L'Arkea Ultim Challenge Brest : ENTRETIEN ULTIM - ANTHONY MARCHAND

  • il y a 8 mois
La légende de la course au large, Loïck Peyron, accueille dans ses fauteuils les skippers participants à l'ARKEA ULTIM CHALLENGE - Brest pour des entretiens exclusifs.

© Polaryse & Nefsea
Transcript
00:00 [Musique]
00:09 On va faire sans filet.
00:11 [Musique]
00:14 Ça tourne les gars ?
00:16 [Musique]
00:18 Antho, ravi de te voir ici.
00:20 Merci Louis, bonjour.
00:22 Bonjour.
00:23 Qu'est-ce que c'est que cette histoire d'aller faire un tour du monde en solo sur ces engins là ?
00:26 Bah quelle histoire c'est ? Je sais pas dans quelle aventure je me suis lancé.
00:30 Une histoire un peu folle.
00:31 Je pense que ces bateaux sont aujourd'hui faits pour faire ce genre d'exercice.
00:36 Ça va être une première mais je pense qu'ils sont à maturité pour faire cet exercice.
00:40 Pour le coup ce bateau là l'a déjà fait ?
00:42 Pour le coup il l'a déjà fait mais il n'était pas en mode vraiment volant à ce moment là.
00:45 Donc il avait des bébés foils.
00:47 Mais aujourd'hui vraiment, François l'avait modifié pour le mettre vraiment en mode volant.
00:50 Donc il n'a pas refait le tour du monde en mode volant comme aujourd'hui.
00:54 Revenons à ton histoire.
00:56 T'as démarré comment ?
00:57 Et moi j'aime bien savoir depuis tout petit.
00:59 T'étais où depuis tout petit ? T'es né où ?
01:01 Alors moi je suis de Plérin dans les Côtes d'Armor.
01:03 Encore un bon temps.
01:04 Voilà.
01:05 Vers 8 ans, journée extrascolaire le mercredi après-midi.
01:07 On pouvait faire du char à voile sur nos grandes plages en Bretagne Nord.
01:10 Et de l'optimiste.
01:11 Et puis ça a été une découverte.
01:13 Il y avait un sentiment de liberté.
01:15 Et ça m'a vraiment plu.
01:16 Mais ta famille naviguait ? Non pas du tout justement.
01:18 Alors personne de ma famille navigue.
01:20 J'ai l'habitude de dire on est plutôt des terriens quoi.
01:22 Un vilain petit canard qui est parti dans la grande mer.
01:24 Qui est parti là-dedans.
01:25 Tout le monde se posait la question.
01:26 Mais qu'est-ce qu'il va faire sur l'eau ?
01:28 Parce que personne n'a mis des pieds sur l'eau.
01:30 Et après l'optimiste ?
01:32 Et après l'optimiste, j'ai continué.
01:34 J'ai fait du laser, j'ai fait du 4-7.
01:36 Le cursus olympique un peu classique.
01:38 J'avais 18 ans.
01:40 Et là j'envoyais des mails sur internet
01:42 à tous les grands skippers du moment.
01:44 En me disant je veux travailler dans une équipe de multicocs.
01:46 Qu'est-ce qu'il faut que je fasse ?
01:48 Et franchement tout le monde m'a répondu.
01:50 "Va à l'INB, fais ceci, fais cela."
01:52 Et donc il y avait une personne, un Yvan Brouillon
01:56 qui m'a répondu en disant
01:58 "Viens faire un stage chez nous chez Brossard."
02:00 C'était au mois d'été, au mois d'août.
02:02 A la fin de mon stage, j'ai commencé à travailler
02:04 sur le trimaran Sodebo avec Thomas Coville.
02:06 En tant que préparateur.
02:08 Bon jeune préparateur, tu passes pas mal de balais.
02:10 Et ensuite tu es devenu autonome.
02:12 Tu voulais.
02:14 Mais ton objectif c'est quoi à ce moment-là ?
02:16 Je ne connaissais pas trop la course au large.
02:18 Au traît, au olympisme.
