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Transcription
00:00 On est à 15 jours maintenant de la COP 28.
00:03 – La COP, je sais.
00:03 – Et vous avez vu les inondations dans le Pas-de-Calais.
00:06 – Exactement.
00:06 – Et vous savez pourquoi les inondations,
00:07 par rapport à ce qu'on a expliqué la dernière fois,
00:09 pourquoi est-ce que les inondations dans le Pas-de-Calais sont dramatiques ?
00:13 Parce qu'on a tous les phénomènes, c'est dramatique.
00:15 – On pense très fort d'ailleurs à tous les habitants qui ont eu des dégâts incroyables.
00:19 – Tout à fait, il faut penser à eux.
00:21 Et pourquoi c'est significatif du dérèglement climatique ?
00:25 C'est-à-dire, c'est deux choses le dérèglement climatique.
00:28 C'est l'accentuation des phénomènes climatiques,
00:30 c'est-à-dire les chaux sont plus graves, il fait beaucoup plus sec,
00:32 il pleut beaucoup plus, il fait beaucoup plus froid, il fait beaucoup plus chaud.
00:35 Et surtout, il y a un rapprochement des phénomènes extrêmes.
00:39 C'est-à-dire qu'il va faire tout de suite très chaud,
00:41 puis quelques jours après très froid.
00:43 C'est le rapprochement des phénomènes extrêmes.
00:45 – C'est ce qu'on voit en ce moment.
00:46 – Et c'est ce qu'on voit en ce moment.
00:48 Et qu'est-ce qui se passe dans le Pas-de-Calais ?
00:49 Il pleut beaucoup bien sûr, mais en plus, comme je vous l'ai expliqué,
00:53 la Manche s'est réchauffée, donc la Manche s'est dilatée,
00:57 et donc la Manche est montée, son niveau est monté beaucoup plus fort.
01:01 Et la force des vents empêche les eaux de ruissellement
01:05 qui viennent de la pluie de s'acheminer vers la mer.
01:09 Elle s'écoule beaucoup plus lentement vers la mer.
01:12 Et en plus, comme il a déjà beaucoup plu, les sols sont saturés d'eau.
01:15 Et donc là, il y a une nouvelle tempête qui arrive avec de nouveaux dégâts.
01:18 Et c'est vraiment désolant et dramatique pour les gens qui subissent ça.
01:22 – C'est très long après, de réparer les dégâts,
01:23 parce qu'on sait ce que c'est, les compagnies d'assurance, etc.
01:26 – Oui, c'est trop long.
01:26 – Donc il faut vraiment les aider.
01:28 Si on peut les aider, d'ailleurs, dans le prime qu'on va faire,
01:30 le prochain prime, on essaiera de faire une cagnotte, d'ailleurs,
01:32 pour les personnes qui sont en détresse, si c'est correct.
01:35 – Et donc, c'est pour vous montrer qu'il y a des grands discours théoriques
01:38 sur le climat, mais en fait non, c'est un impact très direct sur nos vies.
01:43 – En ce moment, on voit que ça…
01:44 – Alors, je vais vous raconter un souvenir très émouvant de la COP21,
01:48 puisque la COP28 qui va avoir lieu est inscrit à l'ordre du jour,
01:51 le bilan de l'accord de Paris sur le climat.
01:53 C'est-à-dire, qu'est-ce qui s'est passé depuis décembre 2015,
01:57 et puis surtout 2016, un moment où tous les pays ont accepté l'accord de Paris.
02:03 Qu'est-ce que c'était que cet accord de Paris ?
02:05 C'était l'engagement de tous les pays d'essayer de réduire la pollution
02:10 par le pétrole pour rester en dessous des 2 degrés du réchauffement climatique.
02:15 Et il s'est passé que cette réunion à Paris de tous les chefs d'État
02:19 devait avoir lieu en décembre 2015.
02:21 – 2015.
02:22 – Et en novembre 2015, qu'est-ce qui se passe ?
02:24 Il se passe les attentats du Bataclan.
02:26 Et à ce moment-là, on s'est dit, c'est pas possible,
02:28 180 chefs d'État ne vont pas venir à Paris compte tenu des problèmes de sécurité.
02:35 Et c'est Barack Obama, le premier, qui a dit,
02:37 si raison de plus de venir à Paris, compte tenu du traumatisme
02:43 que la France vient de subir, nous devons absolument être à Paris.
02:47 Et je pense que cette émotion collective de tous les pays, grands, petits, etc.,
02:52 des pays qui sont en opposition à l'échelle de la planète, étaient là tous réunis.
02:57 Et je pense que cette émotion très forte a contribué à la réussite de l'accord de Paris.
03:03 Pourquoi ça a réussi ? C'était la COP 21.
03:06 Qu'est-ce que ça veut dire, 21 ? Je vais expliquer.
03:08 Il a fallu 21 années, 21 années, pour faire cette COP.
