• il y a 8 mois
Juliette Arnaud a choisi de se replonger dans ce fameux polar de 1940 signé William Irish. Notre bibliophile préférée tisse un lien entre sa lecture et l'actualité autour de la mort de l'opposant à Vladimir Poutine, Alexeï Navalny. Tout ça avant sa dramatique mettant en scène... un crime.
Retrouvez Juliette Arnaud sur le site de France Inter : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/la-chronique-de-juliette-arnaud

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Transcription
00:00 Juliette Arnault, ma chère Juliette, cette semaine vous avez choisi de vous replonger dans un polar fameux de 1940 écrit par William Irish et qui s'intitule "La mariée était en noir".
00:13 Super, mais pourquoi ? Why ? Quel lien avec l'actualité s'il vous plaît Juliette, mon petit pinceau ?
00:20 Et ça c'est pas moi qui l'ai écrit, il y a un mois elle était ici à Strasbourg face au Parlement européen, Julia Navalnaya, avec son visage inoubliable, un visage hanté de veuve, une apparition quasi fantomatique.
00:35 Elle exhortait les élus, elle leur disait pour vaincre Poutine, combattait son réseau criminel. Elle s'engageait elle-même à poursuivre l'oeuvre de son mari.
00:44 Et il m'a fallu un peu de temps pour retrouver dans ma grosse mémoire pleine de livres une autre veuve. Ah mais bordel, oui, cette veuve-là elle hante ce polar, oui, à un moment il y a un des témoins qui dit d'elle qu'elle a une bouche à embrasser mais des yeux froids.
00:58 Moi, ce dont je me souvenais surtout d'elle c'était sa détermination implacable et totalement mystérieuse jusqu'aux dernières pages du livre.
01:05 Veuve, on le sait, on le devine dès le titre, la mariée était en noir. Dans les premières pages, on est avec elle qui s'installe dans un meublé, elle n'a pas donné sa vraie identité et elle est en train de brûler des photos.
01:16 Et puis elle va à une fenêtre et il y a cette phrase prémonitoire qui clôt le chapitre, elle dit "Elle semblait se pencher sur la ville comme pour la menacer".
01:25 De fait, la menace vague se précise, elle s'insinue dans une fête de fiançailles, tous les hommes, même le fiancé l'a remarque, elle est fort belle, elle ne parle à aucun d'eux, elle les esquive, elle rejoint le fiancé qui à un moment est scellé sur un balcon, son foulard à elle s'envole, il se penche pour le rattraper, elle le pousse, il tombe, il meurt.
01:45 Elle disparaît. La police arrive, personne n'a assisté à la scène, personne ne connaît cette femme, bien que tout le monde l'ait vue, le policier chargé de l'affaire note un point d'interrogation dans son calepin.
01:55 Et puis dans les chapitres qui suivent, d'autres hommes qui semblent sans rapport les uns avec les autres sont assassinés. Il n'y a pas de rapport sauf qu'il y a toujours une femme alentour.
02:03 Une fois elle est blonde, une fois elle est brune, elle est rousse aussi, ses yeux étaient-ils verts, étaient-ils gris, grandes, portaient-elles des talons ? Le policier au calepin farci de point d'interrogation est convaincu, lui, que c'est la même femme.
02:15 Et nous, lecteurs et lectrices, on devine que c'est elle. Et comme dans Columbo, et ça, Irish l'invente 30 ans avant, on assiste au meurtre, on connaît la meurtrière, mais on ne sait pas ses raisons et si le policier saura l'arrêter.
02:27 Et puis il y a son catalogue de victimes, toujours des hommes, médiocres, chacun à sa façon, un fiancé content de lui, un père de famille incompétent, un peintre obsessionnel, un barman qui rêve à des femmes qui n'existent pas.
02:38 Mais quoi quand même, on ne tue pas les hommes parce qu'ils sont médiocres, n'est-ce pas ? Ou alors sinon c'est un métier à plein temps.
02:45 La mariée était en noir, la tueuse a une bonne raison, ou alors un fantôme de bonne raison, vous verrez. Merci, bisous, merci.
