Le procès pour dénonciation calomnieuse de Jonathann Daval, qui purge une peine de 25 ans de réclusion pour le meurtre de son épouse Alexia en 2017, à l'encontre de son ancienne belle-famille, s'ouvre ce mercredi 10 avril après-midi devant le tribunal correctionnel de Besançon. La mère de Jonathann Daval et son avocat Randall Schwerdorffer sont les invités du Live Switek.
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00:00 Jonathan Naval a menti, c'est pour ça qu'il y a ce procès aujourd'hui. Martine Henry, à nouveau merci d'être avec nous ce matin, maître également, merci d'avoir accepté cette interview.
00:10 Martine Henry, le procès c'était en 2020, on est quatre ans plus tard, on le sait vous parlez régulièrement, vous voyez régulièrement votre fils, dans quel état d'esprit est-il juste avant ce procès ?
00:23 Quand on l'a vu, il était bien, donc il a envie de venir, donc il m'a dit qu'il allait assumer, donc pour moi ça va aller très bien.
00:33 Il va assumer ce mensonge, est-ce qu'il craint de se retrouver à nouveau face à la famille d'Alexia, face à son frère, face à sa soeur, face à ses parents ?
00:46 On verra bien quand il va être sur place, pour moi ça devrait aller, il avait pas peur, donc on verra bien quand il va être sur place.
00:56 Et vous, à quelques heures de ce procès, comment est-ce que vous vous sentez ?
01:00 Je me sens bien, je n'appréhende pas, on attend, on verra ce que ce procès va nous donner.
01:11 Pour revenir sur ce que disait Mélanie Vecchio à l'instant, sur le fond de ce procès-là, sur ce mensonge, est-ce que vous comprenez aujourd'hui pourquoi est-ce qu'il a menti, pourquoi est-ce qu'il a accusé à tort son beau-frère et sa belle-famille ?
01:23 Il les a accusés à tort, en partie c'était à cause de moi, vu que je ne voulais pas admettre que ça pouvait être lui.
01:33 Donc c'est vrai que quand il m'a dit que ça se passait comme ça, j'ai dit "tu vois, j'avais raison, c'est pas toi".
01:43 Donc c'est en partie de ma faute s'il les a accusés, puisque je ne voulais pas admettre que ça pouvait être lui.
01:49 C'est pour vous protéger d'une certaine manière ?
01:51 Quelque part c'est peut-être pour me protéger que oui, que j'aille mieux.
01:59 Vous l'avez cru tout de suite à l'époque, cette autre version, ce mensonge-là, vous l'avez cru tout de suite vous ?
02:06 Ah ben moi j'y ai cru oui, je suis peut-être bête mais oui j'y ai cru. Pour moi c'était une libération.
02:15 Vous comprenez que ce mensonge-là il a causé beaucoup de tort et beaucoup de mal à Grégory, au frère d'Alexia et à toute la famille d'Alexia ?
02:25 Je comprends très bien que oui ça a créé beaucoup de mal à toute la famille. Bon ben je m'en excuse mais pour moi c'est... j'étais mieux.
02:36 Mais bon, c'était pas la bonne idée.
02:39 Vous souhaitez vous adresser à eux aujourd'hui ?
02:41 Ah non non, moi je viens pas pour m'adresser à eux. Moi je viens parce qu'il y a mon fils qui est là, présent.
02:52 Vous comprenez ce mensonge, vous nous l'avez dit, vous vous excusez pour ça d'une certaine manière, mais pour vous le procès d'aujourd'hui, il n'est pas nécessaire, il ne devrait pas y avoir de procès aujourd'hui ?
03:04 Ah j'ai jamais dit qu'il ne devrait pas y avoir de procès. Si il y a un procès, bon ben on est là, on est présent, mais moi j'ai rien à dire.
03:16 Je dis ça parce que pour vous, d'une certaine manière, comment dire les choses, l'affaire a été jugée une première fois et vous voudriez, vous aussi, avancer ?
03:28 On a avancé, oui, ça a été jugé, on a avancé. Mais bon, il va bien falloir qu'au bout d'un moment, tout ça, ça s'arrête.