03:14 Et le hasard a voulu que, à la première réunion de la planète, en 1992,
03:20 j'étais déjà ministre de l'Environnement.
03:22 Et donc j'ai connu la première réunion de 1992, et le hasard de la vie fait qu'en 2015,
03:29 je suis également chef de la délégation française, puis présidente de la COP,
03:33 et j'ai vu que pendant 20 ans, si vous voulez, c'est pour dire la résistance, l'inertie, les lobbies,
03:41 l'incapacité à bouger, etc., parce qu'il a fallu 21 ans pour qu'enfin,
03:45 tous les pays du monde reconnaissent deux choses.
03:48 C'est-à-dire, premièrement, que c'était à cause des activités polluantes
03:53 que la planète se déréglait, que le climat se déréglait,
03:57 et que, deuxièmement, il fallait mettre en place dans chaque pays des stratégies.
04:01 – Alors là, ça va être la COP 28, après ?
04:03 – Donc ça va être la COP 28, là.
04:04 – C'est 7 ans après.
04:05 – Voilà.
04:06 – Bravo !
04:07 – Bravo !
04:08 – Bravo !
04:09 – Eh !
04:10 – Bravo !
04:11 [Applaudissements]
04:15 – Et donc, il s'est passé quelque chose aujourd'hui que je trouve extrêmement grave,
04:20 c'est que la Commission européenne vient de réautoriser le glyphosate.
04:24 Et c'est une très longue histoire, le glyphosate,
04:27 parce que je vais vous raconter là aussi une anecdote.
04:29 Donc le 4 mars 2016 exactement, je suis ministre de l'Environnement
04:33 et nous sommes convoqués à une réunion, un conseil,
04:35 ça s'appelle un conseil des ministres de l'Environnement à Bruxelles,
04:39 sur la question notamment du glyphosate.
04:41 À ce moment-là, je vois la ministre suédoise qui vient vers moi et qui me dit
04:45 "Mais est-ce que la France va voter avec la Suède pour interdire le glyphosate ?"
04:48 – Réfute, je suis bien, je l'aime.
04:49 – Je dis bien sûr.
04:50 [Rires]
04:51 – Je dis bien sûr.
04:52 – On va s'allumer.
04:53 – C'est le plus grand truc qu'on a.
04:54 – C'est ça, c'est le…
04:55 – C'est sûr.
04:56 – Ava Ramson, je cite son nom parce qu'elle a été vraiment à l'offensive,
05:00 et à ce moment-là, ce n'était pas majoritaire.
05:03 Bon, et on a bataillé pour que ça soit majoritaire.
05:05 Donc le 4 mars 2016, le glyphosate est interdit, sachant,
05:11 tenez-vous bien, que cette firme Monsanto qui fabriquait le glyphosate
05:16 avait déjà été mise en demeure en 2006, c'est-à-dire 10 ans avant,
05:20 et on lui avait dit, donc ça prouve qu'on savait déjà que c'était cancérigène,
05:24 on lui avait dit, on vous donne 10 ans pour faire évoluer vos fabrications,
05:28 pour changer les modes de production,
05:30 pour que les agriculteurs s'adaptent à autre chose, etc.
05:32 Et en 2016, on fait l'interdiction.
05:35 Mais les pressions que j'ai reçues sont inimaginables.
05:40 – À l'époque déjà.
05:41 – Déjà à l'époque, donc même le président de la Commission européenne
05:43 qui était Jean-Claude Juncker à ce moment-là m'appelle personnellement
05:47 en disant "mais non, il faut changer le vote, etc.
05:50 ça va créer des difficultés".
05:51 Je dis "mais si l'Europe n'est pas capable de tenir sa parole
05:55 par rapport à une interdiction d'un produit extrêmement toxique
05:58 reconnu cancérigène par l'OMS, à quoi servons-nous ?
06:04 Ensuite, Nicolas Hulot me succède, le glyphosate est autorisé,
06:08 mais Emmanuel Macron dit pour 2 ans seulement le temps de l'adaptation, etc.
06:12 Et aujourd'hui, nous sommes en 2023,
06:15 et on entend une réautorisation encore pour 10 ans.
06:18 Donc ça veut dire en fait qu'on réautorise.
06:20 Et c'est autant plus scandaleux, c'est qu'aujourd'hui, il y a beaucoup de plaintes.
06:24 Il y a notamment, vous savez, un jeune qui s'appelle Théo Grattaloup,
06:28 qui est né handicapé, et sa maman s'appelle Sabine Grattaloup,
06:32 et vous pourriez d'ailleurs les inviter.
06:34 – On va les inviter Théo ici.
06:35 – Donc sa maman a été exposée au glyphosate parce qu'elle travaillait
06:40 dans un élevage de chevaux, pauvre chevaux d'ailleurs, c'était bizarre,
06:45 qui utilisait le glyphosate pour désherber,
06:47 et son enfant est né très gravement handicapé.
