PARIS/ROUBAIX - 1978 -

  • il y a 7 mois
Cyclisme - Paris/Roubaix - 1978 -
Avril 1978 -
Comm FRA
Transcript
00:00 Nous sommes prêts pour ce sujet de Louis XII.
00:02 Oui, vous savez, ils sont là, ils attendent un petit peu les coureurs,
00:11 comme les spectateurs qui attendraient les viandes qui vont manger les donteurs.
00:17 Est-ce qu'ils ont été surpris de voir surgir le premier Galopin ?
00:21 Joël Galopin, l'un des meilleurs amateurs français l'année dernière,
00:24 et qui surprend en ayant compté jusqu'à 16 minutes d'avance, et qui passe ici devant eux.
00:28 Et vous savez, ça les amusait, ce jeune Galopin qui leur a pris un quart d'heure,
00:32 il disait, comme ça, au bord de la route.
00:35 Alors, le problème, voyez-vous, c'est qu'à Neuville, on attend qu'il se passe une catastrophe.
00:43 Ces pavés sont les premiers, après cent et quelques kilomètres de parcours,
00:47 on attend là que tout éclate, que tout craque, que les jantes explosent, que les voyeaux crèvent.
00:53 Mais alors, malheureusement, dans un certain sens, pour les spectateurs, il ne s'est rien passé.
00:58 Il faisait sec, vous avez vu, et puis un quart d'heure après le jeune Galopin,
01:03 eh bien, tout le peloton s'est amené en même temps.
01:06 Croyez-vous que les cohorts soient du même avis ? Il ne s'est rien passé ?
01:09 Regardez-les passer par groupe.
01:10 On a vu ainsi Zottomel, qui venait un peloton d'une vingtaine d'hommes à la poursuite des premiers,
01:15 et Don Guillaume qui passe maintenant avec Vandenbroek.
01:17 Et puis déjà, des attardés, des faiblards, des hommes qui pensaient être prêts pour la plus grande des courses classiques de l'année,
01:25 et qui en fait mesurent brutalement que tout à coup il y a une différence de classe entre eux et les autres.
01:31 Mais regardez, Robert, ils ont fait du macadam jusqu'à maintenant.
01:36 Ils arrivent sur les pavés, et on le sent dans leur attitude que quelque chose change,
01:41 que quelque chose devient brusquement tout à fait autre chose.
01:46 Ça, je vous laisse un peu commenter ces images, là.
01:52 Vous savez, les coureurs ont des termes très précis pour désigner les pavés.
01:56 On les appelle les chapeaux ronds, d'autres en leur temps les ont surnommés les têtes de sénateurs.
02:01 C'est selon, mais je ne pense pas que sur la côte de Neuilly, les coureurs aient le temps à la réflexion.
02:07 Il faut s'argogner, comme ils disent, y aller au maximum et essayer de conserver le contact.
02:12 Car qui perd le contact ici n'a plus aucune chance de revenir.
02:15 Et pourtant, il y a un homme qui lui compte presque une minute de retard à ce moment,
02:19 c'est Bernard Hinault, victime d'une chute avant d'attaquer la côte de Neuilly,
02:25 et qui va dès lors remonter une centaine de concurrents avant de connaître d'autres en allant.
02:30 - Je pense que c'est terminé, hein. De toute façon, ils étaient assez tirés,
02:33 mais quand même, il va y avoir un regroupement derrière, là.
02:36 Parce qu'il y a des bonnes portions, ça roule bien, là. Il y a du macadam, là, derrière.
02:40 Alors ça va certainement revenir un peu, quoi.
02:42 Enfin, de toute façon, tous les grands étaient là, hein. Il n'y a pas de problème.
02:45 La course est commencée, quoi. C'est tout.
02:47 - Elle est commencée et elle allait se terminer avec bonheur pour certains.
02:53 Et dans la tristesse, on pourrait presque dire pour d'autres.
02:57 Bernard Hinault, pas tout à fait la tristesse, mais 13e de Paris-Roubaix.
03:00 Alors, il a manqué simplement 50 m pour qu'à un moment, vous repreniez la 100 t,
03:05 après une nouvelle chute et puis, voilà, cette chute qui fiche tout en valeur.
03:10 - Bah oui, effectivement, j'étais pas vraiment bien loin, puisque je rentrais dans les voitures,
03:13 à ce moment-là, puisque j'avais presque bouché 3 minutes.
03:16 Il me restait 45 secondes, je pense, à peu près.
03:18 - Même pas. Une trentaine de secondes, vous avez encore de mépris.
03:20 - Et il y a une voiture qui est restée au milieu de la route, même pas de la route, du chemin.
03:24 Parce que c'est des vrais chemins.
03:26 Et à ce moment-là, je suis parti du côté et j'ai pas pu rattraper le vélo.
03:28 Et là, je suis retombé. Et à ce moment-là, j'ai repris 1,30 de retard.
