Passé professionnel en 2013 au sein de l'équipe Sojasun, Alexis Vuillermoz a ensuite évolué pendant sept saisons chez AG2R La Mondiale, avant de s'engager en 2021 avec la TotalEnergies, équipe pour laquelle il court depuis quatre ans et avec qui l'aventure va s'arrêter en fin d'année, puisque le Jurassien va prendre sa retraite. Comptant neuf victoires à son palmarès, Vuillermoz a signé son plus grand exploit le 11 juillet 2015 en remportant, à Mûr-de-Bretagne et en puncheur, la 8e étape du Tour de France. Double vainqueur du Grand Prix de Plumelec-Morbihan (2015 et 2017), et également lauréat du Tour du Limousin (2017) et de la Royal Bernard Drôme Classic (2019), le natif de Saint-Claude a décroché sa dernière victoire il y a maintenant près de deux ans, à l'occasion de la 2e étape du Critérium du Dauphiné. Marquée par de très beaux succès et de belles places d'honneur - 4e du Tour de Lombardie 2017, 6e de la Flèche Wallonne 2015, 11e du Tour d'Italie 2014, 13e du Tour de France 2017... - le parcours d'Alexis Vuillermoz a malheureusement été freinée par de nombreuses grosses chutes. Une carrière remplie de rebondissements, sur laquelle le principal concerné est revenu au micro de Cyclism'Actu.
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00:00 Bonjour Alexis, vous étiez au départ de la Flèche Wallonne ce mercredi, une course
00:09 qui a été rendue très difficile par les conditions météo notamment.
00:12 On aimerait premièrement savoir comment ça va ?
00:16 Bonjour à tous, ça va mieux que hier, on s'est réchauffé mais effectivement on a
00:22 eu une édition épique de la Flèche Wallonne avec l'arrivée de la grêle, de la neige
00:27 et du froid. Après on s'attendait à une course très dure, on avait vu les radars
00:32 météo, on savait qu'il allait pleuvoir, on pensait qu'il allait faire la pluie et
00:36 être entre 3 et 4 degrés, ce qui rendrait de toute manière la course très éprouvante
00:41 avec l'humidité mais de là à avoir la neige arriver, ça a été encore un peu au-delà
00:45 des prévisions mais bon en soi déjà quand l'eau est à 2 ou 3 degrés c'est déjà
00:50 très compliqué.
00:51 Effectivement j'ai retrouvé une bonne dynamique, sportivement, psychologiquement aussi ça m'a
00:54 fait du bien de retrouver des bonnes sensations depuis le tour du Pays Basque. Je ne suis
00:59 peut-être pas encore au niveau de ma forme non plus, il ne faut pas félurer mais la
01:03 dynamique est bonne, l'envie est là donc voilà on aborde cette Flèche Wallonne avec
01:07 beaucoup d'ambition aujourd'hui.
01:09 Comment on fait justement pour récupérer d'une telle course qui a été difficile,
01:15 on a vu énormément d'abandons, tout le monde qui était cuit à l'arrivée, quel
01:21 est le secret de la récupération ?
01:22 Je ne sais pas si je connais le secret de la récupération d'une telle course mais
01:27 pour ma part c'est vrai qu'on se réchauffe comme on peut dans la douche d'eau chaude
01:32 d'abord en se couvrant bien et aujourd'hui on a été roulé parce que demain de nouveau
01:38 ils ont un temps un peu pas terrible donc on ne voulait pas rouler de nouveau, on a
01:44 fait des reconnaissances aujourd'hui de Liège-Bastogne-Liège.
01:47 Bon justement Liège-Bastogne-Liège ça arrive déjà dimanche, 4 jours après la
01:53 Flèche Wallonne qui a été déjà très difficile pour tous les coureurs, qu'est-ce
01:58 qu'on peut attendre de ce qui va être votre dernière participation à Liège ?
