Faut-il instaurer un couvre-feu pour les adolescents ? Pointe-à-Pitre, Nice, Béziers : plusieurs grandes villes franchissent le pas. Pour en parler, le maire de Béziersd, Robert Ménard. Depuis lundi, dans trois quartiers de sa commune, les moins de 13 ans n'ont pas le droit d'être seul dans les rues entre 23h et 6h. Cette mesure était nécessaire ?
Regardez L'invité de RTL Soir avec Julien Sellier du 24 avril 2024
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00:00 RTL bonsoir, Julia Selye, Isabelle Choquet et Cyprien Signy.
00:04 Allez, bonne fin de journée, RTL bonsoir, l'émission continue.
00:07 On va accueillir maintenant notre invitée face à l'événement au cœur du débat de la semaine.
00:12 Est-ce qu'il faut instaurer, oui ou non, un couvre-feu pour nos adolescents ?
00:16 Point à pitre, Nice, Béziers, plusieurs grandes villes semblent franchir le pas.
00:20 Bonsoir Robert Ménard.
00:22 Bonsoir.
00:23 Vous êtes le maire de Béziers et depuis lundi, dans trois quartiers de votre commune,
00:27 les moins de 13 ans n'ont plus le droit d'être seul dans les rues entre 23h et 6h du matin.
00:32 Cette mesure, Robert Ménard, elle était nécessaire ?
00:35 Elle était nécessaire, elle était indispensable.
00:37 Elle est tellement indispensable que j'ai essayé de le faire il y a dix ans quand je suis devenu maire.
00:42 Mais à ce moment-là, l'ère du temps n'était pas la même.
00:45 Peut-être que les gens n'avaient pas pris conscience des problèmes de violence et de violence des plus jeunes.
00:51 Et après quatre ans de procédure à l'initiative de la Ligue des droits de l'homme,
00:57 comme si elle n'avait rien d'autre à faire, la Ligue des droits de l'homme, que de s'occuper de ça,
01:00 j'ai perdu devant le Conseil d'État et on a dû arrêter l'expérimentation qu'on faisait.
01:06 Bien sûr qu'il y a un problème aujourd'hui, pas dans un certain nombre de quartiers, mais dans toute la ville.
01:12 Mais on n'a pas le droit de prendre un arrêté qui couvre toute la ville.
01:15 Donc on s'est concentré sur trois quartiers.
01:18 Mais oui, il y a des enfants de plus en plus jeunes dans la rue et surtout de plus en plus violents.
01:23 Je discute avec la police municipale, ils me disent "ce qui se réglait à coups de poing il y a quelques années,
01:28 maintenant ça se règle à coups de couteau".
01:29 Et oui, il faut faire quelque chose.
01:31 - Vous l'avez dit, le Conseil d'État avait retoqué la mesure à l'époque en expliquant
01:35 que vous n'aviez pas assez justifié en quelque sorte votre idée.
01:39 Vous avez des chiffres précis sur la délinquance des moins de 13 ans à Béziers ?
01:43 Vous dites "c'est indispensable", mais est-ce que vous avez des chiffres pour les tailler ?
01:45 - Des chiffres précis on n'en a pas, puisque si on choisit les moins de 13 ans,
01:50 c'est qu'ils sont irresponsables pénalement, c'est-à-dire qu'ils ne peuvent pas être condamnés.
01:54 Et donc on n'a pas de chiffres précis, mais on a des indications sérieuses.
01:58 Je vais vous en donner deux.
02:00 - Lesquelles ?
02:00 - En 2019 par exemple, il y a une école, vous vous rappelez, vous en avez parlé sur RTL à cette époque-là,
02:06 parce que c'est une école d'un des trois quartiers où des gosses avaient mis le feu.
02:10 Des gosses qui avaient été scolarisés dans cette école-là.
02:14 Je prends cet exemple. Je ne veux pas dire que s'il y avait eu à ce moment-là,
02:19 cette passage-passe en pleine nuit, s'il y avait eu cette arrêtée, on aurait évité,
02:25 mais en tout cas je le pense un petit peu.
02:27 - Mais au quotidien, il y a des gamins de 10, 11, 12 ans qui se baladent vraiment seuls à minuit,
02:32 une heure du matin dans votre ville ?
02:33 - Bien sûr, je vous propose, mais pas que chez moi, dans tout un tas d'endroits,
02:36 écoutez, allez vous promener dans un certain nombre de quartiers "un petit peu difficiles",
02:42 mais on sait tous ce que ça veut dire, et vous verrez si vous ne voyez pas des gosses qui ont 10, 12 ans.
02:47 Quand il y a eu les émeutes l'été dernier, moi comme maire, j'ai accès aux images,
02:53 vous savez, de la vidéosurveillance, je l'ai vue, et il y avait plein d'enfants sur 80, 90 personnes
02:58 ou 100 qui ont participé à ces émeutes, il y en avait une bonne partie qui étaient des gamins.
