À l'occasion de la journée mondiale des droits des femmes, nous avons eu le plaisir de recevoir Ariane Dierickx, la Directrice générale de l'ASBL L'Ilot dans le Carrefour de l'info
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00:00 Le Carrefour de l'info sur Arabelle.
00:06 Bonjour, bonjour à tous. Tout de suite le sommaire de votre Carrefour de l'information.
00:10 Le collectif 8 mars appelle les femmes et minorités de genre à faire grève aujourd'hui
00:14 lors de la journée internationale de lutte pour les droits des femmes.
00:16 Quelques 15 000 personnes sont attendues dans les rues de Bruxelles.
00:20 Ce 8 mars, l'occasion aussi de se pencher sur la thématique du sans-abrisme féminin
00:26 avec Ariane Dierix qui est directrice de l'ASBL Lilo, une ASBL qui lutte depuis 60 ans
00:31 contre le sans-abrisme à Bruxelles et en Wallonie.
00:34 Nous allons aussi nous intéresser à l'occasion de cette journée
00:36 au modèle des féministes dans l'islam avec le regard d'une spécialiste,
00:41 Asma El-Malabat qui est médecin, biologiste, essayiste et féministe marocaine.
00:46 Et puis en deuxième partie d'émission, comme tous les jours, direction le Maghreb,
00:49 au Maroc Pénurido, lancement de la campagne du changement.
00:52 Et puis en Algérie, le gouvernement qui demande aux entreprises de baisser les prix
00:56 pendant le mois de ramadan qui commence dans quelques jours.
00:59 Voilà donc pour l'essentiel de votre Carrefour de l'information qui démarre dans une première minute.
01:03 [Générique]
01:11 Je vous le disais, il y a quelques instants, nous sommes le 8 mars
01:14 et vous le savez, la journée internationale des droits des femmes.
01:17 Le collectif 8 mars recourt à la grève pour dénoncer les inégalités de genre
01:21 et démontrer que quand les femmes s'arrêtent, le monde s'arrête.
01:24 Quelques 15 000 personnes attendues dans les rues de Bruxelles pour défendre les droits des femmes,
01:28 une manifestation qui se fait l'écho de cette journée.
01:31 Pour la sixième année consécutive, le collectif recourt à la grève
01:35 pour dénoncer les inégalités de genre et démontrer que quand les femmes s'arrêtent,
01:38 je dis le monde s'arrête, l'organisation réunit des syndicalistes, des militantes,
01:42 féministes, citoyennes engagées qui appellent les femmes à se croiser les bras au travail
01:46 comme à la maison et à manifester.
01:48 Et puis, il faut savoir aussi que plus de 7 000 personnes sont sans-abri dans la capitale
01:52 et parmi elles, au moins un sur cinq seraient une femme,
01:55 des femmes qui subissent dans la rue de nombreuses violences.
01:59 L'occasion de se pencher aujourd'hui sur cette thématique du sans-abrisme féminin
02:03 avec Ariane Dierix qui est directrice de l'ASBL Lilo.
02:06 Bonjour.
02:07 Bonjour.
02:07 Merci d'être avec nous sur Arabelle.
02:09 Merci à vous.
02:10 Alors, il y a six mois, vous avez été invitée sur ce même plateau avec moi
02:14 pour l'ouverture du Circé de Lilo,
02:16 le premier centre de jour exclusivement dédié à l'accueil des femmes sans-abri.
02:21 Six mois sont passés, pratiquement jour pour jour.
02:23 Peut-être déjà un premier bilan ?
02:25 Alors, le premier bilan qu'on peut faire, c'est qu'on peut aujourd'hui dire
02:30 que ce centre répondait à un immense besoin.
02:33 Il a été assez rapidement utilisé par les femmes qui se sont passées le mot.
02:38 Aujourd'hui, il y a entre 80 et 100 femmes qui connaissent le centre,
02:41 qui le fréquentent de manière régulière.
02:44 Au quotidien, on n'est pas dans ces chiffres-là parce qu'elles ne viennent pas toutes tous les jours.
02:49 Néanmoins, ça répond à un véritable besoin.