02:20 En étant chez Brossard, j'ai rencontré
02:22 un ancien collègue d'optimiste
02:24 qui était Adrien Hardy.
02:26 Il avait un Mini 650 et il voulait faire la Mini Transat.
02:28 Je ne connaissais pas du tout ce milieu-là.
02:30 Et ça m'a plu.
02:32 J'ai voulu créer un projet Mini.
02:34 J'ai commencé à essayer de faire des régates en Mini.
02:36 Ça m'a amené à faire aussi un peu du Figaro.
02:38 Et qu'est-ce qui t'a amené directement à l'Ultime ?
02:40 Là on voit à peu près.
02:42 Oui, par contre, avant de faire du Figaro,
02:44 j'ai fait pas mal de multicocs.
02:46 Parce que c'était compliqué
02:48 de trouver des sous pour faire du Figaro.
02:50 Et donc j'ai pas mal fait de multis en tant que préparateur,
02:52 naviguant.
02:54 J'ai fait plusieurs traversées de l'Atlantique en voyage.
02:56 Et après j'étais réogleur en grand voile sur Sopra Group.
02:58 Donc voilà, j'ai plus goûté au final
03:00 à 20 ans, 22 ans, multicocs.
03:02 Et donc aujourd'hui je suis content.
03:04 C'est un peu le retour à mes premiers amours en fait.
03:06 Enfin mes deuxièmes amours. Mon premier amour c'était l'optimiste.
03:08 Ça reste l'optimiste ?
03:10 Pour moi, j'ai toujours dit
03:12 les deux bateaux les plus beaux au monde
03:14 c'est l'optimiste et l'ultime.
03:16 Ah oui ? C'est pire ça.
03:18 Mais même visuellement, je trouve qu'un optimiste
03:20 c'est juste magique avec sa petite vivarde.
03:22 C'est vrai,
03:24 ce qui est fascinant c'est ce que tu viens de décrire.
03:26 Les mômes qui découvrent
03:28 cette liberté, cette responsabilité aussi,
03:30 à la barre d'un petit engin.
03:32 Sans l'autorité,
03:34 sans avec une certaine liberté, c'est vrai,
03:36 mais malgré tout, un peu de contrainte.
03:38 Mais je pense que la série où il y a le plus de niveaux
03:40 au monde, c'est en optimiste.
03:42 Après, ils choisissent le 4 à marrants,
03:44 le 470, ils se dispatchent.
03:46 Mais là où c'est vraiment concentré,
03:48 condensé, c'est en optimiste.
03:50 Mais tu es un compétiteur né quand même.
03:52 Tu voulais te bagarrer un peu ?
03:54 Je ne suis pas très convoyage.
03:56 Mais t'en as fait beaucoup.
03:58 Il faut bien passer par là, mais en convoyage,
04:00 il manque quelque chose.
04:02 T'as fait combien de tours du monde ?
04:04 J'ai fait mon premier cet hiver, avec Biotherme
04:06 sur The Ocean Race.
04:08 T'as fait toutes les étapes ?
04:10 J'ai fait ma première tour du monde en ville,
04:12 je suis rentré pour faire ma calife en ultime,
04:14 et je suis reparti pour la fin de The Ocean Race.
04:16 Et là, tu es reparti en endroit, mais en solo.
04:18 Après, c'est mon premier tour du monde en ultime,
04:20 en solitaire, mais je suis quand même content
04:22 d'avoir fait le tour du monde avec Biotherme,
04:24 d'avoir ressenti un peu l'atmosphère du Sud,
04:26 la grisaille, la longueur, la houle, le vent,
04:28 parce qu'on parle tout le temps du Sud,
04:30 mais tant que j'y ai pas, c'est pas drôle tous les jours.
04:32 En fait, il y a quand même des choses
04:34 qui m'ont rassuré un peu d'y aller.
04:36 Des fois, on en fait des caisses sur certaines choses,
04:38 et en fait, ça va.
04:40 Je m'attendais à pire.
04:42 Tu fais beaucoup de préparation en solo ?
