• il y a 6 mois
L’avis de Jean-Michel Correia, intermittent du spectacle. Il publie le livre « En Marge » aux éditions Grasset, dans lequel il évoque son parcours. Il relate sa jeunesse, sa vie de bandit et de prisonnier.

Face à lui, Pierre-Marie Sève, directeur de l’Institut pour la Justice.

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Transcription
00:00 La réinsertion est assez encouragée.
00:02 Vrai.
00:03 Faux.
00:04 Il faut créer plus de places en prison.
00:07 Vrai.
00:08 Archi-faux.
00:09 L'islamisme prospère en prison.
00:12 Certainement vrai, oui.
00:13 Pas plus qu'ailleurs.
00:14 Il y a de meilleures alternatives à l'incarcération.
00:17 Probablement oui, pour certains cas.
00:19 Tout à fait.
00:20 On devrait réinsérer plutôt qu'enfermer.
00:23 L'un n'exclut pas l'autre.
00:24 Je suis assez d'accord.
00:25 Il est nécessaire d'instaurer des peines planchers.
00:28 Vrai.
00:29 Non, faux.
00:30 Les prisonniers ont des profils types.
00:32 A priori ou vrai.
00:33 Je dirais vrai aussi.
00:35 La prison est encore un lieu de punition.
00:37 Pas assez.
00:38 Suffisamment.
00:39 On glorifie la prison.
00:40 Ça dépend qui ?
00:41 Exactement, ça dépend qui.
00:43 Le cauchemar d'un tolard pourrait faire le bonheur d'un clochard.
00:46 Ça vient de Mysterieux, le rappeur.
00:48 Oui, certainement.
00:49 C'est même clair.
00:50 Je dirais que c'est une punchline, ça rime bien, mais je ne comprends pas trop le fence.
00:54 L'administration pénitentiaire fonctionne mal.
00:56 Vrai.
00:57 Je le crains, oui.
00:58 Je suis pour la peine de mort.
01:00 Faux.
01:02 Non.
01:03 La prison ne rend pas justice à la victime.
01:05 Actuellement, effectivement.
01:07 Je dirais que ce n'est pas forcément son rôle.
01:09 Les récidives sont nombreuses.
01:11 Vrai, trop nombreuses.
01:13 Je n'ai pas les chiffres, je ne sais pas.
01:15 La prison ne fait plus assez peur.
01:17 Vrai.
01:18 Pour moi, ça ne veut rien dire.
01:19 La justice est suffisamment sévère.
01:21 Faux.
01:22 Je pense qu'elle est très sévère.
01:25 Les prisonniers sont des citoyens comme les autres.
01:27 Vrai dans une certaine mesure, faux dans une autre mesure.
01:30 Je pense que j'avais déjà répondu à la question, je dirais que ça dépend pour qui.
01:33 La prison est devenue confortable.
01:35 Trop confortable, sans être forcément confortable.
01:38 Non, c'est faux.
01:40 Il est facile d'avoir un portable en prison.
01:42 Vrai.
01:43 Il semblerait.
01:44 J'aimerais tout de suite m'arrêter sur le premier, où on parlait de la prison comme une nécessité.
01:49 Sans questionner la prison en elle-même, telle qu'elle est faite aujourd'hui en France,
01:55 est-ce qu'elle est encore utile, la prison, dans son rôle de punition et dans son rôle de réinsertion, qui sont ces deux piliers ?
02:04 Moi, traditionnellement, en droit, on m'a appris qu'une peine avait cinq fonctions.
02:08 La première, c'est la neutralisation.
02:10 On a la dissuasion.
02:12 On a la rétribution, c'est-à-dire la réparation symbolique à la société suite à l'offense qui lui a été faite.
02:18 La réparation aux victimes.
02:20 Et cinquièmement, la réinsertion.
02:22 On n'a pas trouvé encore aujourd'hui de meilleure solution que la prison, par exemple, pour atteindre la neutralisation.
02:27 Alors, il y a la peine de mort, mais je pense qu'on va pas aller sur ce débat-là.
02:31 Mais la neutralisation est la première fonction de la prison et de la peine en général.
02:37 Et très difficile de trouver mieux, plus efficace qu'un endroit où on enferme des gens qui ont contrevenu aux règles de la société pour une durée prédéfinie.
02:46 Bien souvent, d'ailleurs, à mon avis, c'est moins que la durée prédéfinie, et c'est un problème.
02:51 Donc oui, pour moi, la prison est indispensable aujourd'hui. On n'a pas trouvé meilleure solution.
02:55 Enfermer quelqu'un, pour moi, c'est un échec de la société.
02:59 Donc je pense que c'est clair que si on s'arrête sur les crimes les plus odieux, c'est clair qu'il y a des gens qu'il faut extraire de la société.
03:10 Mais c'est vraiment une infime partie des gens qui se trouvent actuellement en prison.
03:14 Alors que la prison, pour l'instant, elle est destinée, pour moi, à beaucoup de gens qui ne devraient pas y être ou qui auraient dû avoir la chance de ne pas s'y retrouver.
03:24 C'est pour ça que je trouve que, on va dire que c'est une nécessité, sans doute, dans notre monde tel qu'il est actuellement.
03:31 Mais que, voilà, pour moi, c'est un échec pour une société.
03:35 Plus il y a de gens en prison, pour moi, ça prouve que cette société va mal et que les problèmes, il faut les prendre à la racine.
03:43 L'enfermement, l'incarcération n'est que le dernier acte. Il faudrait trouver les moyens de s'en passer.
03:50 Moi, je suis d'accord dans les grandes lignes avec ce que vous dites.
03:52 En revanche, je ne pense pas que ce soit... En tout cas, je m'oppose à cette lecture qui est de dire que quand il y a une des personnes en prison, c'est la faute de la société.
