100% Sénat - Narcotrafic : les parquets situés en zone rurale auditionnés

  • il y a 7 mois
100% Sénat diffuse et décrypte les moments forts de l'examen des textes dans l'Hémicycle, ainsi que des auditions d'experts et de personnalités politiques entendues par les commissions du Sénat.
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00:00:00 [Musique]
00:00:10 Bonjour à tous, ravi de vous retrouver pour un nouveau numéro de 100% Sénat,
00:00:13 l'émission qui vous fait vivre les travaux de la Haute Assemblée.
00:00:17 Le Sénat poursuit sa commission d'enquête sur le narcotrafic.
00:00:20 Les sénateurs auditionnent aujourd'hui des magistrats de parquets situés en zone rurale,
00:00:25 les parquets de Bayonne et de Bourg-en-Bresse.
00:00:27 Je vous laisse écouter ces auditions.
00:00:29 Je suis procureure de la République à Bourg-en-Bresse depuis le 23 juin 2023,
00:00:35 donc quelques mois seulement, avec un recul sur ce ressort que je suis en train de découvrir.
00:00:41 Mais néanmoins, j'ai été procureure à Mâcon de 2011 à 2018,
00:00:45 et donc frontalière de ce ressort,
00:00:47 donc ça me permettait également d'avoir une connaissance un peu indirecte.
00:00:51 Un ressort de 680 000 habitants environ,
00:00:54 7 562 kilomètres carrés, ce qui me permet de dire qu'en effet,
00:01:00 nous avons des particularismes très différents,
00:01:03 avec des zones géographiques qui se répartissent peu ou prou entre les quatre compagnies de gendarmerie,
00:01:10 puisque nous avons un secteur gendarmerie à Bourg-en-Bresse,
00:01:15 une compagnie à Trévoux qui va être plutôt frontalière de Lyon,
00:01:19 avec un axe qu'on appelle la côtière,
00:01:22 qui géographiquement va amener des trafics qui viennent de la région lyonnaise,
00:01:28 et avec un axe autoroutier qui nous amène effectivement une porosité sur ce secteur de Trévoux.
00:01:35 Le secteur de Belay, plutôt limitrophe de la Haute-Savoie,
00:01:39 avec pour le coup une compagnie à Belay plus rurale et plus montagnarde,
00:01:45 mais néanmoins la proximité de Chambéry et puis l'Isère pas très loin,
00:01:49 et puis le pays d'Gex qui présente le particularisme d'être totalement frontalier de Genève,
00:01:55 puisque là on est à quelques encabulures de Genève,
00:01:59 et avec effectivement une coopération à cultiver avec les autorités suisses.
00:02:04 En secteur police, deux commissariats, l'un basé à Bourg-en-Bresse, l'autre à Ollonnaz,
00:02:10 c'est la direction départementale de la police de l'un,
00:02:15 et avec la particularité, mais j'y reviendrai, de quatre OPJ spécialisés en stupéfiants,
00:02:21 uniquement à Bourg-en-Bresse, avec effectivement des effectifs à Ollonnaz inexistants sur la spécialisation stupéfiants.
00:02:30 Donc exclusivement des OPJ basés à Bourg-en-Bresse.
00:02:35 47 000 affaires pénales reçues, environ 4000 affaires poursuivables,
00:02:43 et j'y reviendrai là aussi, je pense que dans notre échange on approfondira un petit peu les chiffres en matière de stupéfiants.
00:02:52 Globalement une grande masse d'usages de stupéfiants, avec une baisse significative sur les deux dernières années,
00:03:00 liée notamment évidemment à l'amende forfaitaire délectuelle,
00:03:03 mais aussi peut-être à des politiques un petit peu différentes sur le terrain,
00:03:08 puisqu'on est passé de 800 affaires de stupéfiants avec une assez forte proportion de mineurs,
00:03:14 à aujourd'hui un peu plus de 200-250 affaires qui sont soumises au parquet.
00:03:20 Là je parle de l'usage pur et donc de l'axe traitement des affaires de stupéfiants,
00:03:26 sous l'axe plutôt usagé, sous l'axe addiction, qui est un axe particulier,
00:03:31 avec pour le parquet quand même deux observations. L'absence de médecins relais,
00:03:38 donc des grandes difficultés de prise en charge sur le plan sanitaire,
00:03:42 puisque le traitement des addictions souffre de délais importants,
00:03:46 des associations en matière de lutte contre les addictions en nombre insuffisant et des difficultés de prise en charge,
00:03:53 et puis effectivement une part de mineurs qui tend aujourd'hui à se réduire encore
00:03:59 dans le traitement des stupéfiants sur cet axe très usagé,
00:04:03 du fait de l'audition libre et du fait de la réforme des mineurs,
00:04:07 qui nous a impactés dans le sens où nous avons des avocats qui ont des permanences sectorisées,
00:04:15 donc quatre ressorts, quatre arrondissements différents, qui se déplacent assez peu,
00:04:20 et donc on regroupe les auditions de mineurs dans les brigades de gendarmerie,
00:04:25 une journée par mois, avec des grandes difficultés de disponibilité des uns et des autres,
00:04:30 puisque territoire très vaste, disponibilité des avocats liés à la difficulté de dédier des permanences aux affaires de mineurs,
00:04:38 et donc quasiment plus d'auditions libres avec un stock qui se crée dans les services de police et de gendarmerie,
00:04:44 et notamment, si je le cite ici, en matière d'usage, puisque c'était une de mes interrogations en arrivant,
00:04:51 c'était dire "je suis étonnée de la chute drastique des affaires en nombre de mineurs",
00:04:56 et de fait, il y avait une forte proportion d'usagers de stupéfiants,
00:04:59 avec des orientations souvent en alternative sur de la prise en charge sanitaire.
00:05:04 Donc ça, ça n'existe quasiment plus.
00:05:06 Il y a une réflexion à l'œuvre sur la façon de traiter aujourd'hui ces procédures,
00:05:11 et puis il y a un stock de 400 procédures non traitées en matière de mineurs,
00:05:16 dû faire, encore une fois, de ces problématiques.
00:05:18 Donc ça, c'est les deux impacts.
00:05:21 Ensuite, pour la réponse pénale, et pour ne pas abuser du temps de mon collègue,
00:05:27 mais ensuite on reviendra dans le détail, des axes de transit,
00:05:32 donc on a, là je parle du trafic cette fois, donc des faits de transport, des tensions off-session,
00:05:37 on a des axes autoroutiers assez importants,
00:05:40 beaucoup d'affaires de comparution immédiate lorsque c'est du simple transit,
00:05:45 avec toujours la même difficulté de la preuve, et de fait de remonter les réseaux,
00:05:50 puisque ce sont souvent des affaires traitées un peu en, pardonnez-moi du terme,
00:05:55 mais en one-shot sur le transporteur, et de fait sur la saisie du produit,
00:06:00 mais assez peu sur finalement les réseaux, puisqu'on a peu d'éléments à exploiter.
00:06:05 Des affaires qui partent alors à contrario à l'instruction dans le cadre,
00:06:11 et ma collègue sera là aujourd'hui pour vous illustrer quelques dossiers un peu significatifs,
00:06:15 qui partent à l'instruction sur des dossiers où là on remonte des filières,
00:06:20 c'est souvent des filières en lien avec Lyon, c'est étonnamment,
00:06:25 et quand je dis étonnamment, c'est en tout cas encore à mon stade,
00:06:28 l'étonnement de ma part de constater que nous n'avons pas de filière,
00:06:32 en tout cas identifiée, mise à jour avec l'axe Genevois,
00:06:36 donc pas de demande d'entraide pour le moment dans ce sens-là,
00:06:39 alors que de fait les trafics existent, mais il n'y a pas d'affaires
00:06:43 qui se sont portées sur cet axe du pays de Gex et de Genève,
00:06:48 donc pas de demande d'entraide en cours, en revanche pas mal d'affaires avec Lyon,
00:06:52 et avec des fournisseurs lyonnais, ou en tout cas en provenance de cette filière lyonnaise,
00:06:58 12 commissions rogatoires en stock, ça veut dire 12 affaires au total,
00:07:02 et elles ont une moyenne d'âge entre 18 mois et 3 ans,
00:07:07 donc sur les 3 dernières années, on a un stock de 12 affaires,
00:07:11 5 affaires d'instructions par an, ce qui est assez faible en nombre,
00:07:17 mais représente quand même la majorité des mises en examen et des détenus,
00:07:21 puisque nous avons 39 mises en examen en matière de stupéfiants,
00:07:25 donc des dossiers avec de nombreuses mises en examen,
00:07:28 15 détenus à l'heure actuelle, et parfois des ramifications avec la Girse de Lyon,
00:07:35 qui nous permettent de dire qu'effectivement le haut du panier se situe sur la région lyonnaise,
00:07:41 évidemment au-delà, puisque c'est des réseaux d'approvisionnement en cannabis,
00:07:45 principalement depuis l'Espagne, et que nous avons un peu des bases arrières,
00:07:50 récemment une affaire qui a débouché sur Bourg-en-Bresse même,
00:07:53 avec un fournisseur local très établi dans la place,
00:07:57 et qui sera vitaillé sur la zone lyonnaise.
00:08:00 Donc ça c'est un peu la configuration réponse pénale,
00:08:03 donc finalement peu d'affaires qui aboutissent à l'instruction,
00:08:06 les affaires de trafic du tout venant, qui vont souvent en comparution immédiate,
00:08:11 ou en comparution en délai rapproché,
00:08:14 puis des petites affaires de points de deal locaux,
00:08:16 donc là on arrive vraiment au niveau du terrain et du local,
00:08:21 avec pour le coup des réponses assez diversifiées,
00:08:24 qui vont aller depuis la COPJ devant le tribunal,
00:08:28 à des réponses effectivement, comme je vous l'indiquais, au niveau des usagers,
00:08:32 qui vont être des alternatives aux poursuites.
00:08:35 Alors avec un petit focus, et je vous ai envoyé le panorama géographique
00:08:39 sur les points de deal répertoriés,
00:08:42 qui sont les points de deal répertoriés sur lesquels ont travaillé les services de police locaux.
00:08:47 Alors il y en avait 19, mais ce qui représente très peu par rapport à la réalité du terrain,
00:08:52 c'est-à-dire les 19 identifiés sont ceux sur lesquels les services se sont focalisés,
00:08:58 et ont travaillé au cours des deux dernières années,
00:09:01 donc évidemment il y en a beaucoup plus.
00:09:03 La difficulté étant encore une fois de mettre des effectifs dédiés sur ces objectifs.
00:09:08 Un GLTD, donc groupe local de traitement de la délinquance,
00:09:12 que nous envisageons et sur lequel nous allons commencer à travailler avec Mme Perti-Carrot,
00:09:17 dans le secteur de Trévoux, donc toute cette zone de la côtière,
00:09:21 donc Lyon-Trévoux, à la demande de la gendarmerie,
00:09:25 qui identifie des quartiers et des zones très impactées par le trafic de stupéfiants,
00:09:30 de façon à pouvoir donner des réponses plus rapides, plus coercitives,
00:09:35 et puis je dirais très sectorisées.
00:09:38 C'est-à-dire on est vraiment sur la territorialisation de l'action publique,
00:09:41 avec des réponses qui soient au plus proche du terrain.
00:09:45 Et puis je finirais simplement, c'est vraiment un panorama général,
00:09:49 mais par dire qu'à mon sens le point essentiel sur ma première approche de ce territoire,
00:09:56 c'est vraiment la configuration ressources humaines en termes de services de police et de gendarmerie.
00:10:02 Nous avons donc quatre compagnies de gendarmerie,
00:10:07 quatre brigades de recherche spécialisées dans le judiciaire,
00:10:12 qui au total, des effectifs, constituent une trentaine d'OPJ
00:10:18 qui ne sont pas spécialisées en matière de stupéfiants.
00:10:22 Donc 30 sur 400 OPJ au niveau du territoire, au niveau des brigades,
00:10:27 30 spécialisées en judiciaire au niveau des brigades de recherche,
00:10:31 aucun n'étant véritablement spécialisé en groupe stup.
00:10:35 La spécialisation stupéfiante n'existe pas,
00:10:38 elle existe un peu plus au niveau de la section de recherche de Val-Soronne,
00:10:43 qui est une antenne de la section de recherche du 69, de Lyon,
00:10:48 et qui a été créée l'année dernière.
00:10:51 Elle est toute récente cette antenne, elle est située sur le pays d'Aix,
00:10:55 avec un intérêt à la fois frontalier en trait de pénal international,
00:11:00 une vision clairement économique et financière aussi,
00:11:04 puisque c'est un autre axe.
00:11:06 Val-Soronne, oui.
00:11:08 Elle est à Val-Soronne, la section de recherche, l'antenne de la SR de Lyon,
00:11:14 à la gendarmerie de Val-Soronne.
00:11:17 Elle est existante depuis quelques mois, puisqu'elle a moins d'une année d'existence,
00:11:22 donc elle n'a pas encore produit de dossiers stupéfiants ad hoc,
00:11:26 mais en termes d'initiative, je pense qu'elle va être amenée précisément
00:11:31 à trouver l'information que nous n'avons pas sur cette partie de la frontière pays d'Aix.