03:03 Cette mesure, ce n'est pas une mesure de droite ou de gauche, c'est une mesure de bon sens.
03:08 Demandez aux gens, mais vous avez vu, il y a un sondage qui a été fait,
03:11 les deux tiers des Français y sont favorables.
03:13 - Est-ce que ce n'est pas surtout un symbole aussi, et un message que vous envoyez aux parents,
03:17 en leur disant "laissez pas traîner vos gamins" ?
03:20 - Bien sûr que c'est ça ! Les parents seront obligés d'aller au commissariat chercher leurs enfants.
03:25 Théoriquement, on peut leur mettre une amende, théoriquement même,
03:28 on peut les déférer devant la justice et saisir la justice.
03:31 - Vous comptez mettre des amendes d'ailleurs ?
03:32 - Mais non ! - Puisque l'idée c'est quand même de ramener les enfants à la maison,
03:36 et ensuite de régler le problème d'autorité dans les familles.
03:38 - On n'en a jamais fait des amendes, c'est juste l'occasion, on l'a vu,
03:42 moi j'ai le souvenir d'un certain nombre d'enfants, les parents qui venaient chercher les enfants,
03:46 ils se faisaient remonter les bretelles, comme on dit, un vrai savon,
03:50 en leur disant "mais ça va pas bien la tête, qu'est-ce qu'ils font vos gosses,
03:53 dans telle rue à 2h du matin ?"
03:55 C'est pas que pour réprimer les parents ou les gosses, c'est pour les protéger.
04:00 Parce que imaginez, vous avez des enfants, monsieur,
04:03 vous les avez à 10 ans dans une rue à 2h du matin,
04:06 vous vous inquiétez pas pour leur sécurité, c'est aussi une mesure de protection,
04:10 parce qu'il y a des familles qui n'en ont rien à faire pour dire les choses,
04:14 et puis il y a des familles, on dit "familles monoparentales" beaucoup,
04:18 c'est des femmes seules pour dire les choses clairement,
04:19 où elles sont dépassées par les événements.
04:22 Je me souviens de maman qui venait me dire "ah monsieur le maire, vous m'avez rendu un service"
04:26 et je lui disais "pourquoi ?"
04:28 Elle me dit "au moins quand mes enfants veulent pas m'obéir, je leur dis
04:32 si tu sors, le maire va envoyer la police et on va te ramener au commissariat.
04:36 Faisons des tests, voyons si ça marche, si ça marche pas,
04:39 si c'est pas utile, on le laisse tomber."
04:41 – Dans l'application concrètement, Robert Ménard,
04:43 un gamin de 12 ans qui se balade en ville avec un copain de 18 ans,
04:47 on l'arrête ou on l'arrête pas ?
04:48 – Bien écoutez, bien sûr qu'on va l'arrêter, si c'est ses parents,
04:51 on va pas le faire, on le fera pas, mais si c'est un gamin de 18 ans,
04:55 bien sûr qu'on le fera, pourquoi on le fera ?
04:57 Parce que vous avez pas remarqué comment s'organise le trafic de drogue ?
05:00 Dans les points de deal, c'est de plus en plus des enfants,
05:04 tout le monde a compris, en particulier les dealers,
05:06 que les garçons, les enfants de moins de 13 ans,
05:09 on n'allait pas les arrêter, alors qu'on va les arrêter.
05:12 – Robert Ménard, est-ce que vous avez eu l'occasion d'échanger
05:15 avec le gouvernement sur ce couvre-feu, avec Gabriel Attal ou Gérald Darmanin ?
05:19 On sait qu'au ministère de l'Intérieur, votre initiative est plutôt bien vue.
05:22 – Écoutez, moi j'en ai parlé avec le préfet, qui lui-même en a parlé
05:26 avec M. Darmanin, demandé à M. Darmanin,
05:28 je ne crois pas que la préfecture va attaquer cet arrêté,
05:32 parce que la préfecture, elle peut, je ne crois pas qu'aujourd'hui,
05:36 le ministre de l'Intérieur le fera, et donc le préfet.
05:39 Attendez, ce serait quand même se moquer du monde.
05:41 Je vous rappelle qu'un, il a annoncé lui, un couvre-feu à partir de 18 ans,
05:49 en Guadeloupe, et puis vous avez le Premier ministre qui dit,
05:51 "tiens, il faudrait y réfléchir", voilà, on y réfléchit,
05:54 et on commence à le faire.
05:55 – On vous pose cette question parce que le Premier ministre
05:57 a rappelé la semaine dernière, ça ne vous a pas échappé,
05:59 un sursaut d'autorité avec plusieurs pistes, plusieurs mesures.
06:03 Est-ce que sur cette question, vous avez la sensation
06:05 que Gabriel Attal a pris la mesure de la situation,
06:08 après toute une série de faits divers ces derniers jours
06:10 qui ont impliqué les adolescents ?
