• il y a 9 mois
Interview ou reportage d'une émission cinéma produite par CANAL+ autour d'un film disponible sur CANAL+ ou sortant en salles, un événement ou une actualité du 7ème Art
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Transcription
00:00 - Oh ! - Pardon.
00:01 - Il était beau celui-là.
00:02 - Vous m'avez foutu une trouille Antoine.
00:04 - Je vous ai réveillé surtout.
00:05 - Non c'est pas ça, c'est que tout à coup ça m'a rappelé les pires heures de l'occupation.
00:09 - Non.
00:10 Vous savez qu'on est dans la suite qu'occupait Von Scholtitz pendant l'occupation ?
00:13 - Ah oui, c'est là où il a… Le fameux Paris-Brutal ?
00:15 - Exactement.
00:16 Et Von Scholtitz, ensuite le roi d'Espagne, et puis surtout Salvador Dali.
00:20 - C'est la suite de Dali ?
00:21 - C'est la suite de Salvador Dali.
00:22 - Alors ça c'est bien.
00:23 - Regardez, j'ai même une photo pour la montre, évidemment, pour faire de la télévision.
00:30 - Il est assis à peu près là où vous êtes.
00:31 - Il est là.
00:32 - Il y a la porte derrière.
00:33 - C'est une Harley qui était prêtée par Jenny Hallyday à l'époque.
00:35 - C'est vrai ? Comment vous savez ça ?
00:37 - Je dis n'importe quoi, je vous remercie d'acheter mes mensonges.
00:39 - C'est Dali, j'aime bien cette période de Dali parce que ça, c'est le crépuscule de Dali.
00:43 Il y a la petite manche, vous me ferez un gros plan avec les caméras douces de Jean-Pierre Molineux.
00:47 Il y a le cheveu qui commence à se faire rare, la moustache reste superbe.
00:51 Et il y a le doigt qui pointe comme ça, mais qui pointe qui ?
00:55 Et on va regarder, et c'est vous Antoine.
00:57 - Qui pointe, c'est moi ? Non mais ce n'est pas possible.
01:00 Non, mais c'est un miracle.
01:02 D'ailleurs, je vous sens très très expert en Salvador Dali.
01:05 - Heureusement, vous avez joué.
01:07 - Vous avez beaucoup travaillé.
01:08 - C'est du travail.
01:09 - Qu'est-ce qu'il y a de commun entre Salvador Dali et Édouard Berth ?
01:12 - Une mégalomanie peut-être ?
01:14 On peut être mégalomane sans talent, c'est ça qui est formidable avec ce défaut.
01:17 On n'a pas besoin d'avoir du génie pour être mégalo.
01:19 Donc c'est une façon de se lever le matin, de croire en sa toute puissance.
01:23 Il n'y a rien de commun.
01:25 Il n'y a rien de commun, et là c'est tant mieux, parce que je pense que c'était un génie,
01:28 mais je pense qu'il s'est enfermé dans une sorte de malheur.
01:31 J'aime bien les émissions psychologiques.
01:33 Il y a des choses comme Gainsbourg, quand on était gamin, on les voyait à la télévision,
01:36 c'était des barnum à eux tout seuls.
01:37 - Ça, c'est les personnages qu'on voyait à la télé à l'époque,
01:39 et justement Dupieux dit qu'il s'est intéressé à Dali par ses apparitions télévisées.
01:44 - Oui, c'est un film sur l'image de Dali, ce n'est pas un film psychologique.
01:47 À 12 ans, il dit à son père "Oh, j'ai mal parti, j'aurai une moustache, maman".
01:51 Non, non, pas cette moustache, c'est pas ça.
01:53 Si vous voulez le voir celui-là, vous ne le verrez pas.
01:56 - Ce qui nous a tous marqué à l'époque, c'était ça, cette espèce d'extravagance,
02:00 de folie, de maîtrise du langage aussi.
02:05 - Mais oui, vous me mettez un truc là qui ne m'a pas du tout pour votre interview.
02:08 - Donnez-moi, donnez-moi.
02:09 - Oui, mais alors après il y aura un vide, donc ne m'avancez pas.
02:11 - Il est dingue parce qu'il a l'air d'y croire un peu comme John Cleese des Monty Python,
02:15 c'est-à-dire qu'il y a un niveau de vérité dans ce truc.