00:11:37 Oui, elle a une spécialité ou partie partie partie.
00:11:45 Merci.
00:11:47 Elle est assez intéressant.
00:11:50 Sa vocation est à la fois spécialisée en matière d'économie et financière,
00:11:55 une approche blanchiment et une approche stupéfiante,
00:11:58 elle devrait promouvoir sur ce secteur de l'Aix.
00:12:01 Jusqu'à présent, on n'a bien rien que la BR de Gex,
00:12:06 qui a des calculs qui nous font penser à ce sujet.
00:12:10 Elle a 30 OPJ non spécialisées et 7 pour la section de recherche de Val-Saint.
00:12:16 Au niveau du commissariat de Bourg-Cambresse, je l'ai dit tout à l'heure,
00:12:21 une équipe stupéfiante de 4 OPJ pour l'ensemble de la DDPN,
00:12:27 donc de la Direction de la Police Nationale,
00:12:30 ce qui est quand même très peu vu, vu la surface du territoire.
00:12:34 0 à Ollonna, qui apparaît là aussi assez impactée,
00:12:38 puisque certaines affaires, notamment des affaires en cours,
00:12:42 sont actuellement traitées par l'OFAST,
00:12:44 mais l'OFAST version lyonnaise, c'est-à-dire des dossiers pris en compte
00:12:49 par la GIRS de Lyon ou par la PJ, la Police Judiciaire de Lyon,
00:12:55 sur la partie enquête lyonnaise et puis ramification à Ollonna,
00:12:59 mais aucune affaire qui, dans l'autre sens, part du terrain et part d'Ollonna.
00:13:04 La vraie problématique, en tout cas, moi ce que j'identifie,
00:13:07 c'est qu'on n'a pas d'initiative suffisante sur le terrain
00:13:10 du fait d'effectifs spécialisés, on va dire peu importants,
00:13:15 et en tout cas en difficulté,
00:13:17 puisque le commissariat d'Ollonna est en difficulté en l'absence d'OPSJ.
00:13:22 Donc ça, c'est un petit peu le constat.
00:13:25 Les axes de travail, la possibilité de travailler avec le GIRS,
00:13:30 qui fait une offre de services et que nous avons rencontré récemment
00:13:34 pour pouvoir mobiliser des effectifs en appui des unités locales
00:13:40 et en appui à la fois sur le patrimonial, sur l'axe économique et financier,
00:13:45 et puis en appui effectifs moyens, interpellations et écoute téléphonique,
00:13:50 axes d'enquête au soutien des équipes locales,
00:13:53 tant de la gendarmerie que de la police d'ailleurs,
00:13:56 puisqu'on est là sur de l'inter-directionnel,
00:13:59 donc il n'y a pas de l'inter-ministériel, il n'y a pas de difficulté.
00:14:02 Et puis une absence d'antenne de la police judiciaire dans l'un.
00:14:07 Et c'était une de vos questions, je crois.
00:14:10 La coordination de l'OFAS consiste en une crosse qui se situe dans le 69.
00:14:17 Pas de réunion de la crosse 01 ces dernières années.
00:14:21 En tout cas, dans les archives que j'ai pu trouver,
00:14:23 dans l'historique qu'on m'en a dressée, pas de réunion dans le 01.
00:14:27 Donc là aussi, je pense qu'il faut remobiliser la crosse 69 au profit de l'un,
00:14:32 puisque nous dépendons certes de l'APJ de Lyon,
00:14:35 mais faut-il effectivement qu'il y ait une émanation au niveau du territoire dans l'un,
00:14:40 en termes de partage d'informations, en termes de formation des OPJ,
00:14:45 et puis en termes d'initiatives, j'y reviens,
00:14:48 parce que qui dit affaire de stupéfiants,
00:14:50 dit qu'il faut aussi faire remonter l'information,
00:14:53 et en tout cas au départ définir les objectifs.
00:14:56 Donc je crois que le constat de dire que nous avons finalement une proportion d'affaires assez réduite,
00:15:01 même si on a eu, et Mme Perticaro pourra le compléter,
00:15:05 des affaires assez significatives et intéressantes,
00:15:07 donc la matière y est,
00:15:09 principalement, je ne l'ai pas dit tout à l'heure,
00:15:11 mais principalement des affaires sur 90% c'est du cannabis,
00:15:16 sous toutes ses formes, de la résine et évidemment de l'herbe également,
00:15:20 très peu d'affaires d'héroïne et de cocaïne,
00:15:23 un petit peu de cocaïne sur Bourg-Cambresse et sur les zones plutôt urbaines,
00:15:27 peu de drogue de synthèse, quasiment pas, dans les saisies,
00:15:32 et puis un gros centre pénitentiaire de 700 détenus,
00:15:36 qui là aussi nous amène chaque année, et de façon constante,
00:15:40 sur les trois dernières années, à saisir du stupéfiant,
00:15:43 12 kilos c'est un peu la moyenne annuelle,
00:15:46 et c'est régulier, ça ne baisse pas, malgré tous les contrôles,
00:15:50 malgré toutes les stratégies mises en place,
00:15:53 c'est globalement chaque année le même quantum de saisies en maison d'arrêt,
00:15:58 avec des vigilances effectivement sur les modes d'entrée du stupéfiant.
00:16:03 Donc pour nous aussi un point d'attention et un point de politique pénale,
00:16:07 avec des réponses systématiques qui sont données,
00:16:11 en matière de comparution immédiate, notamment quand ce sont des quantités significatives.
00:16:16 Voilà un petit peu le panorama général,
00:16:18 je pense que si vous le souhaitez on reviendra à des points plus détaillés.
00:16:22 Merci beaucoup madame la procureure,
00:16:24 peut-être qu'on passe la parole à monsieur le procureur de la République du Parquet de Bayonne,
00:16:29 monsieur Bourrier, et puis ensuite on ouvrira.
00:16:32 Oui, monsieur le Président, je vais vous faire une présentation succincte,
00:16:37 en complément de ce qu'a pu dire ma collègue,
00:16:40 parce qu'il y a aussi des thématiques qui malheureusement sont très communes
00:16:44 à l'ensemble du territoire national.
00:16:46 Sur les singularités du tribunal judiciaire de Bayonne,
00:16:50 qui recouvre ce qu'on appelle le pays basque,
00:16:54 en tout cas ce que les basques appellent le pays basque,
00:16:57 puisqu'il y a une agglomération du pays basque,
00:16:59 qui regroupe toutes les communes de ce territoire.
00:17:02 Les singularités elles sont connues,
00:17:05 mais évidemment elles tiennent beaucoup à sa dimension frontalière,
00:17:08 et au fait que c'est un des grands axes de pénétration du cannabis en France.
00:17:16 Les deux principaux à mon avis,
00:17:19 que sont Biriatou dans le pays basque,
00:17:21 et puis les Pyrénées-Orientales, évidemment,
00:17:24 puisque nous saisissons environ,
00:17:27 alors c'est une moyenne, mais environ 10 tonnes de cannabis par an, grosso modo.
00:17:32 Avec une particularité, c'est l'existence du péage de Biriatou,
00:17:37 qui concentre 95% des vecteurs routiers sur 5% du territoire frontalier.
00:17:43 Point où se trouvent situés de nombreux services de police,
00:17:47 et pas seulement, puisque sont présents l'administration des douanes,
00:17:52 la direction interrégionale des douanes se trouve à Bayonne,
00:17:55 les douanes, la police de l'air et des frontières,
00:17:59 puisque la direction interdépartementale,
00:18:01 alors maintenant on s'appelle la CIPAF,
00:18:03 se trouve également à Bayonne,
00:18:06 donc la police de l'air et les frontières,
00:18:08 la gendarmerie, la police,
00:18:10 et côté espagnol, la guardia civile,
00:18:13 et la police basque, qui a des pouvoirs très importants,
00:18:16 qui ne sont pas du tout comparables à nos polices municipales,
00:18:20 puisque sur le territoire basque,
00:18:22 l'Artenza a même davantage de pouvoirs que n'en a la guardia civile en réalité.
00:18:27 Et donc, pourquoi je dis ça ?
00:18:29 C'est que, évidemment, cette archiprésence des services de l'Etat,
00:18:34 des services policiers franco-espagnols,
00:18:36 a induit des modes d'organisation et des spécialisations,
00:18:39 et des équipes qui sont finalement spécialisées
00:18:43 dans la traversée de la frontière,
00:18:45 soit à Biriatou, soit dans l'école,
00:18:48 puisqu'il y a aussi de la drogue qui passe par des zones plus rurales et par l'école,
00:18:53 avec des grosses capacités.
00:18:56 Pour vous donner un exemple, en 2023,
00:18:59 un narcotrafiquant d'ampleur de cannabis a été interpellé.
00:19:02 Il a expliqué qu'il budgetait mensuellement 1 million d'euros
00:19:08 pour récupérer du cannabis dans le sud de l'Espagne,
00:19:11 organiser ses équipes, les véhicules, les convois, etc.,
00:19:16 qu'il revendait 2,3 millions d'euros en région parisienne, tous les mois.
00:19:21 Ça donne une idée, d'une part, de l'ampleur du trafic,
00:19:26 et d'autre part, des marges qui sont réalisées par ces trafiquants.
00:19:32 Donc, les deux spécificités du ressort, je dirais, c'est celle-là.
00:19:37 C'est une part très importante du transit international de cannabis dans le sens sud-nord,
00:19:43 de la cocaïne, dans une moindre mesure, mais dans le sens inverse, nord-sud,
00:19:49 en descendance vers l'Espagne, vers le Portugal,
00:19:52 une délinquance organisée associée à cela,
00:19:56 qui peut être soit une délinquance de transit,
00:19:58 pour lesquelles nous utilisons beaucoup les comparutions immédiates
00:20:01 ou des dénonciations officielles aux autorités espagnoles,
00:20:03 mais je pense qu'on y reviendra par rapport à votre questionnaire,
00:20:06 et des trafics locaux plus ruraux, qui ont aussi leurs spécificités,
00:20:12 c'est-à-dire que ces trafics, qui sont nombreux,
00:20:15 n'ont pas besoin de s'appuyer, je dirais, en approvisionnement,
00:20:18 sur des grandes agglomérations, Toulouse, Bordeaux, ou même Bayonne,
00:20:22 mais vont s'approvisionner directement en Espagne,
00:20:26 sur des quantités à chaque fois relativement réduites,
00:20:29 ce qui rend difficile de caractériser l'ampleur du trafic,
00:20:33 parce qu'en réalité, ils vont se fournir autant qu'ils le veulent,
00:20:36 aussi souvent qu'ils le veulent en Espagne,
00:20:38 et donc ils rapportent la marchandise directement d'Espagne
00:20:41 pour organiser des petits trafics ou des trafics locaux.
00:20:47 Voilà, donc pour moi, ce sont, sans peut-être rentrer pour le moment
00:20:51 davantage dans le détail, les deux singularités du territoire,
00:20:55 avec cette chance, d'une certaine manière, de bénéficier sur ce ressort,
00:21:00 pour le coup, de services de police spécialisés importants.
00:21:04 Alors, l'administration des douanes n'est pas un service de police,
00:21:07 mais elle est à l'origine d'une très grosse partie des saisies qui sont réalisées,
00:21:12 le tout étant d'être en capacité, pour les services d'enquête,
00:21:16 de valoriser ces mises à disposition brutes de produits saisis,
00:21:21 la présence d'un service interdépartemental de police judiciaire à Bayonne,
00:21:25 d'une antenne au fast à Bayonne, et donc, malgré tout,
00:21:30 d'un spectre de moyens pour lutter contre la délinquance organisée important.
00:21:36 S'agissant de la lutte contre le trafic local, là, c'est autre chose,
00:21:41 et je rejoindrai les propos de ma collègue.
00:21:45 On a des services qui sont très clairement sous-dimensionnés,
00:21:50 c'est-à-dire qu'il y a un groupe stup de sécurité publique.
00:21:53 Alors, dans le cadre de la réorganisation de la police nationale,
00:21:56 ce groupe stupéfiant, il y a trois commissariats sur le Pays Basque,
00:22:00 Bayonne, Biarritz, Saint-Jean-de-Luz,
00:22:03 mais il y a un groupe stupéfiant qui était distrécal,
00:22:06 et qui, désormais, depuis l'entrée en vigueur de la réforme de la police nationale,
00:22:11 est rattaché organiquement et fonctionnellement
00:22:15 au service interdépartemental de la police judiciaire, SIPJ,
00:22:19 et qui vient constituer une division de la criminalité territoriale.
00:22:25 Division, c'est un grand mot, parce que c'est actuellement six enquêteurs.
00:22:30 En zone gendarmerie, c'est la brigade de recherche et la section de recherche
00:22:38 qui vont travailler sur les réseaux de trafic de stupéfiants,
00:22:42 mais avec des effectifs qui sont, il faut bien l'admettre, très limités.
00:22:47 J'ai comptabilisé le nombre d'affaires de trafic de stupéfiants
00:22:51 démantelées en zone rurale par les services de gendarmerie sur l'année 2023.
