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Economie européenne : le grand décrochage ?

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00:00 Les Informés de l'Europe, rendez-vous de décryptage de l'actualité européenne tous les dimanches à 7h06 sur France Info.
00:10 Avec vous, François Bodonnet. Bonjour. Bonjour Gilles.
00:12 Éditorialiste international sur France Info TV chaque matin.
00:16 Et puis, bien sûr, nos informés sont autour de la table, François.
00:19 Oui, deux informés aujourd'hui.
00:20 Clara Bauer-Babeff, qui est journaliste au site Eure Active, et José Manuel Lamarque, journaliste spécialiste de l'Europe à France Info.
00:28 Cette semaine, le Parlement européen doit voter un texte qui va changer l'avenir quand même de plus de 28 millions de travailleurs,
00:35 des plateformes en Europe. On va y venir dans quelques minutes.
00:38 Mais premier sujet, François Bodonnet, cette inquiétude sur l'économie européenne, sur l'état de santé économique de l'Union européenne.
00:44 Oui, absolument, parce que l'économie européenne décroche par rapport à l'économie américaine.
00:49 Ce n'est pas nouveau, mais ça s'accélère dangereusement.
00:51 Ça a commencé après la crise financière de 2008.
00:55 Les États-Unis se sont remis beaucoup plus vite de la crise que l'Europe.
00:59 L'Europe qui avait, on s'en souvient, bridé son économie avec une politique d'austérité.
01:04 Alors, il y avait quand même une forme d'injustice, puisque rappelons-le, cette crise, au départ, venait du continent américain.
01:09 De nouveau, même scénario après la crise du Covid, l'État américain fait couler à présent des centaines de milliards d'euros dans son économie,
01:16 alors qu'en Europe, la croissance est absente.
01:19 On retrouve à Bruxelles la correspondante de France Info, Valérie Astruc.
01:24 D'un côté, l'Union européenne, 448 millions de consommateurs.
01:28 De l'autre, les États-Unis, 333 millions.
01:31 Deux marchés de taille comparable, mais dont les performances économiques ne sont pas égales.
01:36 L'année dernière, la croissance américaine était de 2,5%, soit 5 fois plus qu'en Europe, qui a péniblement atteint les 0,5%.
01:44 Pourquoi un tel écart ?
01:45 D'abord, la guerre en Ukraine a privé les Européens de gaz russe et provoqué une inflation généralisée,
01:50 et du coup, une baisse du pouvoir d'achat des ménages.
01:53 À l'inverse, les États-Unis, avec le conflit ukrainien, sont devenus les premiers exportateurs au monde de pétrole et de gaz.
02:00 Et les ventes d'arbres américaines au Vieux Continent se portent très bien.
02:04 C'est enfin sur le plan budgétaire que l'oncle Sam a déployé sa force de frappe.
02:08 400 milliards de dollars pour la loi dite IRA qui subventionne les entreprises engagées dans la transition écologique.
02:14 Conséquence, certains de nos champions, comme par exemple les constructeurs automobiles,
02:19 ont délocalisé une partie de leur production vers les États-Unis.
02:23 - Valérie Astruc à Bruxelles.
02:25 Alors, que faut-il faire ?
02:27 Eh bien, les discussions sont en cours à Bruxelles.
02:29 Enrico Letta, un ancien Premier ministre italien, propose une solution,
02:33 c'est de faire tomber les frontières pour les entreprises dans les secteurs où elles existent encore,
02:38 comme par exemple la finance ou les télécoms.
02:40 Alors, dans ce dernier secteur, Jules, est-ce que vous avez remarqué par exemple
02:44 qu'on ne peut pas prendre en France un abonnement de portable auprès d'un opérateur allemand ou polonais par exemple ?
02:49 - Oui, c'est vrai. Mais bon, quand on se déplace en même temps, nos opérateurs marchent quand même souvent.
02:52 - C'est ça, mais il n'existe pas par exemple de numéro de portable européen.
02:55 C'est un numéro de portable français, allemand, belge, etc.
02:58 - +33, +37, etc.