02:18 On se dit "Est-ce que c'est pour rire ? Est-ce qu'il est génial ? Est-ce qu'il est fou ?
02:21 Est-ce qu'il est ça, ça ?"
02:22 Ce qui se fout de notre gueule, c'est pas mal de se demander, il a un fond d'œil.
02:25 Et donc avant le peintre, on découvre le personnage.
02:27 Quand on est gamin, on voit ces émissions où il y a "Vite, il y a Dali, il fait un truc de dingue à la télé".
02:31 - Je profite de l'occasion, puisque la télévision s'est rendue dans le salon de l'hôtel Meurice,
02:37 parce que j'avais demandé, je sais pas quel était l'organisateur quand vous êtes venus avec M. Simon,
02:44 j'aurais voulu tout simplement qu'on m'apporte une grande baignoire remplie de goudron.
02:52 - Est-ce que vous avez l'impression, quand vous voyez Dali faire son numéro,
02:55 est-ce que vous avez l'impression qu'il est en train de jouer à être Dali ?
02:59 - Ah, je crois qu'il y croit, je crois que comme on disait à la fin de Gainsbourg, qu'il y croyait lui-même.
03:04 Je pense que le matin, il devait se dire "Qu'est-ce que Dali penserait, qu'est-ce que ferait Dali ?"
03:08 Je pense qu'il imagine, il s'invente à la troisième personne.
03:10 - Et ça, ça simplifie le travail de l'acteur qui doit jouer un personnage qui lui-même est en train d'en jouer un autre ?
03:16 - Oui, parce qu'on joue un spectacle. J'essaie d'avoir une assise un peu…
03:19 - Vous voulez ce que je fais ?
03:20 - J'essaie d'embourgeoiser l'interview. Vous choisirez dans les postes plastiques que je vous propose.
03:24 - Celle-là. Antoine, vous savez, la situation est compliquée. Il y a celui-là. La vie, tu sais, Antoine…
03:30 - À l'époque, on s'amusait beaucoup plus, c'était le mieux.
03:34 - Non, non, mais alors qu'est-ce qu'on… Oui, parce qu'il ne nous a pas demandé de jouer de la psychologie, il nous a demandé de faire…
03:39 C'est un film sur l'image de Dali, sur Dali interviewé. Parfois, Dali, il double, il ne sait pas pourquoi, il s'invente un truc.
03:48 Après, souvent, d'ailleurs, il dit "C'était génial, quelqu'un a noté, j'adore quand il fait…"
03:51 - C'est un interview au Murice ? - Sans doute, oui. Là où nous sommes, il est là, on est là, peut-être que c'est lui.
03:56 Il est là, comme ça, il se met à faire un truc, après, c'est du génie, ça.
03:59 Et alors, il a toujours une cour, qu'il lui mette…
04:02 - C'est la première fois que vous jouez un personnage ayant réellement existé, en tous les cas, depuis le film de Robert Hélène Rico,
04:07 La Révolution française, en 89. Vous jouiez un pendu. On peut penser qu'un pendu a réellement existé.
04:14 - Normalement, je continue à vous verser de l'argent sur votre compte aux incaillements pour que vous ne sissiez pas cette scène.
04:19 - Vous avez arrêté ce chantage ? - Oui, non, c'est la première…
04:21 Non, mais aussi, c'est formidable, comme ça, c'est plus facile de s'inspirer de quelqu'un.
04:25 Et puis, qui est évidemment spectaculaire. Donc, il nous a dit, du coup, vas-y, fais ton Dali, et puis ça sera bien.
04:30 L'idée, ce n'est pas de lui ressembler, c'est d'être nous, ce que ça nous inspire.
04:33 Parfois, même quand c'est consternant, c'est pas mal, parce que c'est du long et coco.
04:37 - Il y a une citation de Dali que j'adore et qui, vraiment, correspond tout à fait à la situation qu'on est en train de vivre en ce moment, Édouard, c'est…
04:44 - La beauté, le désir… - Je considère la télévision, le cinéma, la presse, le journalisme,
04:51 comme des grands moyens modernes d'avélissement et de crétinisation des foules.
04:55 - D'abord, je trouve que votre Dali mériterait d'être dans le film. - Ah, merci, ça me touche beaucoup.