02:02 Alors par contre on ne va pas se mentir, on a déjà des conditions météo particulièrement
02:08 compliquées notamment à Bastogne, neige est prévue de samedi à dimanche, pour l'instant
02:16 la pluie est aussi annoncée avec quelques degrés seulement, on ne va jamais dépasser
02:22 les 5 ou 6 degrés avec l'eau, l'humidité, ça risque d'être une édition encore particulièrement
02:27 compliquée donc déjà survivre sur ce type d'épreuve ça va être un peu une course
02:33 d'élimination et le but ce n'est pas de se faire éliminer dès le plus loin possible.
02:36 Justement Liège c'est une course, quand on regarde votre profil qui vous correspond
02:42 plutôt bien, mais je crois que votre meilleur résultat c'est une 21ème place si je ne
02:48 me trompe pas, qu'est-ce qui explique justement que vous n'avez pas réussi à aller chercher
02:52 ce petit step au-dessus ? Je ne sais pas si cette course nous convient
02:57 particulièrement bien, il n'y a de rien, c'est une course d'élimination mais ça
03:00 frotte énormément, le déplacement est une grosse bataille pour être bien placé et
03:04 dès qu'on est mal placé à l'entrène d'un mont on perd énormément d'énergie
03:10 et sur 250 km frotter pendant 6-7 heures ce n'est jamais évident, d'autant plus que
03:17 c'est quand même montagneux, c'est lusant, il y a eu des éditions où j'ai participé,
03:21 il y a eu la pluie, la neige, le vent aussi qui rentre souvent en jeu, c'est quand même
03:27 Liège, avec le beau temps, pas de vent, ce n'est déjà pas facile mais dès qu'il
03:31 y a les conditions météo qui s'en mêlent c'est encore moins compliqué, encore plus
03:34 compliqué et j'estime n'avoir jamais été un très bon coureur dans des conditions
03:39 météo mauvaises, mon organisme fonctionne mieux dès que les températures sont pas
03:45 plus élevées, autant je ne souffre pas de la chaleur autant je souffre vite du froid.
03:49 Forcément un très bon bilan pour ma part avec 4 victoires cette année et une sur le
03:56 Tour de France.
03:57 C'est énorme vraiment, j'en avais les larmes aux yeux, le maillot jaune c'est fabuleux,
04:05 après deux années vraiment de galère, des chutes qui ont été vraiment dures, vraiment
04:08 des moments de doute, je ne savais pas si j'allais continuer ma carrière.
04:10 Je sens que depuis le début du Tour j'ai une bonne forme, depuis le fini j'ai l'impression
04:15 que ma forme est ascendante, grâce à le premier souterrain, ce n'est pas une déclaration
04:21 qu'il faut le dire.
04:23 On va évidemment aussi revenir sur l'annonce que vous avez faite il y a quelques jours
04:27 de cela, de la fin de votre carrière à l'issue de la saison 2024.
04:31 Premièrement, qu'est-ce qui vous a emmené à cette décision ?
04:35 C'est une décision qui était déjà mûrie depuis pas mal de mois, déjà un an passé,
04:40 c'était acté de mon côté.
04:42 Après, pour ma part, je tenais à partager cette information avant le Tour du Jura, le
04:47 Jura Sienz, la dernière course dans mon pays, dans ma région d'origine.
04:53 C'était important pour moi que la course et que la saison passe et finalement qu'on
05:00 soit presque à côté de The Sadd, c'était mon star, en me disant que tout est passé,
05:04 c'est fini.
05:05 Je voulais vraiment partager ça et s'avouer d'autant plus, au bout d'un moment, de
05:10 coureurs professionnels dans mon département, parce que les origines, c'est ce qui nous
05:18 permet de créer en tant que coureurs.
05:23 C'est les personnes aussi, les renseignements qui nous accompagnent depuis tout jeune, c'est
05:27 énormément de contact humain.
05:30 Tout ça n'aurait pas été possible sans eux, donc forcément, ça me tenait à coeur
05:34 de partager ce moment-là.