00:22:58 Il y en a douze.
00:23:01 Ce n'est pas énorme.
00:23:03 Alors évidemment, l'OFAS, tes chefs de file, traite les plus gros dossiers,
00:23:08 mais une douzaine de trafics démantelés sur une année en zone rurale,
00:23:12 si vous voulez, en soi, on pourrait en faire le double,
00:23:15 on pourrait en faire le triple, on pourrait en faire le quadruple.
00:23:18 Tout ça est une question de moyens dédiés et de ce qu'on veut faire.
00:23:23 Voilà sur ce propos liminaire.
00:23:26 Merci, M. le procureur. Je vais passer la main à notre rapporteur.
00:23:29 Je ne sais pas s'il connaît aussi bien Bayonne que Bourg-Cambresse.
00:23:33 Oui, bien sûr, il y en a une.
00:23:36 On va commencer la discussion.
00:23:40 Vous avez constaté, je vais vous faire connaître, c'est notre ancienne fonction,
00:23:46 le développement...
00:24:01 ...des zones sur lesquelles il y a eu toute une suspicion de trafic.
00:24:07 Et aujourd'hui, c'est l'ensemble du territoire...
00:24:11 Prenez-le.
00:24:27 C'est un constat qui est très largement partagé.
00:24:30 D'abord, ça tient à une première chose,
00:24:33 c'est que la consommation de stupéfiants n'est pas quelque chose qui est réservé aux agglomérations.
00:24:40 Et qu'on retrouve de la consommation de cannabis ou de cocaïne,
00:24:44 parce qu'on a aussi des trafics locaux de cocaïne en zone rurale,
00:24:48 qui touchent énormément de monde.
00:24:50 Il y a certaines professions aussi qui sont très touchées.
00:24:53 Je ne sais pas si on abordera la question ultérieurement,
00:24:55 mais par exemple, les marins-pêcheurs sur la cocaïne, c'est quelque chose qui est connu,
00:24:58 mais c'est quelque chose qui n'est pas neutre,
00:25:00 notamment sur leur participation éventuelle à l'entrée sur le territoire national de cocaïne, d'ailleurs,
00:25:05 sur lequel on est complètement aveugle.
00:25:08 Mais évidemment, la consommation est démocratiquement répartie sur l'ensemble du territoire,
00:25:13 y compris dans les zones rurales.
00:25:15 Donc ça, c'est une réalité.
00:25:17 Ensuite, s'agissant du Pays basque,
00:25:22 il est certain que la dimension frontalière,
00:25:26 ce que je disais tout à l'heure dans mon propos liminaire,
00:25:29 favorise l'auto-alimentation de ces trafics locaux,
00:25:32 sans avoir besoin de passer par des fournisseurs qui se trouveraient dans des grandes villes.
00:25:37 C'est évidemment un facteur extrêmement facilitant.
00:25:40 Et puis, il y a un espèce de phénomène, je dirais, de capilarité,
00:25:46 qu'on constate, qui fait que pour moi, d'ailleurs,
00:25:50 la lutte contre le trafic de stupéfiants,
00:25:53 c'est-à-dire quand on parle de lutte contre la délinquance organisée,
00:25:57 c'est la priorité des priorités.
00:25:59 Ce devrait être la priorité des priorités.
00:26:01 Encore faut-il savoir comment on peut être efficace.
00:26:04 Mais il y a cette espèce de mécanisme de capilarité qu'on voit bien.
00:26:07 On prend la problématique, par exemple, des règlements de comptes
00:26:12 ou des narco-homicides, comme les a appelés la procureure de Marseille,
00:26:17 qui est une bonne appellation, je pense.
00:26:19 On voit bien que cette pratique-là était réservée à un certain nombre de cités.
00:26:24 Marseille, où j'ai exercé, où j'ai connu cela, Toulouse, quelques villes.
00:26:29 Et puis que cette espèce de culture, de contre-culture,
00:26:33 s'est diffusée dans des agglomérations moins grandes
00:26:38 et à travers des menaces, des enlèvements, des tentatives, des violences,
00:26:44 puis maintenant des homicides.
00:26:46 Et tout ça a essaimé.
00:26:48 On a en zone rurale des exemples de dossiers où il y a eu des tirs d'armes à feu.
00:26:53 Alors pas de meurtres, mais des tirs d'armes à feu, des intimidations.
00:26:57 Toute cette culture, finalement, qui était celle qu'on connaissait dans des grandes agglomérations,
00:27:02 elle s'est petit à petit répandue sur ces territoires.
00:27:05 Et puis l'avantage des zones rurales, c'est aussi qu'on y est tranquille.
00:27:09 Le maillage de la Gendarmerie nationale est certes un maillage intéressant
00:27:15 et une source de renseignements, mais pour autant,
00:27:20 ce n'est pas une brigade territoriale qui va être en capacité
00:27:24 de démanteler un réseau de stupéfiants conséquents.
00:27:27 Donc ce sont aussi des zones de repli qui, à mon avis, sont intéressantes pour des trafiquants.
00:27:35 Alors là aussi, je rejoins tout à fait les propos de mon collègue.
00:27:42 Et sans concertation, je dirais qu'on fait les mêmes constats.
00:27:45 Moi, je fais le constat aussi d'axes de circulation qui sont un vecteur,
00:27:50 finalement, de porosité, de rapprochement et de facilitation.
00:27:54 Puisque aujourd'hui, c'est peu de dire qu'on est dans une société où on circule beaucoup,
00:27:59 mais où aussi les pôles d'attraction sont des pôles d'attraction qui vont rayonner beaucoup plus loin.
00:28:04 Chez nous, dans l'Inde, on a deux pôles d'attraction majeurs,
00:28:07 que sont la région lyonnaise et la région de Genève.
00:28:12 Et bien évidemment, nos axes de circulation, nos autoroutes et nos axes de circulation
00:28:16 facilitent là aussi l'installation et le trafic sur des zones limitrophes.
00:28:22 Lorsqu'on est dans le pays de Gex, on est à 20 minutes de la frontière suisse.
00:28:28 On est en Suisse en quelques encablures.
00:28:30 Les délinquants le savent.
00:28:32 La frontière, c'est encore une autre problématique, au-delà de la zone rurale,
00:28:37 savent aussi parfois qu'en franchissant la frontière,
00:28:39 ça va démultiplier les difficultés en termes d'enquête et en termes de répression.
00:28:46 Et donc, vont jouer, et on l'a bien connu sur ces zones frontalières,
00:28:50 moi je l'ai connu ailleurs en Alsace avec la proximité de Bâle et les réseaux albanais
00:28:54 qui étaient situés de part et d'autre de la frontière, très volontairement,
00:28:58 pour se jouer de cette frontière en termes d'abri.
00:29:01 Et c'est la même chose pour les zones rurales.
00:29:03 On voit effectivement des délinquants qui parfois nous le disent,
00:29:06 en disant "je suis allée me mettre un petit peu plus au vert
00:29:09 parce que c'était plus facile dans le village où vous êtes anonyme
00:29:14 plutôt qu'identifié avec des services de police peut-être plus présents
00:29:20 sur le territoire en matière de stupéfiants".
00:29:22 Donc il y a cette notion de tranquillité et en même temps,
00:29:25 cette notion de facilité finalement de circulation,
00:29:29 avec aussi la notion un petit peu de base arrière,
00:29:32 puisqu'on a aussi ce phénomène aujourd'hui de lieux d'approvisionnement et de stockage,
00:29:37 que ce soit d'ailleurs sur la périphérie de grande ville,
00:29:40 pas forcément toujours dans la grande ville,
00:29:42 mais je pense à Vénissieux pour avoir exercé en région lyonnaise pour le coup,
00:29:46 de voir qu'on est là sur des zones de distribution
00:29:49 et qu'on va véritablement, après avoir des relais dans des villes moyennes,
00:29:53 ça a été le cas à Bourg-Cambresse où on a démantelé plusieurs affaires,
00:29:57 finalement de base arrière de trafiquants lyonnais
00:30:00 qui, tout simplement, allaient ravitailler une partie du secteur
00:30:04 et qui, tout simplement, se comportent comme des distributeurs
00:30:07 avec des stratégies qui sont des stratégies géographiques
00:30:11 de pouvoir ravitailler au plus près du terrain.
00:30:13 Donc on se rapproche de la clientèle et, comme le disait mon collègue,
00:30:17 la clientèle, il y en a un peu partout.
00:30:19 Et en matière de camionnabilité, c'est une banalisation de la consommation.
00:30:23 Donc effectivement, des particularités qui font qu'aujourd'hui,
00:30:26 on a l'impression que c'est poreux de partout,
00:30:29 mais avec toujours quand même des pôles d'attraction
00:30:31 quand vous êtes à proximité de métropoles telles Genève et Lyon,
00:30:36 évidemment, qui sont des trafics extrêmement structurés en amont.
00:30:40 Ce sont les mêmes qu'on a simplement sur des niveaux dégradés.
00:30:44 Pardon, madame.
00:30:49 Juste une précision sur...
00:30:52 En fait, je crois qu'il y a aussi une banalisation de l'usage de stupéfiants.
00:30:55 J'entends par là que, à travers les réseaux sociaux,
00:30:58 notamment les réseaux cryptés, en fait, il est Telegram, Snapchat, etc.
00:31:02 Il est extrêmement facile aujourd'hui pour des usagers de commander,
00:31:05 notamment de la cocaïne.
00:31:07 C'est une drogue qui est vraiment très répandue aux Pays-Bas,
00:31:10 puisque les habitants ont plus d'argent.
00:31:14 Et tout simplement, il vous suffit d'être abonné à un compte Telegram.
00:31:18 Vous pouvez passer commande, on vient vous livrer chez vous.
00:31:21 Et il y a véritablement cette sensation d'être en dehors de la loi
00:31:27 et de ne rien risquer.
00:31:29 Et c'est un vrai problème aujourd'hui, je pense.
00:31:31 Et c'est aussi une vision très importante de la délinquance
00:31:36 autour du trafic de stupéfiants.
00:31:38 C'est qu'il y a une véritable impunité des délinquants par rapport à cela,
00:31:41 parce que les services d'enquête, aujourd'hui,
00:31:43 ne sont pas en capacité d'infiltrer ou de pénétrer ce réseau de Telegram,
00:31:48 parce qu'une fois que vous avez...
00:31:51 Je peux vous montrer des exemples.
00:31:53 On a ce fil de discussion, mais c'est impossible de remonter
00:31:55 au numéro de téléphone, parce que les applications sont faites
00:31:59 de telle manière qu'on ne peut pas savoir qui est derrière tout cela.
00:32:02 Et donc, peut se dérouler véritablement un commerce,
00:32:05 de véritables start-up, où il y a des cartes de fidélité,
00:32:08 des promos, des prix de vente.
00:32:12 En gros, on vous informe de l'arrivée du produit,
00:32:15 de la qualité du produit.
00:32:16 Et tout ceci permet de développer véritablement le trafic.
00:32:20 Et au final, les techniques traditionnelles d'enquête,
00:32:24 que sont la géolocalisation, les écoutes téléphoniques,
00:32:26 les surveillances physiques, ne permettent pas d'être efficaces,
00:32:29 ou alors elles demandent beaucoup de temps pour réussir à démanteler ce réseau.
00:32:33 Et au final, on n'arrive pas non plus à percevoir toute l'importance
00:32:36 de ce réseau qui est souterrain, invisible.
00:32:39 Et je crois, en tout cas, moi j'ai interrogé les services de police
00:32:43 et de gendarmerie pour savoir si par le biais de l'article 706-32,
00:32:50 ce qu'on appelle les coûts d'achat, est-ce qu'on pourrait,
00:32:52 sans provoquer à l'infraction, mais se faire passer pour,
00:32:56 je simplifie, se faire passer pour un acheteur,
00:32:59 et infiltrer ce réseau.
00:33:02 Et c'est très difficile pour les services d'enquête,
00:33:04 parce qu'il y a des problèmes de compétences techniques,
00:33:06 il y a une formation spécialisée qui est requise,
00:33:08 ce qui n'est pas le cas des enquêteurs à Bayonne,
00:33:11 une technicité pour acquérir du matériel permettant éventuellement d'infiltrer,
00:33:14 et en l'état, aucun service d'enquête n'est en capacité d'enquêter
00:33:20 sur cette nouvelle voie de communication qui me paraît être essentielle
00:33:23 et qui laisse, à mon sens, un sentiment d'impunité pour ces trafiquants
00:33:27 qui peuvent en fait développer leur entreprise,
00:33:29 comme on leur semble, à tous les niveaux de la société.
00:33:33 Très explicite, ce que vous dites, pardon,
00:33:36 et c'est qu'il y a un problème de cryptage.
00:33:39 Si on pénétrait mieux ces communications, on prendrait quelque chose.
00:33:43 Et un système d'infiltration qui est à améliorer.
00:33:47 Sur le système d'infiltration, quelles sont les suggestions,
00:33:50 quels sont les points faibles que vous avez repérés ?
00:33:54 Alors, c'est très technique, je ne suis pas spécialiste sur...
00:34:00 Est-ce qu'on pourrait...