02:52 Ce qu'on peut aussi noter dans les observations après ces quelques mois,
02:57 c'est que ce qu'on avait pu étudier avant la création de ce centre,
03:02 c'est-à-dire le fait que les violences sont la cause principale,
03:06 les violences, toutes formes de violences sont les causes principales du sans-abrisme féminin,
03:10 et bien ça se confirme dans les récits que les femmes nous amènent.
03:14 On voit bien que non seulement ce sont les violences multiples
03:17 qu'elles ont connues dans leur parcours, souvent depuis leur petite enfance jusqu'à l'âge adulte,
03:21 qui les ont amenées à une situation de précarité,
03:24 à progressivement perdre leurs droits et à se retrouver en rue.
03:27 Mais une fois qu'elles sont en rue, ces violences s'intensifient et sont extrêmement graves.
03:33 – Le constat est sans appel, vous le dites, le centre ne désemplit pas.
03:37 Et 100% des femmes qui passent la porte du Circé de Lilo
03:40 sont des femmes victimes de violences sous toutes ces formes.
03:43 – Absolument, et les violences sexuelles sont malheureusement extrêmement présentes.
03:47 Toutes les formes de violences, comme je l'ai dit, sont là,
03:50 mais les violences sexuelles sont particulièrement présentes.
03:53 On sait qu'être une femme en rue, c'est un danger de chaque instant.
03:58 Et donc effectivement, ça fait partie des récits, malheureusement, qu'elles nous amènent.
04:03 Et on doit évidemment apporter un accompagnement tout à fait particulier
04:08 et extrêmement prudent autour de ces questions.
04:11 – Alors justement, comment réagissent un petit peu vos équipes sociales
04:14 face à cet afflux plutôt, je dirais pas inattendu, mais attendu aussi ?
04:18 – Alors oui, on attendait évidemment cet afflux.
04:20 Ce qui est plus compliqué, c'est que le projet est récent,
04:24 donc l'équipe n'est pas encore très grande.
04:27 On a aujourd'hui 8 travailleuses sociales, mais qui ne travaillent pas tout à temps plein.
04:31 Et si on veut ouvrir le centre régulièrement,
04:35 forcément les 8 personnes ne sont pas présentes au quotidien,
04:38 pour accueillir un nombre quand même assez important de femmes, comme je l'ai dit,
04:41 et qui toutes auraient besoin d'un accompagnement individuel.
04:44 Or, comme je le dis, les récits sont assez tragiques,
04:49 c'est ce que les femmes nous racontent,
04:51 demanderaient vraiment qu'il y ait un accompagnement spécifique, individualisé,
04:55 sur mesure qu'on puisse faire des accompagnements physiques.
04:58 Quand une femme a été victime d'un viol, évidemment,
05:01 on doit pouvoir l'accompagner physiquement, dans un commissariat de police,
05:05 l'accompagner chez un médecin,
05:06 dans un centre de prise en charge spécifique pour les violences sexuelles.
05:10 Et ça, ça n'est évidemment pas possible quand on a une toute petite équipe.
05:13 Nous voulons l'étoffer, mais ça demande des moyens.
05:15 – On y reviendra tout à l'heure.
05:18 Un centre de jour exclusivement féminin, c'est un premier pas important selon vous,
05:23 pour la reconnaissance du sans-abrisme,
05:27 souvent qui passait un petit peu sous les radars ?
05:30 – Oui, parce qu'on sait que, vous disiez dans l'introduction,
05:33 qu'une personne sur cinq à Bruxelles sans-abri serait une femme,
05:37 on sait que c'est un chiffre qui est sous-estimé fortement.
05:41 Il y a probablement beaucoup plus de femmes qui vivent le sans-abrisme,
05:46 mais qui ne sont pas dans les chiffres,
05:48 qui ne sont pas répertoriées dans les dénombrements
05:51 qui sont réalisés tous les deux ans,
05:52 parce qu'elles se cachent davantage que les hommes,
05:54 sachant que la rue est dangereuse pour elles.
05:57 Elles ont des stratégies d'évitement,
05:59 qui font en sorte qu'elles ne se retrouvent pas en rue autant que les hommes.