04:44 On fait du faux solitaire souvent ?
04:46 Moi, j'ai fait que du vrai.
04:48 Ma calife, j'ai fait en vrai,
04:50 et c'est un choix avec Team Actual,
04:52 avec Yves Le Bleuvec aussi,
04:54 parce que j'avais envie de ça.
04:56 Je suis toujours parti une semaine, tout seul,
04:58 sur le bateau, deux, trois jours.
05:00 J'ai fait ma calife pour la Route du Rhum
05:02 en tant que skipper remplaçant.
05:04 Ma calife pour le tour du monde solo,
05:06 c'est à chaque fois vraiment tout seul.
05:08 Est-ce que tu as déjà vécu des moments
05:10 un peu difficiles sur ce bateau-là ?
05:12 Ma calife en solitaire,
05:14 j'ai eu deux moments un peu chauds.
05:16 Le premier, j'étais sous
05:18 une petite gennake dans 25, 27 nœuds de vent.
05:20 J'avançais à 30, 35 nœuds.
05:22 J'avais un riz,
05:24 et puis je dormais, peinard, dans la nuit noire.
05:26 Je dormais dans ma banette.
05:28 Et le pilote, sans rien dire,
05:30 il se coupe.
05:32 Le bateau part au love.
05:34 Je me réveille un peu.
05:36 Partir au love, ça veut dire,
05:38 c'est le bateau qui tombe tout seul.
05:40 Il tombe tout seul et il va chercher
05:42 le face au vent.
05:44 Avec des voiles de portant,
05:46 pour aller chercher le face au vent,
05:48 il y a un moment un peu critique
05:50 où ça agite beaucoup.
05:52 Un peu étonné, le bateau très penché,
05:54 nuit noire, qu'est-ce qui se passe ?
05:56 Il a réussi à se mettre face au vent,
05:58 le bateau, voile qui batte,
06:00 une heure et demie pour rouler
06:02 dans l'eau qui était très gros
06:04 et très lourd.
06:06 J'ai endommagé un foil.
06:08 J'ai perdu le foil,
06:10 6 tonnes d'eau dans le flotteur.
06:12 - Et ça, c'est justement la plus grosse angoisse
06:14 de n'importe quel traversé nautique ?
06:16 - La plus grosse angoisse, c'est de taper
06:18 quelque chose qui traîne dans l'eau
06:20 et qui flotte.
06:22 Il ne faut pas stresser non plus là-dessus.
06:24 Ça sert à rien d'y penser, sinon tu vis mal
06:26 et tu ne vis plus.
06:28 Tu ne prends plus le plaisir à naviguer.
06:30 Il faut juste se forcer à dormir les pieds en avant,
06:32 toujours avoir une main pas très loin devant,
06:34 ne pas mettre sa tête à 10 cm
06:36 d'un meuble de winch en permanence.
06:38 Pourquoi pas être casqué
06:40 ou quelque chose comme ça,
06:42 mais il ne faut pas trop réfléchir, ça ne sert à rien.
06:44 - Quand on dit qu'oser,
06:46 déjà vous n'êtes pas beaucoup à pouvoir le faire,
06:48 mais le dosage,
06:50 tu ne crois pas que c'est la chose la plus intéressante
06:52 et la plus importante ?
06:54 - Sur un exercice comme ça, le dosage,
06:56 je pense que ça va être essentiel même.
06:58 Je pense que ces bateaux-là,
07:00 aujourd'hui, tout le monde navigue avec un certain rythme,
07:02 que ce soit sur les routes du Rhum, sur les Transat Jacques Vabre.
07:04 Le rythme sera sûrement différent
07:06 sur ce tour du monde.
07:08 Il va falloir essayer de trouver le juste milieu
07:10 entre le côté
07:12 bon marin, compétiteur.
07:14 Il va falloir jongler un peu entre les deux.
07:16 - Mais c'est toujours l'objectif principal
07:18 étant de finir si possible ?