02:59 - Exactement. Conséquence, un opérateur télécom américain a en moyenne plus de 100 millions de clients,
03:04 alors qu'un opérateur européen, lui, en a seulement en moyenne 5 millions.
03:08 Et on dénombre en Europe plus de 100 opérateurs de télécoms contre 8 seulement aux États-Unis.
03:13 Donc, Enrico Letta propose de créer ce qu'on appelle évidemment le marché intérieur dans les secteurs où il n'existe pas encore.
03:20 - Bon, voilà, on a un bon état des lieux quand même des problèmes posés par le ralentissement de l'économie européenne.
03:25 À quoi est-il principalement dû ? Parce que pour un pays, c'est facile à diagnostiquer à l'échelle d'un continent.
03:30 - Alors, justement, à l'échelle d'un continent, on a donc 27 États avec 27 croissances économiques qui sont différentes et qui ont des besoins différents.
03:37 On ne peut évidemment pas faire l'impasse sur le contexte géopolitique et la guerre en Ukraine.
03:41 Valérie Astruc le disait dans le reportage, notamment avec cette inflation du coût de la vie
03:46 et qu'on a aussi d'ailleurs vu, par exemple, sur le secteur agricole avec cette importation massive de poulets ukrainiens.
03:51 Donc, c'est quand même une guerre qui fragilise une économie européenne.
03:54 Et surtout, si on compare avec les États-Unis, on a vraiment deux stratégies opposées
03:58 où les États-Unis, avec cet IRA dont on parlait, sont dans une logique d'enlètement pour investir et financer une croissance verte,
04:05 alors qu'à l'inverse, en Europe, on a plutôt tendance à être frileux, à imposer des règles de restrictions budgétaires,
04:10 mais à moins prendre ce risque d'endettement.
04:12 Pourquoi est-ce que ça pose autant de questions, autant de soucis, José-Emmanuel Lamarck,
04:17 que l'Europe ralentisse plus ou accélère moins ? Ça dépend des années que l'économie américaine.
04:22 Ça dépend du côté où on est.
04:25 Bah oui.
04:26 Il faut se souvenir quand même que l'Union européenne, avant, on l'appelait la première puissance économique mondiale.
04:31 Ça a été une lente érosion.
04:33 Les années 90, c'était la mondialisation, la fameuse "globalization".
04:38 On a vu aussi des délocalisations européennes vers l'Asie, mais on avait l'Irlande, les dragons celtiques.
04:43 Et puis aujourd'hui, ce sont des délocalisations pour vers les États-Unis d'Amérique, entre autres pour l'Allemagne.
04:49 Mais attention, derrière tout ça, il ne faut pas oublier qu'il n'y a pas que l'Amérique.
04:53 On a aussi le phénomène des BRICS, le rapprochement des pays comme le Brésil, la Russie, l'Inde, la Chine.
04:58 L'Inde et la Chine, concurrents bien sûr de l'Europe.
05:01 Il n'y a pas que la concurrence américaine, mais aussi les Européens.
05:05 Est-ce qu'il y a aussi une solidarité européenne ? Je prends le cas de Dassault.
05:08 Dassault, constructeur du Rafale, combien de pays européens achètent des avions de chasse américains ?
05:13 C'est ce que disait le patron de Dassault dernièrement devant une commission du Sénat.
05:17 Alors l'Europe est en perte de vitesse, oui, mais est-ce qu'elle doit adopter une politique,
05:21 une force de frappe européenne pour tous les États ?
05:23 Ou alors est-ce que ça va être chacun pour soi ?
05:25 On continue en l'état, concurrence entre Européens, ça n'arrange rien, bien évidemment.
05:31 On ne peut pas dire que la bataille mondiale est perdue,
05:33 mais il faut quand même que l'Europe se réveille avec un peu plus de solidarité entre États européens d'abord.
05:38 Alors ça peut sembler assez lointain tout ça.
05:40 On verra d'ailleurs quelle réponse on peut apporter.
05:42 Mais concrètement, quelles conséquences ça a, François,
05:44 que notre économie soit moins dynamique que celle des États-Unis ?
