• il y a 11 mois

Chaque jour, les chroniqueurs d'Europe 1 présentent les infos indispensables à connaître en matière de culture : les dernières actus musique, les sorties littéraires ou cinéma, les nouvelles pièces de théâtre et les séries à ne pas manquer... C'est ici !

Retrouvez "La prescription culture" sur : http://www.europe1.fr/emissions/la-prescription-culture

Category

🗞
News
Transcription
00:00 - 9h, Europe 1 Matin. - Allez, le livre du jour à présent, Nicolas Carreau.
00:04 Ce matin, vous avez choisi un roman qui résonne étrangement avec l'actualité.
00:08 - Signé Agnès de Clairville, ça s'appelle "Cordes de ferme".
00:12 Il y a un avertissement au début du livre, toute ressemblance avec des bêtes ayant existé
00:16 a été particulièrement difficile à produire.
00:19 Et voilà donc l'originalité de ce roman, c'est la vie d'une ferme normale d'aujourd'hui.
00:23 Mais ce sont les animaux qui racontent.
00:24 - Et que se passe-t-il dans cette ferme ?
00:26 - Ça commence avec un veau, il est en train de naître et il nous explique ce qu'il ressent.
00:29 Il parle des pattes de la vétérinaire qui saisissent les siennes.
00:32 Et puis plus tard, il y a l'éleveur qui remet de la paille.
00:35 Il a une tige fumante dans la bouche, précise la vache.
00:38 Il parle parfois dans une boîte qui dégage une lumière bleue.
00:41 Ensuite apparaît un petit homme à la voix plus aiguë que la femme et qui se faufile un peu partout.
00:45 Bon, elle ne les aime pas trop tous ces êtres-là, la vache, parce que pour l'instant, elle a froid.
00:49 Ils lui font tous un tas de piqûres, elle ne comprend pas ce qu'ils veulent.
00:52 Changement de chapitre, c'est une épagnole qui parle.
00:55 Elle trottine à côté de son maître.
00:56 Elle décrit la fraîcheur de la glaise et du trèfle sous ses coussinets.
00:59 Elle sent des odeurs de lapin et de taupinière.
01:01 Elle voudrait chasser, mais elle comprend que ce n'est pas du tout le moment.
01:04 Son maître n'a pas l'air décidé.
01:05 Elle déteste le chat, ça va sans dire.
01:07 Elle nous raconte aussi, elle nous fait part de ses états d'âme, de sa préférence pour sa maîtresse.
01:11 Le chat, justement, le voilà, c'est le chapitre d'après.
01:14 Puis ce sera une pie, etc. On alterne.
01:16 - Mais alors, est-ce que c'est de l'anthropomorphisme ?
01:18 - Un peu, mais pas vraiment.
01:20 On sent que l'auteur essaye d'éviter l'écueil.
01:22 Elle essaye réellement de se demander ce que penserait un animal à tel ou tel moment.
01:26 Mais oui, elle leur prête des sentiments forcément humains.
01:29 Les humains, eux, sont quand même au cœur du livre.
01:31 D'ailleurs, les animaux les regardent essayer de survivre et de maintenir l'exploitation agricole.
01:36 C'est pour ça que le roman est terriblement d'actualité,
01:38 avec un regard aussi sur la dureté du métier, de l'environnement.
01:42 C'est pas du tout un roman rigolo, ou gnangnan sur les bêtes.
01:45 Pas non plus d'ailleurs un roman philosophique, comme le génial "La ferme des animaux" d'Orwell.
01:49 Là c'est brut, c'est direct, avec ce qu'il faut quand même de distance poétique.
01:53 On n'est pas des bêtes.
01:55 - Oui, j'allais dire c'est très bête comme livre, tout simplement.
01:57 Mais vous l'avez fait avant moi.
01:58 "Cordes fermes", signé Agnès de Clairville, c'est chez Harper Collins.
02:02 Le cinéma, "L'orichaléval" est sorti de la semaine.