06:11 – Oui, je pense que oui, ils se sont rendus compte
06:14 qu'il fallait faire un certain nombre de choses.
06:15 Mais ils s'en étaient rendus compte, Gabriel Attal,
06:17 quand il était ministre de l'Éducation nationale.
06:20 Moi, si je n'avais jamais vu un ministre prendre autant de bonnes mesures,
06:23 de mesures de bon sens, de mesures d'évidence, en quelques mois,
06:26 quand il a été à l'Éducation nationale,
06:28 il faut qu'il fasse la même chose pour le reste.
06:31 Il a eu raison sur l'uniforme, mais là, aujourd'hui,
06:34 il faut faire la même chose avec le couvre-feu.
06:37 Et, seigneur, voyons si ça marche.
06:39 – Sur l'uniforme, Robert Ménard, parce que vous faites partie
06:41 des villes qui ont été les premières à tenter cette expérimentation,
06:44 après deux mois de pratique, vous vous en tirez un premier retour ?
06:47 – Oui, bien sûr, on a fait un premier bilan auprès des parents
06:50 et des enseignants, et on change un certain nombre de choses.
06:54 Qu'est-ce qui marche, qu'est-ce qui ne marche pas ?
06:55 – Par exemple, sur les tenues elles-mêmes.
06:57 – Alors, ils sont contents parce qu'on s'aperçoit,
07:00 enfin, ça ne va pas vous paraître tout bêtasson,
07:01 mais par exemple, les gosses font attention à leur uniforme.
07:04 Deuxièmement, oui, on gagne du temps le matin.
07:07 J'ai des chiffres précis et tout sur les parents qui disent,
07:10 oui, on gagne du temps, on perd moins de temps à discuter
07:13 sur qu'est-ce que les enfants vont mettre.
07:15 Ensuite, est-ce que les uniformes, ceux qu'on avait choisis,
07:18 enfin non, on n'avait rien choisi du tout,
07:19 ceux que les parents et les enfants avaient choisis,
07:21 les enseignants avaient choisis, est-ce que c'est exactement ça ?
07:24 Non, il faut modifier, donc dès septembre,
07:26 on modifiera un certain nombre de choses.
07:29 Il fait chaud ici, enfin en Corse, il fait plutôt froid en ce moment,
07:32 et en fait il fait chaud dans notre midi,
07:34 et donc on essaye d'adapter les choses.
07:36 – Une petite question bonus, Robert Ménard,
07:38 vous l'ex-proche de Marine Le Pen, vous avez pris vos distances,
07:42 vous avez un peu le vent en poupe en ce moment,
07:43 est-ce que vous préparez la présidentielle de 2027 ?
07:47 – Je me suis dit, tu sais, je vais éviter cette question-là.
07:49 – Vous répondez toujours avec beaucoup d'ironie,
07:51 est-ce qu'on peut avoir une vraie réponse ?
07:52 – Attendez, non, je ne réponds pas avec ironie,
07:55 je vais vous dire deux choses sérieusement,
07:57 on n'a pas, en gros, aujourd'hui, je ne vois personne
08:02 qui incarnerait cette sensibilité que j'essaye d'exprimer là à votre micro,
08:07 c'est-à-dire ne pas avoir honte de ce qu'on est,
08:12 être attentif aux gens, être réaliste, et en même temps changer les choses,
08:19 parce qu'en général les gens ils vous disent,
08:20 "ah oui c'est plus compliqué, c'est le meilleur argument pour ne rien faire",
08:23 je pense qu'on peut dire que les choses sont compliquées et faire.
08:26 Écoutez, à mon petit niveau, ma ville, venez voir à Béziers,
08:29 elle a changé en disant, ça veut dire qu'on peut changer,
08:31 je pense qu'on peut changer au niveau français,
08:33 est-ce que je pense que mon cerveau l'a joué là-dedans ?
08:37 Pourquoi pas ?
08:38 – Pourquoi pas ? C'est la réponse ce soir, merci Robert Ménard,
08:40 maire de Béziers, merci d'avoir été notre premier invité dans RTL Bonsoir,
08:44 après donc l'instauration de ce couvre-feu pour les moins de 13 ans dans votre commune,
08:47 merci beaucoup.
08:48 – RTL Bonsoir
08:50 – Et RTL Bonsoir continue avec votre RTL Inside.
08:55 – Au bord du terrain de foot où Emmanuel Macron tape la balle
08:57 avec Didier Deschamps, Pires Drogba ou encore Eden Hazard en ce moment même.
09:01 – Et puis la visoconférence, Alex le menu ?
09:04 – Écoutez, je sais que vous aimez le sport, Olivier Giroud un petit peu.
09:07 – Ah forcément, notre footballeur, à tout de suite.
09:10 – RTL Bonsoir jusqu'à 20h.