05:47 Alors ça a énormément de conséquences concrètes sur notre vie quotidienne, à nous les Européens.
05:52 Tout d'abord, quand vous n'avez pas de croissance,
05:54 ça veut dire que vous n'avez pas d'impôts qui rentrent dans les caisses des États ou peu d'impôts.
05:58 Et du coup, les services publics, forcément, ils ont moins d'argent.
06:02 Quand vous avez une croissance nulle, vous n'avez pas de création d'emploi.
06:05 Or, vous avez une partie de l'Europe où, certes, on est quasiment au plein emploi.
06:09 C'est le cas en particulier en Allemagne.
06:10 Mais si vous regardez en Europe du Sud, et je mets la France dans cette catégorie d'Europe du Sud,
06:14 on est loin du plein emploi et donc le taux de chômage reste élevé.
06:18 Et puis enfin, je dirais, c'est presque plus grave.
06:21 Les Européens, avec cette croissance nulle, ne peuvent pas se payer l'innovation,
06:25 par exemple l'intelligence artificielle, qui se développe énormément aux États-Unis,
06:29 beaucoup moins en Europe, et ils ne peuvent pas se payer non plus le coût de la transition écologique.
06:34 On estime que la transition écologique, c'est 400 milliards d'euros chaque année
06:39 qu'il faudrait investir pour pouvoir faire cette transition.
06:42 Donc, vous voyez, le paradoxe sur l'écologie, d'ailleurs, c'est que nous étions en avance,
06:45 par exemple, par rapport aux États-Unis, qui encore il y a quelques années s'en souciaient assez peu.
06:49 Vous vous souvenez même de Trump, qui était sorti de l'accord de Paris.
06:52 Et là, finalement, à cause de cette économie qui patine,
06:55 eh bien, nous pourrions être en retard par rapport aux États-Unis.
06:58 Et face à cela, est-ce qu'il y a un consensus ?
07:01 Parce que c'est toujours la difficulté quand on est à 27,
07:03 il faut trouver une forme de consensus minimale pour avancer.
07:06 Est-ce qu'il y a un consensus, des pistes communes pour sortir du marasme économique ou pas ?
07:11 Alors, le consensus, il est difficile à trouver.
07:13 Comme vous voulez le rappeler, il faut négocier à 27.
07:15 En revanche, les dirigeants européens étaient réunis lors du sommet à Bruxelles, jeudi et vendredi.
07:22 L'économie et les restrictions budgétaires devaient être au programme,
07:25 mais le contexte géopolitique a vraiment pris le pas.
07:27 Donc, pour l'instant, pas d'accord, par exemple, pour un plan de relance
07:30 comme il y a pu y avoir à la suite du Covid.
07:33 C'est notamment l'Allemagne, les Pays-Bas et le Danemark qui ne sont pas trop en faveur de ce plan.
07:38 La seule chose qu'on a vue, c'est un accord sur un nouvel accord de compétitivité
07:42 qui, pour l'instant, dans les grandes lignes, n'est pas très concret
07:45 et qui, surtout, sera aussi soumis aux élections européennes à venir.
07:48 Il faut faire s'accorder des visions différentes de l'économie.
07:51 On sait que les Allemands n'ont pas toujours la même que celle des Français.
07:53 Je vois Emmanuel Lamarck, en gestion de budget, gestion d'investissement.
07:57 Oui, c'est clair. Différence, je dirais, de civilisation européenne l'une par rapport à l'autre.
08:02 Mais il est temps de s'accorder parce qu'on voit que quand même autour de nous,
08:06 nous sommes un petit peu encerclés au niveau économique.
08:09 Donc, il est temps vraiment que l'Europe sorte de sa couette.
08:13 Question de compétitivité et de compétition, plus largement avec les autres continents, notamment.
08:20 On va continuer à parler d'économie européenne,
08:22 notamment de l'emploi et de la question des travailleurs des plateformes.
08:26 On sait que c'est une question des temps modernes et du changement à venir à l'échelle européenne.