05:35 Qu'est-ce que vous retenez de ces 12 années chez les professionnels ? On rappelle que
05:41 vous avez commencé chez Sojasun, puis à G2R La Mondiale et maintenant depuis 4 années
05:45 chez Total Energy.
05:47 En général, qu'est-ce qu'on retient de ces années-là ?
05:51 Déjà, je dirais que pour moi, ma carrière a commencé en tant que vététiste.
05:57 J'étais 4 ans professionnel chez Lapierre International à l'époque.
06:01 Une vraie famille aussi, de vrais bons moments, de vrais bons souvenirs.
06:05 La route a toujours été quelque chose qui m'a plu, qui m'a intéressé.
06:10 Plus jeune, on avait du staff, une équipe de France ITT qui nous contait les histoires
06:16 de Thomas Vauclair au sein de Europecar.
06:19 C'était toujours quelque chose qui m'a toujours attiré, qui m'a toujours fait rêver.
06:23 J'étais avec mon papa plus jeune sur Tour de France, à l'Alpe d'Huez pour avoir
06:29 la Vierankmania à l'époque.
06:31 Déjà, pouvoir participer à tout ça quand je suis allé sur route, j'avais envie de
06:36 découvrir le Tour de France.
06:38 Dès ma première année, j'ai eu cette chance-là.
06:40 Plus tard, je n'ai même plus remporté une étape.
06:44 Ça a été finalement peut-être au-delà de mes espérances quand je suis allé sur
06:50 route.
06:51 Quoi qu'il en soit, c'est sûr qu'il y a eu des hauts, il y a eu beaucoup de bas
06:55 aussi.
06:56 En France, c'est sûr, c'est beaucoup de moments compliqués, de galères pour très
06:59 peu de moments de réussite.
07:01 Le public ne voit généralement que le bon côté des choses.
07:04 Mais pour nous, c'est souvent plus de galères que de bonheur.
07:08 Mais ces moments de bonheur valent amplement tous ces moments de galères.
07:12 Et dans ces cas-là, c'est important d'être bien entouré.
07:16 J'ai eu la chance d'avoir une femme qui a toujours été là pour me ramasser des
07:19 pieds après chaque chute, après chaque maladie.
07:22 Mon entraîneur Yvan, qui a toujours été là auprès de moi.
07:26 J'ai aussi Jean-Baptiste Licté qui m'a permis de passer sur route.
07:30 Sinon, sans lui, je pense que la transition entre VTT et la route n'aurait pas pu se
07:34 faire chez Sojasen.
07:35 On ne peut en citer que trois.
07:38 Ce n'est pas un remerciement, comme je l'ai dit, parce que la saison est encore longue.
07:41 Mais c'est toujours bon de rappeler et de mettre en avant toutes ces personnes de l'ombre
07:48 qui ont eu énormément pour le cyclisme et pour moi.
07:52 C'est important pour moi d'y remercier également.
07:54 Évidemment, on a effleuré le sujet, mais quand on prononce vos noms auprès du grand
08:00 public, c'est forcément cette victoire au sommet du mur de Bretagne sur le Tour de France
08:05 2015 qui ressort.
08:06 Est-ce que c'est votre plus beau succès en carrière ?
08:11 Oui, forcément, sans aucune mesure.
08:15 Le Tour de France est au-dessus de pas mal de choses dans le vélo.
08:20 C'est très important.
08:21 Après, pour moi, ma victoire au Dauphiné en 2022, après une longue période de guisettes
08:32 et de doutes, a signé un peu mon retour au niveau.
08:36 J'avais fait un remix en début de saison, toujours dans les places de mers, mais jamais
08:40 gagnant.
08:41 Retrouver la victoire sur une course de World Tour, ça a été un bon moment, d'autant
08:45 plus que j'ai eu la chance de porter le maillot jaune sur le Dauphiné.
08:47 C'est sûr que ce n'est pas le maillot jaune du Tour de France, mais malgré tout,
08:50 ça reste un étape de le porter.
