L'interview d'actualité - Marie-Hélène Baylac

  • il y a 8 mois
Marie Portolano reçoit Marie-Hélène Baylac, elle était professeure d'histoire géographie à l'école alsacienne de Paris. Elle a été l'enseignante de Gabriel Attal et nous décrit quel élève il était. 

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Transcript
00:00 Bonjour Marie-Hélène, merci beaucoup d'être avec nous.
00:02 Alors vous étiez professeure d'Histoire-Géo à l'école alsacienne à Paris.
00:06 Dans vos classes, Gabriel Attal, le plus jeune ministre de la Ve République,
00:10 vous l'avez eu au lycée ?
00:12 - Au premier rang terminal.
00:13 - Premier et terminal. Il était au premier rang ou pas ? Dites-nous la vérité.
00:15 - Non, non, il n'était pas au premier rang, il n'était pas au fond de la classe,
00:18 il était, je ne sais pas, au deuxième, troisième, je dois dire que je ne me souviens plus très bien.
00:22 C'était un élève attentif, ça je peux vous le garantir, concentré.
00:26 - J'ai une question parce que concrètement, en tant que prof, on ne peut pas se souvenir de tous ces élèves.
00:31 Vous vous souvenez vraiment de lui ?
00:32 - Oui, on se souvient quand même de certains élèves.
00:34 - Et pourquoi lui alors ?
00:36 - Lui et d'autres parce que, je dirais, il sortait du lot.
00:41 Dans une classe, vous savez, d'ailleurs c'est amusant dans une classe,
00:44 je ne vais pas donner les statistiques, mais vous avez pratiquement un tiers d'élèves qui sont assez…
00:51 enfin qu'on oublie.
00:52 - Et lui, il ne l'était pas.
00:54 - Et lui, il ne l'était pas, mais il ne se manifestait pas.
00:57 Mais il y a des élèves, de par la façon de travailler, les copies qu'ils rendent,
01:03 leur attitude, leurs résultats, dont on se souvient davantage, bien sûr.
01:07 - Alors, comment était-il comme élève ?
01:10 Et quand je vous dis ça, je vous demande de donner de l'espoir à tous les lycéens qui sont en train de regarder
01:14 et qui se disent « j'en ai marre, j'ai eu des mauvaises notes à mon contrôle d'histoire ».
01:17 Comment il était, lui ? Est-ce qu'il était vraiment premier de la classe ?
01:19 - Non, il n'était pas premier de la classe.
01:21 C'était un très bon élève, mais de toute façon, il n'y a pas de premier de la classe,
01:24 surtout à l'école algérienne.
01:26 Et puis, dans la classe où il était, cette année-là, en 2007,
01:30 tous les élèves ont eu le bac, bien sûr, du premier cours, mais beaucoup avec mention.
01:35 Et lui, en plus, il a intégré tout de suite Sciences Po par concours,
01:38 puisqu'à l'époque, on passait un concours.
01:39 - Directement après le bac.
01:40 - Donc, il n'était pas premier de la classe, il faisait partie du groupe des très bons élèves.
01:45 - Vous avez un souvenir particulier de lui qui vous revient comme ça ?
01:48 - J'ai un souvenir, oui, que j'ai déjà dit plusieurs fois.
01:51 Un jour, il vient me voir à la fin du cours, comme ça arrivait souvent,
01:55 les élèves aiment bien venir échanger à la fin parce qu'ils peuvent poser des questions.
01:59 - C'est les faillots, ça ?
02:00 - Non, pas du tout.
02:01 - Si, si.
02:02 - Non, parce que vous avez des fois des élèves timides,
02:04 qui n'ont pas compris quelque chose, ce n'était pas son cas,
02:06 et qui viennent poser une question à la fin du cours
02:08 parce qu'ils n'ont pas osé la poser dans leur camarade, parce qu'ils auraient eu l'air idiots.
02:12 - Alors, qu'est-ce qu'il vous a demandé ?
02:13 - Alors, lui, il est venu et il m'a demandé si, au vu de ses résultats,
02:16 je pensais qu'il avait une chance d'intégrer Sciences Po.
02:18 - Et vous lui avez dit ?
02:19 - Oui.
02:20 - Et il l'a intégré par concours.
02:22 - Il l'a intégré tout de suite.
02:23 - Vous avez senti quelque chose chez lui, une impétence particulière pour la politique,
02:26 ou pas du tout ?
02:27 - Oui, oui, oui.
02:28 De toute façon, quand il était en terminale, même s'il ne manifestait pas du tout en classe,
02:32 il était déjà au PS.
02:34 Et puis cette année, justement, de 2007, c'était une année électorale.
02:37 - Présidentielle.
02:38 - Et donc, il avait organisé à l'école des élections avec ses camarades,
02:44 donc absolument dans les normes, tout avait été mené parfaitement.
02:48 Et donc l'école alsacienne a voté pour son président.
02:53 Et c'était déjà à l'époque, ni droite ni gauche, puisqu'elle a voté pour…
02:58 - C'était déjà macroniste, quoi.
02:59 - Voilà. Non, non, c'était pas macroniste.
03:01 - Alors, vous dites que certains profs se souviennent d'élèves,