00:34:01 Je pense qu'il y a eu des affaires, Sky-UCC, en Crochette,
00:34:05 où les services de police et gendarmerie ont été capables
00:34:07 de pénétrer des réseaux, des serveurs, et ont démantelé des réseaux incroyables.
00:34:11 Je pense que techniquement, on serait en capacité d'infiltrer.
00:34:15 Mais voilà, est-ce que c'est possible ?
00:34:19 En tout cas, au niveau local, les services d'enquête
00:34:22 ne sont pas dotés de ces téléphones spécifiques.
00:34:25 Il faudrait un téléphone de travail pour chaque enquêteur,
00:34:27 permettant d'avoir un faux compte, etc.
00:34:29 Ils n'ont pas ça aujourd'hui, ils n'ont pas les habilitations techniques
00:34:32 leur permettant de faire cela.
00:34:34 Et derrière tout cela, il faut quand même protéger aussi les enquêteurs
00:34:37 qui ont peur de la provocation à l'infraction, etc.
00:34:39 Donc, en tout cas, techniquement, aujourd'hui, en termes de formation,
00:34:42 je pense que tant les policiers que les gendarmes n'ont pas les moyens
00:34:46 d'infiltrer ces réseaux-là.
00:34:48 C'est une thématique qui est relevée, notamment,
00:34:52 je pourrais l'avoir évoquée avec lui, avec le chef de l'antenne au FAST,
00:34:55 c'est-à-dire cette capacité à démanteler ce qu'on appelle maintenant
00:35:00 des points de deal numériques, avoir la capacité d'infiltration,
00:35:05 je pense que cela implique un certain nombre de modifications textuelles,
00:35:08 malgré tout, pour permettre ces infiltrations de manière plus facile,
00:35:12 pour sécuriser les coûts d'achat.
00:35:15 Vous savez que le coût d'achat, c'est toujours quelque chose de complexe,
00:35:19 il peut être autorisé dans certaines conditions,
00:35:21 mais il ne faut pas aller à la provocation à l'infraction,
00:35:23 c'est quelque chose qui est complexe.
00:35:25 Je pense que c'est un point extrêmement important pour permettre aux enquêteurs
00:35:31 d'accéder aux adresses IP et à mettre en place des véritables interceptions
00:35:35 de communication sur les messageries cryptées.
00:35:38 Si on rate ce virage-là, aujourd'hui, si vous voulez,
00:35:42 les interceptions téléphoniques et les messages et les SMS,
00:35:45 c'est le passé, très clairement.
00:35:53 Il y a trafic, il y a des flux financiers qui sont particuliers,
00:36:00 parce que ce sont souvent des espèces, des petites coupures,
00:36:04 on paye rarement avec sa carte bleue,
00:36:07 et les sommes en jeu, ce sont des coupures de 10, 20, 50 euros,
00:36:12 et régulièrement, quand on voit des saisies,
00:36:14 on voit des liasses de billets qui ont fait l'objet de ces saisies.
00:36:19 Et le trafic total, en France, on l'estime entre 4 et 6 milliards d'euros,
00:36:25 à peu près aux doigts mouillés.
00:36:27 Ce sont des quantités de petites coupures abyssales.
00:36:31 Comment vous expliquer qu'on n'arrive pas mieux à les suivre,
00:36:35 ces petites coupures ?
00:36:37 Est-ce qu'on surveille mal le train de vie d'un certain nombre de délinquants ?
00:36:41 Est-ce que l'on surveille mal les commerçants qui reçoivent ces sommes,
00:36:45 ou celles et ceux qui les reçoivent ?
00:36:47 Est-ce que le système bancaire permet suffisamment de surveiller ces flux financiers ?
00:36:52 Est-ce que vous avez un avis à nous donner sur ce sujet ?
00:36:56 Alors, tout d'abord, évidemment, on saisit beaucoup d'argent,
00:37:04 nous, sur le ressort de Bayonne, en transit,
00:37:07 l'argent du blanchiment, dans un sens sud-nord ou nord-sud.
00:37:11 C'est de l'argent qu'on poursuit sous la qualification de blanchiment,
00:37:14 pour lequel on ouvre des enquêtes conjointes entre un service de police judiciaire
00:37:18 et le service, le SEJF, le service des enquêtes financières de Bercy.
00:37:25 C'est de l'argent qui traverse la frontière pour aller financer des achats en Espagne ?
00:37:31 Alors, soit c'est de l'argent destiné à acheter de la matière stupéfiante,
00:37:36 ça peut être le cas,
00:37:38 soit c'est de l'argent qui est en cours de blanchiment,
00:37:42 pour aller faire des investissements à l'étranger.
00:37:46 Par exemple, sur le ressort du Pays Basque,
00:37:48 moi, qui ai un secteur extrêmement attractif sur le point de l'immobilier,
00:37:54 on sort quasiment pas d'affaires de blanchiment direct sur le territoire du Pays Basque.
00:37:59 En revanche, des sommes qui transitent, on en saisit beaucoup.
00:38:03 Et parfois, on se dessaisit au profit de la gire,
00:38:05 c'est parce que ces sommes, elles peuvent être de 30 000 à 200 000 à 400 000 euros.
00:38:09 Et ça, c'est évidemment tout ce qu'on appelle le trafic des collecteurs,
00:38:15 des gens qui sont en charge d'évacuer et de blanchir l'argent.
00:38:20 On sait qu'il y a notamment les réseaux chinois qui sont très forts et très organisés sur ce plan-là.
00:38:25 Donc ça, c'est une chose.
00:38:26 Mais après, par rapport à la question que vous posez,
00:38:28 c'est une vraie question, c'est-à-dire de savoir si il faut tracer le produit stupéfiant
00:38:36 ou s'il faut tracer les flux financiers.
00:38:39 Ça, c'est une vraie interrogation.
00:38:42 Nous ne traçons ou nous traçons très peu les produits financiers.
00:38:47 Les Américains le font.
00:38:48 Je sais que la DEA est très organisée sur le suivi des flux financiers.
00:38:55 Et ils les laissent transiter et ils les suivent.
00:38:57 Et en fait, ils démentent une filière en suivant l'argent.
00:39:00 Ça, en France, on ne le fait pas.
00:39:03 On essaie de trouver l'argent, de saisir de l'argent pour le confisquer.
00:39:08 Mais le démantèlement d'un réseau à partir finalement du suivi de flux financiers
00:39:14 et pas du produit, c'est quelque chose qui est peu développé en France.
00:39:19 Pourquoi ? Je pense aussi parce que c'est extrêmement lourd et compliqué et technique.
00:39:25 Donc ce n'est pas facile.
00:39:27 Que ce n'est pas dans la culture des groupes spécialisés en matière de stupéfiants.
00:39:32 Je parle en toute franchise.
00:39:35 Mais dans les services spécialisés de lutte anti-stupes, au FAST,
00:39:43 il y a une notion de plaisir dans la manière de travailler.
00:39:47 L'enquêteur, le policier qui fait du stupe, qu'est-ce qu'il aime ?
00:39:52 Il aime trouver du produit, faire une grosse saisie, interpeller une équipe, un convoi, armée.
00:39:59 Si on lui demandait de passer son temps à essayer de tracer des flux financiers,
00:40:04 je pense qu'il y aurait beaucoup moins de vocation.
00:40:07 Donc on n'a pas cette culture-là et on n'a pas réussi en tout cas à les adjoindre.
00:40:11 On pourrait envisager des groupes communs où il y aurait à la fois des enquêteurs spécialisés
00:40:16 et certains qui travailleraient exclusivement sur le financier.
00:40:19 On n'a pas réussi à les adjoindre.
00:40:21 [inaudible]
00:40:29 Pardon, j'oublie. Il faut m'aider.
00:40:33 Vous avez à la gendarmerie de Val-sur-Rhône des gendarmes spécialisés sur le suivi de ces flux financiers.
00:40:44 Et là, vous pouvez nous donner quelques indications et quelques précisions ?
00:40:47 Alors, pas encore parce que malheureusement, ça n'a pas encore porté ses fruits.
00:40:51 C'est ce que je vous disais. L'implantation est toute récente.
00:40:54 Mais l'optique de travail est clairement celle notamment avec également la cellule de lutte en matière financière,
00:41:02 la CELTIF, au niveau du groupement.
00:41:04 L'optique est véritablement de travailler à la fois sur les flux financiers,
00:41:08 mais de travailler aussi sur le patrimonial, clairement sur les individus et les objectifs
00:41:14 en partant de la notion, alors assez classique, de train de vie.
00:41:18 Mais faut-il partir du financier pour faire le constat que le train de vie ne correspond pas
00:41:24 dans l'effectivité des choses à la régularité des revenus ?
00:41:29 Et donc d'avoir une optique de travail inversée, de ne pas partir de la saisie et uniquement du produit,
00:41:34 mais de partir d'une étude par individu, qui soit une étude patrimoniale et financière.
00:41:39 Ça c'est l'idée de la section de recherche. C'est l'idée aussi des GIR.
00:41:43 Ça présidait d'ailleurs la création des GIR, puisqu'on était là clairement sur l'interministériel,
00:41:49 la présence conjointe de l'administration fiscale, alors qu'il a pour le coup des moyens d'investigation
00:41:55 souvent très efficaces quand on met en commun la façon de travailler des douanes,
00:42:01 de l'administration fiscale, de la police et de la gendarmerie.
00:42:05 Donc mon idée aussi c'est de repartir aussi d'enquête de terrain avec l'appui du GIR
00:42:11 pour pouvoir inverser encore une fois la façon de les traiter.
00:42:14 Parce que partant du constat que l'initiative locale, il y en a assez peu,
00:42:18 et c'est ce que je vous expliquais de l'absence des services spécialisés,
00:42:21 c'est-à-dire que l'information pour qu'elle émerge, il faut qu'il y ait des services de terrain
00:42:25 qui fassent du stupéfiant, qui fassent de l'information et qui fassent remonter des objectifs.
00:42:30 Donc l'optique de travail pourrait être autre, de partir évidemment du criblage
00:42:35 d'un certain nombre d'individus qui peuvent paraître suspects,
00:42:38 notamment eu égard au train de vie ou à des masses financières échangées à partir des comptes bancaires,
00:42:45 et travailler d'abord sur cet aspect-là pour ensuite éventuellement mettre à jour des activités illicites,
00:42:51 qu'elles soient dans le cadre des stupéfiants ou d'autres activités illicites,
00:42:54 puisque on n'a pas forcément l'information au départ.
00:42:57 Donc le GIR peut nous y aider, puisque c'est sa vocation première,
00:43:00 et les sections de recherche à condition qu'on soit effectivement sur un travail financier en amont.
00:43:05 Nous, des saisies de... vous parliez de petites coupures et des saisies effectivement financières,
00:43:12 on en a assez régulièrement dans les dossiers qui peuvent l'illustrer,
00:43:16 mais on n'a pas ni le point de départ ni le point d'arrivée,
00:43:19 et je dirais qu'au-delà du train de vie et de ce qu'on peut établir parfois d'un train de vie qui est en léger décalage,
00:43:25 on n'a rien de très significatif à apporter au tribunal sur ce plan-là.
00:43:29 Donc il faut inverser vraiment l'optique d'enquête, la stratégie.
00:43:33 ...d'exemple une affaire repérée dans une zone rurale,
00:43:37 et un réseau que l'on déstabilise ou que l'on détruit parce qu'on a découvert des espèces.
00:43:43 On a ça dans le département de l'Ain ou dans le département...
00:43:48 Non, vous savez, moi je suis un peu sceptique sur cette démarche-là,
00:43:53 parce que c'est ce qui a fondé l'Egia.
00:43:58 Et au départ, et l'idée était même plus précise, on avait dit "mais c'est pas compliqué,
00:44:03 tous ces types qui roulent avec des grosses voitures, on va travailler sur eux,
00:44:07 et on va démanteler des réseaux". On en a démantelé combien des réseaux comme ça ? Zéro.
00:44:12 Je ne pense pas que ça fonctionne. Parce qu'ils sont malins, parce que les voitures ne sont pas à leur nom,
00:44:18 parce qu'ils ne sont pas propriétaires, parce que là où on fait les plus grosses saisies d'argent ou de patrimoine,
00:44:25 je ne parle pas de saisies d'argent qui transitent, parce que là évidemment on saisit des gros argents,
00:44:29 mais les saisies de patrimoine, quand on essaie de faire des saisies patrimoniales,
00:44:33 c'est rarement dans les dossiers de stupéfiants qu'on les fait. Rarement.
00:44:36 Parce que l'argent, parce que les investissements, ils ne sont pas en France,
00:44:40 en tout cas qu'on n'arrive pas à les identifier, il est rare qu'on arrive à les identifier.
00:44:45 Les gros trafiquants de cannabis français, ils n'investissent pas en France.
00:44:49 Ils investissent, on sait où ils investissent, dans le sud de l'Espagne, ils investissent au Maroc,
00:44:55 mais ils n'investissent pas en France. Donc cette démarche qui est séduisante intellectuellement,
00:45:00 elle est compliquée, je ne dis pas qu'il ne faut pas la suivre, qu'il ne faut pas tenter de la suivre,
00:45:05 mais elle est compliquée en termes d'efficacité de résultat.
