Interview ou reportage d'une émission cinéma produite par CANAL+ autour d'un film disponible sur CANAL+ ou sortant en salles, un événement ou une actualité du 7ème Art
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00:00 Dali ici est un personnage insaisissable, inaccessible, une star qui a des caprices
00:05 complètement absurdes, comme de vouloir être filmée par la plus grosse caméra du monde.
00:09 C'est à cette condition qu'il accepte que Judith lui tire le portrait.
00:14 Donc voilà, il va la rendre chèvre à force d'exigences, de caprices et de dérobades.
00:18 Alors ça n'intéressait pas tellement Dupieux de montrer l'artiste au travail,
00:22 mais plutôt de se servir de ses représentations médiatiques et télévisuelles
00:26 pour construire son portrait un peu façon puzzle.
00:29 Donc c'est pas un biopic, mais plutôt je dirais une comédie en quête
00:33 sur la personnalité plurielle de Dali, sur les perceptions que Dupieux a de lui.
00:39 Et il nous le montre comme une œuvre d'art vivante, mouvante,
00:43 qui est capable de sortir du cadre un peu n'importe quand,
00:47 de décider de l'inflexion du temps.
00:48 Alors tous les films de Dupieux sont des films à dispositif.
00:51 Celui-ci, moi, m'intéresse pour un point, c'est que c'est la mise en abîme du regard.
00:55 En fait, on regarde une journaliste qui regarde un artiste qui se regarde lui-même.
01:01 Forcément, ça crée des bugs dans la matrice, ça crée du spectacle et ça crée du rire.
01:04 Et ça crée aussi effectivement beaucoup de rire.
01:07 Alors on avait déjà pu se procéder de faire jouer le héros par plusieurs personnages,
01:11 on avait eu ça chez Todd Haynes.
01:13 Et chez Buñuel aussi, dans cet obscur objet du désir.
01:16 Mais on pense à Buñuel pour d'autres raisons,
01:18 parce qu'évidemment Dali et Buñuel ont fait un film ensemble,
01:20 qui est chez Andalou, mais c'est pas pour ça.
01:22 C'est le chénon manquant entre les deux.
01:23 - Voilà, sinon il y a un film auquel moi j'ai tout le temps pensé,
01:27 et c'est aussi du coup un hommage à la fin de carrière,
01:29 c'est "Le charme discret de la bourgeoisie".
01:31 Parce que c'est exactement la même histoire.
01:32 Dans "Le charme discret de la bourgeoisie",
01:34 c'est des amis qui n'arrivent pas à dîner ensemble.
01:36 Et comme là, cet entretien est censé se repousser,
01:39 il y a des raisons objectives pour ne pas pouvoir faire ce dîner.
01:43 Et après, ce greffe, comme dans Dali,
01:46 et c'est pour ça que la trame est vraiment calquée,
01:48 des rêves, des rêves dans les rêves.
01:50 On se réveille sur une scène théâtrale, c'est le cochon.
01:53 - C'est vraiment le système Dupieux qui avait assez mal fait.
01:57 - Et je suis sûr, il n'a jamais cité, il parle de Buñuel,
02:00 il dit qu'il a voulu faire un hommage à Buñuel,
02:02 il ne cite pas "Le charme discret", mais c'est évident.
02:05 C'est évident que le film fonctionne comme ça.
02:06 Pour moi, c'est d'ailleurs un peu une limite.
02:08 C'est-à-dire que je trouve ça beaucoup moins fluide que chez Buñuel.
02:12 Au bout d'un quart d'heure, il y a cette séquence.
02:14 - Vous êtes fatigué parce qu'il y a six personnages,
02:16 alors parlez-nous un peu des acteurs.
02:18 - Justement, c'est ça la force du film en fait,
02:20 c'est que Dupieux dit qu'on est un peu tous d'allies, finalement,
02:22 et c'est un peu un cas d'école.
02:24 Voilà, il y a six acteurs.
02:25 Comment est-ce que vous jouez d'allies ?
02:26 - Surtout Frédéric qui est en ce moment très d'allies, qui nous écoute.
02:28 - Fred, c'est ça ?
02:30 - Il y a la grosse caméra qui arrive, Frédéric.
02:31 - C'est vrai qu'Edouard Baer et Jonathan Cohen,
02:33 moi, c'est ceux qui m'ont le plus bluffée,
02:35 même si les autres sont excellents aussi.
02:37 Et il y a évidemment aussi Annalise de Moustier,
02:39 il n'y a pas que les d'allies.
02:40 Et sans elles, il n'y aurait pas le film d'ailleurs.
02:41 - Je vois Frédéric et Arthur un peu chatouin, qu'est-ce qui se passe ?
02:45 - Tout à fait.
02:45 - Moi, je suis un peu circonspect face à cette idée de faire jouer six acteurs
02:48 pour interpréter le même personnage.
02:50 Je trouve qu'il n'y a rien, contrairement au film de Todd Hines,
02:52 qui vraiment donne la règle de pourquoi on change d'un acteur, d'un plan à l'autre.
02:56 Et alors, pourquoi pas créer une espèce de cacophonie comme ça ?
02:58 - C'est dans I'm Not There.
03:00 - Oui, exactement, dans I'm Not There.
03:01 Et comme tu le disais, Edouard Baer, avec son espèce de dandisme rift droite naturel,
03:05 il joue très bien le côté hors-sol de d'allies.