07:20 - Moi, je me mets un deuxième objectif personnel,
07:22 c'est quand même d'essayer,
07:24 je ne vais pas y aller coûte que coûte,
07:26 si il y a moyen,
07:28 ce serait la cerise sur le gâteau,
07:30 de réussir à boucler ce tour du monde sans escale.
07:32 - Parce qu'aujourd'hui, on a le droit de s'arrêter.
07:34 - C'est des grosses pénalités.
07:36 On est obligé de rester au moins 24 heures.
07:38 On ne peut pas se racheter une boîte d'arrivo en Australie
07:40 et repartir 30 minutes après.
07:42 Mais voilà, de boucler la boucle,
07:44 ce tour, en plus, sans faire d'escale,
07:46 ça va être génial.
07:48 Ce serait ma petite victoire.
07:50 - C'est quand même l'aventure d'un tour du monde
07:52 qui t'intéresse plus que le résultat.
07:54 - Pour moi, ce genre d'exercice,
07:56 c'est l'aventure du tour du monde bouclé,
07:58 aujourd'hui.
08:00 Le résultat, il y a tellement d'aléatoires,
08:02 d'imprévus, que ce soit sur ton bateau
08:04 ou sur le bateau des concurrents,
08:06 que commencer à...
08:08 Et puis, je ne suis pas dans une posture,
08:10 aujourd'hui, où je peux dire
08:12 j'y vais pour gagner ou faire podium.
08:14 - Personne peut dire.
08:16 - Aujourd'hui, c'est prendre plaisir,
08:18 essayer de faire des belles trajectoires,
08:20 faire avancer le bateau
08:22 intelligemment, assez vite, tout le temps
08:24 et régulièrement, surtout,
08:26 pas avoir des journées où tu es à
08:28 103% de la polaire, à fond,
08:30 et puis d'autres journées, tu dors et tu es sous-toilé.
08:32 - La polaire, ce n'est pas ce qui sert à tenir chaud,
08:34 je précise. - Il y en aura aussi dans le sud.
08:36 - Il faut expliquer un petit peu.
08:38 La polaire, c'est les possibilités de vitesse.
08:40 - Les possibilités de vitesse du bateau, théorique.
08:42 - En possibilité de vitesse théorique,
08:44 tu es un peu en dessous. - En possibilité de vitesse théorique,
08:46 on est un peu en dessous des tout derniers bateaux, forcément.
08:48 - Mais pour le coup, sur un parcours comme celui-là,
08:50 on se nivelle un petit peu plus, plus la route est longue,
08:52 plus le parcours est long, plus les vitesses se
08:54 nivellent entre les concurrents.
08:56 Le but, c'est déjà de boucler ce tour du monde,
08:58 de faire une belle trajectoire,
09:00 de prendre plaisir, de ramener plein de bons souvenirs,
09:02 que ce soit pour moi ou pour l'équipe,
09:04 plein de belles images. - Et partager.
09:06 - Et partager, oui.
09:08 - Il y a du routage, au moins, il y a de l'assistance personnalisée.
09:10 - Ah, du routage, oui, complètement.
09:12 On a vraiment dessus la terre
09:14 qui nous route.
09:16 Alors, ils nous routent, ils ne nous autopilotent pas.
09:18 Ils vont à droite. Moi, je suis quelqu'un qui aime bien
09:20 faire tourner des fichiers, regarder où je veux aller
09:22 et ne pas suivre une trajectoire bêtement.
09:24 Donc, eux, à terre,
09:26 ils ont beaucoup plus de facilité pour télécharger
09:28 plein de fichiers, des images satellite,
09:30 des images de masse nuageuse,
09:32 les icebergs,
09:34 voilà, toutes ces choses-là.
09:36 Et voilà, donc ils nous mâchent beaucoup le travail,
09:38 mais je pense que la réflexion est pour tout le monde.
09:40 On aura notre réflexion aussi, à dire,
09:42 "Ben non, je pense qu'il ne faut pas faire ça,
09:44 il faut faire ça." Voilà, donc c'est une sorte d'échange
09:46 et d'un dialogue avec l'équipe routage à terre.