00:45:14 L'un des dossiers qu'on souhaitait aujourd'hui vous présenter ne part pas des flux financiers,
00:45:20 mais on a néanmoins sur le train de vie des éléments qui sont intéressants, qui ont été mis au jour,
00:45:25 puisque le gérant principal qui a été identifié dans le cadre de cette procédure,
00:45:29 au niveau de son train de vie, les investigations mettent en évidence qu'on a une personne
00:45:34 qui dépense environ 8 000 euros en termes de loisirs de façon mensuelle,
00:45:39 2 000 euros pour le train de vie, les dépenses de la vie courante, achats de nourriture, essence et vie du quotidien,
00:45:47 ce qui fait quand même un budget assez conséquent tous les mois,
00:45:51 mais c'est une personne qui, pour autant, n'a aucune source de revenus, ni salaire, ni prestation sociale,
00:45:59 et qui ne disposait d'aucun compte bancaire. Donc là, sur ce dossier-là, c'est un élément bien évidemment
00:46:04 qui n'a pas été le point de départ des investigations, mais c'est un élément qui, dans le cadre de l'enquête de trafic de stupéfiants,
00:46:10 est bien sûr très intéressant et qu'on a pu exploiter par la suite sur le train de vie de cette personne-là.
00:46:16 Vous vous êtes aperçus qu'on dépensait 10 000 euros dans les activités de loisirs,
00:46:24 et 2 000 euros de nourriture et d'achats courants.
00:46:29 Qui est-ce qui vous a informé ? Comment vous vous y êtes pris pour avoir ces éléments de preuve ?
00:46:35 On est sur une enquête qui a duré une année, avec des surveillances qui ont été importantes,
00:46:45 avec des voyages à l'étranger, donc des vérifications qui se sont associées pour les billets d'avion et les différents lieux de destination.
00:46:52 On est sur des estimations qui sont faites, et également des interceptions téléphoniques qui étaient nombreuses,
00:46:59 et précises également sur des sorties au restaurant, sur des achats et des marques de luxe qui étaient évoquées.
00:47:07 Après, c'est bien évidemment des estimations qui sont faites par les enquêteurs,
00:47:10 mais ça donne quand même une idée assez intéressante du train de vie de la personne, entre les différents voyages,
00:47:15 les lieux qu'il pouvait fréquenter et les différents achats qu'il pouvait effectuer.
00:47:19 Et après, des éléments qui se sont confirmés avec des perquisitions.
00:47:22 Et dans le cadre de ces perquisitions, on a retrouvé là encore un certain nombre d'objets qui avaient été achetés,
00:47:26 et qu'on avait identifiés tout au long de la procédure, avec le suivi durant l'enquête.
00:47:31 On sait qu'il y a des moyens de blanchiment, et c'est l'achat de fonds de commerce.
00:47:36 Dans ce fonds de commerce, un chiffre d'affaires qui est fictif, pendant quelques mois, puis ensuite un épaule-bilan, puis ensuite la revente du fonds.
00:47:44 Est-ce que vous avez eu des dossiers de cette nature, et est-ce que c'est quelque chose que vous suivez particulièrement ?
00:47:50 Là encore, on l'identifie, par exemple, on a beaucoup parlé des commerces de téléphonie,
00:48:02 ou d'un certain type de commerce qui sont des machines à...
00:48:08 Restaurants rapides.
00:48:10 Restaurants rapides, restaurations rapides.
00:48:13 Pour autant, objectivés et démontrés,
00:48:21 moi j'ai pas d'exemple en tête, sur le ressort.
00:48:27 Vous aviez travaillé avec les grèves des tribunaux de commerce, un suivi un peu plus fin.
00:48:35 Est-ce que par exemple, quand les parquets sont représentés dans les affaires de procédure collective,
00:48:40 est-ce que c'est quelque chose, une question sur laquelle vous avez une attention particulièrement pour l'instant ?
00:48:46 On peut dire cela.
00:48:48 Les CODAF permettent aussi, en termes de lutte contre la fraude,
00:48:55 de faire émerger un certain nombre d'objectifs, qui souvent nous laissent à penser,
00:49:00 vous citiez un certain nombre de commerces, je pensais aussi, alors je vais pas stigmatiser,
00:49:04 mais les kebabs aussi, parfois, parce qu'on a cette notion d'injection rapide et de création rapide,
00:49:10 avec finalement une traçabilité qui paraît pas évidente,
00:49:14 qui mériterait d'être vérifiée, donc on les vérifie,
00:49:17 enfin on en a fait là trois récemment, précisément parce qu'il y avait cette notion d'absence de traçabilité,
00:49:22 mais sous l'aspect fraude, donc avec un CODAF,
00:49:25 et derrière peut-être l'idée d'embrayer sur une enquête financière,
00:49:29 qui nous permettra, alors si elle révèle quelque chose,
00:49:32 peut-être d'aller à la source des infractions, qui sont à la source de ces revenus.
00:49:38 Donc on prend effectivement le problème complètement autrement,
00:49:41 par une source d'informations totalement autre,
00:49:44 et je pense effectivement, en effet le commerce, et puis peut-être le CODAF ou d'autres instances d'informations.
00:49:50 Oui, mais ceci dit, il faut pas toujours, parce qu'on a des résultats sur certains types de commerces comme ça,
00:49:55 mais il faut pas nécessairement, alors bien sûr il y a le lien avec le tribunal de commerce,
00:49:59 quand on y est présent systématiquement, ça permet d'identifier des situations, il y a les CODAF,
00:50:04 mais parfois il est plus simple de travailler, et dans ce cas-là c'est ce qu'il faut choisir,
00:50:08 sur des qualifications de droit commun, ça peut être du blanchiment pour lequel on n'est appliqué pas,
00:50:14 que c'est du blanchiment de stupéfiants, mais peu importe, du blanchiment de droit commun,
00:50:18 ou du travail dissimulé, par dissimulation d'activité,
00:50:23 et peut-être que c'est du blanchiment de stupéfiants, mais que ce lien-là on l'a pas démontré,
00:50:29 mais pour autant, si on arrive à l'attaquer sous des qualifications de droit commun, autre,
00:50:35 c'est efficace aussi pour le coup, vous voyez.
00:50:38 Ce qui nous retient, c'est la question de la corruption, la corruption des services d'État,
00:50:52 la corruption, pardon, deux minutes, deux petites minutes et puis après on aura épuisé les questions,
00:51:01 la corruption dans les administrations, est-ce que vous avez été confronté à des situations de cette nature,
00:51:07 je pense à la maison d'arrêt, vous nous avez dit que vous avez une maison d'arrêt importante,
00:51:11 c'est une maison d'arrêt, oui, 700 détenus actuellement, vous avez eu des cas,
00:51:18 est-ce que vous pouvez nous dire comment est-ce que vous pouvez suivre ces questions-là particulièrement ?
00:51:24 Nous avons une affaire particulièrement qui est encore en cours, qui concerne des surveillants de la maison d'arrêt,
00:51:31 je vous disais que le centre pénitentiaire, l'ensemble du centre pénitentiaire, c'est 700 détenus,
00:51:36 pas seulement la maison d'arrêt, mais c'est un centre de détention également,
00:51:40 alors je ne veux pas vous dire de bêtises, je n'ai pas le chiffre exact,
00:51:44 mais en tout état de cause, il y a effectivement des pénétrations importantes de stupéfiants irréguliers,
00:51:52 je vous disais le chiffre il est constant les trois dernières années, c'est 12 kilos au total,
00:51:56 beaucoup de projections par drone, mais aussi beaucoup d'entrées au niveau des parloirs,
00:52:01 et c'est là où se pose la question d'éventuelles complicités parfois,
00:52:05 et il y a un dossier qui concerne 4 surveillants mis en cause sur, effectivement, de la corruption et de la complicité,
00:52:13 notamment pour avoir fait rentrer un certain nombre de produits stupéfiants.
00:52:17 Donc là, ce sont des enquêtes qui sont évidemment menées dans le cadre de commissions rogatoires,
00:52:21 et qui sont en cours d'instruction, qui permettent, alors avec une bonne coopération de la direction du centre pénitentiaire,
00:52:30 puisqu'il y a un vrai échange sur les politiques pénales, à la fois la comparution immédiate systématique,
00:52:36 le disciplinaire à côté, et puis l'échange d'informations réguliers,
00:52:40 des brouilleurs aussi qui sont mis en place au niveau des drones,
00:52:44 donc aussi des dispositifs que le centre pénitentiaire essaye de mettre en place,
00:52:48 et puis pour nous, une politique pénale très présente,
00:52:51 puisqu'on a un service d'exécution des peines dédié au traitement des infractions en centre pénitentiaire.
00:52:56 Donc une seule affaire ces dernières années, alors quand je dis ces dernières années,
00:53:00 moi j'ai un recul très récent, mais en tout cas de l'historique que j'ai pu retracer,
00:53:04 qui est assez récente, et qui était assez significative,
00:53:07 puisque pour le coup elle a véritablement facilité l'entrée.
00:53:11 Beaucoup aussi de parachutage aux abords des centres pénitentiaires,
00:53:15 donc on a cette vraie problématique de sécurisation des lieux de détention,
00:53:19 avec parfois des possibilités d'approcher d'assez près finalement la détention,
00:53:26 qui pose question sur les dispositifs de sécurité aux abords des maisons d'arrêt,
00:53:30 puisqu'on a des mineurs qui arrivent en scooter le soir,
00:53:34 qui tournent autour du centre pénitentiaire et qui arrivent à projeter tout simplement
00:53:38 en lançant par-dessus les murs d'enceinte.
00:53:40 Donc c'est quelque chose qui interpelle en termes de dispositifs de sécurité,
00:53:44 et puis qui est assez fréquent, on a énormément de mineurs impliqués,
00:53:48 parce que évidemment les peines encourues sont assez faibles,
00:53:53 lorsque ils ont 14 ans, 15 ans, il n'y a pas de détention au bout,
00:53:56 et ils sont souvent utilisés pour effectuer ces livraisons et ces projections.
00:54:01 Et puis le drone, ces dernières années, qui est devenu vraiment l'outil à la mode,
00:54:06 je dirais, qui fonctionne finalement assez bien,
00:54:08 avec du parachutage de produits stupéfiants en centre pénitentiaire.
00:54:12 Donc un vrai point d'attention, puisque pour nous, un vrai facteur de risque,
00:54:17 et puis on voit que les quantités qui circulent, alors c'est celles qui sont saisies,
00:54:20 donc il en circule beaucoup plus que ce qui n'est saisi,
00:54:23 mais c'est assez significatif quand même.
00:54:27 Sur la corruption, je pense que c'est vraiment une thématique centrale,
00:54:31 parce que si vous voulez, c'est un peu l'arlésienne la corruption,
00:54:35 c'est-à-dire que tout le monde en parle,
00:54:38 mais des dossiers qui tiennent et qui vont jusqu'à une condamnation, il y en a peu.
00:54:43 Alors ça tient à la difficulté aussi de cette qualification,
00:54:46 parce qu'il faut démontrer un pacte de corruption, c'est compliqué, ce n'est pas simple.
00:54:50 Mais je pense que la corruption en lien avec le trafic de stupéfiants,
00:54:55 c'est un point de vigilance majeur.
00:54:57 Nous, on a eu plusieurs enquêtes qui n'ont pas abouti, aucune n'a abouti.
00:55:01 Une visant un douanier, une visant un agent pénitentiaire,
00:55:08 et une enquête, c'est plus périphérique, mais visant une fonctionnaire de police de la CROSS64.
00:55:13 Ces enquêtes n'ont pas abouti par des poursuites ou des condamnations,
00:55:17 mais ce sont des indices.
00:55:19 Et aujourd'hui, on voit, et mon expérience passée a montré,
00:55:24 évidemment il y a des milieux qu'on cible, l'administration pénitentiaire, oui, forcément.
00:55:29 Les FSI aussi, dans mon ancien ressort à Vienne,
00:55:33 on a pour le coup poursuivi et condamné lourdement une gendarme,
00:55:37 une militaire de la gendarmerie, qu'on a pris en flagrant délit,
00:55:40 elle rentrait 30 téléphones à peu près tous les mois.
00:55:43 Donc les FSI, oui.
00:55:45 Les élus locaux, à ne pas négliger dans le cadre de nos dispositifs partenariaux,
00:55:50 là aussi sur mon ancien ressort, on a mis en examen un élu,
00:55:53 qui dans le cadre d'un JLTD, un groupement local de traitement de la délinquance,
00:55:57 avait eu une information sur une opération de police qui allait se monter dans une cité,
00:56:01 et qui a divulgué cette information,
00:56:04 parce que c'est une personnalité qui comptait dans le quartier,
00:56:10 peut-être en termes électoraux aussi,
00:56:13 et divulguait cette information.
00:56:16 Les agents des ports, sur lesquels nous travaillons actuellement,
00:56:21 le ministère de la Justice a créé à la fois sur l'arc atlantique et l'arc méditerranéen un travail,
00:56:26 parce que dans les ports, il y a une telle différence juridique de statut,
00:56:30 déjà si repéré en termes de maquis, de qui ça dépend, qui a compétence,
00:56:34 les ports sont évidemment des points de potentielle corruption important.
