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Explorez la saga scandaleuse du roi Juan Carlos I d'Espagne, en explorant son règne tumultueux rempli de controverses liées à des scandales financiers, des affaires extraconjugales et des activités de chasse controversées. Cette vidéo offre un aperçu captivant des événements qui ont terni l'image de la monarchie espagnole, suscitant des débats sur la pertinence de l'institution dans l'Espagne moderne. Rejoignez-nous pour démêler les complexités du pouvoir, de l'argent et de la vie personnelle dans les cercles royaux.

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00:00 [Générique]
00:29 Bonsoir à vous et bienvenue dans cette émission.
00:32 Ce soir, on a décidé de s'intéresser à un pays tout proche de nous, l'Espagne.
00:36 Tout proche parce que le destin de la Suisse et de l'Espagne a souvent été mêlé,
00:40 entre autres, par les migrations dans les deux sens et de tout temps.
00:44 Mais l'Espagne aujourd'hui, il faut bien le dire, nous inquiète.
00:47 Il y a bien sûr la question de la Catalogne qui a été l'occasion de violences policières
00:51 jamais vues dans l'Union européenne.
00:53 Mais il y a aussi la crise monumentale des institutions,
00:56 les scandales qui s'enchaînent autour d'une des plus vieilles monarchies du monde.
01:00 Pour nous, les Suisses, la fonction d'une reine ou d'un roi reste plutôt obscure.
01:04 On comprend mal qu'en plus de vivre aux frais du contribuable,
01:07 les monarques se comportent comme des stars capricieuses et corrompues.
01:12 C'est dire si le spectacle de la décadence totale de la monarchie espagnole est une énigme.
01:17 C'est surtout un incroyable roman qui réunit tous les ingrédients d'un polar.
01:21 Au cœur du récit, le roi Juan Carlos,
01:23 une personnalité complexe et un parcours affectif chamboulé,
01:26 sur son chemin des faits divers, mystérieux et sanglants,
01:30 du sexe et des maîtresses pour cet homme à femme,
01:33 et l'argent, une obsession qui va le conduire à sa perte.
01:36 C'est cette histoire que Roland Rossier et Mauro Lossa ont reconstituée
01:40 grâce à des documents étaient moins inédits.
01:42 Cette histoire folle, qui implique aussi les banquiers privés de Genève,
01:46 n'avait jamais été racontée en télévision.
01:48 La voici.
01:50 Vive el rey ! Vive España !
01:54 Viva España !
01:56 Juan Carlos de Bourbon.
02:03 C'est l'histoire d'un roi qui avait tout pour réussir.
02:06 Chef suprême de l'État espagnol, il était adulé par son peuple.
02:10 Après 40 ans de règne, son image s'est pourtant ternie.
02:14 Un safari en Afrique.
02:18 Une amende insoumise.
02:21 Et une affaire financière à Genève vont signer sa chute.
02:25 L'Espagne s'entredéchire dans une guerre civile débouchant sur une dictature.
02:45 Celle du général Franco.
02:48 En 1938, Juan Carlos voit le jour à Rome où sa famille,
02:53 la branche espagnole de la maison de Bourbon, se trouve en exil.
02:57 Seul biographe espagnol ayant accepté de nous accorder une interview,
03:01 cela fait plus de 20 ans que Rebeca Quintens s'intéresse à la figure du roi Juan Carlos.
03:06 On raconte que la famille de Juan Carlos a dû s'exiler,
03:12 qu'ils seraient pratiquement nés dans la misère,
03:15 qu'ils sont partis d'Espagne comme des indigents, les pauvres.
03:19 Et que ce serait cela qui explique cette anxiété de Juan Carlos pour gagner de l'argent.
03:24 Mais c'est une légende absurde.
03:27 Ce n'est pas vrai qu'ils aient été dans la misère.
03:30 Car même si la République avait saisi leurs biens,
03:33 ils leur ont été restitués sous le franquisme.
03:36 Ils ont retrouvé leurs propriétés en Espagne,
03:39 on leur a permis de reprendre leurs bijoux,
03:42 ils recevaient même une aide mensuelle de l'Etat
03:45 pour qu'ils puissent vivre une vie de palais avec des voitures de luxe.