03:06 et nous, les élèves, évidemment, on se souvient…
03:08 - De certains profs, absolument.
03:10 - De certains profs qui nous ont marqués.
03:11 Lui, ça a été son cas avec vous.
03:13 Il vous a rendu hommage lors de sa passation de pouvoir avec Pape-Edie à l'éducation.
03:18 Pourquoi vous pensez qu'il se souvient de vous comme ça ?
03:21 - Vous savez, c'est difficile à dire.
03:23 J'ai d'autres élèves avec lesquels je suis encore en contact.
03:27 On ne sait pas.
03:28 C'est justement le miracle, la gratitude, mais aussi le miracle du métier de professeur.
03:33 C'est qu'on s'aime sans rien savoir.
03:36 Et puis finalement, quand même, ça sert à quelque chose.
03:39 - Qu'est-ce que ça vous a fait quand vous avez entendu votre nom ?
03:42 - Alors, je vais vous dire, je ne l'ai pas entendu
03:44 parce que je n'ai pas écouté la passation de pouvoir.
03:47 Je l'ai appris parce qu'un journaliste m'a envoyé un mail
03:50 en me disant "Voilà, qui êtes-vous, Madame Bélac ?"
03:53 Et du coup, j'ai regardé, évidemment.
03:55 Ça m'a émue parce que c'est quand même extrêmement gentil de sa part.
04:00 Et puis, bon, je ne suis pas la seule.
04:03 - Vous êtes toujours en lien avec lui ?
04:04 - Oui, de temps en temps.
04:05 - Vous lui avez écrit pour le féliciter ?
04:07 - Je lui ai félicité.
04:08 - Il vous a répondu ?
04:09 - Non. Vous croyez qu'hier après-midi, il avait autre chose à faire
04:11 qu'à répondre à tous les SMS qu'il a dû recevoir.
04:15 - Et alors, en tant que prof, comment vous l'avez trouvé
04:17 au ministère de l'Éducation nationale ?
04:19 Il n'est resté que six mois.
04:20 - Ah non, non, mais j'ai trouvé formidable.
04:22 Parce que je vais vous dire, il y avait notamment une grande idée que j'avais
04:25 parce que moi, quand j'ai commencé à enseigner,
04:26 il y avait encore ce qu'on appelait les classes de niveau.
04:28 C'est avant la réforme à bi.
04:30 Et puis, il y a eu cette réforme à bi,
04:31 on a décidé qu'il fallait mettre tous les élèves ensemble.
04:34 Par exemple, moi, je suis normalienne.
04:37 Quand je suis sorti de l'école,
04:39 on m'a nommée dans un collège sur une zone de transit.
04:42 Parce qu'il fallait que les meilleurs profs, entre guillemets,
04:45 aillent aux élèves les plus faibles.
04:47 Donc, il y avait cette espèce d'idéologie,
04:50 à mon avis, complètement idiote,
04:52 que l'égalité était à ce prix-là, alors que ce n'est pas du tout ça.
04:56 Moi, j'ai eu les deux types de classes.
04:58 Quand vous avez une classe où tout le monde est mélangé,
05:00 alors ce n'est pas le cas à l'école Alsaciel,
05:01 parce qu'il n'y avait pas d'élèves faibles, vraiment faibles,
05:03 mais vous ne faites cours ni pour les meilleurs,
05:06 ni pour les plus faibles.
05:07 - Et donc, vous pensez que c'est ça qui l'a véhiculé ?
05:08 - Ça, je trouve ça formidable.
05:09 Bon, après, il y a toutes les mesures qu'il a prises.
05:12 - Vous êtes d'accord avec toutes les mesures ?
05:13 - Ah oui, oui, toutes.
05:14 - Et qu'est-ce que vous pensez qu'il va apporter
05:15 en tant que Premier ministre, concrètement ?
05:17 - Je pense qu'il va apporter une méthode,
05:20 c'est-à-dire sa façon d'agir, qu'il a depuis très longtemps.
05:23 On le voyait quand il était encore très jeune,
05:26 sur cette capacité à cerner les problèmes de manière posée,
05:30 sans excitation, grâce à une intelligence
05:34 et des capacités, je dirais, inhabituelles.
05:37 Et puis, seulement après, à essayer de voir les mesures concrètes.
05:41 Et je pense qu'il va apporter ce pragmatisme,
05:44 du moins je l'espère, et qu'il va pouvoir
05:47 diffuser cette méthode au sein du gouvernement.
05:49 - Donc vous, vous y croyez à Gabriel Attali,
05:51 Premier ministre ?
05:52 - J'y crois, bien sûr.
05:53 - J'imagine que vous avez eu d'autres politiciens, non,
05:56 dans votre carrière, qui sont passés à l'école asiatique ?
05:58 - Pas de politiciens assez haut niveau,
05:59 mais j'ai eu plusieurs élèves qui sont à haute fonction publique, oui.
06:01 - D'accord.
06:02 - J'en ai eu dans le monde artistique.
06:04 - Vous n'avez jamais eu de Premier ministre ?
06:05 C'est la première fois.
06:06 - J'ai jamais eu de Premier ministre, quand même.
06:08 - Merci beaucoup Marie-Hélène Bellac.
06:09 Je souligne quand même que le 25 janvier prochain,
06:11 vous sortez un nouveau livre consacré à Louise Michel,
06:13 aux éditions Perrin.
06:14 Merci beaucoup d'avoir été avec nous.

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