Philippe Augé, président de l'université de Montpellier

  • l’année dernière
Il milite en faveur de la création d'une allocation spéciale pour les étudiants, une sorte de salaire étudiant en quelque sorte. L'été dernier il a signé une tribune en ce sens dans le journal Le Monde. Philippe Augé, président de l'université de Montpellier, était notre invité ce matin dans le 6/9
Transcript
00:00 Philippe Auger, notre invité. Philippe Auger, c'est le président de l'Université de Montpellier.
00:03 Et effectivement, il milite en faveur de la création d'une allocation spéciale pour les étudiants.
00:08 On en parle ce matin, Guillaume.
00:09 - Bonjour Philippe Auger. - Bonjour.
00:10 - C'est la semaine des présidents de l'université.
00:12 - Ouais. - On avait en début de semaine Anne Freiss, la présidente de Paul Valéry.
00:16 Philippe Auger, président de l'Université de Montpellier, merci d'être venu.
00:20 Vous avez signé cet été, dans Le Monde, une tribune qui n'est pas passée inaperçue,
00:25 avec 13 autres présidents de l'université, pour réclamer, proposer, réclamer, je sais pas trop, vous allez nous dire,
00:31 la création, la mise en place d'une allocation étudiant.
00:34 Est-ce qu'on peut parler de salaire étudiant ? C'est un mot qui...
00:36 - Oui, on peut parler de salaire étudiant, on peut parler de revenu universel étudiant.
00:39 Effectivement, nous avons signé cette tribune pour ouvrir le débat.
00:42 Ouvrir le débat parce que nous sommes confrontés, dans nos établissements, à une difficulté.
00:47 Aujourd'hui, on le voit bien chez les étudiants, la question donc de conditions de vie,
00:51 la précarité, il faut le dire carrément, avec distribution maintenant alimentaire,
00:55 distribution de produits d'hygiène.
00:57 Alors, je dois dire qu'on est conscient de tous les efforts qui ont déjà été faits.
01:00 La ministre, en mars dernier notamment, a annoncé l'augmentation des bourses,
01:06 l'extension aussi du périmètre de celle-ci, donc là-dessus, le maintien aussi du repas,
01:11 par exemple à 1 euro, ça existe, c'est bien.
01:14 Mais ce n'est pas suffisant, parce qu'aujourd'hui, on s'aperçoit qu'on a de plus en plus d'étudiants.
01:19 Alors, certains passent en dessous des radars, on n'arrive même plus à savoir où ils sont,
01:22 mais quand même pour beaucoup d'étudiants, ils travaillent au-delà de quelques heures par jour.
01:26 C'est quasiment des fois des emplois à temps plein, qui sont pour les étudiants,
01:30 et derrière cela d'emplois à temps plein, ça veut dire aussi des difficultés pour suivre les études,
01:34 et pour suivre les études, donc des difficultés de réussite.
01:37 Donc, il y a tout un système sur lequel on voudrait pouvoir débattre,
01:41 d'arriver à dire que si on donne un revenu à des étudiants,
01:45 bien sûr, il faut définir le montant, les conditions,
01:47 il se peut être tout le monde...
01:49 - Est-ce que ce serait sans condition de ressources, comme pour les bourses, par exemple, des parents ?
01:53 - Sous condition de ressources, les parents, notamment la séparation du foyer fiscal,
01:56 pour pas qu'il y ait l'effet d'opportunité.
01:58 Également des conditions de réussite, d'avancer dans le parcours, ça aussi c'est nécessaire.
02:03 Mais ce qu'on veut dire aussi, c'est qu'aujourd'hui, réfléchir à un revenu d'étudiants
02:07 permettrait de se projeter sur l'avenir, d'abord quel débat, quelle place pour notre jeunesse,
02:12 c'est ouvert le débat, et puis également réfléchir, réfléchir sur les effets
02:16 que peuvent avoir dans le long terme des étudiants qui, faute de revenus,
02:19 ne vont pas acheter des produits d'hygiène,
02:21 et qui, faute de revenus, ne vont des fois pas suivre les parcours de soins.
02:25 Donc aussi, il faut voir les effets induits de l'absence de revenus.
02:28 - Justement, est-ce qu'on connaît un peu, on a une idée des proportions
02:30 des étudiants qui sont confrontés à ces difficultés du quotidien-là,
02:33 et qui même, peut-être, peut-être, renoncent à leurs études, faute de moyens ?
02:37 - Alors, ceux qui renoncent à leurs études, non, honnêtement, on n'a rien à voir.
