OCCITANIE - Des températures élevées : 3 questions à Serge Zakka, agro-climatologue

  • il y a 9 mois
Les températures sont plus que douces pour un mois de janvier, notamment dans le sud. Une montée du thermostat qui est loin d'être normale et positive pour la nature, comme l'explique l'agro-climatologue Serge Zaka, invité de Jérôme Florin.
Regardez Les trois questions de RTL Petit Matin du 25 janvier 2024 avec Jérôme Florin et Marina Giraudeau.

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00:02 RTL
00:06 Les trois questions du petit matin.
00:08 Aux 6h15, le thermomètre décidément difficile à suivre après le froid glacial de la semaine dernière.
00:14 C'est une douceur exceptionnelle qui s'installe 22 degrés attendus aujourd'hui à Perpignan notamment.
00:20 Quelles conséquences sur la nature, sur notre biodiversité ? C'est ce qu'on va voir avec vous Serge Zaka. Bonjour.
00:26 Bonjour à vous.
00:27 Vous êtes agroclimatologue. D'abord j'ai dit douceur exceptionnelle.
00:31 Est-ce que vous confirmez ? On n'est pas sur des températures habituelles pour un 25 janvier.
00:35 Non, non, pas du tout puisqu'il suffit de regarder les records.
00:38 Déjà plusieurs dizaines de records ont été battus hier avec des 22 degrés, des 23 degrés, voire même des 24 degrés qui seront attendus aujourd'hui.
00:47 Donc non, là on est sur un événement qui est record.
00:50 Donc ce n'est pas des températures habituelles.
00:52 Contrairement à l'épisode de froid qu'on a eu la semaine dernière où un seul record de froid a été battu en deux semaines.
00:58 Alors qu'historiquement, fin janvier c'est la période la plus froide de l'année. On en est loin.
01:02 C'est ça. Normalement quand on regarde les températures moyennes au niveau national, fin janvier, début février, c'est la période la plus froide.
01:08 Là on est à peu près 10 à 12, 8 à 12 degrés au-dessus de ce qu'on devrait observer.
01:14 Donc voilà, un excédent thermique extrêmement important pour la période.
01:18 Là ce qui est marquant c'est la différence de température entre aujourd'hui et la semaine dernière.
01:22 Il y a quelques jours où on avait vraiment des températures diverses, la neige, le verglas.
01:27 Comment réagit la nature ?
01:29 Alors en réalité les variations climatiques en hiver sont courantes.
01:34 Après de monter à ces niveaux de température là, ce n'est pas courant.
01:37 La nature en fait, elle a besoin de froid pour la floraison. C'est ce qu'elle a eu la semaine dernière.
01:41 Et ensuite elle a besoin de douceur. C'est ce qu'elle a cette semaine.
01:44 Et donc en fait ce qu'il va se passer c'est qu'on va avoir ce qu'on appelle la montée de sève dans la végétation.
01:49 Puisque entre 5 et 10 degrés, la plupart des végétaux vont commencer à réagir.
01:53 Ils vont croire qu'on est au printemps.
01:55 Et donc ils vont faire une montée de sève puis une ouverture des bourgeons.
01:58 C'est ce qui va se passer cette semaine, notamment pour les espèces les plus précoces,
02:01 comme la manguier, comme la bricotier, comme certaines fleurs dans le jardin, qui vont débourrer.
02:07 Alors vous allez me dire, où est le problème ? Il y aura des fleurs un peu plus tôt.
02:10 Le problème c'est qu'on a encore 3 mois de risque de gel devant nous.
02:13 Et qu'il y a de fortes probabilités qu'à un moment ou un autre, le gel revienne dans l'hiver et détruit ces fleurs.
02:18 Donc ce qui aura commencé avec l'or va être détruit, c'est ça ce que vous êtes en train de dire ?
02:22 Si le gel revient d'ici le mois d'avril, tout ce qui est sorti du bourgeon va brûler.
02:27 Puisqu'il sera sensible au gel.
02:29 Et c'est ça le risque, c'est des risques de perte de rendement, notamment pour l'arbriculture.
02:34 L'amande, l'abricot sont pour l'instant bien exposés.
02:37 Puisqu'ils sont dans le sud de la France, il va faire entre 15 et 20 degrés pendant au moins 2 semaines.
02:42 Ce qui va permettre l'éclosion des bourgeons.
02:44 Si le gel revient, on aura des pertes de rendement massives, comme on a observé malheureusement ces 3 dernières années.
02:50 Oui, parce que ça devient malheureusement habituel.
02:52 Donc la nature, elle s'adapte ou elle subit ?
02:56 Non, la nature ne s'adapte pas aux douceurs hivernales.
02:59 La nature ne s'adapte pas, parce que si elle s'adapterait,
03:02 on aurait à peu près la même date d'éclosion des bourgeons quel que soit le temps.
03:07 Ça c'est de l'adaptation.
03:09 Ce n'est pas le cas, la nature elle subit.
03:11 Puisqu'en réalité, les dates d'éclosion, les dates de vendange, les dates de floraison,
03:16 c'est ce qu'on appelle la phénologie des végétaux, donc les stades d'avancée des végétaux,
03:19 sont décalés d'à peu près 2 à 3 semaines au cours de l'année.
03:23 La floraison démarre à peu près 2 semaines suivant les végétaux au cours de l'année.
03:28 Donc elle subit en fait cette douceur hivernale.
03:30 Elle ne peut pas lutter contre le gel.
03:34 C'est une question de physiologie de la plante.
03:37 Dès qu'il fait en dessous de -0,5°C, -1°C, la plante commence à geler.
03:41 On ne peut pas lutter vraiment contre le gel.
03:44 Elle a très peu de marge de manœuvre, peut-être 0,5°C de marge de manœuvre.
03:47 Et s'il gel, on aura des chutes de fleurs et des chutes de feuilles.
03:52 Donc non, la végétation a plutôt tendance à subir la vitesse de ce changement climatique
03:57 et ne laisse pas du tout le temps aux végétaux de s'adapter.
04:00 - Serge Azaka, vous êtes agroclimatologue.
04:03 On parle beaucoup des agriculteurs en ce moment.
04:05 Quels sont ceux qui vont le plus souffrir de ces variations de température ?
04:08 - Alors c'est essentiellement les arboriculteurs.
04:10 Pour l'instant, les végiculteurs, ça ne va pas trop les impacter.
04:14 On verra peut-être dans une ou deux semaines.
04:16 Tout ce qui est grandes cultures, ça ne va rien changer.
04:19 Peut-être un développement plus précoce,
04:21 mais elles sont quand même assez résistantes au gel jusqu'à -5°C, -7°C suivant les cultures.
04:25 C'est vraiment les arboriculteurs, les amandiers, les abricotiers dans un premier lieu.
04:29 Puis ensuite, les pêchers, si la douceur continue.
04:32 C'est vraiment les arbres qu'on va plutôt retrouver au sud de la France qui vont être exposés.
04:36 Outre les agriculteurs, il y a aussi les potagers particuliers
04:42 où parfois on plante des arbres un petit peu plus exotiques qui viennent du sud de la France.
04:45 Et ceux-là sont aussi en première ligne.
04:47 Si on se retrouve avec un amandier, on abricotie dans le nord de la France,
04:50 c'est sûr que dans les prochaines semaines, il va fleurir et il subira le gel derrière.
04:55 Merci beaucoup Serge Zaka, agroclimatologue.
04:57 Merci beaucoup, bonne journée.
04:59 Merci à vous, bonne journée.
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