00:56:38 Les aéroports secondaires.
00:56:41 Et puis, je le dis en toute honnêteté, le ministère de la Justice.
00:56:46 Nous sommes, nous, dans une phase, vous le savez,
00:56:51 où nous recrutons beaucoup d'agents contractuels, beaucoup,
00:56:55 qui travaillent dans nos bureaux d'ordre pénaux, à enregistrer les procédures.
00:57:01 Nous avons peu de contrôle, en termes d'enquête de moralité,
00:57:06 sur le recrutement de ces agents contractuels, très peu.
00:57:12 Et donc, il y a tous ces points-là.
00:57:15 Mais après, l'objectiver, et c'est pour ça que je pense qu'il y a un vrai travail à faire sur la corruption,
00:57:20 si vous prenez le nombre d'affaires de condamnations liées à des affaires de corruption
00:57:25 en lien avec le trafic de stupéfiants en France par an, je pense que ça n'en fait pas lourd.
00:57:29 Vous disiez, je vais donner la parole à mes collègues qui l'ont demandé,
00:57:34 vous disiez qu'il est difficile de démontrer le pacte de corruption.
00:57:37 Il y a un sujet de texte d'évolution législative ?
00:57:40 Je ne sais pas, parce qu'intrinsèquement, je ne vois pas bien comment on pourrait le modifier.
00:57:47 C'est simplement une infraction qui est compliquée à caractériser,
00:57:51 parce qu'elle est très opaque, qu'il faut démontrer.
00:57:55 Ce n'est pas simple.
00:57:58 Après, je pense à des dossiers plus basiques,
00:58:02 mais enfin, la complicité par aide ou par instigation est quelque chose qui peut être plus facilement démontré.
00:58:09 Je dirais que parfois, il faut juste être pragmatique et trouver effectivement le champ de qualification qui permette de...
00:58:16 En effet, parfois, on a des qualifications qui sont compliquées juridiquement à qualifier,
00:58:22 mais on peut partir sur d'autres champs.
00:58:24 Nous, c'était le choix qu'on a fait procédural, de partir plutôt sur de la complicité,
00:58:28 à la fois par aide et puis par instigation en réalité.
00:58:31 Merci.
00:58:32 Alors, j'avais vu Marie-Laure Finera-Hort et Catherine Concon qui souhaitaient poser des questions.
00:58:39 Oui, merci Président. C'est juste une petite question. Bonjour à tous.
00:58:43 Il y a quelques années, j'avais suivi une affaire concernant un jeune militaire guyanais,
00:58:49 puisque je suis sénatrice à Guyane, qui recevait des colis de cocaïne en provenant de la Guyane.
00:58:54 Je voulais juste savoir, est-ce qu'il y avait eu d'autres cas depuis...
00:58:58 Je m'adresse à Monsieur le Procureur de Bayonne, puisque c'était chez vous.
00:59:02 Est-ce que vous avez connaissance ? Je ne sais pas.
00:59:04 Parce que vous savez que chez nous, il y a un phénomène de mule qui, malgré les contrôles à 100%,
00:59:11 ça ne change pas grand-chose puisque ça continue.
00:59:14 Et quand j'ai su qu'il y avait à Bayonne, je me suis dit, je ne sais pas,
00:59:18 on arrive à Orly ou à Roissy pour arriver jusqu'à Bayonne.
00:59:21 En plus, c'est certainement par voie postale, puisqu'il s'agissait d'un colis.
00:59:25 Donc voilà, je voulais juste savoir, est-ce qu'il y a eu d'autres cas comme celui-là ?
00:59:30 Je vais peut-être passer la parole à Caroline Parizel.
00:59:33 C'est vrai, j'ai un de mes magistrats honoraires qui était procureur adjoint en Guyane.
00:59:38 C'est effarant. Il me dit quel était le taux de personnes "chargées" par avion.
00:59:45 C'est absolument effarant.
00:59:47 Mais ce qu'il y a, c'est des livraisons par voie postale aussi,
00:59:51 que l'administration des douanes essaie de tracer.
00:59:55 C'est-à-dire qu'on fait certaines procédures en traçant des colis.
00:59:59 Mais ça, c'est quelque chose de plus répandu.
01:00:02 Les douanes nous informent qu'un colis contenant du stupéfiant est en cours de livraison,
01:00:09 mais en fait c'est livré dans des points-relais avec des fausses identités.
01:00:12 Donc on n'arrive pas à remonter.
01:00:14 Catherine Conconne.
01:00:18 Oui, merci. Bonjour. Catherine Conconne, sénatrice de Martinique.
01:00:22 Notre territoire, qui fait partie à mon avis des plus affectés,
01:00:26 compte tenu du gabarit de notre population,
01:00:30 on est moins de 400 000 et pourtant les affaires de drogue sont extrêmement répandues chez nous.
01:00:36 Vous avez dit avec regret tout à l'heure que les enquêteurs ne disposaient pas de moyens,
01:00:43 de téléphone, etc., pour pouvoir tracer toutes ces communications.
01:00:48 Ça m'a l'air simple à priori à mettre en place.
01:00:52 Pourquoi ça ne se met pas en place ? C'est quoi le problème ?
01:00:55 Est-ce une volonté ? Est-ce un manque de moyens ?
01:00:58 Comment vous expliquez ça ?
01:01:00 C'est simple, mais pas simple.
01:01:04 C'est-à-dire qu'on en revient aussi au cadre juridique de ce qu'on appelle nous les techniques spéciales d'enquête,
01:01:12 qui sont régies par le Code de procédure pénale, organisées,
01:01:17 et qui peut-être mériteraient d'évoluer.
01:01:20 Mais l'équilibre est délicat, parce qu'il y a d'un côté la défense de l'État de droit,
01:01:26 il y a ce que nous impose la jurisprudence européenne,
01:01:30 dont on pense ce qu'on veut, que ce soit un bien, que ce soit un mal,
01:01:35 mais en tout cas elle existe, et c'est une pression qui est forte,
01:01:40 et d'autre part les moyens dont disposeraient les enquêteurs.
01:01:44 Si vous proposez au service de police d'envisager des solutions,
01:01:48 moi mon chef de l'OFAST propose de créer ce qu'il appelle un pack TSE,
01:01:53 un pack technique spécial d'enquête, balise, écoute, vidéo, sonorisation,
01:01:59 qui serait autorisé par le juge des libertés et de la détention,
01:02:03 mais dont le détail de mise en place ne serait pas communiqué,
01:02:07 notamment pas communiqué aux avocats, et c'est un dispositif qui est prévu en Belgique par exemple.
01:02:13 C'est un dossier COP dans lequel on place toutes ces procédures qui sont dérogatoires.
01:02:19 Exactement. Tout est une question, et là il ne m'appartient pas de me positionner là-dessus,
01:02:26 je m'en garderai bien, mais tout est question d'équilibre entre d'un côté un État de droit,
01:02:32 et ensuite une efficacité. Mais ce dont il faut avoir conscience,
01:02:37 il ne faut pas être naïf, c'est que face à toutes ces techniques modernes,
01:02:41 nous sommes de moins en moins efficaces. Voilà, ça c'est une réalité.
01:02:45 Je peux ajouter, en tout cas sur le terrain, ce qui ressort des enquêteurs,
01:02:50 qui sont de moins en moins motivés pour faire du judiciaire,
01:02:54 parce que les règles sont de plus en plus compliquées, ils ont peur des nullités,
01:02:57 c'est vraiment une responsabilité pour eux, c'est que quand on a une enquête préliminaire
01:03:01 en matière de stupéfiants, c'est très très lourd à gérer,
01:03:04 parce que c'est une demande de géolocalisation du téléphone AB initio délivré par le parquet,
01:03:09 et ensuite au bout de 15 jours on doit aller voir le JLD, qui nous autorise une première fois,
01:03:12 puis ensuite tous les mois on doit y retourner, y compris pour les écoutes téléphoniques,
01:03:16 où on a un délai maximum de 2 mois d'écoute téléphonique.
01:03:21 Donc c'est très très lourd, à la fois pour les enquêteurs et pour le parquet de gérer.
01:03:25 Moi si je n'avais pas d'assistant autour de moi, de juriste assistant pour m'aider à gérer,
01:03:29 ce serait impossible en fait, parce que faire une requête, la retransmettre aux enquêteurs,
01:03:34 ça demande extrêmement, enfin beaucoup de temps.
01:03:37 Et je dirais, il n'y a pas de, par rapport à ce qui est possible de faire pour le juge d'instruction,
01:03:41 il n'y a pas de parallèle pour le parquet.
01:03:44 Je dis par là que ce qu'on constate, c'est qu'en matière de stupéfiants,
01:03:47 on est efficace sur les réseaux locaux à partir du moment où on arrive à être réactif
01:03:52 et à démanteler rapidement le trafic avant qu'il ne s'installe de manière plus longue sur nos territoires ruraux,
01:03:59 parce que là encore on a une possibilité de réactivité par rapport aux dénonciations des voisins.
01:04:05 Et la force qu'on a, c'est de pouvoir intervenir rapidement et de démanteler rapidement
01:04:09 et de juger rapidement ces personnes-là.
01:04:11 Si on doit passer par une instruction judiciaire,
01:04:13 inévitablement on est parti sur un an et demi d'enquête avant le jugement,
01:04:17 les personnes vont être libérées et on n'aura pas des peines à la hauteur de...
01:04:21 Oui, ce sera une peine proportionnée, mais il n'y aura pas cette réactivité qui est attendue par la population
01:04:27 et qui est extrêmement importante pour arracher les racines de manière rapide.
01:04:31 Il ne faut pas travailler tous les dossiers comme ça, mais en tout cas sur les petits réseaux locaux,
01:04:35 véritablement c'est une efficacité, c'est la rapidité et c'est difficile à mettre en œuvre
01:04:40 avec les moyens législatifs aujourd'hui ouverts au parquet dans le cadre de l'enquête préliminaire.
01:04:44 [INAUDIBLE]
01:04:46 Oui, pour avoir plus, en tout cas des délais plus longs et un assouplissement des règles
01:04:51 dans le respect des libertés judiciaires.
01:04:52 J'en parlais avec le juge des libertés à la détention, qui est très réactif aussi.
01:04:55 Ça lui demande aussi beaucoup de travail et il disait "mais pourquoi ne pas imaginer une autorisation par personne ?"
01:05:02 Et puis ensuite, on fait des géolocalisations, pas par objet en fait, parce qu'on a un téléphone, une voiture.
01:05:08 La voiture, c'est la géolocalisation, le téléphone, c'est la géolocalisation, l'écoute téléphonique.
01:05:13 Donc ça fait des demandes, mais à rallonge, on a des dossiers comme ça, uniquement d'autorisation.
01:05:19 Alors que le GLD sait très bien ce qui se passe, il peut autoriser pour la personne impliquée
01:05:23 sur tous les moyens possibles.
01:05:25 Enfin voilà, c'est une idée...
01:05:27 [INAUDIBLE]
01:05:29 Conviction.
01:05:30 Voilà.
01:05:31 C'est ça.
01:05:32 La suggestion, l'idéal, ce serait ça.
01:05:35 Dans le respect de l'état de droit.
01:05:37 Bien sûr, de la séparation des pouvoirs, on l'a bien compris.
01:05:40 Madame la procureure.
01:05:42 Si je peux me permettre, si je pouvais ajouter encore un petit souhait, parce que je souscris à ce qu'il vient de dire,
01:05:48 d'être dit, mais le souhait aussi de la spécialisation et finalement d'une uniformité au niveau du territoire,
01:05:55 de la formation et de la spécialisation des OPJ.
01:05:59 Je voudrais quand même citer ici une réforme qui nous inquiète tous un peu en tant que procureure.
01:06:04 Alors on attend de voir comment elle va être portée, mais cette réforme de la police judiciaire
01:06:08 qui tend à une nouvelle centralisation des moyens et une administration unique,
01:06:13 alors a sûrement une vocation de rationalisation.
01:06:17 Ceci dit, quand on étudie la carte et je l'ai étudiée avec soin et je me suis rendue à Lyon au contact des ZPJ au niveau zonal
01:06:26 pour voir un petit peu où se situait l'Ain, le territoire de l'Ain, 680 000 personnes, aucune antenne police judiciaire dédiée.
01:06:35 Alors aujourd'hui, somme toute, quand je fais le constat et avec le nouveau directeur départemental de la police nationale,
01:06:43 notre police judiciaire à Bourg-en-Bresse, pour l'ensemble du territoire, qui est un territoire extrêmement vaste,
01:06:49 c'est 4 OPJ et c'est la même chose qu'avant.
01:06:52 C'est-à-dire que le maillage territorial réforme de l'APJ qui est passé par là, change strictement rien.
01:06:58 Nous sommes en zone grise et d'ailleurs la carte qu'on m'a présentée était très significative.
