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Une nouvelle prise à droite pour Emmanuel Macron : pugnace mais clivante, symbole de la diversité, la sarkozyste Rachida Dati, maire du VIIe arrondissement de Paris, a être nommée jeudi ministre de la Culture, deux ans avant les municipales où elle ambitionne de conquérir Paris. Pour en parler, Frédéric Mitterrand, ancien ministre de la Culture.
Regardez L'invité de RTL du 12 janvier 2024 avec Amandine Bégot.

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00:02 RTL matin
00:06 RTL 7h43 bienvenue à vous tous qui nous rejoignez. Amandine Bégaud vous recevez donc ce matin notre ancien ministre de la culture Frédéric Mitterrand.
00:13 Frédéric Mitterrand, ce milieu de la culture vous le connaissez parfaitement, vous y avez toujours évolué.
00:19 Vous nous disiez la nomination de Rachid Haddati c'est une surprise pour vous, une bonne surprise.
00:24 C'est une bonne surprise et je pense que c'est une bonne surprise pour le monde de la culture. Mais je pense qu'il y a une première chose qu'il faut noter,
00:31 qui est quand même très importante et je suis très surpris que personne ne le relève,
00:35 c'est que le ministère de la culture c'est aussi le ministère de la culture et la communication.
00:39 Or le monde de la communication quand on a créé ce ministère avec deux têtes,
00:44 il y avait quatre chaînes de télévision dont deux en noir et blanc. Maintenant ça n'a plus aucun rapport.
00:50 Et donc le problème de la communication c'est qu'il dévore le fonctionnement du ministère.
00:55 Donc soit elle a un très bon directeur de cabinet et une équipe très forte,
01:01 ce qu'elle est tout à fait capable de faire, la montrer.
01:04 Avec des gens qui ont un air solide parce qu'elle a du caractère et qu'elle travaille beaucoup.
01:09 Soit elle a un secrétariat d'état
01:12 qui lui est attaché et qui lui obéit et qui la suit. Mais gérer l'ensemble
01:20 c'est un travail de fou et qui ne permet pas vraiment
01:24 d'avoir le temps de réflexion et de construction nécessaire. Il faut bien voir que la communication fait aussi partie de la culture bien sûr.
01:32 Puisque au fond l'essentiel des informations et
01:36 finalement des références culturelles que l'on peut avoir, on les a à travers la télévision aujourd'hui et à travers les réseaux sociaux.
01:43 Et les plateformes.
01:44 Voilà donc ça veut dire que
01:46 déjà il y a cette première question là.
01:49 Alors cette question on peut la résoudre en ayant un cabinet très très solide, très très fort et je pense qu'elle y arrivera.
01:55 La deuxième chose qui est importante c'est d'avoir un soutien en permanence
01:59 du gouvernement, du premier ministre et du président de la république.
02:03 Il ne faut pas se cacher, les grands ministres de la culture ou les bons ministres de la culture
02:08 sont toujours été les présidents de la république. - C'est un ministère très difficile.
02:12 - Oui, c'est un ministère très très difficile parce qu'on est à la fois
02:17 le ministre des artistes qu'il faut défendre envers et contre tout, mais qui n'ont évidemment aucune reconnaissance.
02:23 C'était la phrase de Maurice Druon qui a été un très bon ministre de la culture, mais qui en revanche a trouvé la vraie phrase
02:30 qui a dit "ils viennent vous voir avec la sébille dans une main et le cocktail molotov dans l'autre".
02:34 Et on sait jamais ce qu'ils vont vous envoyer à la figure. - Mais c'est vraiment comme ça ?
02:38 Vous qui l'avez vécu ? - Absolument, c'est tout le temps comme ça.
02:40 C'est tout le temps comme ça et c'est d'autant plus comme ça que le monde de la culture
02:45 est très étatisé en France. Ça date de François 1er,
02:50 l'arrivée de Léonard de Vinci, ça a toujours été comme ça. Et donc c'est très étatisé, donc il y a une bureaucratie culturelle très très importante.
02:59 Tous les directeurs de théâtres régionaux sont extrêmement
03:04 soucieux de leur indépendance et de leurs sous. Ils sont donc toujours
03:09 en gros hostiles.
03:12 De toute façon les artistes d'une manière générale sont hostiles à l'État.
03:15 Et donc si l'État est connoté comme étant plutôt de droite, ils sont encore plus hostiles.
03:21 - Mais alors comment on fait face à ces artistes ? - On travaille.