09:48 La gestion du sommeil,
09:50 sur ce type d'ultime ?
09:52 Ben, la gestion du sommeil,
09:54 que ce soit l'ultime ou d'autres bateaux,
09:56 ça ne change pas grand-chose.
09:58 Tu es à l'écoute du bateau.
10:00 En course large, la gestion du sommeil, c'est sûr qu'elle est importante,
10:02 mais il faut surtout se connaître soi-même
10:04 et apprendre comment soi-même
10:06 on fonctionne.
10:08 Est-ce que le facteur vitesse
10:10 et paradoxalement le confort, quand même,
10:12 parce que j'ai l'impression que ces bateaux sont paradoxalement
10:14 plus confortables que les IMOCA d'aujourd'hui,
10:16 est-ce que l'endormissement
10:18 est aussi facile ?
10:20 Malgré ?
10:22 C'est quand même beaucoup plus dur à haute vitesse, c'est très bruyant.
10:24 Avec les ultimes, l'avantage, contrairement à l'IMOCA,
10:26 c'est que ça ne tape pas trop.
10:28 Pour s'endormir, j'ai remarqué que tu ne peux pas dormir en ultime
10:30 de suite. Tu te dis, "Bon tiens, je vais aller me coucher."
10:32 Tu es obligé de regarder le pilote,
10:34 regarder, voir comment ça se passe,
10:36 pendant une heure, voire une heure et demie,
10:38 d'attendre qu'il ait eu des risées,
10:40 est-ce que ça a eu beaucoup la patte ? Non.
10:42 Tu es obligé d'être vigilant, et là, au bout d'une heure, une heure et demie,
10:44 tu te dis, "Je vais me mettre dans la bannette."
10:46 C'est encore un autre dossier, donc tu es là, "Ouais, c'est bruyant."
10:48 Et là, tu refais encore une demi-heure,
10:50 ou trois quarts d'heure,
10:52 en mode plus près des écoutes,
10:54 mais dans la bannette. Et je pense que
10:56 au fur et à mesure de la course,
10:58 tu t'endors de mieux en mieux.
11:00 Et c'est sûr que le problème, ça va être la première semaine.
11:02 Par contre, le fait de s'allonger et d'oublier la course,
11:04 déjà,
11:06 pendant une demi-heure, tu t'allonges,
11:08 ou tu écoutes de la musique ou pas,
11:10 et juste, tu reposes ton corps.
11:12 Tu mets du casque anti-bruit,
11:14 ou des choses comme ça ? J'ai un casque anti-bruit, ouais.
11:16 Mais qui ne te coupe pas tous les bruits.
11:18 En fait, ça ne coupe pas tous les bruits. On dirait que c'est fait pour.
11:20 Ça enlève vraiment tous les bruits qui ne servent à rien.
11:22 Les bourdonnements, des galopants,
11:24 tous les bruits un peu parasites.
11:26 Et par contre, tous les petits bruits aigus
11:28 de casse,
11:30 si tu tapes quelque chose, ça, tu les entends bien
11:32 avec les casques anti-bruit. Tu te souviens du nombre de fois
11:34 où tu t'es dit que... Tu te demandais ce que tu faisais là ?
11:36 Peu importe, tu l'as trouvé ?
11:38 Oui, oui, je pense que ça arrivait...
11:40 Ça a duré à chaque fois une seconde,
11:42 et ça a dû arriver 200 fois.
11:44 En fait, c'est souvent quand il y a de la mer et ça tape.
11:46 Et donc, tu n'avances pas.
11:48 Et quand le bateau va mal, non ?
11:50 Et tu sens que le bateau va mal, et tu n'avances pas.
11:52 Et tu te dis, mais qu'est-ce que je fais là ?
11:54 Pourquoi je m'inflige ça ?
11:56 Mais tout vit vite.
11:58 Même avant l'arrivée.
12:00 Le lendemain, tu as les bonnes conditions,
12:02 tu es là, mais heureusement que je suis là.
12:04 Ou quelques heures après, je ne sais pas, le front est passé.
12:06 Et voilà.