03:41 Maître Schwerdorfer, est-ce que vous savez ce que va dire votre client aujourd'hui au procès, ce qu'il a l'intention de dire ?
03:46 Alors, pour être clair, M. Switek, il n'a pas de directive de ma part, ni de celle de Maître Spatafora. Comme d'habitude, il est libre de ses propos.
03:56 Tout ce qu'on lui demande, c'est de dire la vérité, d'expliquer au tribunal comment le mensonge s'est construit, de quelle façon il a élaboré ce mensonge et pourquoi il a fait ce mensonge.
04:07 Je connais Jonathan Daval depuis 7 ans et je sais très bien qu'il dira exactement la façon de laquelle ça s'est passé en toute liberté.
04:17 Ça, c'est la première chose. La deuxième chose, vous avez parlé du fait que j'ai pu, parce que c'est moi en réalité, faire état du fait que ce procès était peut-être un procès de trop.
04:30 Je vous le dis tout simplement. D'abord, Jonathan Daval s'est excusé plusieurs fois auprès de la famille d'Alexia, auprès de Grégory Gay, après la confrontation sur ce mensonge.
04:41 Il s'est excusé aussi pendant son procès sur ce mensonge, puisqu'on a longuement débattu de ce mensonge pendant son procès devant la cour d'assises de Hudson.
04:50 Et qu'effectivement, aujourd'hui, à part de nouveau s'excuser et expliquer les conditions réelles de la création de ce mensonge, il n'y a rien de plus à dire.
05:00 Mais vous comprenez que pour la famille, ce mensonge, il a été insupportable et que ce mensonge doit être jugé ?
05:06 Naturellement, monsieur Switek. Non seulement je le comprends, mais en plus je le conçois tout à fait.
05:15 Mais il faut savoir une chose, c'est que le procureur de la République de Hudson avait refusé de mettre en place ce procès.
05:20 Il avait classé sans suite l'affaire. Une juge d'instruction avait été saisie.
05:24 Elle avait refusé de renvoyer cette affaire devant un tribunal, notamment pour des questions de problèmes de droit juridiques.
05:31 Et là, on est dans ce procès à l'initiative de la famille.
05:35 La difficulté que j'ai, et ce que j'ai du mal à comprendre sur cette volonté absolue d'avoir ce procès, malgré l'avis du procureur de la République, malgré l'avis du juge d'instruction,
05:44 c'est qu'à la fin du procès, en Hudson, à la fin du procès d'Assise, la mère d'Alexia avait dit très clairement,
05:50 il est désormais temps de tourner la page de l'affaire Daval, de tourner la page de l'affaire d'Alexia et de passer à autre chose.
05:57 C'était il y a bientôt quatre ans. Et nous revoilà de nouveau devant un tribunal pour parler de nouveau de l'affaire
06:05 et pour ressortir tous les éléments de cette affaire, ce qui, à notre sens, n'était pas forcément utile.
06:14 Martine Henry, votre fils, Jonathan Daval, vous l'avez dit, il sera là aujourd'hui à ce procès, il a voulu y assister.
06:19 Sa vie en prison, aujourd'hui, elle ressemble à quoi ?
06:22 Une vie comme tous les détenus. Il travaille, il promène, il repart. La vie de prison.
06:35 Une vie quand même particulière, dans une prison particulière où il côtoie notamment un certain nombre de personnalités condamnées
06:42 comme Nordal Lelandais, comme Guy Georges. Vous confirmez par exemple qu'il a pu sympathiser avec Guy Georges ?
06:48 Il a sympathisé avec Guy Georges comme il a sympathisé avec d'autres télédétenus. Il faut bien qu'ils se côtoient, qu'ils se parlent.
07:01 Sinon, ils font quoi ? Ils parlent entre quatre murs. C'est des détenus, bon, ils ont fait certaines choses, mais ils sont humains.
07:13 Donc, il faut bien qu'ils se côtoient, qu'ils se parlent, qu'ils boivent un café ensemble. Il faut bien continuer, il faut bien vivre.
07:21 Mais de quoi ils se parlent ? À quoi ils ressemblent leur vie ensemble en prison ?