03:49 Ils ont vécu comme des rois en exil, dans l'opulence et sans être dans le besoin.
03:54 Après son enfance à Lausanne, le petit prince découvre une autre ville suisse, Fribourg.
04:02 Placé dans un internat chez les pères marianistes, il n'est âgé que de 8 ans.
04:07 Et il n'a que 10 ans lorsque son père, Don Juan de Bourbon, l'envoie en Espagne.
04:13 Don Juan confie l'éducation de son fils aîné à Franco,
04:17 dans l'espoir de restaurer la monarchie.
04:19 C'est la deuxième fois que le jeune garçon est abandonné par ses parents.
04:23 Spécialisé dans la psychiatrie familiale, Robert Neuburger livre son analyse.
04:30 Vous savez, la petite enfance est quand même souvent très déterminante sur le trajet de quelqu'un.
04:37 Une question que je pose quelques fois à des patients, des couples que je rencontre,
04:42 comment avez-vous appris à aimer ?
04:44 Alors, il y a une catégorie de gens, et je pense que Juan Carlos en fait partie,
04:51 que j'appelle les mal aimés.
04:53 C'est-à-dire des gens qui n'ont pas appris à aimer.
04:57 Parce que, si on voit son trajet, il a eu extrêmement peu de contact
05:04 avec sa famille, avec ses parents en particulier,
05:07 qui apparemment l'ont, je dirais, rétrocédé à Franco.
05:11 Il a été donné à Franco, quand même.
05:14 Son instruction se déroule dans une école du régime franquiste à Madrid.
05:19 L'été, il respire à Estoril, au Portugal,
05:23 où résident ses parents et d'autres familles royales, dont celle de Savoie.
05:27 La princesse Marie-Gabrielle de Savoie se souvient de cette époque.
05:34 Il revenait pour les vacances.
05:36 On le voyait pour les vacances.
05:38 Il était toujours très enthousiaste, de très bonne humeur,
05:42 toujours voulant faire des tas de choses.
05:44 Il était un gentil garçon, vraiment un cœur d'or.
05:49 On a eu un petit flirt quand on avait 13, 14 ans.
05:53 Rien de spécial.
05:56 Vous savez, mes parents trouvaient ça très bien,
06:00 parce que dans le mariage entre les Savoies et les Bourbons,
06:03 Bourbon, Parme, Sicile, ce que vous voulez,
06:06 il y a eu dans les 43 mariages dans l'histoire.
06:10 Donc un de plus, un de moins, ça aurait été peut-être une bonne idée,
06:14 mais moi, je n'avais aucune envie de me marier.
06:18 J'avais 17 ans, non, non, 15 ans.
06:22 J'aime beaucoup mon cousin, mais je ne l'aime pas d'amour, d'affection.
06:29 Comment on peut dire ça ?
06:31 Je l'ai toujours aimé avec beaucoup d'affection.
06:34 Mais le mariage arrangé, c'était quand on avait des pays,
06:39 quand nous étions des pions, les femmes.
06:42 Et puis il est parti faire son service militaire.
06:45 Il a eu six ans de service militaire,
06:48 donc deux dans l'infanterie, deux dans la marine, deux dans l'aviation.
06:52 Il est un homme qui était très dévoué à son pays.
06:57 Ça, je le sais, parce qu'il m'a dit qu'il était tout à fait prêt
07:02 pour servir son pays.
07:05 Et il l'a fait, d'ailleurs. Et il l'a fait bien.
07:08 L'ayant pressenti comme successeur possible,
07:12 le général Franco veut que le prince ait une solide formation.
07:15 Et Juan Carlos l'achève à l'académie militaire de Saragosse.
07:19 À 18 ans, il va vivre un drame fondateur.
07:24 En vacances avec sa famille et ses amis au Portugal,
07:27 Juan Carlos tue accidentellement avec un pistolet son frère cadet,
07:32 Alfonso, alors âgé de 14 ans.
07:35 Marie-Gabrielle de Savoie s'en souvient encore.
07:39 C'était un jeu de tissin, je me rappelle.