08:31 On voit ça juste après. Le Fil info à 10h moins 10, Claire Chekaglini.
08:35 Ce vote défend la civilisation occidentale, estime Benjamin Netanyahou.
08:39 Le Premier ministre israélien a salué hier soir l'adoption par la Chambre des représentants
08:43 aux États-Unis d'un paquet colossal d'aides.
08:45 13 milliards sont destinés à l'État hébreu, 61 à l'Ukraine.
08:49 Mais selon le Kremlin, ce plan va exacerber les crises mondiales.
08:53 Pour Joe Biden, cette enveloppe budgétaire envoie un message clair
08:55 sur la puissance du leadership américain dans le monde.
08:58 Les partisans du président, majoritaires au Sénat, devraient approuver dès la semaine prochaine le texte.
09:02 Le procureur de la République de Cahors, bientôt dans le rôle du prévenu.
09:06 Le magistrat sera jugé en juin pour violence conjugale.
09:09 L'épouse d'Alexandre Rossi a déposé plainte à plusieurs reprises au début du mois.
09:14 Lui aussi a dénoncé sa femme pour défaites de violences.
09:16 Le couple est en instance de divorce.
09:18 Les opposants à l'A69 appelaient une nouvelle fois à se mobiliser à Toulouse.
09:23 La préfecture a autorisé l'utilisation de drones pour surveiller le cortège.
09:27 De la bière contenant de l'antigel.
09:29 Des packs de la marque 1664 vendus par Intermarché ont été rappelés.
09:34 Ils étaient distribués dans les magasins de Nouvelle-Aquitaine et d'Occitanie.
09:38 Les filles de 15 de France face aux galloises, dernières du tournoi Destination.
09:42 Rendez-vous à Cardiff à 16h15. La semaine prochaine, les Bleus affronteront le très redouté 15 de la Rose.
09:49 Et nous parlons de l'état de santé de l'économie européenne ce matin avec vous François Bodonnet,
10:04 avec nos informés Clara Bauer-Babeuf du site Internet Euractiv.
10:08 Et vous José-Emmanuel Lamarque, spécialiste des questions d'Europe à la rédaction de France Info.
10:12 On parlait du mur d'investissement vert, qu'il s'agit de dépasser tout l'investissement autour des technologies,
10:18 l'intelligence artificielle, etc.
10:19 Des investissements, ça demande beaucoup d'argent, on en manque vu l'état de santé économique.
10:23 Et donc ça demande des budgets, des emprunts et se mettre d'accord sur la dette, les niveaux de dette, etc.
10:28 Ça aussi c'est un point de blocage ?
10:30 Absolument, c'est un énorme point de blocage.
10:32 Et c'est d'ailleurs aussi ce qui a bloqué lors du Conseil européen qu'il y a eu la semaine dernière.
10:37 On n'arrive pas à se mettre d'accord sur est-ce qu'il faut un plan de relance ou est-ce qu'il n'en faut pas.
10:41 La France pousse plutôt en faveur d'un plan de relance.
10:44 L'Allemagne est plutôt contre.
10:45 C'est comme par exemple aussi pour l'union des marchés de capitaux.
10:49 Donc c'est débloquer des fonds pour justement accélérer cette croissance.
10:53 Là aussi, l'Estonie est plutôt en faveur, la France aussi.
10:55 L'Allemagne pour le coup se range aussi plutôt de ce côté-là.
10:58 Mais on voit qu'à 27, selon les sensibilités économiques et politiques de chaque pays,
11:03 trouver un consensus qui ira à tout le monde, ça reste quand même très compliqué.
11:07 – Est-ce qu'il y a un problème de compétition entre les États au niveau européen
11:11 qui rend plus difficile l'idée de se mettre d'accord ou pas du tout ?
11:14 – Bien sûr il y a compétition entre les États.
11:16 Vous savez, ça me fait penser un peu au film de Robert l'Amoureux,
11:18 "Ma maman est malade et mon petit frère ne va pas bien non plus".
11:21 C'est un peu ça l'Europe aujourd'hui.