02:54 [Applaudissements]
03:01 On reste dans le monde du polar qu'on va transposer au théâtre. Un théâtre pour les oreilles. Alors imaginez, imaginez une scène de crime, ici même à Strasbourg.
03:12 Et la victime, allongée, inerte sur le sol, est incarnée par Frédéric Fromet. Autour du corps, imaginez aussi des forces de police incarnées par Juliette et Laélia, tandis que Doulie fait office de témoin.
03:28 [Musique]
03:45 Bonjour, commissaire Arnaud.
03:47 Adjudant Véron, bonjour. Alors qu'est-ce que c'est ?
03:50 Eh ben on l'a trouvé ce matin, le corps de l'Union européenne. Sans doute tombé de ce gros bâtiment en verre là derrière vous.
03:57 Le Parlement européen ?
03:59 Ah, c'est ça ce machin ? D'accord, je vais mener des investigations.
04:03 Bien, bien, bien. Dites donc, le corps est encore chaud ?
04:07 Euh, tu peux arrêter de me faire des guillis ?
04:09 Non, merde, Fred, tu sors pas de ton personnage. Bien, bien, bien, bien. Qui a découvert le corps ?
04:14 Au niveau des investigations, nous savons que c'est une jeune fille de type féminin.
04:19 Bien, amenez-la moi.
04:21 Oui, chef, mais avant, je dois vous prévenir que mes investigations m'amènent à penser qu'elle est dans un état d'ébriété avancée.
04:28 [Rires]
04:30 Euh, il est encore long ce sketch parce que je commence à avoir des crampes, moi.
04:33 Silence, cadavre. Bien, comment vous appelez-vous ?
04:37 Je m'appelle Greta Müller-Schmidt-Schneider.
04:42 Euh, comment ça s'écrit, ça ?
04:44 G-R-E-T-A.
04:47 Bon, allez, c'est bon, on n'a pas le temps. Je vais vous appeler Gregre.
04:51 Gregre, dites-moi comment vous avez découvert le corps.
04:55 Eh bien, j'allais chercher mon petit déjeuner et là, paf, je suis réveillée.
05:01 D'accord. À cause du corps, Gregre ?
05:03 Non, non, non, non, non, non. À cause du vodka.
05:07 Oui, bien sûr.
05:09 Et en me relevant, qu'est-ce que je vois ?
05:12 Le corps ?
05:14 Une bouteille de schnapps, un peu empamée. Je fonce dessus et là, paf, je suis réveillée.
05:23 Toujours pas sur le corps, j'imagine ?
05:25 Eh bien, là, si.
05:27 Bien, bien, bien, bien. Alors, quelles sont les pistes pour le moment ? Adjudant, Véron.
05:32 Nos investigations nous laissent penser à un suicide, chef.
05:35 Mais enfin, pour quelles raisons l'Union Européenne se serait-elle suicidée ?
05:39 Pour des raisons sentimentales. Elle venait de se faire larguer par les Anglais.
05:43 Bien. Enfin, c'est pas suffisant. Ils font un motif plus fort quand même pour imaginer un suicide.
05:48 Ce ne sont pas les seuls. Tous les Européens se replient sur eux-mêmes ces derniers temps et envisagent de la quitter.
05:53 Bien, bien, bien. Alors, creusons la thèse du suicide.
05:56 Ah, maman, je sais pourquoi. Ça fait plus de 25 ans qu'elle vient à Strasbourg, quand même, maintenant.
06:05 Mais attendez, non, arrêtez, c'est pas moi, c'est le sketch. C'est pas moi qui ai écrit le sketch.
06:11 Bien, enfin, bien, bien, bien.
06:13 Non, mais en fait, j'étais pas mort.
06:15 Oh, c'est donc ça un sursaut européen ?
06:18 Stayin' alive, stayin' alive. Ah, ah, ah, ah, stayin' alive.
06:24 Mais alors, commissaire Arnaud, mes investigations m'amènent à penser que le mort n'est pas mort.
06:30 Pas encore, Adjudant Véron. Nous verrons le 9 juin.
06:39 Merci à Juliette Arnaud et toute sa petite troupe.
06:43 On a pris une claque d'acting.

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