02:40 Après, c'est quand même très difficile d'arriver à cerner un nombre, même une fourchette,
02:45 parce que, comme tout chacun, on est aussi public, on a aussi notre honneur,
02:50 et donc, lorsqu'on voit quand même des files d'étudiants qui viennent,
02:54 donc des distributions alimentaires,
02:56 des files d'étudiants qui sollicitent des aides, donc, exceptionnelles,
02:59 on voit que c'est un problème difficile à quantifier pour nous,
03:03 peut-être une étude nationale pourrait le faire,
03:05 mais qui a sa réalité sur Montpellier, mais dans la totalité des villes universitaires,
03:10 et pas simplement dans les grandes villes,
03:12 puisque, parmi les prés en université, il y a aussi des présidents d'universités moyennes.
03:17 Donc, pour nous, c'était de lancer le débat,
03:19 quel avenir pour notre jeunesse ? Est-ce qu'on autonomise nos étudiants ?
03:23 - Alors, justement, quel accueil a été réservé, Philippe Auger, à cette tribune,
03:26 qui date du mois de juillet ?
03:27 Est-ce que les choses, est-ce que le débat a véritablement été ouvert ?
03:30 Est-ce que les choses avancent ?
03:31 Est-ce que vous avez eu, à part de votre ministère de tutelle, ou d'autres, d'ailleurs, des retours ?
03:36 - Alors, je pense qu'il y a eu une écoute, à part de notre ministère de tutelle,
03:38 et ça, c'est évident, j'ai même pu échanger en direct
03:41 avec la ministre au téléphone, là-dessus.
03:43 J'expliquais que, pour nous, c'était donc de positionner quelque chose.
03:47 Après, il faut être conscient aussi que, notre ministère,
03:50 donc, a tant de difficultés financières,
03:53 on n'a pas de quoi financer.
03:54 Donc, ça veut dire qu'aujourd'hui, la priorité de la ministre, c'est quand même, donc,
03:57 doter ses établissements, on pourra mettre un revenu.
03:59 - On va y arriver. - Ensuite, donc, ça va être
04:01 de financer les aides actuelles, parce qu'elle a quand même injecté 500 millions,
04:05 mais là, c'est plusieurs milliards.
04:06 Donc, je pense que, même s'il peut y avoir une volonté,
04:09 une volonté politique, derrière, il faut quantifier.
04:11 Et aujourd'hui, ça veut dire déplacer une partie des budgets de la nation.
04:16 - Ça veut dire que c'est pas prêt de se mettre en place.
04:18 - Je crois que c'est pas prêt de se mettre en place, mais, quand même,
04:20 je crois qu'aujourd'hui, il y a eu une audition de la présidente,
04:23 je crois, de l'université de Nant, toute son équipe au Sénat.
04:25 Donc, il y a quand même un relais qui est pris, donc, par le monde politique.
04:29 - Alors, je disais que c'était la semaine des présidents de l'université,
04:31 parce qu'effectivement, on avait, donc, la présidente de Paul Valéry,
04:34 à ce même micro, en début de semaine, avec qui on évoquait
04:37 ce fameux classement d'AEF sur les dotations accordées aux universités par étudiant.
04:43 Alors, on n'a rien à voir avec la qualité de vie ou le niveau de vie des étudiants,
04:47 c'est sûr, ce que l'État vous donne, par étudiant,
04:50 pour permettre à l'université de fonctionner.
04:52 Alors, Paul Valéry, il n'était pas très content,
04:54 parce qu'il se rend compte qu'ils sont les derniers de la classe,
04:56 en ce qui concerne l'université de Montpelier.
04:58 En revanche, j'ai l'impression que vous êtes plutôt bien lotis, non ?
05:00 Vous êtes un peu au-dessus de la moyenne nationale, non ?
05:02 - Oui, on est un petit peu au-dessus de la moyenne nationale.
05:04 Après, je voudrais quand même revenir sur un ou deux éléments,
05:07 c'est que ces dotations ne peuvent pas être les mêmes pour tous les établissements.
05:11 Par exemple, l'enseignement, qui dépend de la nature de l'enseignement,
05:14 et puis derrière, quand même, la dotation, ça dépend aussi de la structure de l'établissement.
05:17 Bon, côté enseignement, c'est vrai que d'avoir donc études scientifiques,
05:21 il faut du matériel spécifique, des locaux, des enseignements aussi,
05:24 il y a beaucoup de courant de TP.
05:26 TP, c'est 15 juillet en maxi, donc là, c'est des dépenses.