08:53 Après, il y a énormément de belles histoires, que ce soit sur les grands tours, à titre
08:59 collectif, que ce soit avec G2R, à titre personnel aussi.
09:04 C'est vrai qu'on vit une aventure humaine, mais sportivement parlant, même si ça ne
09:09 va pas forcément pour le public, être parmi les meilleurs auprès de son leader dans
09:14 le monétaire et en montagne, pour moi, qui est rêvé devant les grimpeurs quand j'étais
09:20 petit à la télé, c'était toujours quelque chose qui m'a fait rêver de pouvoir être
09:26 là.
09:27 Même si au final, le but, peut-être que je me retrouve à dire qu'effectivement, il
09:30 était équipé, il a fait très bien, en général, c'est anecdotique, c'est sûr.
09:33 Mais pour moi, ça prouvait que j'étais capable, j'ai été capable d'être au top
09:37 niveau en montagne avec les grimpeurs pour accompagner à l'époque Romain Bardet, qui
09:41 a été un grand leader durant ma carrière et qui a été un exemple en termes de professionnalisme,
09:48 si je dois dire.
09:49 Il a toujours été en avance sur pas mal de choses, il a toujours été proactif dans
09:55 sa carrière.
09:56 Forcément, ça a été une belle rencontre aussi, dans le sens où il y a eu des grands
10:02 talents autour de moi, Jean-Christophe Perrault également, que ce soit en VTT, je l'ai
10:06 reconnu en VTT, il a été le deuxième autour de France.
10:09 C'est pour citer que les deux, peut-être, les deux plus grands leaders mnématiques
10:13 du moins que j'ai pu côtoyer.
10:15 Est-ce que justement, on fait un petit retour sur la carrière, après 12 années sur route,
10:24 parce que bien sûr, il y a eu le VTT avant, est-ce que vous partez avec plus quelques
10:30 regrets ou il y a quand même ce sentiment de devoir accompli ?
10:35 Non, non, j'ai eu vraiment au contraire plus d'opportunités que ce que je n'aurais
10:41 espéré encore une fois.
10:42 Même les Jeux Olympiques, par exemple, d'avoir participé aux Jeux Olympiques en 2016, quand
10:47 j'étais VTT, mon objectif c'était de participer aux Jeux Olympiques.
10:51 J'ai été deux fois remplaçant, deux Olympiades, du coup, j'étais toujours dans le coup,
10:58 mais jamais suffisamment pour pouvoir être sélectionné.
11:00 En passant sur route, mon deuxième rêve c'était le Tour de France.
11:04 Jamais j'aurais imaginé pouvoir participer au Tour de France et aux Jeux Olympiques.
11:08 C'était des rencontres humaines aussi, des moments indéniables, et dont je serais
11:12 "fier" de rencontrer ça à mon fils plus tard.
11:17 Peut-être que je me souverais avec ça, mais je me dis que ce serait des bons moments
11:21 à partager, une petite anecdote, et c'est sûrement sympa.
11:25 Pour revenir un peu plus sur ce qui est récent et ce qui est le dernier chapitre de votre
11:31 carrière chez Total Energy, quatre années au sein de l'équipe de Jean-René Bernodeau.
11:38 Ce passage, expliquez-nous un peu comment vous êtes arrivé dans cette équipe et vos
11:44 quatre années au sein de la Total Energy.
11:47 C'est vrai que j'ai fait un an chez Souljahsun, et ensuite sept ans chez H2R La Mondiale,
11:52 où j'ai passé de très belles années, de très belles rencontres.
11:56 Et sportifment parlant, je pense que j'étais un peu entré dans une routine, et j'arrivais
12:01 un peu dans une impasse.
12:02 Je pense que ça a été un moment important pour moi de changer d'air pour pouvoir relancer
12:07 un peu ma carrière.
12:08 L'équipe à l'époque, c'était Europe Car, qui est devenue Total Energy actuellement.