06:08 Et donc oui, je pense qu'une journée comme celle-ci,
06:11 c'est une journée importante pour pouvoir parler du sans-abrisme au féminin,
06:15 le sans-abrisme caché aussi.
06:17 Toutes ces femmes qui dorment sur le canapé d'une amie,
06:20 qui dorment dans des voitures,
06:22 qui toute la nuit marchent pour éviter d'être agressées,
06:26 et ça fait en sorte qu'effectivement le sans-abrisme féminin est plus invisible.
06:30 Alors bien évidemment, on en parlait tout à l'heure en off,
06:32 avant d'entrer en studio, il ne faut pas attendre un 8 mars pour bouger,
06:35 pour réagir, informer, sensibiliser,
06:37 c'est finalement un combat de tous les jours de l'année.
06:39 Oui, bien sûr.
06:41 C'est bien qu'on en parle aujourd'hui, évidemment,
06:43 parce que je pense que la situation des femmes,
06:45 en situation de très grande vulnérabilité, de très grande précarité,
06:48 doit faire partie des revendications fortes d'une journée comme celle-ci.
06:52 Et on parle malheureusement trop peu des femmes
06:55 qui vivent toutes les exclusions et qui ont tout perdu.
06:58 Mais toute l'année, c'est un combat pour nous, évidemment,
07:02 pour l'ensemble des associations féministes.
07:04 Et je pense qu'il y a aussi aujourd'hui l'illusion
07:06 que l'égalité, elle commence à être gagnée.
07:08 Les nouvelles générations peuvent avoir cette illusion
07:11 que l'égalité est acquise parce que les femmes sont plus présentes
07:14 dans à peu près tous les métiers,
07:16 que la politique des quotas en politique a fait son chemin.
07:21 En réalité, on voit bien qu'il y a peu de choses qui changent dans les faits.
07:24 On parle plus de l'égalité entre femmes et hommes
07:27 qu'on ne la vit au quotidien.
07:29 Il y a encore beaucoup d'inégalités sur le terrain.
07:31 L'égalité, de fait, elle n'est pas là.
07:32 Ça, c'est une certitude.
07:34 Alors, on parlait tout à l'heure de l'afflux vers le centre.
07:36 Je préfère, je voudrais y revenir.
07:38 Elle est passée aussi par l'ampleur du nombre de personnes accompagnées.
07:41 Vous allez déménager dans quelques mois, si bien cela.
07:43 Quelques explications.
07:44 Malheureusement, pas dans quelques mois encore,
07:46 mais nous avons effectivement, depuis le début,
07:49 en fait, voulu trouver un bâtiment qui soit plus grand
07:52 et plus adapté que celui dans lequel on accueille aujourd'hui les femmes.
07:55 On les accueille aujourd'hui sur le parvis de Saint-Gilles,
07:57 dans un bâtiment qui ne nous appartient pas,
07:59 que nous louons et que nous avons adapté veille que veille
08:01 pour pouvoir accueillir les femmes le mieux possible.
08:04 C'est un bâtiment qui est assez petit, assez étroit, mal équipé.
08:09 Voilà, il y a le minimum nécessaire pour pouvoir accueillir les femmes correctement.
08:14 Mais l'objectif, c'est de pouvoir accueillir plus de femmes,
08:16 de pouvoir les accueillir avec leurs enfants,
08:18 ce qui aujourd'hui est très difficile dans le centre,
08:21 et de pouvoir y développer d'autres actions
08:24 que les services de prévention des nécessités qu'on propose aujourd'hui.
08:28 Avoir vraiment des ateliers où on va pouvoir travailler avec les femmes
08:31 sur les trajectoires d'émancipation,
08:33 de faire un travail de soins du corps et de l'esprit.
08:37 Donc vraiment s'engager dans quelque chose de beaucoup plus ambitieux
08:40 que ce qu'on peut faire dans un bâtiment comme celui qu'on a aujourd'hui.
08:42 Alors pour se développer, on le sait, le nerf de la guerre, c'est l'argent.
08:45 Et dans le cadre de cette journée internationale de lutte pour les droits des femmes,
08:48 il y a une soirée stand-up au profit de Lilo
08:51 qui sera organisée le 15 mars à la Tricoterie à Bruxelles.
