Hervé Morin, président du conseil régional de Normandie, invité de France Bleu Normandie (Calvados, Orne) pour parler de son opposition à l'agrivoltaïsme.
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00:00 Bonjour Hervé Morin.
00:03 Bonjour.
00:04 Cette semaine, lors de vos voeux 2024 à la presse, vous vous êtes une nouvelle fois
00:08 déclaré opposé à l'agrivoltaïsme, l'utilisation de terres agricoles pour produire de l'électricité
00:14 avec des panneaux solaires.
00:16 On aurait pu commencer par ça, mais le président de la République, Emmanuel Macron, est à
00:21 Cherbourg pour ses voeux aux armées aujourd'hui.
00:23 Une question politique pour démarrer donc.
00:25 Est-ce que vous trouvez le président relancé par son nouveau gouvernement et sa conférence
00:31 de presse ?
00:32 Écoutez, vous connaissez le scepticisme qui est le mien sur la politique d'Emmanuel Macron.
00:37 Donc très clairement, ce n'est pas le changement de quelques ministres qui tout d'un coup va
00:42 bouleverser le paysage politique et la politique du pays.
00:45 On a un modèle qui est à l'excès de la centralisation absolue où tout est décidé.
00:54 Et bien vu qu'Emmanuel Macron, dans sa conférence de presse, il est priori public, il est Premier
00:57 ministre, il est ministre de la Famille, il est ministre de l'Éducation.
01:01 Bref, il concentre dans ses mains la totalité du pouvoir.
01:05 Donc à partir de là, que ce soit un ministre ou un autre, ça ne change pas fondamentalement
01:11 les choses.
01:12 Et d'ailleurs, si vous regardez bien les sujets, il a à peu près dit tout et son contraire
01:17 durant les sept ans de l'exercice du pouvoir.
01:20 Je prends juste un sujet.
01:21 Il nous a expliqué un jour qu'il n'y avait pas de culture française.
01:24 Et puis là, il nous a parlé de l'exception culturelle.
01:27 - Il manque des centristes selon vous dans ce gouvernement ?
01:29 - Non, non.
01:30 Je vous dis, comme j'étais dans un gouvernement il y a déjà quelques années, il y a un
01:37 principe simple.
01:38 C'est que tout est dans la main d'un monarque, monarque républicain, qui s'appelle le président
01:43 de la République.
01:44 Donc ce n'est pas parce qu'il y aura deux modems de plus, un philippiste de plus, que
01:50 ça changera le système.
01:52 Après, ce qui est clair, c'est qu'il faut des ministres qui ont suffisamment d'expérience
01:57 pour être capables d'éviter d'avoir des politiques qui leur sont imposées par l'administration.
02:02 Le vrai sujet, c'est que souvent les politiques renoncent à exercer leur pouvoir.
02:06 Ils laissent les administrations faire et puis ensuite éviter les maladresses comme
02:10 on a pu déjà en avoir.
02:12 - Hervé Morin, on referme cette page politique pour aborder une question.
02:16 Ce matin, on en parle sur France Bleu, celle de l'agrivoltaïsme dans la région.
02:21 N'y allons pas par quatre chemins, vous y êtes farouchement opposé.
02:25 Pourquoi ne pas tenter le coup comme le font certains agriculteurs dans la région déjà ?
02:29 - D'abord, ce qui a été décidé avec la profession, avec la Chambre d'agriculture,
02:34 c'est qu'on devait laisser le temps de l'expérimentation.
02:37 Il y a quelques expérimentations qui sont en cours.
02:40 Deuxièmement, je comprends l'intérêt pour un particulier, un agriculteur, de se dire
02:46 je vais percevoir des revenus supplémentaires en posant des panneaux solaires.
02:50 Je vous pose juste trois questions.
02:51 La première, est-ce qu'il n'y a pas suffisamment de zones artificialisées en Normandie comme
02:57 ailleurs pour poser des panneaux solaires ?
02:58 Il n'y a pas suffisamment de parking ? Il n'y a pas suffisamment de zones commerciales ?
03:03 Il n'y a pas suffisamment de hangars ? Il n'y a pas suffisamment d'entreprises, de zones
03:09 permettant d'installer des panneaux photovoltaïques sans les mettre dans la campagne et de défigurer
03:14 nos paysages ? Première question.
03:15 Deuxième question.
03:17 Pourquoi la totalité des entreprises se rue sur le monde, sur nos champs pour mettre des
03:25 panneaux photovoltaïques ?
03:26 - Justement, combien il y a de projets aujourd'hui ?
03:27 - Pourquoi ?
03:28 - Vous en connaissez combien ? Non mais en Normandie, combien vous en répertoriez ?
03:30 - Des centaines.