01:07:02 Il y avait les zones qui étaient couvertes par l'APJ, qui avaient des directions interrégionales, zonales aujourd'hui, de police judiciaire,
01:07:11 donc formées et spécialisées, disposant des techniques d'enquête et disposant de l'information,
01:07:17 puisqu'on a des antennes OFAST avec des gens qui sont spécialisés pour les trafics de stupéfiants.
01:07:23 Et à côté de ça, on a des territoires laissés pour compte, parce que moi je le vis un petit peu comme ça,
01:07:28 où il y a une zone grise, elle est en gris sur la carte et elle n'est pas couverte.
01:07:33 Donc elle est couverte par la gendarmerie, certes, et aujourd'hui par des émanations des sections de recherche,
01:07:38 mais en termes de PJ, d'OFAST, d'office central et finalement de maillage territorial,
01:07:44 on est sur des zones qui finalement n'ont pas de police judiciaire.
01:07:48 Alors moi j'attends de voir, encore une fois, je vais être optimiste,
01:07:51 et peut-être que la réforme va nous amener une centralisation de la formation et de la spécialisation,
01:07:56 mais en l'état c'est ce constat-là qui fait quand même que sur des territoires extrêmement vastes, on a zéro PJ.
01:08:03 Donc la technicité dont on parle, autant vous dire qu'elle n'existe pas, très clairement.
01:08:08 Merci Madame. Madame Paoli Gagin demande la parole.
01:08:14 Oui, merci beaucoup Monsieur le Président, Monsieur le rapporteur, Madame, Monsieur le Procureur, chers collègues.
01:08:21 Je voulais savoir si vous estimez que le renseignement territorial joue un rôle suffisant, en fait,
01:08:28 pour vous aider en amont du travail que vous conduisez,
01:08:34 ou si là encore on est dans une situation un peu indigente qui nécessiterait des moyens supplémentaires.
01:08:42 Et puis ensuite j'ai quand même le sentiment, en vous écoutant, qu'on a un problème systémique,
01:08:49 c'est-à-dire qu'on ira toujours moins vite, et on est très siloté par rapport à la menace,
01:08:56 et les moyens des malfrats qu'on a en face.
01:09:00 Vous parliez, Monsieur le Président, des petites coupures, mais je pense qu'aujourd'hui c'est les crypto-monnaies, en fait, en plus.
01:09:05 Donc la traçabilité, ça va devenir un autre enjeu dans le domaine du numérique,
01:09:11 par lequel plus de la moitié de la criminalité et du narcotrafic passe.
01:09:16 Donc si on ne change pas d'approche non plus, je crains qu'on soit toujours en retard
01:09:23 sur l'histoire qui est en train de se faire, et cette histoire-là est plutôt morbide,
01:09:28 donc il faut peut-être qu'on se donne à la fois de conceptions différentes et de moyens plus adaptés.
01:09:38 C'est le propre de la police et de la justice d'être à la traîne du délinquant dans l'histoire,
01:09:45 mais c'est évidemment que quand les choses s'accélèrent, il faut courir encore plus vite.
01:09:50 Sur la crypto-monnaie, évidemment c'est un enjeu majeur, mais la crypto-monnaie, elle est traçable.
01:09:59 Elle est traçable, et donc je ne pense pas qu'elle supprimera le cash.
01:10:05 Ça sera un vecteur de plus en plus important pour les réseaux criminels, c'est certain,
01:10:11 mais je pense que le numéraire restera quand même quelque chose d'important.
01:10:16 Sur votre question sur le renseignement, c'est un peu une question piège.
01:10:21 Enfin, ce n'est pas une question piège, mais c'est...
01:10:24 Alors, la police judiciaire développe évidemment ses propres capacités de renseignement.
01:10:29 La police judiciaire est un service de renseignement judiciaire, donc elle développe ses prêts.
01:10:34 Sur le renseignement territorial, comme sur la sécurité intérieure, la DGSI,
01:10:41 tout dépend des relations... Il n'y a pas de relation institutionnelle formalisée
01:10:49 entre les procureurs de la République et les services de renseignement.
01:10:52 On a souvent à choper sur la classification du renseignement.
01:10:55 Aujourd'hui, les procureurs de la République, en tout cas lorsqu'ils le souhaitent, sont habilités,
01:11:00 c'est mon cas, mais ça s'est fait dans le cadre du vecteur de la lutte contre la radicalisation et le terrorisme,
01:11:06 des jèdes, où on a finalement noué des liens avec les services de renseignement territoriaux
01:11:12 qu'on n'avait pas du tout avant.
01:11:14 Mais les renseignements territoriaux ne nous alimentent quand même pas spontanément
01:11:21 en renseignement sur ce type d'affaires.
01:11:24 Alors après, ils alimentent leurs propres services, les services de police ou les services de gendarmerie,
01:11:30 en tout cas ils sont censés le faire, mais la vision qu'en ont les parquets est très parcellaire.
01:11:35 Ça m'est difficile de savoir ce que le renseignement territorial sur le trafic de drogue remonte aux services de police ou de gendarmerie.
01:11:48 J'en ai pas une vision précise.
01:11:50 Moi je dirais même plus court, je n'en ai aucune.
01:11:54 En revanche, c'est-à-dire que nous n'avons pas de contact direct et pas de retour sur la source
01:12:01 et sur la façon dont l'information est remontée en interne aux services de police,
01:12:06 les procureurs n'en sont absolument pas destinataires du tout.
01:12:11 Donc il n'y a pas de lien institutionnalisé, nous n'avons pas de visibilité.
01:12:15 En revanche, là où la culture a changé, c'est dans le cadre effectivement de la lutte contre la radicalisation
01:12:22 et dans le cadre des jeux ED lorsque nous sommes en réunion d'État-major, donc en périmètre restreint,
01:12:30 là pour le coup, moi je vois une nette évolution ces dernières années d'informations croisées à l'occasion de la problématique radicalisation
01:12:39 mais qui souvent recouvrent d'autres réalités.
01:12:41 Par exemple, les stupéfiants sont aussi quelque chose qui émerge dans ces instances-là.
01:12:47 Lorsqu'on étudie un individu en particulier sur lequel on a une problématique radicalisation,
01:12:52 on va étudier l'ensemble finalement du spectre de son train de vie, de la façon dont il se comporte, de ses activités.
01:13:00 Et là, l'échange d'informations, je trouve ces dernières années a beaucoup progressé
01:13:04 dans le sens où nous sommes maintenant destinataires des informations, parfois en amont des jeux ED,
01:13:11 parfois au cours des jeux ED, nous avons accès aux notes blanches et à une information détaillée.
01:13:16 Et donc, il y a des barrières qui se sont rompues là à l'occasion de la lutte contre la radicalisation.
01:13:22 Donc dans ces instances, on échange de l'information, mais elle n'est pas destinée aux stupéfiants.
01:13:27 Et en revanche, dans le cadre de la lutte contre les stupéfiants, les RT pour nous n'ont pas de contact direct avec les parquets.
01:13:34 Très bien, merci.
01:13:35 Là, comme l'autre, vous nous avez parlé de frontaliers,
01:13:39 vous avez parlé des rapports très brièvement avec vos voisins espagnols et suisses,
01:13:44 vous en êtes satisfait sur ces sujets de stupéfiants ?
01:13:47 Ce sont des éléments que je vous communiquerai dans la réponse au questionnaire.
01:13:53 On a fait en octobre un colloque financé par la Mildeca sur la lutte contre le narcotrafic franco-espagnol,
01:14:00 qui était intéressant, qui était assez riche d'enseignements, pour être très synthétique.
01:14:07 Avec l'Espagne, il y a une coopération qui, évidemment, est forte sur cette thématique-là.
01:14:12 Mais il y a toujours des pierres d'achoppement.
01:14:15 Les pierres d'achoppement, et ça, elles ne sont pas propres à l'Espagne,
01:14:18 c'est souvent la méconnaissance de nos cadres juridiques distincts, parce qu'ils restent distincts,
01:14:24 et du coup, la mauvaise utilisation des voies de communication ou de ce qu'on peut obtenir ou ne peut pas obtenir.
01:14:30 Par exemple, si on ne comprend pas qu'en Espagne, et je dirais que, je prêche pro domo, ça valorise beaucoup le parquet à la française,
01:14:40 en Espagne, le procureur de la République doit passer par un juge pour presque tout,
01:14:45 ce qui rallonge beaucoup de délais, ce qui ajoute beaucoup d'aléas.
01:14:49 Si vous voulez faire une perquisition en Espagne, si vous voulez faire une perquisition chez quelqu'un
01:14:54 dont vous n'identifiez pas que c'est le domicile du mis en cause, vous n'aurez jamais gain de cause.
01:14:58 Vous ne pourrez pas faire une perquisition, ce qui chez nous est possible.
01:15:01 Donc, il y a cette différence de régime juridique qui est importante,
01:15:05 ensuite, il y a une part d'intuitu personnée qui est importante,
01:15:08 et ensuite, mais ça c'est propre aux relations internationales, il y a une part de réciprocité qui est importante,
01:15:14 c'est-à-dire que pour avoir de la réciprocité, il faut intéresser, et parfois les thématiques qui focalisent un Etat ne sont pas forcément les mêmes.
01:15:23 En Espagne, on l'a connu, quand la France s'est engagée dans la lutte contre l'ETA,
01:15:29 l'Espagne a davantage coopéré sur la lutte contre le trafic de stupéfiants.
01:15:33 Donc, tous ces éléments-là, évidemment, sont à prendre en considération.
01:15:37 Côté Suisse, alors, mon étonnement, mais encore une fois, je suis au stade encore du rapport d'étonnement,
01:15:44 puisque je suis dans les six mois de la prise de fonction,
01:15:47 c'était de découvrir que nous n'avions effectivement émis aucune demande d'entraide en matière de stupéfiants,
01:15:53 et en matière d'ailleurs de délinquance organisée de façon générale ces trois dernières années.
01:15:59 En revanche, nous sommes destinataires, et pour traiter moi-même le champ de l'entraide pénale internationale,
01:16:05 nous sommes destinataires de multiples demandes dans des domaines très variés des autorités suisses
01:16:10 qui sont très proactives sur le champ de l'entraide,
01:16:13 alors principalement sur des infractions de droits communs, du routier, mais aussi des vols et aussi des atteintes aux personnes.
01:16:19 Les Suisses sont extrêmement demandeurs.
01:16:22 On exécute, nous, très facilement ces demandes d'entraide,
01:16:25 et je me suis rapprochée tout récemment du procureur général de Genève,
01:16:29 et donc de mon homologue, la première procureure de Genève,
01:16:32 pour déterminer avec elle justement les champs dans lesquels on pourrait favoriser une entraide directe,
01:16:38 parce que moi je pense que l'entraide judiciaire, c'est avant tout effectivement une question de relations proches, de proximité,
01:16:47 identifier des objectifs communs, et aller effectivement sur nous, de notre côté, plus de proactivité.
01:16:54 Faut-il encore une fois que sur ce paychex du front allié, émergent les affaires qui le permettent.
01:16:59 Donc ça c'est un constat.
01:17:01 Une difficulté des services d'enquête qui nous sont remontés, et à l'occasion de ma visite du CCPD de Genève,
01:17:08 une difficulté sur la poursuite transfrontalière avec les autorités suisses,
01:17:13 qui ne se passe pas toujours dans les meilleures conditions,
01:17:17 avec des freins assez importants des Suisses lorsqu'on est sur de la poursuite transfrontalière,
01:17:24 donc ça se fait quasiment peu,
01:17:26 puisqu'il faut qu'il y ait une atteinte grave aux personnes où une menace avérée,
01:17:32 dans le cadre des accords de Paris, et qu'ils ont une vision très restrictive.
01:17:35 Donc par exemple, l'infraction de droit commun qui donne lieu à une poursuite,
01:17:39 expose les enquêteurs en cas de difficulté ou en cas d'usage des armes par exemple, à des poursuites,
01:17:46 et donc ils sont extrêmement restrictifs, extrêmement craintifs sur cette poursuite transfrontalière,
01:17:52 à plan de leur vœu, une évolution des accords de Paris et du texte,
01:17:57 et puis peut-être la pratique aussi des Suisses,
01:18:00 alors qu'ils eux viennent assez facilement, franchissent la frontière assez facilement,
01:18:05 et avec effectivement une interprétation parfois compliquée.
01:18:08 Donc un risque lorsque il y a ce franchissement de frontière,
01:18:11 qui en tout cas, m'est retranscrit par les enquêteurs.
01:18:14 Et puis sur le plan de l'entraide, effectivement une entraide directe à nourrir.
01:18:18 Voilà pour cette audition débarquée de Bayonne et de Bourg-en-Bresse,
01:18:22 devant la commission d'enquête du Sénat sur le narcotrafic.
01:18:25 Les sénateurs auditionnent aujourd'hui également des compagnies de gendarmerie
01:18:28 sur ce sujet du trafic de drogue, notamment en zone rurale.
01:18:31 Je vous laisse écouter cette audition.
01:18:33 La compagnie de gendarmerie départementale d'Allence-Port Argentin,
01:18:36 c'est une compagnie qui est composée de neuf brigades,
01:18:38 donc neuf brigades pour la plupart en communauté de brigade,
01:18:41 un peloton de surveillance des interventions de la gendarmerie d'Issabre,
01:18:45 donc c'est des personnels qui sont tous d'actifs et formés au spectre du terrorisme,
01:18:50 et enfin une brigade de recherche.