07:28 De quoi ils se parlent, c'est eux qui savent. Moi, ça ne me concerne pas. Du moment qu'ils sont bien ensemble, que tout se passe bien, c'est tout ce que je demande.
07:39 Il y a des gens qui lui écrivent à votre fils, des correspondants qui lui écrivent régulièrement ?
07:44 Il en a eu. Il en a peut-être moins maintenant, mais il en a eu, oui.
07:50 Pourquoi moins maintenant ?
07:55 Les gens se tassent un peu, moi, c'est moi qui les reçois, les courriers. On m'en envoie un, moi.
08:01 Mais quel genre de correspondance, quel genre de liaisons il peut nouer de manière épistolaire, comme ça ?
08:07 S'il y a des personnes qui lui envoient du courrier, c'est pour lui demander s'il va bien, tout ça, mais lui ne répond pas.
08:19 Moi, il m'en envoie aussi pour me demander comment je vais, comment va Jonathan, tout ça, mais moi, je leur réponds.
08:25 En fait, après le procès, on recevait au cabinet une cinquantaine de lettres par semaine pour Jonathan Daval, de lettres de soutien,
08:33 de gens qui analysaient son affaire, qui lui disaient, voilà, on ne cautionne pas ce que vous avez fait, mais votre personnalité nous a touchés,
08:42 ce que vous dites nous a touchés, qui lui envoyaient des livres, qui lui envoyaient des DVD, des disques, et on transmettait tout à Martine Henry,
08:50 et on en a eu, à une époque, plusieurs centaines. Maintenant, effectivement, le temps a passé, j'imagine que Jonathan reçoit moins de lettres,
08:59 mais nous aussi, au cabinet, on reçoit toujours régulièrement des mails, des lettres, dès qu'on parle de l'affaire de Jonathan Daval.
09:06 Des lettres pour comprendre, des lettres de soutien, est-ce qu'il y a aussi, parce que c'est régulièrement le cas pour des accusés comme lui,
09:12 comment dire, des correspondances amoureuses ?
09:15 Il y a très clairement, moi, dans certaines lettres que j'ai vues, effectivement, des jeunes femmes qui lui écrivaient, et moi jeune,
09:25 qui lui écrivaient en faisant savoir très clairement que voilà, elle pouvait être présente pour lui s'il le désirait. Oui, c'est vrai, c'est une réalité.
09:35 Ça ne regarde pas que Jonathan Daval, c'est un phénomène que j'ai déjà vu pour d'autres affaires criminelles.
09:40 Oui, bien sûr. Martine Henry, ça ne vous choque pas, ça ne vous perturbe pas, ça ?
09:44 Qu'ils reçoivent du courrier ? Pas du tout. Ils sont là pour lui remonter le moral, et puis non.
09:54 Puisque moi, je vous dis, j'en reçois aussi, et moi je réponds, non, c'est très bien, c'est gentil de leur part,
10:02 c'est une personne qui nous envoie du réconfort comme ça.
10:05 Est-ce que vous évoquez avec lui, Martine Henry, le moment où il sortira de prison ?
10:10 Pas du tout. On n'est pas dans cet esprit-là. On attend que ce soit le moment, comme ça, on ne se fait pas de fausses idées en disant
10:20 "Oh, ben, il va peut-être sortir dans deux ans, trois ans". Non, nous, on attend que ce soit le moment.
10:27 Votre vie à vous, Martine Henry. On a pu lire, le week-end dernier, dans la Tribune du Dimanche, un long reportage
10:33 sur la manière dont les deux familles cohabitent aujourd'hui, toujours dans la même ville.
10:40 Ça veut dire que vous vous croisez avec la famille d'Alexia, ça veut dire qu'il y a encore des tensions aujourd'hui.
10:48 Comment vous vivez les choses, vous ?
10:52 Écoutez, je ne les ai jamais rencontrées personnellement en ville, parce qu'on ne sort pas en même temps, sûrement.
11:01 Non, ça se passe bien. On ne les voit pas, donc de toute façon, je pense qu'ils ne nous diront pas bonjour.
11:12 C'est peut-être mon idée. À moi, bon, s'ils disent bonjour, je leur répondrai. Je peux leur dire bonjour s'ils me répondent,
11:19 je ne comprends pas. Je comprends leur malheur, donc non, tout va bien.