03:08 Jonathan Cohen, il n'a pas peur d'en faire des caisses.
03:09 Donc forcément, quand toujours un personnage un peu limite,
03:12 si on y va à fond, ça passe.
03:13 Mais par exemple, Gilles Lelouch et Pio Marmaille,
03:16 je trouve qu'on les sent vraiment engoncés dans le costume de d'allies.
03:18 On sent qu'ils ont du mal à se lâcher.
03:20 - Moi, Gilles Lelouch, je ne l'ai pas reconnu.
03:21 Je ne l'ai jamais vu comme ça.
03:23 Gilles Lelouch, tu sais, il a quand même une gueule.
03:25 Dans les films, on le reconnaît, c'est Gilles Lelouch.
03:27 Là, pour moi, c'était d'allies.
03:28 - Il faut avoir une interprétation différente.
03:30 - J'ai une vision différente de toi, de ça,
03:33 par exemple, des six interprétations de d'allies.
03:35 J'ai l'impression, en fait, que ça ne fait que remettre en question
03:37 ce qu'on appelle le jeu ou le naturalisme d'un jeu.
03:40 On est sans cesse en train de se demander, en fait,
03:41 est-ce qu'on est vraiment en train de juger le jeu d'un acteur
03:44 ou la nature d'un acteur ?
03:45 C'est ce qui se passe.
03:47 Je pense que c'est à la fois la force et la limite de toujours de chez Dupieux.
03:50 C'est quelqu'un qui pose d'excellentes questions de cinéma.
03:53 C'est un laboratoire, le cinéma de Dupieux.
03:55 C'est un laboratoire, je pensais parfois,
03:57 je pense effectivement un peu à Godard, parfois,
03:59 parce que, comme chez Godard, j'ai l'impression qu'il tente des expériences
04:02 et ces expériences posent de très bonnes questions de cinéma,
04:05 parfois intéressantes et parfois, ça n'a pas beaucoup d'intérêt, ça ne marche pas.
04:08 Mais il y a dans ce film,
04:10 oui, mais il y a dans ce film des idées de montage
04:14 que je n'avais jamais vues auparavant.
04:16 Il y a des intuitions sur le montage.
04:18 Par exemple, l'arrivée, l'arrivée impossible d'Allie.
04:21 - C'est la meilleure solution.
04:23 - Mais c'est pas du montage, c'est à l'écriture, ça, Frédéric.
04:26 - Non, non, non, c'est pas du montage.
04:29 - Il y a un travail aussi sur la distance avec le son.
04:31 - Cette cacophonie est à l'image du film.
04:34 - J'ai l'air mutuée, je ne vais pas comme dans le film.
04:35 - Ava, vous avez des images ?
04:37 - Ava, Ava !
04:38 - J'ai des images, comme ça, je peux vous parler de plusieurs versions de Dalli,
04:41 puisque j'ai la version Pio Marmaille et la version Jonathan Cohen
04:44 qui cohabitent dans un même extrait.
04:46 Donc, on va le voir.
04:47 Judith essaye toujours de joindre le peintre qui est chez lui dans sa maison atelier,
04:52 qui est un lieu polymorphe, on va dire, comme l'est son propriétaire.
04:56 - Non, non, non, non.
04:57 - Regardez bien le soin qui est accordé à la fois aux détails, au décor.
05:02 Et là, voilà, on va faire un saut dans le temps.
05:05 C'est le principe de l'ellipse et on va retrouver Dalli.
05:08 Et là, ce n'est plus Pio Marmaille, c'est Jonathan Cohen.
05:10 - Oui, allô ?
05:13 - Bonjour, Salvador.
05:14 - Je ne vous entends pas.
05:15 Là, en ce moment même, il y a une pluie de chiens morts.
05:18 Ça fait un vocal diabolique sur le toit de ma maison.
05:22 - Appelez-moi plus tard.
05:23 - Une pluie de chiens morts, tout aussi improbable que le titre qui était en une,
05:27 donc de François.
05:28 Et c'est ça qui est magique avec Dupieux,
05:30 c'est que c'est la rencontre entre l'art du "Norizon" et l'art du "What the fuck".
05:34 Et clairement, ça crée des étincelles.
05:36 - C'est une des meilleures vannes, les chiens morts.
05:37 - Mais c'est presque annoncé dès l'affiche, Frédéric, cette chose-là.
05:40 - Oui, oui, elle est assez amusante, cette affiche, parce que dans la fiche du film,
05:44 on retrouve à la fois l'affiche de "Une référence à tromper énormément" d'Yves Robert
05:48 et l'affiche également de "Y a-t-il un pilote dans l'avion ?" des frères Zucker.
05:53 Donc on a l'impression que dans cette affiche, il y aurait à l'intérieur
05:56 à la fois le côté parodique très décalé des Zuckers
05:59 et peut-être l'écriture au cordeau du système Robert.
06:03 Mais j'ai l'impression que le film, c'est autre chose.
06:05 Moi, je le vois autrement, cette affiche.
06:06 Je le vois comme un autre moment du comique, plutôt.
06:09 C'est-à-dire qu'on a eu un étage dans les années 60,
06:11 on a eu dans les années 70 avec Robert,
06:12 on a eu un autre moment du comique avec les Zuckers pendant 10 ans.
06:16 Et aujourd'hui, Dupieux est peut-être en train d'inventer
06:19 une autre manière d'envisager la comédie.