Ils s'appellent Samara et Shamseddine, deux adolescents tabassés à la sortie de leur collège cette semaine. Ces drames choquent et interrogent sur le rapport qu'entretiennent nos ados avec la violence. Pour en parler, Cécile Mamelin, vice-présidente de l'Union syndicale des magistrats, et qui a exercé pendant des années la fonction de juge pour enfants et juge aux affaires familiales.
Regardez L'invité de RTL Midi avec Vincent Parizot et Céline Landreau du 05 avril 2024
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00:00 RTL midi avec Vincent Parizeau et Céline Landreau.
00:04 Il s'appelle Samara, Chamsedine, deux ados qui ont été tabassés cette semaine à la sortie de leur collège.
00:11 Alors on vous a beaucoup parlé dans les journaux d'RTL de ces drames qui choquent,
00:16 qui interrogent aussi sur le rapport qu'entretiennent nos ados, nos pré-ados parfois,
00:22 avec la violence, la violence extrême et parfois la violence quasiment gratuite.
00:26 On peut en parler avec nous Cécile Mamelin, bonjour.
00:30 Bonjour.
00:31 Vous êtes vice-présidente de l'Union syndicale des magistrats et vous avez exercé pendant des années
00:36 la fonction de juge pour enfants, juge aux affaires familiales, deux agressions cette semaine,
00:42 deux affaires très médiatisées, on le disait il y a quelques minutes, avec ces drames de Montpellier et de Viry-Châtillon.
00:47 Est-ce qu'on peut aller jusqu'à dire que cela signifie que nos ados sont plus violents qu'avant ?
00:54 Alors c'est très difficile effectivement de parler de la violence et de la quantifier,
01:01 notamment au titre de son intensité.
01:03 En réalité les statistiques actuelles sont assez difficilement exploitables
01:08 et en fait la recrudescence qu'on peut constater de la violence, voire même de l'ultra-violence,
01:14 que peuvent constater les policiers, les magistrats et MEG,
01:17 elle manque d'indicateurs en fait pertinents,
01:19 puisqu'on n'a aucun élément statistique sur la notion d'intensité.
01:23 Cela peut aller sur une simple claque, au véritable passage à tabac,
01:29 comme ce sont des faits divers, des faits dramatiques qui se sont produits ces derniers jours
01:33 et qui sont mis sur le devant de la scène.
01:35 Mais en réalité c'est très difficile de venir affirmer péremptoirement
01:41 une augmentation significative de la violence et de l'ultra-violence.
01:45 Parce que des bandes d'hélices il y en a toujours ?
01:47 Par contre, les individus, ça c'est un débat très récurrent.
01:52 On en parle de cela depuis le début du XXème siècle en réalité,
01:58 selon l'Observatoire National de la Délinquance et des Réponses Pénales,
02:01 ces débats étaient les mêmes.
02:03 Donc régulièrement on s'interroge, parce que je pense que c'est l'âge des auteurs
02:08 qui est particulièrement perturbant, notamment pour les parents de ces adolescents,
02:12 de ces pré-adolescents.
02:13 Mais en réalité la violence chez les jeunes, comme j'allais vous dire,
02:17 chez les majeurs, elle a toujours existé.
02:20 C'est difficile pour l'instant, parce que si vous voulez,
02:26 dans les statistiques du ministère de la Justice,
02:28 on ne distingue pas, en dessous de 18 ans, il n'y a pas de distinction qui est faite.
02:31 On ne peut pas vous donner de chiffres précis là-dessus.
02:33 Ce qu'on peut dire par contre, c'est qu'il y a une légère augmentation
02:36 des faits d'homicide.
02:38 C'est-à-dire les faits les plus graves, qui conduisent effectivement
02:40 au décès d'une personne, ont légèrement augmenté
02:43 au cours de ces dix dernières années.
02:45 Mais en même temps, la part des mineurs reste sensiblement la même.
02:49 J'ai eu l'occasion également de me rendre compte
02:53 qu'il y avait à peine 2000 mineurs par an qui étaient poursuivis
02:56 devant le tribunal pour enfants.
