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00:00 Avec nous pour en parler notre invité Maurice Oudiek Dionne, professeur agrégé de sciences politiques à l'université Gaston-Berger de Saint-Louis au Sénégal.
00:09 Bonsoir, merci d'être avec nous sur France 24.
00:11 Il semble donc que les électeurs se sont rendus en masse dans les urnes ce dimanche après tout ce qu'il s'est passé ces dernières semaines.
00:17 On sent un soulagement de pouvoir voter.
00:21 Oui, en réalité, on a un soulagement et c'est dans la tradition politique du Sénégal.
00:27 À chaque fois qu'il y a des crises de cette nature, qu'au dernier moment, que les citoyens qui ont une très forte culture politique démocratique
00:36 et très emprunt de valeurs civiques puissent dénouer les crises politiques comme celle-là très grave que nous avons vécu depuis maintenant quelques trois ans.
00:48 Et notre envoyé spécial l'évoquait il y a quelques instants, il y a une volonté de changement.
00:53 Il semble que c'est le dénominateur commun de beaucoup de votants aujourd'hui.
00:57 Il y a cette aspiration au changement parce qu'on a eu des pratiques autoritaires, des pratiques néopatrimoniales qui se sont développées.
01:04 Alors que depuis les dérives oppressives, répressives auxquelles on a assisté sous le président Ouad,
01:10 on espérait qu'avec le président Sall, on allait renforcer, consolider la démocratie et l'état de droit.
01:16 Ça n'a pas été le cas.
01:17 Et aujourd'hui, face à la crise économique, face à tous ces errements du régime en place,
01:23 il y a une mobilisation forte et déterminée de tous les citoyens sénégalais pour régler ce problème-là par les jeunes.
01:30 La moyenne d'âge de la population, c'est 19 ans au Sénégal.
01:33 Une jeunesse touchée, on le sait, par le chômage, le manque de perspective.
01:37 C'est l'un des défis majeurs pour le futur président ?
01:41 C'est l'un des défis majeurs parce qu'en réalité, le président Sall a beaucoup fait en termes d'infrastructure.
01:46 Mais on aurait pu peut-être investir davantage sur l'industrialisation,
01:50 prendre à bras-le-corps les questions relatives à l'emploi des jeunes, à leur insertion professionnelle et sociale.
01:56 Ça n'a pas été le cas.
01:58 Aujourd'hui, c'est un des défis majeurs auxquels sera confronté le président qui sera élu.
02:04 Autre défi, l'économie et cette inflation qui pèse durement sur le pouvoir d'achat des Sénégalais ?
02:10 Effectivement, il y a un renchérissement du coût de la vie qui est insupportable pour la plupart des Sénégalais.
02:16 Et on aurait pu, avec les promesses de souveraineté alimentaire, d'autosuffisance alimentaire,
02:22 de dynamisation du secteur primaire, notamment de l'agriculture, venir à bout de ces problèmes-là.
02:28 Mais il n'en a pas été le cas.
02:30 Avec nos 700 km de pêche également, le poisson se raréfie.
02:34 Il y a donc des questions brûlantes qu'il va falloir régler de façon définitive
02:40 pour arrimer l'action publique et politique au cœur des préoccupations des Sénégalais.
02:45 1 000 observateurs sont déployés dans le cadre de ce scrutin.
02:49 On peut espérer une élection transparente ?
02:53 Oui, une élection transparente parce que, quoi qu'on puisse dire,
02:56 le système électoral de Sénégalais est un système fiable.
02:59 Il est pratiquement difficile, voire improbable, de manipuler les élections au sens matériel du terme.
03:06 C'est pourquoi on a eu recours ces derniers temps à d'autres formes de manipulation des opérations préélectorales,
03:13 notamment avec le parrainage et autres mécanismes pour écarter des candidats.
03:19 Le Sénégal est historiquement à un niveau de stabilité.
03:23 C'est une élection importante pour toute la sous-région ?
03:27 C'est une élection importante, c'est une élection cruciale
03:29 parce que le Sénégal est un repère en matière démocratique,
03:34 avec une forte tradition établie depuis le 19e siècle et même dans les royautés précoloniales.
03:40 Donc le Sénégal doit continuer à apporter ses lumières,
03:44 à faire preuve de leadership pour montrer la voie dans la consolidation démocratique.
03:51 Et un scrutin suivi aussi avec attention par l'Occident ?
03:56 Bien entendu, un scrutin suivi avec attention par l'Occident
03:59 puisque le Sénégal a cette ressource symbolique cruciale
04:03 pour constituer un modèle, un exemple, une vitrine démocratique,
04:07 mais aussi en raison des dangers géopolitiques et stratégiques
04:10 qui ont toujours placé le Sénégal au cœur des confrontations.
04:15 Merci infiniment Maurice Soudiak-Dion d'avoir répondu à nos questions ce soir sur France 24.