02:05 Un film incontournable, nous dites-vous, cette semaine.
02:08 - Oui, la zone d'intérêt qui a reçu le grand prix au dernier Festival de Cannes
02:11 et puis cinq nominations à la prochaine cérémonie des Oscars.
02:14 Jonathan Glazer, qui réalise avec ce film un tour de force.
02:17 Il nous plonge dans l'horreur et la barbarie nazie sans jamais nous la montrer.
02:20 Le film s'intéresse au quotidien paisible d'une famille de nazis
02:24 dont le père, Rudolf Huss, commande le camp d'extermination d'Auschwitz
02:28 qui est situé tout près de leur maison.
02:30 - "Bienvenue à votre nationale, socialiste, gastro-friendship."
02:35 - "Allez, c'est parti."
02:37 - Alors c'est un court extrait puisque c'est une version originale en allemand.
02:40 C'est pour vous montrer l'atmosphère glaçante qui dénonce en fait la banalité du mal.
02:44 Tout ce travail sur le bruit.
02:46 C'est une façon très originale de traiter de la Shoah
02:48 en utilisant ce procédé hors champ pour suggérer les horreurs des nazis.
02:51 On ne voit jamais ce qu'il se passe derrière les barbelés.
02:54 On l'imagine seulement, c'est finalement beaucoup plus fort.
02:56 Et pendant ce temps-là, les enfants vont à l'école.
02:59 La mère, jouée par Sandra Hüller, plante ses rosiers.
03:01 Ils reçoivent leurs amis autour d'une tasse de thé.
03:03 Ils vont se baigner dans une rivière et le père règle les derniers détails de la solution finale.
03:08 Bref, le bonheur face à l'horreur.
03:09 C'est un film dérangeant, glaçant, subtil et nécessaire.
03:12 - Oui, c'est l'histoire d'une maison de rêve en fait.
03:14 - Oui, très paisible.
03:16 - Que doivent quitter Rudolf H. et son épouse.
03:17 Elle ne veut pas quitter cette magnifique maison qui jouxte le camp d'Auschwitz.
03:20 Mais il faut partir.
03:21 - Exactement.
03:22 - C'est assez étonnant.
03:23 Le retour d'un acteur également.
03:25 Là, on change totalement de registre.
03:26 C'est beaucoup plus léger.
03:27 Acteur qu'on aime beaucoup sur Europe 1.
03:29 - Bien que le film ne soit pas si léger que ça,
03:31 mais effectivement, c'est François Damiens qui revient cette semaine à l'affiche
03:34 sous le vent des marquises de Pierre Godot.
03:36 Il joue en fait un père absent,
03:38 qui est en fait un acteur de renom
03:40 qui joue Jacques Brel dans les dernières années de sa vie
03:42 lorsqu'il apprend qu'il est malade et décide de partir à la reconquête de sa fille.
03:45 - Je n'y crois pas.
03:47 - Je suis venu pour te voir.
03:48 - T'es bon ton âge ?
03:49 - Non, je vais en profiter pour rester un peu.
03:51 - Tu débarques et nous on doit t'accueillir comme ça, comme si de rien n'était ?
03:54 - C'est quoi le problème ? C'est Brel ? C'est la maladie ? Il y a une chanson ?
03:58 - Qu'est-ce qui te fait peur ?
03:59 - Je sais que tu vas repartir, donc je me dis moi, t'es malade ou t'es pas malade ?
04:02 - C'est une mise en abîme qui permet à François Damiens d'explorer une facette
04:05 beaucoup plus émotionnelle sans jamais perdre son capital sympathie.
04:08 Il est toujours aussi drôle et tendre et c'est une jolie chronique sur la relation père-fille.
04:13 - Voilà, sous le vent des marquises avec François Damiens.
04:16 C'est donc la zone d'intérêt de Jonathan Glazer que vous nous recommandez cette semaine.
04:20 - Complètement.
04:20 - Merci beaucoup Laurie Chauleve et merci les amis.

Recommandations