03:32 - Bernard, j'ai envie de vous poser une question. À quel jeu jouez-vous ce matin au départ de Compiègne ?
03:36 Vous nous disiez qu'après tout, Paris-Roubaix, pour vous, c'était une course comme les autres,
03:40 que vous ne pensiez pas la gagner, plus spécialement aujourd'hui que lors de vos 2 premières essais.
03:46 - Bah non, les 3 premiers essais que j'ai faits, bon, bah, j'ai fait Paris-Valenciennes à chaque fois.
03:50 Cette année, bon, bah, j'ai vu que je pouvais aller un peu plus loin et j'ai essayé.
03:53 Puis à partir d'un certain temps, j'ai pris un coup moral, quand même.
03:56 Enfin, j'ai repris 3 minutes derrière. Et je suis revenu.
03:59 Et à ce moment-là, j'ai eu la chute. Après, bah, c'était fini pour moi
04:02 parce que je pouvais pas revenir, surtout sur les mauvaises portions qui finissent, là.
04:05 - Pour vous, c'est une course normale ? Il est normal de faire emprunter aux coureurs ces routes, ces chemins ?
04:12 - Pour moi, c'est pas une course, hein. Y a 100 km de course.
04:15 Et puis après, c'est du cyclocrosse. C'est plus de la course.
04:18 Y a que des pavés. Et puis en plus, les voitures ramènent toute la boue qu'il y a sur les côtes de ma côté, l'eau.
04:22 Ce qui fait une vraie patinoire, quoi.
04:24 - Vous n'allez pas reprocher aux suiveurs, d'abord, d'être dans des voitures et de vouloir suivre Paris-Roubaix ?
04:28 - Non, mais je crois qu'il y a des endroits où on ferait mieux de nous faire passer ailleurs.
04:33 Parce qu'il y a un pavé tous les 30 cm. Donc ça fait un trou à chaque fois parce que les pavés, ils s'enfoncent aussi.
04:40 - Yvan Bertin, quel travail Bernard Hinault, votre leader, vous a imposé au sein de l'équipe Renault-Gitan.
04:45 D'abord, vous croyez, vous, au départ ce matin, sa victoire ?
04:49 - Ben oui, on espérait. Puis cette chute-là, à l'entrée des pavés, qui a mis... qui a été assez loin, tout ça.
04:58 Puis ça a mis du temps à remonter. Et c'est un effort gratuit, disons.
05:03 - Cyril Guimard, j'étais épaté, pour ma part, par votre sérénité, par votre calme.
05:09 Comme si, en fait, vous étiez presque assuré que Bernard allait faire un grand truc.
05:13 - Non, ben je commence... Ça fait 3 ans que je suis leader sportif. Disons que je commence à avoir un petit peu d'expérience.
05:19 Et je crois surtout qu'il est nécessaire que moi, je ne sois pas nerveux.
05:24 Parce que si je le suis, ça risque d'amener des répercussions sur les coureurs.
05:27 Et une fois, à Paris-Roubaix, je savais ce qui pouvait arriver. Alors il pouvait rien arriver de pire.
05:32 - Pour vous, c'est un résultat logique ? Premier Moser, deuxième Dauzanac et demi après Hinault parmi les 3 premiers.
05:37 - Non, pour moi, c'est un résultat logique. Je pense que sans les problèmes qu'a connus Bernard avant l'entrée des pavés et ensuite dans le final,
05:45 il aurait pu briguer une place dans les 5e ou 6e ou 7e. Mais je ne pense pas dans les 3 premiers.
05:52 - Vous savez mieux que personne, puisque vous êtes directeur sportif et que vous avez procédé au changement de roues lorsque c'est nécessaire, au dépannage,
05:59 qu'on doit compter environ aujourd'hui 200 crevaisons pour l'ensemble de la course.
06:03 Vandenbrouck, pour sa part, a dû crever 4 ou 5 fois. En tête, le pauvre Galopin, avant d'être rejoint à crever, lui aussi 3 fois.
06:10 Et une bonne centaine de chutes, lequel peut se vanter ce soir d'avoir été épargné ?
06:16 - Je ne sais pas, il faut peut-être le demander. - À part de Vlamingue, je pense, parce qu'il sait mieux tenir encore que les autres sur une bicyclette.
06:22 Mais je vous invite d'ailleurs, Bernard, à revivre un peu ce passage en enfer, car peut-être jamais, jamais, le nom de baptême de Paris-Roubaix,
06:32 l'enfer du Nord, n'a été aussi justifié. Il fallait simplement y passer pour le croire.
06:37 Et je ne suis même pas certain que les images que vous propose maintenant Jean-Michel Leliot vous traduisent parfaitement la vérité.
06:44 On va faire un petit retour en arrière avec Neuilly, que vous avez vu tout à l'heure avec le Misdouça.
06:48 Neuilly, où, vous le savez, apparaissaient les premiers pavés aujourd'hui, après 106 km de piste.