07:42 Ils étaient en train de jouer avec des pistolets,
07:45 et puis il y en avait un qui était chargé, et le coup est parti.
07:49 C'est des enfants, vous savez, ça c'est des enfants qui sont un peu inconscients.
07:54 Ils ont des accidents terribles. Ce sont les aléas de la vie.
07:58 Ce qu'on a raconté alors à l'opinion publique,
08:06 c'est que les deux enfants étaient en train de jouer avec un pistolet.
08:10 Deux enfants jouant avec une arme qui se décharge accidentellement.
08:15 Maintenant on sait qu'ils n'étaient pas des enfants,
08:18 que Juan Carlos avait plus de 18 ans,
08:21 qu'il suivait une formation militaire en particulier dans le maniement des armes.
08:26 On soupçonne également que le pistolet, qui était d'un petit calibre,
08:30 était un cadeau personnel de Franco.
08:33 Ni les autorités portugaises, ni les Espagnols
08:39 n'ont mené d'investigation au niveau de la situation.
08:43 Ni les policiers, ni les judiciaires,
08:46 suite aux pressions du régime franquiste qui a réussi à étouffer l'affaire.
08:51 Par des témoignages d'amis d'enfance du roi,
08:54 on sait qu'au sein de la famille royale, il y a eu beaucoup de suspicions.
08:58 Don Juan avait des doutes quant au fait que Juan Carlos ne l'ait fait intentionnellement.
09:04 Il l'aurait même obligé à jurer à genoux devant le drapeau espagnol
09:08 qu'il ne l'avait pas fait délibérément.
09:11 La question c'est quelle trace ça laisse chez lui,
09:15 comment il a intégré ça plus tard,
09:18 est-ce que c'est resté quelque chose qu'il a...
09:22 Je ne sais pas, alors là c'est très difficile de savoir en quoi ça a joué dans ses rapports ultérieurs,
09:29 d'autant plus que finalement en étant roi, il n'a plus de rivaux.
09:34 Juan Carlos reste fortement lié à la Suisse.
09:39 C'est à Lausanne, où réside sa grand-mère paternelle,
09:42 qu'il choisit de se fiancer avec Sofia, princesse de Grèce et de Danemark.
09:47 Un an plus tard, leur mariage est célébré à Athènes.
09:54 Franco encourage cette union avec l'héritière d'une des dynasties régnantes d'Europe.
10:00 Trois enfants naîtront de ce mariage,
10:06 Helena en 1963,
10:09 Christina en 1965
10:14 et enfin le futur héritier tant attendu, Félipé en 1968.
10:19 Il a eu trois enfants, bon de toute façon c'est ce qu'on attendait de lui, il n'avait pas le choix.
10:24 Donc il a été jusqu'à faire un garçon, puis une fois qu'il a fait un garçon, son boulot était fini.
10:30 Il avait assuré la transmission si je peux dire.
10:33 Son chemin est alors tout tracé vers le sommet de l'Etat espagnol.
10:38 En 1969, treize ans après la mort brutale de son frère,
10:42 Juan Carlos est confronté encore à un dilemme digne d'une tragédie grecque.
10:47 Pour accéder au trône, il va devoir trahir son père, Don Juan de Bourbon,
10:52 qui espérait encore devenir roi.
10:55 Depuis 1969, Juan Carlos est un homme de 16 ans.
11:00 Depuis 1969, Juan Carlos est l'héritier désigné du général Franco au titre de futur roi d'Espagne.
11:11 Et en acceptant cette fonction face au Parlement franquiste,
11:18 il a juré solennellement respecter les principes du mouvement national.
11:25 J'assure la loyauté au chef de l'Etat et je vais suivre les principes du mouvement national et les autres lois fondamentales du roi.
11:34 Il a trahi son propre père en acceptant le poste de successeur de Franco,
11:42 sautant ainsi l'ordre successoral et contre l'avis de son père, Don Juan.
11:46 Ce n'est pas comme si le père lui avait dit "fais-le, c'est bien que tu le fasses".
11:50 Non, le père n'a pas du tout apprécié, il s'est vraiment fâché avec Juan Carlos.
11:54 C'est la comtesse de Barcelone qui a fait beaucoup pour calmer les eaux.
