Céline Pina : "Certaines phrases de Judith Godrèche sonnent faux"

  • il y a 6 mois
L'édito de Céline Pina, chaque vendredi à 8h10

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##CELINE_PINA-2024-03-01##

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Transcript
00:00 Le Grand Matin Sud Radio, 7h-8h30, Patrick Roger.
00:04 Il est 8h12, Céline Pinard comme chaque vendredi matin.
00:09 Bonjour Céline.
00:10 Alors vous avez écouté l'audition de Judith Gaudrech hier au Sénat
00:13 et cela vous a intéressé à plus d'un titre.
00:16 Alors pourquoi ? Et racontez-nous.
00:17 D'abord parce que les questions que pose Judith Gaudrech à notre société sont fondamentales.
00:22 Cela parle du rôle des adultes envers les enfants et de la signification du consentement
00:27 quand on est une personne trop jeune pour mesurer ce qu'il implique.
00:31 Judith Gaudrech avait 14 ans et Benoît Jacot 39 quand il en a fait sa maîtresse.
00:35 A 14 ans on est encore un enfant et on ne peut pas se défendre face à un prédateur,
00:40 surtout si celui-ci appartient à un milieu qui fait fantasmer.
00:44 Mais à 14 ans on peut aussi être très proactive et construire soi-même son propre malheur
00:49 en croyant être au service de son désir.
00:52 Vanessa Springora dans son livre "Le consentement" raconte comment elle fit la misère à sa mère
00:56 pour que celle-ci la laisse aux mains de Mads Neff.
00:59 Mais est-ce que cela signifie que les femmes qu'elles sont devenues
01:02 brûlent ce qu'elles ont adoré pour essayer de tirer bénéfice d'un statut de victime
01:07 comme on les accuse parfois à mi-voix ?
01:09 Oui, alors justement, vous en pensez quoi Céline ?
01:12 Et bien qu'à 14 ans on est encore une enfant.
01:14 Oui les désirs sont brûlants, les envies sont absolues et les prises de risques importantes.
01:20 C'est pour cela que l'on n'est pas émancipé justement
01:23 et qu'à 14 ans on est sous la responsabilité de ses parents.
01:27 Oui, face à un enfant de 14 ans, un homme de 40 ans doit s'empêcher.
01:31 C'est tellement facile de séduire une gamine quand on est un homme de pouvoir, célèbre et admiré.
01:37 Oui, il y a de la prédation et non de la séduction dans le fait de s'en prendre à une enfant
01:42 qui ne sait pas encore qui elle est et ignore tout de la marche du monde.
01:45 Oui, pourtant vous êtes sortie un peu dubitative, c'est ça de cette audition de Judith Godrech ?
01:51 Oui, mais j'ai longtemps hésité à le dire,
01:53 tant aujourd'hui on ne peut plus exprimer la moindre nuance
01:56 sans se faire déchiqueter par des ordres militantes.
01:59 Or, autant je trouve l'histoire personnelle de Judith Godrech interpelle,
02:04 autant le sabir politique qui accompagne ces accusations est contestable.
02:08 Judith Godrech fait de son cas particulier une histoire générique.
02:12 Elle est moins victime d'un homme que d'un système, le patriarcat, et finalement de tous les hommes.
02:18 Pareil pour son refus de la présomption d'innocence,
02:20 un rejet qui transforme de fait toute accusation en condamnation.
02:24 Ses circonvolutions visent à sortir du viseur le cas de ses parents,
02:28 des notables qui ne l'ont pas protégé. Je la cite.
02:31 "Revenir sur la responsabilité des parents est une façon de ne pas faire face à la responsabilité du patriarcat."
02:37 Le problème est que cette phrase peut parfaitement être inversée.
02:41 Or, si on ne rappelle pas aux parents qu'ils ont le droit d'interdire à leur fille de devenir de son plein gré une proie,
02:48 les prédateurs auront encore de beaux jours devant eux.
02:51 Ceci dit, on peut comprendre que Judith Godrech, déjà trahi par son premier compagnon,
02:56 ait du mal à regarder en face la trahison de ceux dont sa protection était la première mission.