04:02 Je ne pense pas que ce soit un échec de la société. C'est aussi l'échec. C'est en partie certainement l'échec d'une partie de la société.
04:07 Certainement que la société peut faire plus. Mais c'est aussi le résultat de décisions individuelles de ces personnes-là.
04:14 Et je pense que les autres, que l'ensemble des citoyens n'ont pas à pâtir de ces mauvaises décisions.
04:21 Ils n'ont pas à se sentir responsables de ces mauvaises décisions individuelles.
04:24 Et a fortiori, les victimes qui, elles, n'ont rien demandé, se sont faites voler, attaquer, agresser, violer, que sais-je, tuer dans le cadre de leur famille
04:35 et qui n'ont pas apporté le moindre gramme de culpabilité due à une quelconque culpabilité collective de la société du fait de ces mauvaises choses.
04:48 Non, non. Mais ce que je veux dire, c'est que la société, pour moi, si elle donnait les mêmes chances à tout le monde,
04:53 déjà, elle diminuerait de beaucoup tous les facteurs qui conduisent à la délinquance.
04:59 Donc je pense que c'est dans ce sens-là que je tiens ces propos-là.
05:03 Donc après, le rapport avec les victimes, après, là, je pense que pour moi, c'est autre chose.
05:10 Effectivement, quelqu'un a subi un préjudice. Il est normal qu'il y ait réparation.
05:17 Mais après, justement, toute la question la plus pertinente, c'est de trouver quelle est la meilleure réparation possible pour la victime,
05:25 pour la société, et effectivement pour la personne incriminée, dans le sens où elle va être amenée un jour à réintégrer le giron de la société.
05:34 Donc je pense que voilà, c'est tout ça qu'il faut bien prendre en compte quand on parle de la prison et de tout ce qui va avec.
05:41 Mais il faut bien l'hierarchiser pour moi. Pour moi, vraiment, la victime doit être... Je suis d'accord avec ces trois points,
05:47 mais il faut bien l'hierarchiser, c'est-à-dire que, en tout cas pour moi, la victime doit toujours être prioritaire sur la réinsertion éventuelle du criminel ou du délinquant.
05:54 Enfin, pour moi, ce n'est pas antinomique. Je suis d'accord.
05:56 C'est-à-dire qu'il y a une décision judiciaire qui est prise, qui doit normalement satisfaire la partie civile, qui doit satisfaire la victime.
06:04 Après, maintenant, les conditions de détention, par exemple, je ne pense pas qu'une victime...
06:09 Enfin, là, on peut rentrer dans des considérations philosophiques. Je ne pense pas qu'une victime va se sentir mieux...
06:19 Comment dire ? Mieux avoir eu une décision de justice favorable ou du moins qui...
06:28 — Oui, moins lésée. — Oui, va se sentir moins lésée ou va avoir son préjudice amoindri parce que les conditions de détention sont difficiles.
06:38 — Je suis d'accord. Je suis d'accord. — Donc c'est là qu'il faut faire la part des choses.
06:40 — Je suis d'accord. Mais on n'est pas dans ce cas-là actuellement. Pour moi, on est même plutôt à l'inverse.
06:44 — Si on voit le scandale que vous avez forcément vu il y a 2 ans du karting à Fresnes, c'est quand même absolument récurrent, ce genre de choses.
06:51 — C'est là le problème. On s'attache à prendre vraiment des micro-phénomènes pour en faire des généralités.
06:57 — Franchement, des histoires de... — C'est pas ça, la prison ? C'est pas le karting à Fresnes ?
07:01 — C'est pas du tout ça. Là, il faut... — Ça le serait pas, en tout cas.
07:04 — Non, non. Mais je veux dire les conditions de détention en prison, elles sont difficiles. Il y a la surpopulation.
07:10 Vous retrouvez à 2, 3 êtres humains dans 9, 10, 12 m². Est-ce que c'est des conditions qui sont humainement dignes ? Non.
07:19 Donc je veux dire il faut arrêter de dire que les gens en prison, ils sont club-maître. C'est pas vrai.
07:24 Les gens, c'est dur. Il y a la promiscuité. Il y a le fait de se sentir enfermé. Je sais pas. Parce que vous avez jamais été en prison.
07:32 — Bien sûr. — Vous avez peut-être même jamais fait une garde à vue. Vous avez même jamais eu les menottes au poignet.
07:36 Déjà, ça commence là. Se sentir privé de ses mouvements, c'est déjà une sensation horrible.
07:41 — Oui, mais c'est logique. — Se retrouver dans une cage où vous ne pourrez sortir qu'au bon vouloir d'un surveillant...
07:48 L'être humain n'est pas fait pour ça. Donc après, quels que soient les petits aménagements...
07:55 Oui, la douche dans la cellule, l'eau chaude, le frigo. Mais les gens qui passent des années dans ces conditions-là,
08:01 pour moi, c'est pas des conditions dignes d'un pays comme la France par exemple.
08:07 Je sais pas. Mais en tout cas, ça me semble en tout cas justifié que la prison reste une expérience désagréable,
08:13 — ne serait-ce que pour le but de dissuasion. — Mais le fait d'être privé de liberté, c'est déjà désagréable.
08:16 — Mais ce ne sont pas des enfants de terre. — Oui, je suis d'accord. — Mais c'est pas suffisant pour vous.

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