12:00 C'est toujours difficile, mais à un moment donné, il faut se raisonner.
12:05 Si on rate son tour, il faut être content pour l'autre.
12:14 Formaté par le régime franquiste, Juan Carlos s'est désormais éloigné de son père naturel, Don Juan de Bourbon,
12:20 et s'est rapproché de son père spirituel, le général Franco.
12:24 Pour vous personnellement, que représente le général Franco ?
12:29 Pour moi, c'est un exemple vivant, jour à jour, par son dévouement patriotique en service de l'Espagne.
12:39 Et à part ça, j'ai pour lui une très grande affection et admiration.
12:45 Juan Carlos s'adonne à ses loisirs préférés.
12:53 Mais une grande partie des Espagnols souffre encore des blessures de la guerre civile.
12:58 Beaucoup d'entre eux doivent encore s'exiler pour des motifs politiques ou économiques.
13:06 Arrivée en Suisse en 1960, fille d'un républicain emprisonné par les franquistes,
13:16 Marie-Carmen Cid se souvient de ces années terribles marquées par la dictature.
13:21 C'était une peur que j'ai vécue pendant 20 ans, il n'y a pas de doute.
13:27 J'avais toujours peur qu'il revienne de nouveau les mauvais, pour moi c'était les mauvais,
13:33 qu'il revienne et qu'il nous fasse de nouveau du mal.
13:38 Et quand on est venu en Suisse en 1960, en vacances, j'ai vécu toujours avec ma mère,
13:44 puisque j'étais la dernière, les autres étaient mariés.
13:47 Et en arrivant en Suisse en vacances, j'avais toujours mon travail à Barcelone, très bien,
13:53 j'ai eu la sensation d'enfin, personne ne pouvait me faire du mal.
14:02 Et là, c'est la raison pour laquelle on est resté.
14:07 D'origine galicienne, José Ril raconte de son côté comment il a émigré en Suisse en 1978.
14:17 En tant qu'Espagnol, on voyait tous ces étrangers qui venaient de la Suisse avec des grandes voitures,
14:22 donc nous on était un peu rares.
14:24 Et je dis à mes collègues, écoute, je vais en Suisse, je reste une année,
14:28 je vais m'acheter une voiture et puis je reviens, et voilà, on va s'amuser.
14:31 Ce qui n'a pas été le cas, bien sûr, parce que ma première voiture, je l'ai achetée quand j'avais 30 ans seulement.
14:37 C'est pas si facile que ça la Suisse, quand même.
14:40 Dans les années 70, les manifestations contre le franquisme se multiplient en Suisse.
14:48 Des milliers de personnes descendent dans la rue pour dénoncer les exactions d'un régime mort et bon.
14:55 Les Espagnols, Franco a mort.
15:01 En 1975, la mort de Franco, le dictateur au pouvoir pendant 36 ans, a frappé les Espagnols.
15:09 Tristesse pour les uns, libération pour les autres.
15:13 José Ril vivait alors à Barcelone. Il se rappelle de ce jour mémorable.
15:22 On n'y croyait pas trop parce qu'à cette époque-là, il fallait pas trop parler.
15:27 Et on s'est retrouvé un peu comme libérés, un peu, parce que voilà,
15:32 on s'est trouvé un peu enfermés dans cette Espagne de l'époque, un peu cloisonnés.
15:37 On n'avait pas le droit d'aller vers les autres, d'aller à l'extérieur, donc on était vraiment enfermés.
15:43 Et pour nous, moi personnellement, dans notre classe, c'était un peu comme une petite libération.
15:49 La question était de dire qu'est-ce qui va se passer.
15:54 Parce que cette peur, elle était toujours malgré tout, de dire il va y avoir de nouveau une guerre,
16:01 les Espagnols vont s'entretuer, il y avait les franquistes, il y avait les rojos, comme on disait.
16:07 Et ça, c'est quand même mon pays d'origine.
16:11 Donc ça m'a touchée.
16:13 Alors voilà, c'était ça, et c'est là que le roi a intervenu.
16:19 J'espère pour Dieu et les saintes Évangiles,
16:22 que je vais faire accomplir les lois fondamentales du Royaume,
16:26 et garder la loyauté aux principes qui informent le mouvement national.