12:08 La gestion d'une équipe, c'est un poids supplémentaire pour un skipper ?
12:10 La gestion de l'équipe,
12:12 moi je suis chanceux,
12:14 parce que ce n'est pas moi qui m'en occupe.
12:16 Donc voilà, c'est justement Yves
12:18 qui m'a gentiment
12:20 prêté son bateau,
12:22 donné son bateau pour le tour du monde.
12:24 C'est vraiment lui qui gère ça,
12:26 et qui sait bien gérer ça,
12:28 et il trouve aussi une passion à gérer une équipe.
12:30 Ça c'est super.
12:32 C'est génial, c'est super.
12:34 Donc moi je ne gère pas trop ce côté-là.
12:36 Par contre, je sens une responsabilité vis-à-vis de l'équipe
12:38 de garder, on va dire,
12:40 en vie leur outil de travail.
12:42 Et voilà, je pense que c'est important
12:44 de prendre soin
12:46 de l'outil de travail commun qu'on a tous.
12:48 Un truc qu'on n'a pas abordé, c'est cette notion
12:50 un peu exceptionnelle malgré tout.
12:52 Oui, mais c'est forcément, et je n'arrive pas à le dire,
12:54 parce que je me force à ne pas dire
12:56 que c'est fou, que c'est exceptionnel, machin.
12:58 Mais inconsciemment, c'est peut-être pour ne pas me mettre trop de pression.
13:00 Et je préfère
13:02 plutôt banaliser la chose.
13:04 Alors c'est peut-être pas très bien,
13:06 médiatiquement parlant,
13:08 mais moi, mentalement parlant,
13:10 c'est une sorte de défense
13:12 ou de manière
13:14 où c'est déjà ma préparation psychologique
13:16 pour ce tour du monde-là. C'est de désacraliser
13:18 ou banaliser un peu par ce tour du monde.
13:20 Ce que je vais faire,
13:22 c'est normal. Mais normal dans mon
13:24 évolution professionnelle.
13:26 Enfin, normal.
13:28 C'est une chose pharaonique.
13:30 C'est vrai, mais d'un autre côté,
13:32 quand on analyse le truc, c'est pas la première fois que des multis vont faire
13:34 des tours du monde, en solo.
13:36 C'est pas la première fois que des marins vont le faire.
13:38 C'est la première fois que des bateaux aussi rapides font.
13:40 On est d'accord, il y a potentiellement moins de risques
13:42 de faire le Nouveau-Durham sur un Nord-Marc.
13:44 Les projets, les bateaux sont matures pour faire ce genre d'exercice.
13:46 Les marins aussi.
13:48 Et si les bateaux ne seraient pas
13:50 matures pour faire ça, on ne le ferait pas.
13:52 Si tout le monde décide de faire
13:54 cet exercice, c'est que c'est jouable.
13:56 C'est ce que je me dis.
13:58 Sinon, je suis...
14:00 Bien sûr que c'est jouable.
14:02 Et vous allez nous faire rêver,
14:04 les gars, une fois de plus.
14:06 C'est ça, c'est pas mal.
14:08 Il y a deux manières de faire un tour du monde aussi.
14:10 Moi, j'ai envie de faire un tour du monde et réussir à le faire,
14:12 mais à des vitesses élevées.
14:14 Réussir à avoir la sensation d'avoir tiré dessus.
14:16 Je n'ai pas non plus
14:18 envie de faire un tour du monde et me dire
14:20 "Ah ouais, c'est bon, j'ai fait le tour de la planète en solitaire,
14:22 mais au ralenti, histoire d'absolument le faire."
14:24 Ce qui n'est pas le cas sur Vendée Globe,
14:26 on est d'accord.
14:28 Il y a des choix aussi.
14:30 Je pense que tous les gens qui sont en ultime,
14:32 on a le même choix.
14:34 J'y vais en mode compétiteur
14:36 et je tire sur le bateau.
14:38 Merci Anto.
14:40 Merci à toi.
14:42 [bruit du bateau]
14:58 [SILENCE]

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