• il y a 7 mois
Thomas Sotto reçoit Yaël Braun-Pivet, présidente de l’Assemblée Nationale, sur le plateau des 4 vérités. 

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Transcription
00:00 Bonjour et bienvenue dans les 4V, Yael Bron-Pivet.
00:04 Bonjour.
00:05 C'est donc tout à l'heure que le Congrès, c'est-à-dire la réunion des 925 députés et sénateurs,
00:09 devrait voter l'inscription de la garantie du droit à l'IVG dans notre Constitution.
00:15 Déjà ce matin, est-ce que vous avez le moindre doute sur l'issue de ce vote ?
00:18 Non, je n'ai pas de doute.
00:20 Quand on regarde les votes qui ont été exprimés à l'Assemblée nationale et encore très récemment au Sénat,
00:25 on est très très large, l'immense majorité des sénateurs et des députés se sont prononcés pour l'adoption de ce texte.
00:32 Donc je n'ai garde de doute sur le résultat au Congrès.
00:35 Mais ça ne veut pas dire que ce n'est pas un moment extrêmement important.
00:39 Il n'y a pas de suspense, mais le moment est crucial.
00:43 Oui, alors justement, fin de semaine, le garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti,
00:46 qui a mis beaucoup d'énergie pour convaincre les sénateurs récalcitrants d'adopter ce texte,
00:50 y est parvenu et après il a dit avoir vécu le moment le plus marquant depuis son arrivée dans son ministère,
00:54 décrivant un instant suspendu durant lequel il a été pris par le vertige de l'histoire.
00:59 Les mots sont forts. En quoi le rendez-vous de cet après-midi, Elbron Pivet, est un rendez-vous avec l'histoire ?
01:05 C'est un rendez-vous avec l'histoire parce que la France renoue avec sa tradition universaliste.
01:10 Vous savez, la France, c'est la patrie des droits de l'homme.
01:13 La Déclaration des droits de l'homme 1789, nous avons proclamé au monde entier qu'il y avait des droits et libertés fondamentaux.
01:20 Et aujourd'hui, nous allons inscrire un nouveau droit fondamental dans notre Constitution.
01:26 Nous serons les premiers au monde à le faire, le droit pour les femmes à avoir la liberté de recourir à une interruption volontaire de grossesse.
01:34 Donc c'est un moment important pour nous, pour notre histoire républicaine, pour les femmes de notre pays, pour nos filles, nos petites-filles.
01:42 Mais c'est aussi un moment important pour les femmes du monde entier.
01:45 On comprend tous évidemment et on partage la charge symbolique.
01:48 En revanche, on n'est pas tous des experts en droit constitutionnel, Yann Brunepivet.
01:51 Est-ce que ça veut dire qu'en France, à partir de cet après-midi, enfin à partir du 8 mars, quand tout ça sera écrit noir sur blanc dans la Constitution,
01:58 plus jamais, plus jamais, le droit à l'IVG ne sera ramis en cause ?
02:02 Ça signifie qu'on inscrit le droit à l'IVG dans notre texte le plus fondamental et celui qui est le plus difficile de modifier.
02:09 Et on le voit aujourd'hui, il nous faut un vote conforme de l'Assemblée nationale et du Sénat,
02:14 puis une adoption au Congrès au 3/5 ou alors par référendum.
02:18 C'est la procédure de révision de la Constitution telle qu'elle est prévue à l'article 89 de la Constitution.
02:23 Donc on met la barre effectivement le plus haut possible.
02:26 Donc je ne peux pas dire aujourd'hui, personne ne pourra demain changer la Constitution.
02:31 Mais en tout cas, il est certain qu'il est beaucoup plus difficile de changer la Constitution que de changer une loi dite ordinaire,
02:39 qui garantissait aujourd'hui l'IVG en France, c'était une loi ordinaire.
02:43 Nous renforçons la protection et nous rendons effectivement plus difficile...
02:48 Il ne pourra pas y avoir un coup de sang de l'Assemblée ou du Sénat seul qui pourrait mettre ça par terre ?
02:50 Ça, ça ne sera pas possible. Il faudra que les deux chambres s'entendent.
02:53 Et il faudra après qu'il y ait une majorité dite qualifiée ou un référendum.
02:57 Donc vous comprenez bien que le fait d'inscrire un nouveau droit dans la Constitution,
03:01 c'est extrêmement protecteur pour les femmes de notre pays.
03:05 Elbron de Villiers, vous êtes la première femme de l'histoire à présider l'Assemblée nationale.
03:08 Vous serez aussi la première à présider un Congrès cet après-midi.
03:10 C'est vous qui annoncerez les résultats de ce vote.
03:13 J'imagine que vous avez déjà réfléchi à ce que vous alliez dire cet après-midi.
03:16 À quoi penserez-vous, à qui penserez-vous au moment de prendre la parole tout à l'heure ?
03:21 C'est une question difficile.
03:23 J'imagine que vous y avez déjà réfléchi.