03:31 J'ai répertorié, parce qu'il faut-il encore pouvoir les répertorier.
03:33 Mais il faut savoir que ce qu'on appelle les entreprises de ticketing, c'est-à-dire celles
03:37 qui sont chargées d'obtenir toutes les autorisations et ensuite de vendre une boîte d'énergie,
03:44 elles s'adressent à tous les agriculteurs.
03:45 Il y a des mailings entiers qui partent aujourd'hui.
03:48 Deuxième question que je vous pose.
03:50 La question de l'agrivoltaïsme va se régler de la façon suivante.
03:55 Bien entendu, vous n'aurez pas ça dans les terres les meilleures de Normandie.
03:59 Vous n'aurez pas ça dans la plaine de Caen ou dans le Péicot.
04:02 Vous aurez ça dans les zones herbagères.
04:04 Bon, ça veut dire quoi ?
04:07 Ça veut dire que globalement, on va proposer à un agriculteur de mettre des panneaux photovoltaïques
04:15 dans des champs, dans le bocage, pour faire simple.
04:17 - Et les bêtes peuvent être en dessous ?
04:20 - Oui, d'accord.
04:21 Mais pourquoi vous vous emmerderiez tous les matins, 365 jours par an, matin et soir,
04:27 à continuer à faire de l'élevage et à traire des vaches, quand on vous propose 4 000 euros
04:32 de l'hectare pour poser des panneaux photovoltaïques ?
04:35 Vous avez 100 hectares, vous mettez 40 hectares de panneaux photovoltaïques, vous touchez combien ?
04:42 Faites l'addition, faites la multiplication.
04:44 Ça fait 160 millions.
04:46 - Et la loi d'accélération des énergies renouvelables, vous dites qu'il faut continuer l'agriculture à côté ?
04:50 - Globalement, très rapidement, pourquoi on va continuer à témoigner d'une agriculture
04:55 qui sera bien entendu insuffisante ?
04:56 Et je vous rappelle que derrière, on a un sujet, on a une puissance importante qu'est
05:03 notre industrie agroalimentaire.
05:05 S'il n'y a plus de matières premières, il n'y a plus d'industrie agroalimentaire.
05:09 S'il n'y a pas de vaches, il n'y a pas d'industrie laitière.
05:12 Prenez un exemple simple, on a une magnifique entreprise qui s'appelle Vigny-Sainte-Mère.
05:17 400 millions d'euros de chiffre d'affaires, 1 500 salariés, 70% d'exportation.
05:23 Pourquoi voudriez-vous qu'un agriculteur dans la baie de 40 ans continue à travailler
05:28 dans des conditions qui sont les siennes, alors qu'on peut lui proposer des revenus
05:32 nettement plus importants ?
05:34 Donc au bout du compte, c'est tout le système, toute la souveraineté alimentaire qu'on
05:37 défend tous les matins qui risque de s'effondrer.
05:40 - J'en reviens à l'expérimentation.
05:42 Si par exemple, on prouve que c'est pas dangereux et que finalement ça augmente les rendements,
05:47 est-ce que vous seriez pour ? Et justement, vous pourriez soutenir ce genre de projet ?
05:50 - Le premier sujet, c'est comment on vérifie la question du maintien du potentiel agricole.
05:58 Très important.
05:59 Deuxième question, quelles sont les conséquences sur la biodiversité ? Pas non plus un petit
06:06 sujet.
06:07 Et troisième, comment s'assure-t-on que si l'agriculteur au bout du compte laisse
06:11 simplement ses panneaux dans les champs et ne fait plus rien d'autre, comment on fait
06:14 en sorte qu'on maintienne l'activité agricole ?
06:17 Et quatrième question, les jeunes agriculteurs, cher monsieur, pourquoi aujourd'hui quand
06:22 vous avez 63-65 ans, etc, vous êtes fatigué par le boulot, ok vous transmettez.
06:28 A partir du moment où vous avez une économie de rente, pourquoi voudriez-vous transmettre
06:32 votre exploitation à un jeune agriculteur à partir du moment où vous aurez un revenu
06:36 plus important ? Donc je comprends l'intérêt individuel, je comprends qu'on veuille grosso
06:41 modo améliorer son revenu.
06:43 Mais moi j'ai aussi l'obligation d'avoir en tête que c'est 120 000 à 150 000 emplois,
06:50 l'agriculture et l'industrie agroalimentaire normande, et que ça c'est extrêmement précieux.
06:55 Dans un monde où le réchauffement climatique va faire de la question agricole une question
07:00 absolument centrale.
07:01 Merci Hervé Morin, président centriste du Conseil Régional de Normandie.
07:05 Vous étiez notre invité ce matin sur France Bleu, Normandie et France 3.
07:09 *Rire*