02:57 C'est-à-dire pour les faits les plus graves,
02:59 ce qui, sur la totalité des personnes qui passent devant la Justice,
03:03 est quand même relativement faible.
03:04 Il y a 32 000 auteurs qui sont envoyés.
03:06 Donc voilà, ça reste un pourcentage fort, heureusement, relativement faible.
03:11 Alors, vous le disiez, les statistiques ne permettent pas
03:14 de distinguer un mineur de 17 ou de 12 ans
03:17 qui aurait commis de tels actes.
03:19 Mais vous, en tant que juge pour enfants, vous les avez vus
03:21 dans votre bureau, ces jeunes agresseurs défilés.
03:24 Qui sont-ils ? Est-ce que vous diriez que leur profil a changé
03:27 au fil des années, de par votre expérience ?
03:29 Qu'est-ce que vous avez constaté ?
03:31 Alors, il y a souvent à l'origine déjà des difficultés familiales,
03:38 des carences éducatives.
03:40 Bien souvent, lorsqu'un mineur devient d'élinquence,
03:44 il a d'abord été un mineur en proie à des carences éducatives.
03:47 Je ne dirais pas que c'est à chaque fois,
03:49 mais bien souvent, il y a des problèmes dans le cadre de la famille, etc.
03:54 Donc, ce qu'on peut constater, et je le disais tout à l'heure,
03:58 c'est qu'il y a effectivement des adolescents plus jeunes
04:02 qui commettent des actes vraiment violents.
04:05 Ça, c'est un constat que l'on peut porter.
04:07 On a effectivement nos collègues juges des enfants
04:10 qui se rendent compte que la proportion d'individus plus jeunes,
04:13 c'est-à-dire qu'avant, c'était plutôt aux alentours de 16 ans,
04:15 maintenant, effectivement, c'est 14-15 ans.
04:18 Mais ça veut dire aussi que peut-être à 14-15 ans,
04:20 ils n'ont pas conscience de l'extrême gravité de leurs actes ?
04:26 Bien évidemment.
04:29 Mais tout ça, c'est une question aussi de confrontation
04:33 aux images qu'eux-mêmes peuvent voir.
04:35 On est confronté, maintenant, sur les réseaux sociaux, sur Internet,
04:40 à des images parfois violentes, sans parler même de la pornographie, etc.
04:44 Donc les jeunes sont soumis à un flot d'informations et d'images
04:48 qui sont quand même très négatives.
04:51 Avant, on en parlait, mais maintenant, on les voit.
04:53 Et je pense que si on ne met pas des mots là-dessus,
04:56 et là, bien sûr, tout est une question d'éducation,
04:59 si on ne met pas de mots là-dessus, si on ne met pas en place
05:02 tout ce qui est de l'ordre de la prévention, etc., de l'aide aux parents,
05:05 ces jeunes, ils ont, à mon sens, une difficulté d'abstraction,
05:09 qu'on avait, effectivement, peut-être avant,
05:12 parce qu'on ne se rendait pas autant compte que la violence était prégnante.
05:16 Merci beaucoup, Cécile Mamelin.
05:19 Je rappelle, vous êtes vice-présidente de l'Union syndicale des magistrats.
05:21 Et vous avez pointé, c'est assez rare pour le souligner,
05:24 quand même pointé du doigt le rôle des réseaux sociaux, aujourd'hui,
05:28 qui amènent ces jeunes à voir la violence,
05:34 et peut-être, du coup, à la banaliser,
05:36 contrairement, peut-être, à leurs aînés,
05:39 qui n'étaient pas confrontés à ces images.
05:41 C'était très intéressant.
05:43 On va pouvoir, évidemment, en débattre avec vous tous,
05:45 si vous le souhaitez, au 3210.
05:47 Le standard est ouvert. On vous attend dès 13h.
05:49 Avant ça, dans un instant, on va parler des dangers des régimes,
05:53 parce qu'ils peuvent provoquer des carences et de la dénutrition.
05:56 A tout de suite.
05:58 RTL midi.
06:00 Céline Landro.