03:25 - François Hollande disait à Fleur Pellerin, je sais pas si vous vous souvenez de cette séquence, elle est assez savoureuse,
03:30 - Il a eu tort de dire ça. - Il disait, je rappelle pour nos auditeurs,
03:32 - Il a eu tort de dire ça et il a eu tort de l'accepter.
03:35 Oui il a dit "vous allez voir les artistes, vous allez au théâtre, vous leur dites que c'est très bien" et voilà.
03:39 François Hollande qui est par ailleurs un homme tout à fait honorable, mais il a eu tort de dire ça.
03:43 Mais les politiques n'aiment pas vraiment la culture.
03:46 Il y a eu, malheureusement,
03:48 c'est ça où c'est très important, c'est que le ministre de la culture c'est aussi le président de la République.
03:53 Donc quand c'était François Mitterrand, il y avait Jacques Lang, ils marchaient sur le même pas, c'était la même chose.
04:00 Quand il y a eu
04:01 Giscard d'Estaing, pendant deux ans il a eu un ministre de la culture absolument formidable.
04:06 Après il l'a débarqué, il considérait que c'était une de ses plus grandes erreurs.
04:10 Un président de la République c'est le ministre de la culture.
04:13 Regardez la manière dont Emmanuel Macron
04:16 s'occupe de Versailles.
04:19 Il a raison, en plus il a raison. Tout le monde lui est tombé dessus, mais il a raison.
04:23 La manière dont il s'occupe de Notre-Dame qui sera le grand chantier culturel, mais patrimonial.
04:28 La manière dont il s'occupe de
04:31 la maison de la francophonie, mais patrimonial.
04:34 - Dont il a défendu aussi le passe culture.
04:36 - Il défend plutôt le patrimoine, d'où l'importance d'ailleurs, à juste titre, et c'est très bien de Stéphane Bern.
04:42 Mais en même temps, la culture c'est quelque chose qui évolue sans cesse, c'est quelque chose qu'il faut créer, qu'il faut
04:48 accompagner sans cesse.
04:50 - Je reviens sur Rachida Dati, Frédéric Mitterrand.
04:52 Beaucoup disent ce matin qu'elle n'y connaît rien.
04:54 - Oui, elle n'y connaît rien, mais c'est pas grave.
04:56 - Il n'y a pas besoin de s'y connaître pour être ministre de la culture.
04:58 - Il faut savoir comment marche l'État, surtout, et avoir autour de soi des gens qui sont très compétents et très capables.
05:05 D'où l'importance d'avoir un directeur de cabinet de première qualité, une équipe de très grande qualité.
05:10 Moi, par exemple, quand je suis devenu ministre, j'étais paniqué, donc j'ai constitué un cabinet trop rapidement.
05:17 Et après, finalement, comme je suis plutôt gentil, je ne suis pas entré en conflit avec mon cabinet.
05:23 Erreur.
05:24 - Donc ça, vous lui dites, surtout prend ton temps pour constituer ton cabinet.
05:28 - Prends ton temps pour constituer ton cabinet, et prenez des gens en qui vous avez totalement confiance,
05:34 et qui vous suivront quoi qu'il arrive.
05:36 Et qui sont compétents, surtout qui sont compétents.
05:38 - Il y a d'autres conseils à lui donner ?
05:40 - Non, mais c'est le principal.
05:41 Faire attention aux nominations.
05:43 En fait, à partir du moment où elle devient ministre de la culture,
05:47 et où elle a un président de la République qui aspire à être ministre de la culture,
05:52 ça va être son ennemi.
05:54 C'est-à-dire celui avec lequel il va falloir qu'elle se batte.
05:57 Alors, heureusement, elle a un premier ministre absolument remarquable, je le connais.
06:03 Je le connais un peu, mais suffisamment pour vous dire qu'il est extraordinairement remarquable.
06:07 Juste une anecdote, une seconde.
06:09 Quand j'étais à la Villa Médicis, on m'a nommé un stagiaire de l'ENA.
06:14 Et donc, j'ai vu arriver Gabriel Attal.
06:17 - C'était votre stagiaire à la Villa Médicis ?
06:19 - Une demi-heure, parce qu'après une demi-heure, on m'a nommé ministre, donc je suis reparti.
06:23 En une demi-heure, j'ai pris la mesure.
06:27 J'en avais vu des freluqués qui arrivaient pour essayer de faire des trucs.
06:31 En une demi-heure, je me suis dit "mais celui-là, il est extraordinaire".