03:02 C'est simplement humain.
03:03 Judith Godrech est touchante quand elle évoque ce qu'elle a vécu.
03:07 Elle est moins convaincante quand elle essaie de se poser en grande conscience politique.
03:11 Des phrases comme "la famille incestueuse du cinéma n'est que le reflet de la société"
03:17 ou "notre société est systématiquement organisée dans l'écrasement de la parole"
03:21 sont aussi grandiloquentes qu'exagérées, surtout quand on est en pleine audition au Sénat,
03:26 donc quand sa parole est reconnue et valorisée.
03:28 Et parce qu'elles sonnent faux, ces phrases affaiblissent un témoignage qui mérite pourtant vraiment d'être entendu.
03:35 Merci Céline Pinar.
03:37 Guillaume Bigot, c'est vrai que ça secoue un peu ce monde du cinéma.
03:46 Ce n'est pas la première fois, parce qu'il y a eu des affaires qui sont venues des Etats-Unis,
03:51 et il y a eu beaucoup de déclarations.
03:54 Elle demande aussi, elle est appuyée pour qu'il y ait une enquête dans les milieux du cinéma.
04:02 Ça c'est une bonne chose, Guillaume Bigot, ou pas ?
04:05 Non, je pense qu'il faut...
04:07 Ce qui manque dans cette affaire, c'est la question de la loi.
04:09 La loi à la fois au sens symbolique et à la fois au sens de la répression pénale.
04:14 En fait, ce n'est pas du tout le fait du hasard si la loi interdit des relations sexuelles avec des mineurs de moins de 15 ans.
04:22 Parce qu'on sait bien qu'à 14 ans, là en l'occurrence c'est 14 ans, on n'est pas complètement responsable.
04:27 La loi doit être incarnée par les parents.
04:29 Il faut que les parents sachent dire non à leurs enfants.
04:32 Il faut que les sociétés sachent dire non.
04:33 C'est vrai, mais sauf que dans le monde du cinéma, c'est un peu particulier.
04:36 Parce que dans le monde du cinéma, il y a des gamines, des gamins,
04:39 qui sont jetés en fait devant les caméras, puis on leur dit de tourner.
04:44 Ce qu'a dit Judith Godrech hier, c'est-à-dire qu'on leur demande de se dénuder aux gamines, un peu plus, un peu, voilà, de jouer.
04:50 C'est ça qui est fascinant.
04:51 Le cinéma c'est particulier en plus.
04:52 Ce qui est absolument fascinant, c'est que le cinéma nous a montré comment on passait d'un modèle à un autre.
04:57 Le modèle de la libération du cinéma, c'était le modèle des valseuses, c'est vraiment l'idée qu'il n'y a plus de loi.
05:03 On fait ce qu'on veut, y compris avec des gamines de 14 ans, parce qu'elles montrent leur liberté et la société montre qu'elle est cool.
05:09 Et maintenant on est à passer dans une autre société, c'est la #MeToo.
05:13 Nous aussi, c'est-à-dire la société où on veut rétablir des interdits.
05:16 Le problème c'est qu'il y a une contradiction entre vouloir rétablir des interdits,
05:19 tout en mettant l'individu au centre, en rétablissant des interdits au nom de nous, pas au nom de moi.
05:24 En fait, pour le coup, je trouve que la proposition qu'a fait Judith Godrech sur cette question-là,
05:31 Judith Godrech est intéressante.
05:34 Elle, elle propose que quand un enfant est employé dans le monde du cinéma,
05:38 il ait une sorte de coach qui porte sa parole, qu'il soit un adulte, qu'il lui soit entièrement dédié et dévoué,
05:45 qu'il ne soit pas payé par la production, qu'il soit en fait une obligation qui accompagne l'enfant.
05:50 - Une indépendance, oui, bien sûr. - Exactement.
05:51 Et je pense que là-dessus, elle a raison.
05:54 C'est concret, c'est évident et ça peut fonctionner,
05:58 sans doute beaucoup plus pour le coup qu'un rappel à la loi, dans un milieu où malgré tout,
06:05 lorsque vous êtes artiste, vous devez jouer avec la transgression.