03:25 Alors j'ai réfléchi à ce que j'allais dire.
03:27 Et effectivement, j'ai un discours qui est préparé et auquel j'ai apporté beaucoup d'attention.
03:33 Après, vous savez, on pense aux femmes qui ont compté pour soi-même.
03:37 Donc c'est très personnel.
03:39 Aux femmes fortes, ma mère, ma grand-mère.
03:41 Je penserai évidemment à mes filles qui seront dans les tribunes,
03:44 parce que c'est pour elles que l'on agit aussi.
03:47 Et puis je penserai à toutes ces femmes aujourd'hui.
03:50 Je penserai à Narjes Mohamdi, notre prix Nobel de 2023, qui est en prison aujourd'hui en Iran.
03:57 Je penserai à ces femmes afghanes qui aujourd'hui n'ont plus l'accès à l'enseignement, à l'éducation
04:03 et qui sont obligées de couvrir leur visage.
04:06 Je penserai évidemment à Marsa Amini, qui est morte pour une mèche de cheveux en Iran.
04:11 Donc je penserai à toutes ces femmes de par le monde
04:14 qui se battent pour leurs droits fondamentaux et qui meurent aujourd'hui.
04:18 Et c'est la raison pour laquelle cette semaine, à l'Assemblée nationale,
04:21 je réunirai 25 présidentes de parlement qui viendront du monde entier,
04:26 d'Afrique du Sud, du Mexique, d'Indonésie.
04:28 25 femmes qui président des parlements comme vous en fait, des assemblées.
04:32 Et je vais réunir aussi des parlementaires de parlement comme moi,
04:35 une dizaine qui les président pour la première fois.
04:38 Et nous parlerons des droits des femmes et de la place des femmes en politique,
04:42 parce que justement, je crois que les femmes en politique ont un rôle particulier à jouer,
04:46 une responsabilité particulière à assumer en matière de droits des femmes.
04:50 Cela dit, tout ne va pas se régler avec l'inscription de l'IVG dans la Constitution,
04:53 cette liberté garantie, parce qu'en 15 ans, en France,
04:56 130 centres où l'on pratiquait les IVG ont fermé.
04:59 - Et c'est ça la réalité du quotidien, le vrai défi c'est l'accès. Alors on fait quoi ?
05:02 - Alors on agit, on renforce les possibilités pour les femmes d'accéder.
05:07 On a voté plusieurs lois, dont la loi sous l'égide d'Alban-Gaillot en 2022,
05:12 qui permet d'une part de rallonger les délais pour recourir à l'interruption volontaire de grossesse.
05:18 Nous avons aussi conféré aux sages-femmes la capacité de procéder
05:22 à des interruptions volontaires de grossesse instrumentales.
05:25 Ce n'était pas le cas avant et cela va permettre de renforcer ces accès.
05:29 - Donc vous souhaitez qu'il y ait une politique derrière cette inscription de la Constitution ?
05:32 - Mais évidemment, il faut que les droits soient des droits réels,
05:35 ils doivent être inscrits pour être garantis, mais la vraie garantie des droits,
05:39 c'est leur effectivité, c'est la capacité pour chaque femme de notre pays
05:43 à avoir accès partout sur le territoire, que ce soit le territoire hexagonal ou ultramarin,
05:49 à l'interruption volontaire de grossesse si elle le souhaite.
05:52 Il faut aussi agir, et c'est une politique globale qu'il faut avoir,
05:55 sur l'accès à la contraception des jeunes filles et des jeunes hommes.
05:59 Nous avons rendu le préservatif gratuit, accès à la contraception d'urgence gratuite également,
06:04 et évidemment travailler aussi sur l'éducation sexuelle de nos enfants.
06:09 C'est les trois volets sur lesquels il faut agir,
06:12 et c'est ce que disait Gisèle Halimi dans cette plaidoirie au procès de Bobigny.
06:16 Elle parlait de ces trois actions à mener,
06:19 et c'est ainsi que nous pourrons assurer la pleine effectivité des droits.
06:23 Tout à l'heure sur les coups de 15h30, vous allez avoir devant vous l'ensemble des députés et des sénateurs de la République.
06:27 Lesquels font partie selon vous de l'arc républicain ?
06:30 Tous, vous savez, ils ont tous été élus par les Français.
06:34 Y compris le RN.
06:35 Mais ils sont des députés de la nation et des sénateurs élus par les Français.
06:40 Donc ceux qui siègent en congrès aujourd'hui représentent le peuple français.
06:44 Vous ne dites pas exactement la même chose que le chef de l'État, ça ne vous échappe pas.
06:47 Moi je n'ai jamais parlé...
06:49 Qui lui varie beaucoup sur le sujet en fonction de la personne qu'il a en face.
06:51 Vous savez, moi je n'ai jamais utilisé cette expression d'arc républicain,
06:53 je ne sais même d'ailleurs pas bien ce que cela veut dire.
06:56 Ce dont je suis sûre, c'est que moi j'ai des adversaires politiques.