01:18:52 Donc la compagnie est située dans l'Orne,
01:18:54 c'est un département qui est plutôt de passage,
01:18:57 qui est frontali avec six départements et qui se trouve à moins de 200 km à l'ouest de Paris.
01:19:03 On couvre 97% du territoire, du département, principalement en zone rurale,
01:19:09 et ça correspond aux trois quarts de la population.
01:19:12 Donc le reste est géré par la police nationale.
01:19:15 Donc la présentation, pour ma part,
01:19:18 ce qui est important, ce que je voulais vous évoquer,
01:19:22 c'est quand vous prenez le commandement d'une compagnie,
01:19:24 vous avez une appropriation territoriale,
01:19:26 c'est un département que je ne connaissais pas, que je découvre,
01:19:29 et en qualité de commandement de compagnie,
01:19:31 je suis responsable de la sécurité publique sur le territoire,
01:19:34 et par conséquent je suis impliqué par tous les contentieux
01:19:37 qui sont commis sur ma partie de la compagnie,
01:19:41 mais qui va au-delà des infractions aux stupéfiants.
01:19:44 Donc néanmoins, conformément aux directives que j'ai reçues quand je suis arrivé,
01:19:48 l'Hémicycle d'Intérieur qui a été décliné localement par le groupement de gendarmerie,
01:19:52 il y a deux priorités qui sont fixées depuis plusieurs années
01:19:55 et qu'on m'a données en arrivant,
01:19:57 c'est les violences à traits familiales et les stupéfiants.
01:20:00 Et dès mon arrivée il y a six mois,
01:20:02 donc ces deux priorités m'ont été rappelées par le commandement du groupement
01:20:04 et par les autorités judiciaires,
01:20:06 puisque j'ai été reçu par les deux procureurs dans la République,
01:20:09 par le parquet d'Argentan et d'Alençon,
01:20:11 et par l'autorité administrative.
01:20:13 Donc moi ce que ça me dit quand j'arrive,
01:20:15 parce que j'ai servi dans d'autres départements qui sont un peu plus urbanisés,
01:20:19 c'est que j'ai servi dans l'Est de la France, le Nord de la France,
01:20:22 près de Lille,
01:20:24 et la dernière affectation d'administration centrale en région parisienne,
01:20:27 c'est qu'un département comme Lorme,
01:20:29 qui est particulièrement rural,
01:20:31 n'est pas épargné par le fléau des stupéfiants.
01:20:33 Voilà, je pensais, en arrivant on me dit tout de suite que les stupéfiants c'est une problématique.
01:20:37 Et c'est tout le sens en fait à Alençon,
01:20:40 donc on me rappelle aussi un petit peu la jeunesse de ce qui s'est passé avant que j'arrive.
01:20:43 C'est le comité interministériel de lutte contre les stupéfiants qui a eu lieu à Alençon,
01:20:48 qui réunissait le Premier ministre et les ministres concernés de l'intérieur,
01:20:52 notamment de la justice et des comptes publics.
01:20:54 Et aussi, on me rappelle que, quelques mois avant ma arrivée, en janvier 2023,
01:20:58 il y a un plan de lutte contre le krach qui a été mis en place à Alençon.
01:21:02 Ce plan implique les forces de l'ordre,
01:21:05 et non seulement, il implique l'agence régionale de santé, la préfecture, la mairie,
01:21:10 tous les partenaires qui ont besoin d'en connaître.
01:21:13 Donc même si Alençon n'est pas en zone de gendarmerie,
01:21:17 même si Alençon relève de la zone police,
01:21:20 malgré tout, la gendarmerie est également associée à la lutte contre les stupéfiants.
01:21:25 Et si le trafic se situe essentiellement sur Alençon,
01:21:30 la zone des consommateurs s'étend sur tout le département de l'Orme.
01:21:34 Donc on est conscient que la plupart du trafic est sur Alençon,
01:21:38 mais pourtant, ça irrigue tout le département de l'Orme.
01:21:40 Donc par conséquent, le contrôle des flux est stratégique.
01:21:43 Et dans cet esprit, on a un groupe local de contrôle des flux
01:21:47 qui a été mis en place en janvier 2022,
01:21:49 qui est chargé, justement, de traquer les approvisionnements aux stupéfiants en substances illicites.
01:21:55 Et du coup, on a un groupe de quatre militaires,
01:21:57 qui est commandé par l'adjoint-chef Vernet, qui est sur ma gauche,
01:22:00 qui aura l'occasion également de vous présenter son travail
01:22:02 et les problématiques qu'il rencontre dans ce cadre-là.
01:22:04 Actuellement, ils sont quatre.
01:22:06 La difficulté, c'est que c'est sous le plafond des effectifs.
01:22:09 Donc cette difficulté, normalement, devrait être surmontée dans les années à venir,
01:22:14 puisque dans le cadre des 200 brigades,
01:22:16 ces postes devraient être pérennisés à hauteur de six personnels.
01:22:19 Donc nous, on récupérait des postes pour nous faire autre chose,
01:22:22 et six personnels seraient affectés définitivement à cette tâche.
01:22:27 Alors, je voulais vous faire un état aussi de la menace,
01:22:29 et ce qu'on trouve sur notre secteur.
01:22:31 Sur la circonscription, on trouve tout type de drogue, effectivement,
01:22:34 du cannabis, de l'héroïne, de la cocaïne, de la méthamphétamine,
01:22:38 et d'autres types de drogue.
01:22:39 Et concernant le crack, on n'a pas eu de saisie importante ou alarmante.
01:22:43 Donc là, je n'ai même pas de saisie depuis six mois que je suis présent sur la compagnie,
01:22:47 mais ça ne veut pas dire qu'il n'est pas présent sur la circonscription.
01:22:51 Ce n'est pas parce qu'on n'a pas fait de saisie.
01:22:53 Donc on est attentif à ça, et l'objectif du plan crack également,
01:22:56 c'est d'éviter qu'il ne s'étende, justement, à la zone gendarmerie.
01:22:59 C'est pour ça qu'on est attentif.
01:23:01 Concernant la cocaïne, on constate qu'elle s'est démocratisée, malheureusement,
01:23:06 parce qu'elle a perdu son image négative qu'elle avait par le passé
01:23:09 de la seringue et du reste, et qu'en plus les prix ont baissé.
01:23:12 Sur la délocalisation des trafics en zone rurale,
01:23:15 nous on peut l'expliquer par plusieurs raisons.
01:23:18 C'est que les fournisseurs cherchent la discrétion.
01:23:21 Dans les zones rurales, la clientèle est plus restreinte et connue des fournisseurs.
01:23:26 La délocalisation aussi en campagne, elle permet aussi le développement
01:23:29 d'un phénomène de cannabis culture, avec le matériel que vous trouvez
01:23:33 facilement sur Internet et qui est en vente libre.
01:23:36 Et en plus, pour la culture, vous trouvez des tutos facilement
01:23:39 sur Internet pour vous montrer comment le faire.
01:23:41 Alors nous, sur la circonscription, je n'ai pas eu, depuis les mois
01:23:45 de ma présence, de grosses découvertes de cannabis culture en indoor.
01:23:50 On fait des saisies, de temps en temps, de pieds de cannabis.
01:23:53 Donc ça veut dire que ça existe, on a des pieds de cannabis qui sont saisis.
01:23:56 Une quarantaine sur la compagnie voisine et nous une dizaine.
01:24:00 Donc on a aussi ce phénomène-là.
01:24:02 On a aussi les investigations, l'accessibilité à tous les produits
01:24:06 en deux clics sur Internet.
01:24:08 Donc ça aussi, c'est un phénomène qu'on rencontre et on s'en rend compte
01:24:11 puisque ça favorise aussi les petits délinquants qui peuvent s'improviser
01:24:14 facilement, dealer, justement grâce à la disponibilité des produits sur Internet.
01:24:20 Et je voulais évoquer aussi, sur le constat de ce qu'on peut trouver
01:24:24 sur le secteur, c'est aussi la livraison.
01:24:27 Donc les Uber Sheets, si vous me permettez l'expression,
01:24:29 qui sont apparus avec des fournisseurs de grandes villes,
01:24:32 de villes limitrophes au département de Lornes,
01:24:34 qui viennent approvisionner notre secteur.
01:24:37 Alors ils ont des modes opératoires assez faciles.
01:24:40 Ils récupèrent des listes de téléphones d'usagers.
01:24:42 Le matin, avant de partir, ils diffusent les produits disponibles
01:24:45 aux consommateurs et ils livrent sur le département en différents points
01:24:50 avec un conducteur qui est chargé d'être toujours en mouvement
01:24:53 et le passager qui se charge de ventre.
01:24:56 Donc on est loin, c'est pour ça que j'avais pris volontairement ces exemples-là,
01:24:59 on est loin des points de deal traditionnels qu'on peut rencontrer,
01:25:03 même si on a des points de deal dans des pavillons,
01:25:05 des logements collectifs qui existent également.
01:25:08 Donc les conséquences du trafic sur la circonscription.
01:25:11 Donc ça génère des infractions connexes, c'est sûr,
01:25:14 par contre qui sont difficiles à quantifier.
01:25:16 Donc on sait que ça génère des infractions type d'appropriation,
01:25:19 des vols, des cambriolages, pourquoi pas des vols à main armée,
01:25:22 mais aussi, alors je peux également évoquer des règlements de compte.
01:25:26 Alors c'est pareil, je vais évoquer cet exemple,
01:25:28 parce que c'était récent, c'est durant les 6 mois où j'étais présent.
01:25:32 Il y a quelques mois, on a constaté que deux individus
01:25:34 qui voulaient recouvrir une dette de stupéfiants
01:25:36 auprès d'un usager, consommateur, dealer,
01:25:39 qui devait revendre pour sa consommation personnelle,
01:25:42 et donc ils se sont pénétrés dans son logement,
01:25:45 l'ont abîmé d'un liquide inflammable,
01:25:47 en le menaçant de le brûler, et ils se sont retranchés dans le logement.
01:25:50 Donc ce type de règlement de compte a nécessité
01:25:52 l'intervention de la brigade locale, du plateau d'intervention,
01:25:55 et effectivement ça aurait pu être beaucoup plus grave,
01:25:58 donc on a réussi à interpeller les individus, et voilà, ça s'est bien passé.
01:26:01 Mais à travers cet exemple, ce que je veux montrer,
01:26:03 c'est que la régalité n'est pas épargnée
01:26:05 par ce type de fait qui est particulièrement grave.
01:26:08 Et par contre, ce que je veux dire également,
01:26:11 c'est qu'on ne peut pas faire d'un fait particulier une généralité.
01:26:14 Parce qu'on est lucide sur le constat, ça existe,
01:26:18 pour autant, ce n'est pas comparable à ce que vivent certaines grandes villes.
01:26:22 Mais on ne nie pas que ça arrive également chez nous.
01:26:25 Mais ce n'est pas mon quotidien. Sur les 6 mois, c'est arrivé une fois.
01:26:28 Alors, les moyens, sur une deuxième partie.
01:26:31 Donc les moyens, en fait l'action, moi ce que je vois,
01:26:34 et ce que j'avais vu, je me sers aussi de mon expérience passée,
01:26:37 c'est que l'action elle est globale,
01:26:39 elle ne s'arrête seulement sur la dimension judiciaire et répressive.
01:26:42 Donc elle se base aussi sur la prévention,
01:26:45 et notamment auprès des plus jeunes.
01:26:47 Si je fais le parallèle sur ce qu'on fait avec les plus jeunes,
01:26:50 moi je l'ai vu avec la rentrée des classes,
01:26:52 on a fait beaucoup d'informations sur la cybermenace, le harcèlement.
01:26:55 On fait la même chose dans le cadre des stupéfiants,
01:26:57 avec l'intervention des formateurs relais anti-drogue.
01:26:59 Et si je veux donner quelques chiffres, le bilan 2023,
01:27:02 on a sensibilisé plus de 4200 personnes
01:27:05 qui ont été sensibilisées dans ce cadre-là,
01:27:08 essentiellement des scolaires, au nombre de 93 classes,
01:27:11 plus de 2300 personnes en milieu scolaire,
01:27:14 professeurs, encadrement y compris.
01:27:16 Donc on agit aussi dans le cadre de la sensibilisation stupéfiante
01:27:19 avec des partenaires, comme la CPAM,
01:27:22 les services de santé, les bailleurs sociaux,
01:27:24 avec qui on travaille également,
01:27:26 à qui on peut faire ce type d'intervention.
01:27:29 Voilà pour ces travaux de la commission d'enquête du Sénat
01:27:31 sur le trafic de drogue.
01:27:33 Les sénateurs auditionneront mercredi les services de police.
01:27:36 C'est la fin de cette émission, merci de l'avoir suivie.
01:27:38 Continuez à suivre l'actualité politique et parlementaire
01:27:41 sur notre site internet publicsénat.fr.
01:27:43 Je vous souhaite une très bonne soirée sur Public Sénat.
01:27:46 (Générique)

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