12:14 C'est toujours une équipe qui m'a donné envie du moins de l'extérieur.
12:19 C'est vrai que déjà, parce que quand j'étais jeune, les amis Pierre Rolland, Thomas Vauclair,
12:23 il y a toujours eu aussi un peu ce côté familial avec Jean-René, qui incarnait un
12:29 peu cette équipe-là.
12:30 Et ça a toujours été une équipe qui était portée sur l'offensif.
12:34 Et peut-être que chez H2R, j'étais aussi rentré dans un rôle d'équipier, d'être
12:39 le dernier équipier.
12:40 Souvent, on me demandait de rester tout le temps en contact, d'être attentiste aussi,
12:45 pour pouvoir protéger au placement général.
12:46 Pour moi, le vélo, c'est un peu comme un jeu de cartes.
12:52 Quand on joue tout le temps sur la défensive, ça peut vite être ennuyeux à la longue.
12:57 Et à un moment donné, on a envie de prendre un peu plus de risques, de se porter un peu
13:00 plus souvent.
13:01 Et je savais que j'allais avoir ce soutien-là, du moins chez Total Energy, pour pouvoir prendre
13:06 plus de risques dans le money time.
13:08 Que ce soit même si c'est trop tôt, on va dire, attaquer trop tôt.
13:12 Ou peut-être qu'on me dit que c'est un coup d'épée dans l'eau, que ce n'est pas très
13:14 utile.
13:15 Moi, je pense qu'il n'y a pas de coup d'épée dans l'eau.
13:16 C'est à chaque fois, au contraire, des cartes qu'on avance pour le prochain match,
13:21 entre guillemets.
13:22 On s'arme de mieux en mieux à chaque offensive peut-être ratée.
13:27 C'est ce qui va peut-être permettre de concrétiser à l'avenir un résultat ou une victoire.
13:32 On voit un peu la situation, notamment de l'équipe de Total Energy cette année, qui
13:39 n'a pas été invitée sur bon nombre de courses World Tour, puisqu'on le rappelle, elle fait
13:44 partie de la deuxième division.
13:46 Est-ce que ça fait un peu peur pour la suite ou vous êtes quand même plutôt serein en
13:51 ce qui concerne l'équipe ? Non, après, j'ai envie de dire que nous,
13:56 en tant que coureurs, on est quand même concentrés sur chaque course.
14:00 C'est vrai que nous, les premiers, on sait que de toute manière, rien ne nous est dû.
14:06 On doit aller chercher aussi ces invitations.
14:09 On doit aller chercher les résultats justement pour pouvoir briller et pouvoir participer
14:14 aux belles courses World Tour.
14:16 C'est toujours malgré tout important, un honneur de participer.
14:20 On doit rendre à l'organisateur l'invitation qu'il nous a faite.
14:28 On a toujours à cœur de bien faire.
14:30 Après, c'est sûr que malheureusement, une saison cycliste, il y a des hauts et des bas.
14:34 Il y a des dynamiques qui sont des fois bonnes, des fois moins bonnes.
14:37 On le voit d'ailleurs dans toutes les équipes.
14:38 Il y a des équipes qui font de très grosses saisons et qui ont du mal à remettre en route.
14:42 Et ça, malheureusement, ce sont des dynamiques qui sont des fois un peu abstraites et difficiles
14:47 à décrypter.
14:48 Même les entraîneurs, avec toutes les datas et toutes les sciences qu'ils peuvent avoir,
14:52 ce n'est pas toujours évident.
14:54 C'est ce qui fait la beauté du sport.
14:55 C'est le côté aussi un peu aléatoire.
14:57 Même si on a beau travailler âprement, qu'on a beau faire tout ce qu'il faut en termes
15:04 de nutrition, d'hygiène de vie, et même si on reproduit plus ou moins les schémas
15:08 passés, on n'a pas la certitude d'avoir les mêmes résultats malheureusement.
15:11 C'est toujours une remise en question perpétuelle.
