14 passant de 2 milliards d'euros en 2023
02:17 à 14 milliards d'euros en 2027.
02:21 Évidemment, il ne faut pas se tromper
02:23 sur le sens de ces chiffres relatifs aux retraites.
02:26 La loi de financement de sécurité sociale pour 2023,
02:29 qui supposait déjà dans sa programmation
02:31 un report de l'âge légal de la retraite,
02:33 prévoyait un déficit de la branche vieillesse
02:35 de 15,7 milliards d'euros en 2026.
02:38 Déficit qui a été ramené à 14,2 milliards d'euros
02:43 lors de la loi de financement rectificatif
02:45 de la sécurité sociale en début d'année,
02:47 réformant les retraites,
02:49 ce qui n'est pas significativement différent
02:51 des 14 milliards d'euros actuellement prévus pour 2027.
02:56 Cette augmentation du déficit de la branche vieillesse
02:58 n'est donc pas une nouveauté.
03:00 Elle était prévue lors de la récente réforme des retraites,
03:03 qui, selon le gouvernement, réduit le déficit
03:05 de 6,3 milliards d'euros en 2027.
03:09 Ce qui est nouveau, en revanche,
03:11 c'est que contrairement à ce qui était le cas
03:13 dans les précédentes lois de financement
03:15 de sécurité sociale,
03:17 on ne prévoit plus d'amélioration du solde de la branche maladie.
03:21 Le gouvernement assume de financer durablement la santé
03:24 par le déficit.
03:25 C'est ça qui est véritablement contestable dans ce PLFSS.
03:30 La 2de rupture, c'est que l'on assiste
03:32 à une déconnexion historique en 2023
03:35 entre le déficit de la sécurité sociale,
03:38 d'un côté, de 8,8 milliards d'euros,
03:40 et l'excédent, je dis bien l'excédent,
03:43 pas le déficit, de l'ensemble des administrations
03:45 de sécurité sociale,
03:46 qui comprennent, en plus de la sécurité sociale,
03:49 des entités comme la CADES, l'UNEDIC
03:51 ou les régimes complémentaires de retraite.
03:54 Ces administrations de sécurité sociale,
03:55 qui correspondent donc à un périmètre
03:58 nettement plus large que la sécurité sociale,
04:00 auraient cette année un excédent très important,
04:03 ce qui est un phénomène nouveau apparu l'année dernière.
04:07 Le gouvernement suppose que ce phénomène historiquement atypique,
04:10 loin de se résorber, va s'accentuer d'ici 2027,
04:15 où l'excédent des administrations de sécurité sociale
04:18 atteindrait un point de PIB, c'est-à-dire 30 milliards d'euros.
04:23 D'où ces plus de 30 milliards d'euros d'excédent global
04:26 viendraient-ils ?
04:28 D'un côté, on aurait 17,5 milliards d'euros,
04:31 le déficit de la sécurité sociale stricto sensu,
04:34 et de l'autre, on aurait une cinquantaine de milliards d'euros
04:36 d'excédent divers,
04:38 correspondant essentiellement à la CADES, à l'UNEDIC,
04:42 aux régimes complémentaires de retraite
04:45 et à 6 milliards d'euros d'économies
04:47 restant à documenter, monsieur le ministre,
04:50 et dont on ne sait pas encore comment
04:52 elles se répartiront entre la sécurité sociale
04:55 et justement les administrations de sécurité sociale,
04:58 au sens strict et donc les autres administrations.
05:00 Cette programmation amène à se poser donc 4 questions.
05:04 La 1re question est de savoir si cette programmation
05:06 d'excédent des administrations de sécurité sociale
05:09 à l'échéance 2027 est réaliste.
05:12 La Commission des affaires sociales la juge optimiste.
05:15 Elle estime que du fait notamment d'une hypothèse de croissance
05:18 déjà optimiste de 1,3 % par an,
05:21 plutôt que de 1,7 % par an, comme le prévoit le gouvernement,
05:25 et d'un nom d'âme plus dynamique,
05:27 le déficit de la sécurité sociale stricto sensu
05:30 sera en 2027 nettement supérieur
05:33 à ce que prévoit la loi de financement
05:35 de sécurité sociale.
05:37 Elle considère en outre que les prévisions d'excédent
05:39 de l'UNEDIC et des régimes complémentaires de retraite
05:42 sont optimistes.
05:43 Au total, en 2027,
05:45 l'excédent des administrations de sécurité sociale
05:47 considérées dans leur ensemble
05:49 ne serait pas de plus de 30 milliards d'euros,
05:51 mais à notre avis de seulement quelques milliards d'euros.
05:54 La 2e question est de savoir comment gérer
05:57 une situation de décalage
05:59 entre une sécurité sociale stricto sensu en fort déficit
06:03 et d'autres administrations de sécurité sociale
06:05 en fort excédent,
06:06 même s'il nous semble que cet excédent sera moins fort
06:09 que ce que pense le gouvernement.
06:11 Le gouvernement choisit de prendre de l'argent
06:13 aux administrations de sécurité sociale en fort excédent
06:16 pour le transférer à la branche vieillesse
06:18 dans le cas de l'Agir Carco
06:20 ou à l'Etat dans le cas de l'UNEDIC.
06:22 La Commission des affaires sociales
06:24 juge ces 2 mesures inappropriées.
06:26 Elle vous proposera de supprimer les dispositions
06:28 correspondantes aux articles 9 et article 10.
06:31 La Commission considère qu'il ne faut pas réaliser
06:33 subrepticement une nouvelle réforme des retraites
06:36 en contraignant financièrement l'Agir Carco
06:39 et que la priorité pour l'UNEDIC,
06:40 comme d'ailleurs pour l'ensemble des administrations publiques,
06:43 est de se désendetter.
06:44 Si l'Etat veut financer de nouvelles dépenses,
06:47 il doit le financer par des économies.
06:50 La 3e question est celle du financement
06:52 d'une dette de la sécurité sociale stricto censu
06:54 qui va continuer à croître.
06:56 En 2020, la loi autorisait à transférer
06:59 136 milliards d'euros de la dette à la CADES.
07:02 Actuellement, c'est seulement 8,8 milliards d'euros
07:04 qui restent disponibles, et c'est justement
07:06 le déficit de cette année.
07:08 Ca tombe assez bien.
07:09 Et donc, à droit à changer, les déficits annuels
07:12 vont s'accumuler à l'Ursaf Caisse nationale.
07:14 Si on ne fait rien, dans 10 ans,
07:16 la somme pourrait atteindre 200 milliards d'euros.
07:19 L'Ursaf Caisse nationale se finançant à court terme
07:21 sur les marchés, cela serait dangereux,
07:24 en particulier si la France devait connaître
07:26 une nouvelle crise économique.
07:29 Je vais aller à la 4e question,
07:32 et celle de ce qu'il faut faire pour réduire le déficit
07:34 de la sécurité sociale stricto censu.
07:36 Comme les années précédentes, la Commission des affaires sociales
07:39 a abordé chacun des articles de ce test
07:41 de façon constructive.
07:43 En particulier, elle propose de rétablir,
07:45 donc, je l'ai dit, l'article liminaire,
07:47 l'article 1 et l'article 2 un peu modifiés.
07:50 Et puis, elle a toutefois adopté un amendement
07:53 tendant à modifier la répartition de l'ondamne 2023
07:56 entre ces différentes composantes.
07:58 Elle a exprimé son désaccord avec la trajectoire financière
08:01 et l'abstence de stratégie du gouvernement
08:03 en proposant de rejeter l'article 16 et annexe A,
08:07 ainsi que l'article 42.
08:09 (Générique)
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