11:22 Les Européens ne s'entendent pas, par exemple quand on prend le cas du franco-allemand,
11:28 est-ce que le franco-allemand existe encore ?
11:30 C'est vraiment la question qu'on peut se poser.
11:32 À mon avis, non.
11:33 Le franco-allemand c'est fini.
11:35 C'était un moteur le franco-allemand avant.
11:37 Maintenant, je le répète, c'est chacun pour soi quand même.
11:39 – Bon, François Baudelaire ?
11:41 – Et même ce qu'on peut dire au-delà du franco-allemand,
11:43 en fait la question et la grande inquiétude c'est autour de l'économie allemande justement,
11:47 l'état de santé de l'économie allemande qui est en fait maintenant devenue l'homme malade de l'Europe.
11:52 C'était au contraire le moteur.
11:54 Et puis du fait qu'on n'achète plus d'hydrocarbures à la Russie ou très peu,
11:59 du fait que c'est difficile de vendre à la Chine,
12:02 alors que jusqu'à présent en fait l'Allemagne s'était construite sur ces deux piliers,
12:07 aujourd'hui l'Allemagne a véritablement un énorme problème avec une croissance négative
12:12 et elle a quitté ce statut de moteur de l'économie européenne.
12:17 On va presque dire que maintenant c'est une forme de frein de l'économie européenne.
12:20 – Et d'un mot Clara Bauer-Babeuf,
12:21 est-ce qu'on a aussi un peu trop de scrupules peut-être
12:23 ou de… à être protectionniste au moins autant que peuvent l'être la Chine, les États-Unis ?
12:28 – Oui absolument et c'est un débat qui s'invite régulièrement
12:30 et qui va d'ailleurs s'inviter dans les élections européennes,
12:32 est-ce qu'il faut aller vers plus de protectionnisme ou non
12:35 et comment justement faire refleurir cette économie.
12:37 – Débat d'actualité dans la campagne en effet,
12:39 c'est vrai qu'on ne l'avait pas abordé jusqu'à maintenant.
12:42 Deuxième sujet de ces informés de l'Europe,
12:44 on continue à parler d'économie mais là du monde du travail et d'emploi,
12:48 François, avec le Parlement européen qui tient à partir de demain
12:51 sa dernière session plénière avant ces élections européennes
12:54 et parmi les textes que les eurodéputés doivent voter,
12:57 il y a cette loi européenne qui est censée changer la vie de millions de travailleurs,
13:01 ceux des plateformes comme Bolt, Uber, Deliveroo.
13:04 – Oui alors c'est une loi européenne importante
13:06 parce qu'elle concernerait 28 millions de travailleurs dans toute l'Europe,
13:10 alors ce sont des conducteurs de VTC comme par exemple Uber ou Bolt,
13:14 des livreurs de repas comme Uber Eats ou Deliveroo.
13:17 Et que dit cette directive ? Eh bien elle dit deux choses,
13:19 d'abord elle va modifier le statut de ces travailleurs,
13:23 alors aujourd'hui ces travailleurs se sont…
13:25 en fait la directive va dire que ces travailleurs se sont des salariés
13:28 et ça sera à la plateforme de prouver que ce n'est pas le cas,
13:31 en gros c'est ce qu'on appelle inverser la charge de la preuve,
13:34 or jusqu'à présent c'était aux travailleurs de prouver
13:37 qu'ils n'étaient pas indépendants mais qu'ils étaient bien salariés.
13:39 Et puis le deuxième point de cette directive,
13:42 ce sera un meilleur encadrement de l'utilisation des algorithmes pour ces travailleurs,
13:46 vous savez que ces plateformes travaillent exclusivement avec des algorithmes,
13:49 dorénavant il sera interdit qu'un algorithme décide par exemple
13:52 de se séparer d'un de ses travailleurs,
13:56 et il sera également interdit l'utilisation de certaines données
13:58 comme par exemple l'état psychologique, l'état de fatigue par exemple,
14:02 la religion, la sexualité, et les conversations privées des travailleurs,
14:07 eh bien ces algorithmes n'auront plus le droit de se servir de ça
14:11 pour prendre des décisions concernant les travailleurs des plateformes.