11:24 Maître, une question encore pour préciser ce que vous disiez tout à l'heure sur ce procès, sur l'intérêt de ce procès,
11:32 sur la volonté de la famille d'Alexia d'intenter ce procès en dénonciation calomnieuse. Est-ce que pour vous,
11:38 je vais vous poser la question clairement, est-ce que pour vous, il peut y avoir aussi une question d'argent ?
11:44 Évidemment, je l'ai dit, j'ai qualifié ça à un moment de victime business, parce que tout simplement, dans le premier procès,
11:52 la famille dans son ensemble réclamait près d'un million d'euros de dommages et intérêts.
11:57 On avait souligné à quel point c'était disproportionné par rapport à toutes les autres affaires.
12:03 Quand je pense aux autres affaires, je pense aux indemnisations de familles meurtries, comme la famille Douib,
12:09 comme la famille Varlet, qui ont vécu les mêmes choses et qui ont perçu des sommes en corrélation avec la jurisprudence habituelle des cours d'assises.
12:16 La cour avait réduit le montant à 165 000 euros de dommages et intérêts.
12:21 Et dans cette affaire-là, on demande des sommes qui sont surmultipliées par rapport aux jurisprudences habituelles.
12:27 Je crois que Grégory Gay demande 30 000 euros d'indemnisation.
12:31 Pour des affaires similaires, on est quatre à cinq fois en dessous des montants alloués.
12:37 J'ai l'impression qu'en toile de fond, il y a une volonté de récupérer sur cette affaire-là, indûment à mon sens,
12:48 il y a la juste indemnisation et après il y a ce qui n'est pas juste, de l'argent.
12:52 Mais c'est terrible à entendre parce que c'est la seule arme qui leur reste.
12:55 Je dois dire que ça me dérange. Mais ce n'est pas une arme. L'argent n'a jamais fait de mal à personne.
13:02 J'aurais compris s'ils avaient demandé un euro dommages et intérêts à titre symbolique.
13:07 La seule arme qui leur restait, c'était un procès qui consacrait le mensonge et des excuses de Jonathan Daval.
13:13 Je ne vois pas en quoi l'argent va réparer quoi que ce soit. L'argent ne rendra pas Alexia. L'argent ne réparera rien en réalité.
13:20 Donc ce qui a été alloué par la Cour d'Assise et le prix de l'indemnisation pour la mort d'Alexia,
13:25 c'est l'indemnisation du préjudice de la perte d'un être cher.
13:29 Aujourd'hui on n'est pas du tout là-dedans. C'est une question d'honneur pour Grégory Gay.
13:33 Je le comprends tout à fait. Pour moi, les questions d'honneur ne se règlent pas par des questions d'argent.
13:38 Elles se règlent par une décision, par une condamnation et par l'allocation de ce qu'on appelle l'euro symbolique.
13:44 Là je le comprends et je suis tout à fait en phase.
13:46 Venir réclamer 30 000 euros, on n'est plus pour moi sur une question d'honneur. On est sur une question d'argent.
13:52 Martin Henry, votre fils travaille aujourd'hui en prison pour rembourser cet argent ?
13:58 Oui, il travaille pour rembourser cet argent.
14:02 Vous savez combien il a remboursé aujourd'hui ?
14:04 Il fallait qu'il travaille. Ah non, je ne sais pas du tout. Non.
14:09 Parce que ça, ça se passe dans la prison. Donc non, non.
14:16 On ne nous dit rien. Et puis ça ne nous regarde pas, je ne le demande pas.
14:19 Une question encore pour vous, madame.
14:23 Après toutes ces années, après le crime commis par votre fils, après ces années passées en prison pour l'instant,
14:29 est-ce qu'il a changé ? Est-ce que vous l'avez vu changer ?
14:33 Oui, il a changé. Je le trouve plus mature. Il a repris du poids. Oui, oui, pour moi il a changé. Il est mieux.
14:47 Procès donc cet après-midi à Besançon. Merci à tous les deux. Merci Martin Henry.
14:53 Merci à Rendat Ferdinand-Ferrand d'avoir été avec nous en direct dans ce live ce matin.