05:29 Après, il ne faut pas oublier que l'université comme Montpelier,
05:31 c'est quand même une université qui est sur tous les sites universitaires de l'ex Languedoc aussi,
05:35 sur le président Hammand, à Carcassonne... - Une université éclatée.
05:37 - Éclatée, donc ça veut dire aussi des surcoûts qui sont conséquents,
05:41 un bâti qui est relativement ancien, pour donner quelques exemples.
05:44 Donc c'est vrai qu'on est au-dessus de la moyenne nationale.
05:47 - On va donner les chiffres, si vous le permettez, Philippe Auger, pour...
05:49 - Alors, c'est 7... La subvention par étudiant à Montpelier est de 7 175 pour votre université,
05:56 7 175 euros, alors que la moyenne nationale est à 6 700, donc vous êtes à 400 euros.
06:00 - Tout à fait. Je me permettrais de rajouter deux choses là-dessus.
06:04 Un, c'est que dans ces sommes-là, il y a également des crédits qui sont injectés au titre de projet que l'on a obtenu.
06:12 Donc on a aussi candidaté pour avoir des crédits supplémentaires.
06:14 Et puis la seconde chose que je voudrais dire, c'est que même les 7 000 et quelques
06:19 ne suffisent pas à assurer le fonctionnement de l'établissement.
06:21 Je l'ai dit par ailleurs, aujourd'hui l'université, pour arriver à son équilibre,
06:25 tente à développer ses ressources. Développer ses ressources, candidatés à ces appels à projets,
06:31 développer l'apprentissage, puisqu'on a besoin, pour arriver à l'équilibre financier,
06:35 d'avoir des ressources au-delà de ceux que donne l'État.
06:38 - Et il y a un sujet qui vous inquiète et que vous vouliez aussi évoquer ce matin, je crois,
06:41 qui est celui des dépenses mises à la charge de l'État et non compensées.
06:45 Est-ce que vous pouvez nous expliquer en deux mots ?
06:47 - Oui, alors, c'est essentiellement des mesures de ressources humaines annoncées par le gouvernement,
06:52 l'augmentation du point d'indice, l'indemnité, donc pouvoir d'achat.
06:56 Il faut savoir que ça s'est annoncé, mais l'année dernière, par exemple,
06:59 l'augmentation du point d'indice de juillet à décembre, ça a coûté 5 millions d'euros en plus à l'université.
07:05 Je ne critique absolument pas le bien-fondé qui n'en était à peu près.
07:07 - Sauf que c'est normalement l'État qui devrait payer ?
07:09 - Ça aurait dû être l'État qui devait payer, puisque c'est lui qui a annoncé.
07:11 - Donc l'État ne paye pas ? - Ça n'a pas été compensé, voilà.
07:13 Et cette année, eh bien, l'indemnité, pouvoir d'achat pour les salaires les plus modestes,
07:17 ça a coûté à peu près 2 millions de 3, là aussi annoncé par l'État.
07:21 Je ne critique absolument pas la légitimité de la mesure, mais aucune compassion pour l'établissement.
07:25 Donc ce qui veut dire, là aussi, une difficulté probable,
07:28 c'est que tous ces crédits qu'on doit assumer sont prélevés de notre fonds de roulement.
07:32 Donc notre fonds de roulement, ça veut dire quoi ?
07:34 Ça veut dire qu'on va pouvoir moins investir pour l'université.
07:37 - Et des inquiétudes par rapport à l'avenir ?
07:39 - Des inquiétudes, parce que ça se renouvelle sur plusieurs années.
07:41 C'est vrai que lorsque le fonds de roulement sera à sec,
07:44 la capacité d'innovation ou d'investissement de l'université,
07:47 eh bien, ce sera totalement identique.
07:49 - Bon, la prochaine fois qu'on reçoit un ministre ici,
07:51 c'est le ministre du Renseignement supérieur, on lui en touchera de beau.
07:54 - Tout à fait !
07:54 - Qu'on reçoit les ministres ici, dans le 6/9, je suis pas trop sûr de vous avoir remarqué.
07:57 Merci Philippe Augé, merci à vous, à l'Université de Montpellier d'être venu ce matin.
08:01 - Merci beaucoup. Vous habitez dans la métropole ou pas ?
08:02 - Oui.
08:03 - Donc c'est gratuit pour vous les transports, donc c'est du 21 décembre, vous savez.
08:06 - Tout à fait.
08:06 Pour ceux qui ne savent pas, sachez que nous avons un rendez-vous qui s'appelle "Mobilité, mode d'emploi".

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