06:08 C'est ce jeu avec les limites qui peut aussi se révéler créatif.
06:12 À travers ses propos, moi je trouve qu'il y a une condamnation finalement du monde du cinéma
06:17 pendant une trentaine d'années où il y a eu une grande libération en fait des mœurs
06:21 et qui est allée peut-être trop loin.
06:23 Il y a d'autres propos qu'on devrait entendre, c'est ceux de Juliette Binoche justement,
06:26 qui dans une interview au Parisien, dit de manière très claire,
06:30 et elle, elle raconte comment effectivement, elle s'est trouvée aussi confrontée à une forme de prédation,
06:35 mais comment l'éducation que lui ont donné ses parents, leur présence autour d'elle,
06:40 ont fait qu'elle a été protégée et qu'elle n'a pas vécu cela.
06:44 Donc ce qu'elle raconte, c'est en fait un monde dans lequel les adultes
06:48 tiennent leurs responsabilités vis-à-vis de leurs enfants et ça se révèle extrêmement protecteur.
06:53 Il faut aussi écouter ce que dit Juliette Binoche.
06:56 Complètement d'accord, les responsables là dans cette affaire,
06:59 comme dans l'affaire Springora, comme dans l'affaire de Madame Godrej,
07:05 sont les parents, les parents de cette adolescente de 14 ans,
07:09 qui n'est pas complètement en situation de décider.
07:12 Autre chose, il y a quelque chose d'un peu indécent, parce qu'on sait que malheureusement,
07:15 les violences sexuelles, les abus, les viols, y compris sur des mineurs,
07:18 sont malheureusement légion dans notre société,
07:20 dans des milieux qui ont beaucoup moins de moyens matériels pour se défendre,
07:24 ou de psychologiques pour se défendre.
07:26 Donc dire que les actrices sont d'abord les premières victimes ou les symboles de la victimisation,
07:31 je veux bien qu'elles servent de symboles pour aborder cette question,
07:34 mais ce ne sont pas elles les plus malheureuses.
07:35 - Non mais sur les parents, il faut quand même dire qu'on est aussi victime de son temps,
07:40 c'est-à-dire que quand vous regardez ce que raconte Vanessa Springora,
07:44 on est aussi à une époque dans laquelle la libération de la sexualité des enfants est revendiquée,
07:50 dans laquelle cette liberté est vue et valorisée,
07:54 et donc le parent à ce moment-là ne sait plus quel est son rôle aussi.
07:57 - Et donc Céline, il y a bien un problème d'anachronisme,
07:58 on ne peut pas juger hier avec les critères d'aujourd'hui ?
08:01 - Ce n'est pas parce qu'à un moment donné on trouve qu'une sexualité débridée est cool,
08:06 que c'était le cas dans tous les milieux.
08:08 Rappelons quand même qu'à cette époque, dans plein de milieux,
08:11 on sait encore ce qu'est le rôle de parent.
08:13 - Allez, merci. Il est 8h20, dans un instant on va poursuivre évidemment le débat.
08:16 Dites-le franchement, qu'est-ce que vous pensez de la menace nucléaire évoquée par Vladimir Poutine ?
08:20 On va en parler. Il y avait un auditeur, Patrick, qui était avec nous ce matin,
08:22 qui se disait extrêmement inquiet par les tensions internationales,
08:26 pas seulement d'ailleurs en Ukraine, mais évidemment aussi en moyenne au Proche-Orient.
08:29 On a vu aussi ce qui s'est passé avec les tirs de l'armée israélienne hier sur le Hamas,
08:36 en fait sur le Hamas, non, sur des Palestiniens lors de distribution.
08:40 C'est assez dangereux, il y a cette escalade.
08:42 On voit ça ensemble dans un instant, c'est l'Inpina, Guillaume Bigot,
08:45 et puis tout à l'heure l'invité de Jean-Jacques Bourdin,
08:48 ce sera la ministre Agnès Pagnier-Runacher,
08:52 ministre déléguée auprès du ministre de l'Agriculture et de la Souveraineté Alimentaire,
08:54 ici en direct du Salon de l'Agriculture.
08:56 Il est 8h21.

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