14:14 – Alors José-Emmanuel Lamarck, depuis le début des négociations,
14:16 la France, Emmanuel Macron, n'est pas forcément pour cette directive,
14:19 il y est même opposé, est-ce qu'on sait pourquoi ?
14:22 – Il n'y a pas que la France, la Grèce, l'Estonie, l'Allemagne aussi,
14:25 et d'autres comme Chypre, alors Paris souhaitait avoir des garanties
14:29 sur l'interprétation qui serait faite du texte,
14:31 et pour Paris c'est une présomption de salariat, une ambiguïté juridique,
14:36 la France souhaite privilégier une présomption d'indépendance
14:39 et protéger justement son modèle unique en Europe
14:41 qui consiste à accorder des protections à ses travailleurs
14:44 via la négociation collective entre représentants des plateformes
14:48 et représentants élus par les travailleurs indépendants concernés,
14:51 donc Paris craint un décricotage des accords collectifs conclus ces dernières années.
15:00 – Juste un mot peut-être là-dessus quand même, Emmanuel Macron est très contre ça,
15:04 parce qu'il estime, il a peur que ça fasse fuir les plateformes,
15:08 et il pense, après à tort ou à raison, qu'une grande partie de l'économie
15:12 peut se développer grâce à ces plateformes,
15:15 et on sait en particulier que c'était souvent des gens qui n'avaient pas de travail,
15:19 qui sont devenus par exemple chauffeurs, livreurs, etc.
15:22 Donc la raison principale à mon avis de ça, c'est qu'il avait vraiment peur
15:27 que ça ferme le passage aux plateformes et qu'elles aillent ailleurs,
15:31 et en particulier dans d'autres pays.
15:33 – Et sa voix a quand même été entendue,
15:35 peut-être qu'il y a eu aussi un travail de lobbying efficace au Parlement,
15:37 parce que le texte finalement qui est censé être voté
15:41 est quand même moins dur que le texte initial,
15:43 en quoi va-t-il faciliter finalement la vie de ces quelques 28 millions de travailleurs ?
15:47 C'est un enjeu massif.
15:49 – Alors effectivement, le texte qui va être voté la semaine prochaine
15:52 a été détricoté, comme le disait José Manuel,
15:54 en revanche, ce qu'on peut dire tout de même,
15:56 c'est qu'avec cette présomption de salariat,
16:00 si le travailleur, par exemple le chauffeur Uber devient salarié,
16:04 selon les pays, il aura quand même le droit à une certaine protection sociale,
16:07 ce qui est quand même inavancé, parce que ce sont quand même des métiers
16:09 qui restent très précaires, avec un statut, alors en France,
16:11 celui d'auto-entrepreneur, donc qui n'offre ni protection sociale,
16:14 ni garantie de chômage, ni garantie d'aide financière
16:18 en cas de besoin, par exemple d'arrêt maladie.
16:20 Et donc il y a déjà cette protection sociale qui est quand même assez importante,
16:23 et surtout, comme le disait François, ce chapitre sur les algorithmes,
16:27 où ça paraît quand même assez incroyable de pouvoir être espionné par son employeur,
16:30 par rapport à sa religion, par rapport à ses conversations privées,
16:33 par rapport à sa sexualité, donc ce sont quand même deux avancées
16:37 qui vont normalement aller dans le bon sens pour ces personnes-là.
16:40 - Bon, texte qui est censé passer, qui est censé être voté au Parlement
16:42 dans cette dernière session plénière avant les élections européennes.
16:46 Merci beaucoup François Bodonnet, pilier de ce rendez-vous,
16:48 les informés de l'Europe, et merci à vous Clara Bauer-Babeuf
16:51 du site Internet Euractive et José Manuel Lamarque,
16:54 spécialiste des questions d'Europe, à la rédaction de France Info,
16:56 d'avoir participé à ces deux débats aujourd'hui.
16:59 [Musique]

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