06:34 - En une demi-heure, vous vous êtes dit "il ira loin" ?
06:36 - Ah bah oui, je me suis dit "il faut que je reste avec lui, il ne faut pas que je devienne ministre, il va m'apprendre plein de choses".
06:43 - La nomination de Rachid Al-Attahi, c'est un coup politique formidable ?
06:46 - Oui, c'est un coup politique formidable.
06:47 - Ça tue l'ALR ou pas ?
06:48 - On a un gouvernement. Non, c'est pas tant que ça.
06:50 Ça tue la droite.
06:52 C'est-à-dire le fait que la droite, maintenant, va de Éric Ciotti à Bardella.
06:57 Alors, première chose, d'abord, il vaut mieux s'engueuler avec le président de la République et le Premier ministre, avec Éric Ciotti,
07:03 qui est quand même un tout petit petit monsieur.
07:05 Et puis, c'est déjà beaucoup plus intéressant.
07:08 Et puis, par ailleurs, et puis c'est plus positif,
07:11 et par ailleurs, c'est sûr qu'on va dans le domaine de la culture et de l'image que la culture porte en France.
07:19 Parce que la culture, c'est très important pour les Français.
07:22 Tous les Français savent qui est le ministre de la Culture, ils ne savent pas qui est le ministre des Comptes Publics.
07:25 Ils savent qui est le ministre de la Culture.
07:27 À partir du moment où on va avoir un ministre de la Culture, une ministre de la Culture,
07:31 très offensive, très... qui tiendra fortement les enjeux de la culture,
07:37 à partir de ce moment-là, on aura un argument très puissant face à la droite qui nous menace, quand même,
07:44 qui est très proche, la droite extrême.
07:46 Il y a peut-être une petite difficulté, et l'on est moindre peut-être, pour Rachida Dati,
07:50 c'est qu'elle est nommée, alors même qu'elle est mise en examen pour corruption et trafic d'influence.
07:54 On le rappelle, alors, il y a Gabriel Attal...
07:57 Ils sont tous mis en examen...
07:59 Il faut vraiment avoir des nerfs d'acier pour devenir ministre.
08:03 Premièrement, votre femme ne vous parle plus, si c'est bon.
08:07 Deuxièmement, parce que vous n'avez plus le temps de la voir.
08:09 Deuxièmement, vous avez des journalistes qui couchent sur votre palier toute la journée à vous casser les pieds.
08:14 Et troisièmement, vous avez des juges qui préparent depuis le début votre mise en examen.
08:18 Alors, donc, elle est mise en examen, je ne sais même pas si elle est mise en examen.
08:22 Elle est mise en examen et...
08:23 D'accord, mais ce n'est pas la seule.
08:24 Bon, mais présumée innocente, on le rappelle d'ailleurs,
08:27 et elle se défend depuis le début sur cette histoire, ça n'a aucune importance.
08:30 Dites-vous, dernière question, Rima Abdelmanach, qui a précédé...
08:34 Elle a été très bien très appréciée d'ailleurs dans le monde de la culture.
08:36 Juste un mot, c'est l'affaire Depardieu qui lui coûte quand même visiblement sa place, non ?
08:41 Vraiment pas ?
08:42 Non, je ne pense pas.
08:42 Elle va devoir se positionner, Rachida Dati, sur l'affaire Depardieu ?
08:45 Je ne sais pas, j'espère pas, j'espère qu'elle ne s'en occupera pas.
08:48 Ça ne relève pas de la politique ni de l'État.
08:51 L'affaire Depardieu, ça a fait divers, très grave, très important, tout ce que vous voulez,
08:55 mais ça ne relève pas de...
08:57 Le ministre de la Culture n'a rien à dire sur celui-là ?
08:59 Ah non, non, rien à dire.
09:00 Mais je ne pense pas que Rima paye ça.
09:03 Rima était une excellente ministre, qui connaissait les dossiers extrêmement bien.
09:08 Le problème, c'est qu'elle n'avait pas d'épaisseur politique.
09:11 Elle n'avait pas de...
09:12 Bon, tandis que là, Gabriel Attal, de manière incroyable,
09:16 déjà, il a une épaisseur politique considérable.
09:19 Merci beaucoup, Président.
09:20 Merci à vous.
09:21 Merci à vous de venir commenter ce matin cette nomination.
09:23 Elle n'y connaît rien, ce n'est pas...
09:25 [SILENCE]

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