15:14 L'équipe est dans le même cheminement, dans le même bateau.
15:18 On sait que des fois, il faut faire le dos rond et les résultats ne sont peut-être pas
15:23 forcément à la hauteur de ce qu'on espérait par rapport à ce qu'on donne.
15:27 Mais tôt ou tard, on ne sait pas où va tourner.
15:30 Je voulais aussi revenir sur un sujet avec vous qui est un peu un sujet chaud et polémique
15:38 du moment.
15:39 Il y a quelques minutes de ça, on a encore eu une grosse chute sur le Tour des Alpes.
15:43 Vous avez pas mal chuté au cours de votre carrière, notamment on se rappelle de la
15:48 chute sur le Tour de Suisse en 2021, qui vous avait pas mal handicapé.
15:52 Pour vous, qu'est-ce qui explique ce nombre de chutes qui augmente ? Et quelles seraient
16:00 peut-être les solutions à envisager pour le futur ?
16:02 J'ai envie de différencier.
16:05 Il y a deux types de courses.
16:08 On a quand même des courses World Tour où il y a des gros chutes, mais il n'y a pas
16:13 de nervosité en poteau.
16:14 C'est plutôt serein et on se sent plutôt en sécurité.
16:20 Et dernièrement, pour avoir couru en Coupe de France, quitte à ouvrir la polémique,
16:26 je trouve que c'était clairement dangereux.
16:28 On voit des coureurs qui font des mouvements de course assez dangereux, assez loin de
16:33 l'arrivée, alors qu'il n'y a aucun stress, aucun besoin.
16:35 J'ai l'impression que la nouvelle génération a grandi avec YouTube, avec les images de
16:42 Cavendish qui met des coups de casque et des coups de coude, et qui pensent que dès qu'ils
16:45 arrivent dans le peloton, c'est des coups de coude et des coups de casque du kilomètre
16:49 zéro jusqu'à l'arrivée.
16:50 Alors que non, on est un peloton, on est aussi tous des humains, on est tous garants de
16:57 l'intégrité physique de chacun.
16:59 On doit faire la course, c'est sûr, mais d'une manière intelligente.
17:03 À un moment donné, on doit aussi se départager, mais c'est le meilleur physiquement qui doit
17:08 gagner, ça ne doit pas être une arène de gladiateurs de A à Z.
17:13 Après, forcément, la technologie a évolué, peut-être, les freinages, mais à l'époque
17:20 quand on avait des roues carbone avec des patins, les freins, dès qu'il pleuvait, ils
17:24 ne freinaient pas.
17:25 On avait toujours une ou deux secondes où on ne savait pas si le vélo allait s'arrêter,
17:28 c'était aussi dangereux.
17:29 Donc, oui, il y a ça, mais pour moi, le principal vecteur, malgré tout, c'est la retransmission
17:37 télé.
17:38 Il y a de plus en plus de courses qui sont transmises de A à Z.
17:41 Toutes les courses du programme sont retransmises.
17:43 Les directeurs sportifs ont tous accès à la vidéo en temps de direct et on a tous
17:48 les mêmes conseils dans l'oreillette de se placer tout le temps, en permanence, au cas
17:52 où, à un moment donné, en première ligne ou dans les 20 premiers, il n'y a que 20
17:56 coureurs, il n'y a pas 180 coureurs.
17:58 Donc, il y a un moment donné où il y a un blocage et puis il y a des coureurs parfois
18:03 qui sont un peu moins bien physiquement, ce qui peut arriver, ou qui ont un bagage technique
18:10 un peu moins bon.
18:11 Et puis, quand on les harcèle toute la journée, remontent au placé, remontent au placé,
18:15 qu'est-ce qu'on fait ? Dès qu'on n'a pas la jambe pour se placer en force, on passe
18:21 en prenant des risques.
18:22 C'est comme ça aussi que ça passe une fois, peut-être deux fois, mais une fois, c'est
18:26 une fois qu'il y a des gros chutes aussi.