06:50 Vous pouvez les inviter tous les deux, ils pourront témoigner.
06:54 Et aux États-Unis, il y a 18 000 plaintes, il y en a aussi en France,
06:59 mais c'est très dur d'arriver jusqu'à la justice parce que le glyphosate
07:03 est un perturbateur endocrinien et cancérigène, bien évidemment,
07:08 entraînant la stérilité, entraînant pour les femmes le cancer du sein,
07:12 entraînant le cancer du système lymphatique, entraînant l'éleucémie pour les enfants,
07:17 et d'ailleurs même en France quand on voit les statistiques de l'eucémie sur les enfants,
07:21 on voit que c'est dans les zones où ils utilisent des pesticides,
07:24 et notamment sur les exploitations viticoles autour des vignes,
07:29 le cancer du testicule pour les hommes qui est très important,
07:31 chez les agriculteurs qui utilisent du glyphosate, donc on sait tout cela.
07:36 Et malgré ça, aujourd'hui, mais c'est scandaleux,
07:40 malgré ça, aujourd'hui, c'est réautorisé,
07:43 alors que c'est reconnu comme quelque chose d'extrêmement grave
07:47 et qu'en plus, bien sûr, ça pollue les sols, ça pollue l'air,
07:50 et puis surtout, donc ça pollue,
07:55 et de vitam éternam, si j'ose dire,
07:57 puisque ça imprègne très fortement les sols.
08:00 Et la dernière chose, c'est que les études scientifiques viennent de montrer aussi
08:03 que c'était meurtrier pour ce qu'on appelle la biodiversité.
08:07 - Qu'est-ce que c'est que la biodiversité ?
08:09 C'est la diversité, bien évidemment, des animaux et des plantes, etc.
08:14 Et il faut que vous sachiez qu'avec cette agriculture intensive ultra-chimique,
08:18 Monsanto, Bayer, il faut citer les deux firmes,
08:21 parce que vous voyez, ce qu'il faut voir aussi,
08:24 c'est les enjeux financiers qui sont considérables.
08:27 Parce qu'une annonce comme celle-ci,
08:29 je serais curieuse de voir quel va être le cours de la bourse.
08:32 Et quand il y a eu les plaintes aux États-Unis,
08:33 les premières condamnations, indemnisations,
08:35 l'action Bayer a dévissé de 40 %,
08:41 ça serait intéressant de savoir qui a acheté les actions avant cette annonce.
08:46 Vous voyez, il ne faut jamais oublier les enjeux financiers considérables
08:50 qu'il y a derrière une décision comme celle-ci.
08:52 Et moi, je pense qu'il faut se battre pour que cette décision ne soit pas définitive.
08:56 Pour qu'elle soit réversible.
08:57 Déjà, on parlait, je pense que les ONG vont se mobiliser,
09:00 je pense que les associations de malades vont se mobiliser.
09:03 Parce que l'autre effet pervers d'une annonce comme celle-ci,
09:06 c'est que toutes les entreprises qui ont fait des efforts,
09:09 tous les chercheurs qui ont cherché pendant des années des alternatives,
09:13 qui se sont dit "on a peut-être trouvé quelque chose,
09:16 on va procéder autrement",
09:17 les agriculteurs qui font de l'agriculture bio,
09:19 ils se sont donné quand même beaucoup de mal,
09:20 et qui n'ont pas été aidés pour ça.
09:23 Donc une annonce comme celle-ci, en plus à 15 jours de l'échéance,
09:26 parce que la fin de l'autorisation c'était au 15 décembre,
09:31 provoque l'écroulement des activités vertueuses.
09:34 Vous voyez que tous ceux qui s'étaient engagés
09:36 pour trouver des solutions alternatives
09:38 qui ne provoquaient pas toutes ces maladies,
09:42 tout d'un coup se retrouvent totalement démunis.
09:45 Et donc c'est une mauvaise décision.
09:47 Et donc il faut vraiment se battre pour qu'elle soit réversible.
09:53 Et puis dernier élément, il y a d'autres pays européens
09:56 qui ont interdit le glyphosate sur leur territoire,
09:58 par exemple le Luxembourg.
09:59 Mais à partir du moment où l'autorisation est donnée
10:01 au niveau européen, Bayer est allé devant la justice,
10:04 et la justice a obligé le Luxembourg à réautoriser le glyphosate
10:10 parce que la réglementation européenne s'impose aux pays.
10:13 Alors que là, en principe, je ne sais pas,
10:17 les règles humanitaires et les règles de respect
10:20 de la santé publique devraient autoriser les pays
10:23 à être plus vertueux que ce que décide la Commission européenne.
10:27 Donc là aussi, il y a des enjeux quand même très importants
10:29 pour les citoyens qui ne doivent pas être écartés
10:32 de ces débats et de ces décisions.
10:35 [Musique]

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