07:00 Parce que j'ai des adversaires qui ne partagent pas mes valeurs,
07:03 qui ne partagent pas les valeurs de la République.
07:06 Et j'ai des adversaires politiques qui souhaitent transformer les institutions
07:11 et donc s'attaquer à l'essence de la République.
07:14 On peut penser à l'extrême gauche qui veut faire une sixième République
07:18 et faire un énorme Big Bang qui, je crois, n'assurerait pas la garantie des droits.
07:23 Et on peut penser au Rassemblement National...
07:25 Donc des adversaires mais qui sont des interlocuteurs légitimes.
07:28 Qui sont des interlocuteurs, ils sont élus par les Français.
07:31 Bon et après le congrès, vous allez faire quoi ? Vous vous portez en vacances ?
07:33 Non, je ne pars pas en vacances.
07:35 On a beaucoup de boulot à assurer à l'Assemblée Nationale.
07:39 Evidemment...
07:40 Non mais il paraît que le Premier ministre ne s'intéresse assez peu au Parlement
07:43 et que vous n'avez pas grand chose à faire.
07:44 D'ailleurs, ça grogne dans les rangs de la majorité.
07:47 La colère sourde du Parlement contre Gabriel Attal,
07:49 qui trahit hier le JDD dans un article qui avait l'air assez informé.
07:52 C'est quoi le problème ? Qu'est-ce qui coince là ?
07:54 Il n'y a pas de problème. Rien ne coince.
07:56 Comme je le disais, moi, cette semaine, je vais recevoir...
07:58 Vous n'aviez pas fait de langue de bois jusqu'à présent.
08:00 Mais je n'en fais jamais de langue de bois et vous le savez très bien.
08:02 Rien ne coince. Le Parlement est à sa place.
08:04 Le gouvernement est en action.
08:06 Chacun dans ses prérogatives et vous savez,
08:08 les prérogatives du Parlement et du gouvernement sont fixées
08:10 par la Constitution que nous allons réviser tout à l'heure
08:13 pour inscrire un nouveau droit.
08:14 Donc la Constitution, elle est là pour garantir aussi
08:17 le respect de l'équilibre des pouvoirs et la répartition des pouvoirs.
08:20 Quand vous avez reçu le prix du Trombinoscope 2023
08:23 avec Gérard Larcher, le président du Sénat,
08:24 vous avez dit tous les deux, vous avez fait part de votre volonté
08:26 de renforcer les pouvoirs du Parlement.
08:28 Ce n'est pas tellement la tendance depuis que Gabriel Attal est arrivé, non ?
08:31 C'est important de renforcer, vous savez, les pouvoirs du Parlement
08:34 parce que c'est l'expression démocratique.
08:36 Le Parlement, c'est le cœur battant de la démocratie,
08:38 c'est la maison du peuple, c'est là où siègent les élus de la nation.
08:42 Et vous savez, quand j'entends que les Français veulent plus de démocratie,
08:46 je pense qu'il faut plus de démocratie directe,
08:49 donc plus de référendum, plus de participation
08:51 et il faut plus de démocratie représentative, donc plus de Parlement.
08:55 Est-ce que vous réfléchissez, comme on a pu le dire dans la presse du week-end,
08:57 là encore, à une loi ordinaire qui pourrait introduire
08:59 une dose de proportionnel aux législatives ?
09:01 Moi, c'est un engagement que j'avais pris
09:03 et que le président de la République avait pris en 2017.
09:05 Je pense qu'il faut avancer très clairement sur cette question.
09:08 Maintenant ?
09:09 Maintenant, oui, bien sûr, parce que...
09:11 Donc pour les prochains législatifs, vous souhaitez qu'il y ait une dose de proportionnel ?
09:13 Qu'il y ait une forte dose de proportionnel, au moins 25 ou 30 %.
09:16 Je pense que c'est important que tout le monde constate
09:19 qu'il faut que nous travaillions ensemble
09:21 et que les partis politiques s'entendent.
09:23 C'est ce que moi, j'essaye de faire au quotidien à l'Assemblée nationale,
09:26 faire que les gens se parlent et avancent dans un objectif d'intérêt général pour les Français.
09:31 Le gouvernement est d'accord là-dessus sur la proportionnelle ?
09:33 En tout cas, je n'en ai pas discuté récemment avec le gouvernement,
09:36 mais c'était un scrinoir sur blanc dans les engagements présidentiels de 2017
09:40 quand je me suis engagée avec le président de la République.
09:42 Merci beaucoup Yann Lebrun-Pivet d'être venu dans les 4V.
09:44 Rendez-vous donc cet après-midi au Congrès à suivre en direct sur Canal 27, France Info.
09:48 Et si je peux me permettre, dans une époque qui a tendance à surjouer la guerre des sexes,
09:51 je dois quand même vous dire que nous aussi, les hommes, on est très nombreux à nous réjouir
09:54 de voir l'IVG être inscrite dans la Constitution.
09:56 Merci et bonne journée.

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