18:28 Donc, oui, c'est vrai que ça interroge de plus en plus aussi par rapport à tout ce
18:33 qui est data aussi qu'on peut avoir en embarqué, les plus GPS, on ne sait pas où sont passées
18:37 les coureurs dans le peloton à chaque fois, en permanence.
18:42 Les coureurs sont des fois peut-être, manquent peut-être de l'autonomie à ce niveau-là,
18:46 parce qu'un coureur doit de lui-même savoir quelles sont les zones à risque en termes
18:51 de vent, là où il y a des bordures, là où il y a des risques de matricissements,
18:54 de cassures, de relances.
18:56 Ça se perd un peu, c'est vrai que ça se perd un peu.
19:01 Je ne suis pas pour le retrait de l'oreillette, par exemple, parce que l'oreillette, souvent,
19:05 elle nous sauve bien la mise dès qu'on a des fois des voitures qui rentrent sur le
19:08 circuit ou des plaques d'essence qui peuvent arriver ou des manifestations.
19:14 Mais est-ce que comme dans la Formule 1, on voit où ils ont un canal unique avec toutes
19:19 les informations qui sont données pour toutes les équipes au même moment ? Ce ne serait
19:23 pas une solution.
19:24 Je pense que ce ne serait pas une solution intéressante.
19:25 Ça permettrait justement que, malgré tout, au moins le capitaine de route peut-être
19:30 de l'équipe, peut-être pas tout le monde va avoir marqué l'oreillette à ce moment-là,
19:33 mais que chaque équipe puisse avoir accès, à chaque coureur, à ce type d'informations.
19:38 Il y a aussi besoin d'oreillettes, par exemple, pour aller chercher des bidons, parce que
19:41 sinon, la voiture, dès qu'il y a une crevaison, comment prévenir la bonne voiture qu'il y
19:45 a une crevaison ? Les voitures passeraient tout droit et on resterait vers un pampa.
19:48 Ça serait compliqué de se retrouver hors-cours à cause d'une crevaison, ce qui ne serait
19:52 pas sportivement équitable.
19:53 Le but d'avoir une belle course sportive en vélo, ce n'est pas de voir des éliminations
19:59 sur chute, sur crevaison ou sur problème mécanique.
20:01 Je pense que le public, attendant autre chose que ça, attend justement de voir du sport
20:05 à la pédale et de voir les coureurs s'affronter à la pédale.
20:08 Pour ça, je pense que l'oreillette, malgré tout, est importante.
20:12 C'est intéressant ce que vous dites parce que ces derniers temps, on a eu des grosses
20:17 chutes, les chutes qui ont marqué le public sur les courses World Tour, Pays Basque, à
20:23 travers la Flandre.
20:24 Et là, vous me dites quand même que c'est sur les Coupes de France où pour vous, il
20:28 y a le plus de danger.
20:29 C'est un peu paradoxal.
20:30 Clairement, après les trois dernières Coupes de France, les trois ont été neutralisées
20:34 parce qu'il n'y avait plus de défense.
20:35 C'est vrai.
20:36 Et à un moment donné, il y avait des chutes, les Jappes étaient déjà partis, on était
20:41 à 180 de l'arrivée.
20:42 Il y a encore eu des chutes monumentales dans des mouvements pour moi qui ne sont pas clés
20:46 où il n'y a pas lieu de se mettre en danger, il n'y a pas lieu de mettre en danger les
20:49 autres coureurs.
20:50 Donc, il y a aussi des gros mouvements dans le peloton qui sont déraisonnables.
20:57 Et moi, clairement, j'ai eu peur dernièrement de couler en tête.
21:01 Oui, ok.
21:02 Bon, ça marche.
21:03 On a fait un peu le point sur ce sujet-là.
21:05 Un petit mot quand même sur l'après carrière qui arrive assez vite maintenant pour vous.
21:12 Est-ce que vous avez déjà une idée de ce que vous voulez faire ou pas encore ? Éclairez-moi
21:19 là-dessus.
