• il y a 8 mois
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Sport
Transcription
00:00 ...
00:06 -Alizée, ce n'est pas une interview comme les autres, aujourd'hui.
00:09 -Non, c'est vrai.
00:11 J'ai une annonce très spéciale à vous faire.
00:14 Je vais jouer mon dernier Roland-Garros dans un mois, tout pile,
00:18 et je prendrai ma retraite dans la foulée.
00:20 Donc voilà, ça me fait bizarre de dire ces mots à voix haute,
00:23 ça fait longtemps que j'y pense, mais de l'annoncer officiellement,
00:27 ça fait un petit quelque chose.
00:29 -Pourquoi c'est le bon moment d'arrêter pour vous, à 34 ans ?
00:31 -C'est le bon moment parce que c'est le résultat d'un long cheminement
00:34 qui a duré plus de deux ans,
00:37 et là, ces derniers mois, ma pensée s'est précisée,
00:40 et je sens que c'est l'heure, tout simplement.
00:42 Mon classement a un peu baissé,
00:43 ça m'a aussi permis de prendre un petit peu plus de recul
00:47 par rapport à ma carrière,
00:48 donc forcément, j'ai pas envie d'être poussée vers la sortie,
00:51 j'ai aussi envie de décider de ma sortie,
00:54 et là, je sens que j'ai un peu moins à donner en termes d'envie,
00:57 et pour moi, c'est le bon moment de dire au revoir au tennis.
01:00 -Alizé, si on fait le bilan,
01:01 vous avez passé 20 ans sur le circuit professionnel, quasiment,
01:05 un long chemin qui a débuté en 2005, votre premier Roland-Garros,
01:09 et la France vous découvre face à Amélie Moresmo.
01:13 -Ça m'émeut de repenser à ça,
01:14 parce que je me dis quel chemin parcouru depuis, en fait.
01:17 J'étais une petite gamine de 15 ans,
01:20 je débarquais à mon premier Roland-Garros avec des étoiles plein les yeux,
01:23 et j'en viens à jouer une de mes idoles
01:25 sur un des plus gros cours de Roland-Garros,
01:27 à prendre une bonne fessée bien méritée,
01:29 mais quand même, 15 ans,
01:32 j'avais une rage de vaincre qui était vraiment hyper forte,
01:35 il y avait un feu intérieur qui contaminait tous les gens autour de moi.
01:39 -Il y a une autre image que l'on retient de vous,
01:41 une victoire peut-être plus prestigieuse que toutes les autres,
01:45 en étant en 2014, au 3e tour de Wimbledon,
01:48 face à la numéro 1 mondiale, Serena Williams,
01:51 et vous réalisez l'exploit.
01:52 -Ah oui, c'est un moment fou, c'est un moment fort, ça.
01:55 En général, quand on me demande quel est le match qui m'a le plus marquée,
01:58 j'ai tendance à citer celui-là.
01:59 Quand on gagne cette balle de match,
02:05 c'est des émotions qui sont inégalables, en fait,
02:08 c'est joie de victoire,
02:10 c'est vraiment de l'euphorie, c'est si puissant, c'est si fort,
02:13 c'est addictif, en fait.
02:15 Et puis surtout, ça se passe une semaine après le décès de ma grand-mère,
02:21 et la veille de ce match, je fais l'aller-retour à Nice
02:24 pour aller enterrer ma grand-mère.
02:26 Donc là, à ce moment-là,
02:27 j'ai d'autres choses en tête que de battre Serena.
02:30 Et comme par hasard, encore une fois, quand on s'y attend le moins,
02:33 je bats Serena et j'ai l'impression qu'elle est avec moi à ce moment-là.
02:38 -Ce qui caractérise aussi votre carrière, Alizé,
02:42 c'est votre longévité.
02:44 Avec ce record, 68 tournois du Grand Chlem,
02:48 disputés de manière consécutive,
02:50 69 au mois de mai prochain...
02:52 -Si tout va bien !
02:54 -Qu'est-ce qu'il dit, ce record, sur vous ?
02:56 -Je pense qu'il me définit parfaitement, ce record.
02:58 C'est vraiment la rigueur incarnée, la discipline...
03:03 Être restée à ce niveau-là, en fait, on se rend pas bien compte,
03:05 mais je suis restée dans le top 100, voire dans le top 50
03:09 pendant quasiment toutes ces années.
03:11 Quand j'y pense, je me dis "Mais comment j'ai fait ?"
03:13 Quand je vois le niveau de jeu des filles,
03:15 j'ai tenu bon, quoi !
03:17 -Vous êtes allée au maximum de vos capacités, selon vous ?
03:19 -Ouais, ouais, je suis allée au bout du bout.
03:22 J'aurais pu faire des choses mieux.
03:23 -C'est-à-dire ?
03:24 -Avec une meilleure gestion des émotions, à mon avis,
03:28 il y a quelques matchs que j'aurais pu remporter.
03:29 C'est un sport qui rend fou, qui nous habite, qui nous obsède...
03:33 -Qui vous a rendu folle ?
03:34 -Oui, folle et triste, surtout.
03:36 J'ai eu des immenses joies,
03:38 mais en contrepartie, des grosses déceptions,
03:41 des moments de déprime...
03:43 Et je pense que ça a été des montagnes russes, finalement,
03:45 pendant 20 ans.
03:46 ...
03:49 -Avant les adieux à Roland-Garros,
03:51 Alice, il y a une personne qui a voulu vous rendre hommage.
03:53 -Oh là là, j'ai peur !
03:56 Vous n'avez pas honte de me faire ça, les gars ?
03:57 Non, c'est pas vrai !
03:59 ...
04:01 Je peux même pas appuyer sur "play".
04:03 Oh putain, c'est pas vrai !
04:05 -Bonjour, Alice.
04:06 I just want to congratulate you for an amazing career.
04:11 I just want to wish you all the very best,
04:15 whatever you decide to do in the future.
04:18 You're gonna be, for sure, doing very well,
04:22 but it's your day, enjoy,
04:24 and all the best for the future.
04:25 -Oh putain !
04:27 Je tremble et tout !
04:29 Je pense que j'ai osé lui parler une fois dans ma vie,
04:32 donc c'est pour dire l'admiration que j'ai pour lui.
04:34 Ça a été un exemple pour moi, ça a été...
04:36 Wow, je suis sous le choc, là !
04:39 Vous pourrez me l'envoyer, la vidéo, s'il vous plaît ?
04:41 ...
04:43 -Comment vous envisagez la suite, la précarrière ?
04:46 -Alors, parlons-en !
04:47 Je vais continuer l'écriture,
04:50 c'est mon métier de romancière, évidemment,
04:51 et en plus, quand je vois qu'il y a des gens qui sont émus par mes histoires,
04:55 ça m'apporte beaucoup de bonheur.
04:57 -Alice, puisque votre reconversion est toute trouvée,
04:59 je vous laisse dire adieu au tennis, avec vos mots et votre plus belle plume.
05:04 -Oui, donc j'ai écrit un petit truc.
05:06 "Nous y sommes, à cette petite mort tant redoutée,
05:10 à ce vide que le tennis va laisser derrière lui.
05:13 Pourtant, ce vide, je vais tenter de le sublimer,
05:16 d'en faire quelque chose de beau,
05:17 quelque chose de semblable au bonheur,
05:19 pour vivre sans tennis, sans cette course au succès
05:22 et cette obsession de la performance.
05:24 Alors, c'est une petite mort, peut-être,
05:26 mais c'est surtout une toute nouvelle vie,
05:28 et j'y suis prête."
05:30 Sous-titrage ST' 501
05:32 [SILENCE]