04:59 - Je lui dis ça en forfanterie. - Vous savez, il sort comme ça, je ne l'ai pas vraiment travaillé.
05:02 - Non, non, mais c'est ça, vous n'avez pas besoin de travailler pour être là.
05:04 - Non, mais évidemment, non, parce qu'il y a souvent des gens qui ont dénoncé la télévision.
05:09 - J'ai vu le théâtre dénoncer le cinéma, le cinéma dénonce la télé, la télé dénonce Internet et moi, je dénonce ma sœur.
05:15 - Non, c'était les médias de masse, je crois qu'il… - Oui, mais parce qu'il jouait un personnage d'aristocrate
05:20 qui est contre le peuple et tout à coup qu'il faut pas… C'est des postures aussi un peu de…
05:25 La provocation, c'est son art quand même, Dali. Ce qu'il dit provoquer, c'est choquer, dire des phrases un peu choquantes.
05:30 - Ayant passé de la bourgeoisie à l'aristocratie et à la monarchie, je tiens à vivre le plus que possible en tant que bon courtisan
05:40 auprès des ambiances qui m'évoquent la monarchie dans mon pays.
05:46 D'ailleurs, je crois que dans deux jours arrive Louis XIV, qui est une dame.
05:54 - Vous êtes donc à des scies d'Ali, avec un point d'exclamation à la fin, mais c'est vous qui avez proposé à Dupieux de travailler avec lui.
06:01 - Oui, mais ravalant tout égo, je me suis dit, les gens vous admireraient, on sait jamais, sur un malentendu, peut-être qu'ils vous aiment bien.
06:10 Parce que parfois, les gens ne vous connaissent pas, bon. Et alors, j'ai demandé de prendre un café avec lui,
06:14 je lui ai proposé en plus de régler le café, ce qui simplifie énormément le… - Le courtois, oui.
06:18 - Oui, financièrement, je peux dire qu'il n'a pas pris qu'un café, c'est pas le sujet.
06:21 Et donc, je lui ai dit que moi, j'aimerais beaucoup tourner avec toi, parce que je trouve que les films sont épatants,
06:25 et que les acteurs, ils sont vraiment formidables. Donc, c'est un fou du jeu.
06:29 Ça le passionne qu'on soit juste, qu'on soit vrai, il ne lâche pas, et je n'ai pas été déçu.
06:34 - Moi, je me demandais qu'est-ce qu'il y a de dupieuxien chez Beret, ou qu'est-ce qu'il y a de berrien chez Dupieux ?
06:39 - Eh bien, c'est peut-être d'accepter qu'on ait des petites boutiques, et d'attendre les gens, plutôt que d'aller dans les grands trucs.
06:46 On se dit, on essaie de faire notre truc dans notre coin, si les gens viennent...
06:50 Si les gens viennent, tiens ! - Viennent, viennent, viennent.
06:52 - C'est le début de la fin. - Ils sont plusieurs.
06:54 - Si les gens ne viennent peut-être pas, justement, c'est de l'inquiétude.
06:57 Bon, alors, c'est d'avoir confiance un peu dans nos choses un peu bancales, parfois.
07:02 Dupieux, ça fait longtemps qu'il fait des films, et c'est que récemment que des gens viennent beaucoup le voir, en fait.
07:07 Mais lui, il reste à sa place. Maintenant, on va dire, ah oui, Dupieux fait partie du système du cinéma, tant mieux.
07:12 Mais lui, il continue de faire ses films de la même fantaisie.
07:14 - Est-ce que, c'est une question purement rhétorique, est-ce que vous avez déjà été tenté de déjouer des interviews à la Dali ?
07:21 - Mais c'est pas pour faire le malin, c'est pour amener un petit peu de fantaisie,
07:23 qu'on a l'impression qu'on commence ou à s'ennuyer, ou à être sur des sujets qui emmerdent des gens, ou qui les attrichent.
07:30 Je crois que c'est important de ne pas amener de la tristesse et de la gravité, il y en a assez comme ça.
07:34 - Bon, merci, Edouard. - Merci beaucoup.
07:36 - Vous pouvez partir avec le coussin, si vous voulez. - C'est vrai.
07:39 - Oui, oui, ça fait partie du formulaire. - C'est pas une bonne nouvelle.
07:41 - Regardez, je pars avec, moi.

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