21:20 Alors, je voudrais déjà passer un diplôme d'État pour pouvoir encadrer des personnes,
21:25 que ce soit localement, à travers éventuellement de séjour, de découverte.
21:31 Mais vraiment, ce soir-ci, dans un cadre d'échange, de partage, pour vous raconter justement ces
21:35 petites anecdotes, les backstage un peu que j'ai pu causer durant le Tour de France,
21:39 les Jeux Olympiques, et puis pouvoir rouler, faire découvrir les lieux touristiques un
21:42 peu de ma région.
21:43 J'aimerais peut-être également aussi éventuellement, si des équipes ont besoin justement d'encadrer
21:51 des invités, que ce soit en vélo ou autre, c'est quelque chose qui m'intéresserait
21:55 également parce que je suis dans l'échange toujours encore une fois.
21:58 Et en tant que coureur, parfois, tout va très vite.
22:00 On n'a pas vraiment le temps de prendre le temps.
22:02 Après, bien sûr, je reste aussi ouvert et alerte aux opportunités qui pourraient se
22:10 présenter à moi.
22:11 C'est vrai que pour l'instant, je suis fermé à pas grand-chose.
22:13 La seule chose, c'est que je ne veux pas partir 300 jours par an en tant que coureur
22:19 parce que si justement j'arrête ma carrière, c'est aussi pour en profiter de mon petit
22:22 bout.
22:23 Mais voilà, si c'est ponctuellement, sur des actions ponctuelles, c'est vrai que c'est
22:30 des choses qui pourraient m'intéresser.
22:33 Pour finir cette interview, un petit mot sur cette fin de saison qui arrive.
22:42 Il vous reste six mois dans le peloton professionnel.
22:46 Qu'est-ce que vous attendez de ces six derniers mois ?
22:48 Fin de saison au mois d'avril ? Non, c'est la dernière saison.
22:53 Il reste six mois.
22:54 D'accord, ça marche.
22:55 Non, mais après, c'est vrai que pour le moment, je suis plutôt en coureur maintenant.
23:03 Les années passent malheureusement.
23:05 Peut-être que les stigmates de mes chutes passées et de mes problèmes de santé font
23:09 que j'ai de plus en plus de mal à évoluer dans le froid, l'humidité.
23:14 Et quand on a retrouvé la chaleur, par exemple, au Pays basque ou le week-end dernier autour
23:19 du Jura, tout de suite, j'ai retrouvé des meilleures sensations.
23:22 Donc, les beaux temps, les beaux jours arrivent et je n'ai pas envie de cibler une course
23:28 ou une autre.
23:30 Je veux vraiment prendre chaque course comme une opportunité.
23:34 Je veux vraiment, encore une fois, pouvoir me faire plaisir sur le vélo en courant à
23:37 l'avant.
23:38 Et en courant à l'avant, en essayant de disputer justement les premières places, les premiers
23:42 rôles, je me suis toujours épanoui comme ça.
23:45 Et c'est hors de question pour moi de dérouler et de finir tranquillement ma nana.
23:50 Ça serait trop long.
23:52 Pour moi, le plaisir que j'ai d'aller m'entraîner, j'adore faire du vélo, mais malgré tout,
23:57 c'est la compétition.
23:58 Et en compétition, on ne va pas se mentir, c'est plaisant quand on peut mettre sa cacahuète,
24:04 quand on peut être acteur.
24:07 Sinon, ce n'est pas intéressant.
24:09 Et je sais que ces moments vont être couverts, rares maintenant.
24:13 Donc, il va falloir en profiter jusqu'à la fin de l'année.
24:18 Très bien.
24:19 Merci d'avoir accordé cette interview à Assyclisme Actu.
24:23 On vous souhaite bonne chance pour la suite, que ce soit la fin de la saison ou ce qui
24:31 arrive après.
24:32 Merci beaucoup et bonne chance.
24:34 Merci beaucoup.
24:36 [Musique]