08:55 Parlez-nous un petit peu de cet événement.
08:56 Alors on organise depuis la création de Circé de Lilo
09:00 plusieurs soirées qui visent à financer l'acquisition
09:04 et la rénovation de ce bâtiment plus grand qu'on essaie d'avoir.
09:08 Et cette soirée du 15 mars, en présence de deux célèbres stand-upers aujourd'hui,
09:13 qui sont Fanny Ruet et Elisabeth Moitier,
09:16 c'est une soirée de plus qui va permettre de faire connaître le centre,
09:19 d'attirer des personnes qui s'intéressent peut-être à la cause du sans-abrisme
09:24 ou qui la connaissent un peu moins,
09:26 mais qui ont envie de s'amuser tout en soutenant une cause sociale.
09:29 C'est l'objectif de cette soirée-là.
09:31 Il y a encore des places, donc vous pouvez vous inscrire.
09:34 Les informations se trouvent sur notre site web
09:37 ou sur les pages de Lilo sur les réseaux sociaux.
09:40 Donc voilà, c'est un moment qui va être un moment de joie,
09:44 mais de soutien aussi.
09:46 C'est une programmation 100% féminine.
09:47 Absolument.
09:48 Alors c'est un premier pas, mais bon, je rappelle que Lilo a besoin,
09:53 je dis dans la presse, d'un million et demi d'euros.
09:56 La moitié a à peu près été déjà récoltée.
09:58 Oui.
09:58 Qu'est-ce qu'on pourrait faire de plus justement pour vous soutenir au-delà de cette soirée stand-up ?
10:03 Alors parlez de nous.
10:04 Aujourd'hui, vous nous aidez à le faire.
10:07 Fréquentez nos différents moyens de communication et partagez notre information.
10:11 Et pourquoi pas devenir donateur ou donatrice à Lilo.
10:14 Chaque euro est important.
10:16 On dit que les petites rivières font les grands, les petits ruisseaux, pardon, font les grandes rivières.
10:21 Mais c'est vraiment de ça qu'il s'agit.
10:22 Quand on récolte des sommes aussi importantes,
10:24 quand on vise à récolter des sommes aussi importantes,
10:26 on a besoin d'un engagement d'un maximum de personnes,
10:29 mais aussi peut-être d'entreprises, de fondations.
10:32 Voilà, nous allons veiller à ce que le plus rapidement possible,
10:36 nous puissions avoir les moyens de développer ce grand projet.
10:40 Avant de quitter, peut-être Ariane Lérix, pardon, le mot de la fin,
10:44 un message à faire passer à l'occasion de ce 8 mars,
10:47 pour ne pas se mettre la main devant les yeux,
10:50 pour ne pas regarder la réalité en face ?
10:54 Alors pour moi, c'est le grand défi aujourd'hui des luttes féministes,
10:58 c'est vraiment de ne pas croire que tout est acquis.
11:00 Je l'ai dit tout à l'heure, mais je réinsiste là-dessus,
11:02 parce qu'on a beaucoup parlé de MeToo,
11:06 mais on voit bien que les résistances restent quand même très importantes
11:09 et que dans les faits, la précarité compte tenir du terrain,
11:12 et elle concerne plus les femmes,
11:13 que les violences restent extrêmement nombreuses,
11:16 le nombre de féminicides ne fait qu'augmenter d'année en année,
11:19 dans à peu près tous les domaines de la vie en société,
11:22 les inégalités entre femmes et hommes restent extrêmement importantes.
11:26 Je pense que c'est essentiel qu'on s'attaque maintenant
11:29 à la mise en œuvre de ces combats,
11:31 de toutes les revendications portées par les féministes
11:33 et par les personnes qui les soutiennent,
11:35 et qu'on ne s'arrête pas à des paroles.
11:37 Voilà, c'était donc la conclusion d'Ariane Derix,
11:40 je rappelle que vous êtes directrice de l'ASBL Lilo.
11:42 Merci d'avoir été avec nous sur Arabelle.
11:44 Merci à vous.
11:45 On se retrouve dans quelques instants pour la suite de votre Café aux Donnex Faux.