16:30 Le couronnement de Juan Carlos Ier a lieu deux jours seulement après la mort de Franco.
16:37 Juan Carlos accède au trône à 37 ans,
16:41 en s'affichant comme le garant de la continuité du régime franquiste.
16:45 Sa jeunesse et sa modernité séduisent pourtant les Espagnols,
16:50 qui espèrent que leur pays ressemblera à son image.
16:53 Tout le monde était pro Juan Carlos.
17:05 Ils avaient tendance toujours à dire "moi je ne suis pas monarchiste, mais je suis Juan Carlos".
17:11 L'Espagne s'affranchit du carcan imposé par la dictature franquiste,
17:17 et les moeurs se libèrent.
17:19 C'est à cette époque que le nouveau chef de l'État se révèle comme un grand séducteur.
17:24 Le mode opératoire de Juan Carlos avec ses maîtresses,
17:30 c'est qu'il a une relation plus ou moins sérieuse et respectable avec l'une d'entre elles,
17:36 tout en ayant en parallèle des aventures occasionnelles.
17:42 Sans oublier son épouse officielle, la reine Sofia,
17:48 avec laquelle il n'a pratiquement plus de relations intimes depuis des décennies,
17:52 comme tout le monde le sait.
17:55 Ce qui est intéressant, c'est son rapport aux femmes de façon un peu plus générale.
18:04 Effectivement, il partage la façon d'opérer que j'ai pu repérer sur pas mal de mal-aimés,
18:12 c'est-à-dire cette espèce de soif d'être aimé, mais d'incapacité d'aimer.
18:20 C'est quelqu'un qui, à mon avis, était incapable d'aimer une femme.
18:24 Le secrétaire de la maison royale d'Espagne, qui était aussi son secrétaire personnel,
18:31 Sabino Fernandez Campos, a raconté que lorsque le roi voyait de belles filles passer à la TV,
18:37 une présentatrice, une chanteuse ou une danseuse,
18:40 il demandait qu'on les lui amène à la zarzuela, la résidence royale,
18:45 presque comme un seigneur féodal réclamant son droit de cuissage.
18:50 Une autre affaire glauque au sujet des amantes de Juan Carlos
18:55 a été la mort non élucidée de Sandra Mozarowski,
18:59 une très jeune actrice des années 70 dont on savait qu'elle entretenait une relation avec Juan Carlos.
19:05 C'était connu dans le milieu artistique de la capitale par une certaine presse,
19:11 même si cela n'était pas rendu public dans les médias.
19:15 On a su que Sandra était enceinte et qu'elle voulait garder l'enfant.
19:19 Par la suite, on a appris qu'elle était tombée depuis sa terrasse,
19:24 en étant seule chez elle, soi-disant en arrosant ses plantes.
19:28 Cet épisode obscur n'a jamais fait l'objet d'une investigation.
19:34 Côté affaires, Juan Carlos saisit rapidement l'importance de nouer d'étroites relations avec les pays arabes,
19:41 à une époque où les crises pétrolières malmènent l'économie.
19:44 Il soigne les successifs rois d'Arabie Saoudite qu'il considère comme ses frères.
19:49 Des rumeurs sur les pays arabes, qui sont encore en cours de développement,
19:53 sont en train de se dérouler.
19:56 -Il semblerait que les premières commissions apparaissent,
20:00 à moins qu'il y en ait eu d'autres avant dont on ne sait rien,
20:04 pour sa médiation dans l'achat de pétrole en 1973.
20:08 Par ce biais, l'Espagne a pu être approvisionnée par les pays arabes,
20:15 et les pays arabes ont pu se réunir.
20:18 -C'est un peu comme si on avait un pays qui était en train de se réunir,
20:23 et par ce biais, l'Espagne a pu être approvisionnée par l'Arabie Saoudite
20:28 en pleine crise du pétrole.
20:30 Certains parlent d'un dollar, et d'autres de trois dollars par baril.
20:38 Et cela n'a fait qu'augmenter le prix du pétrole pour les citoyens espagnols,
20:44 car la Maison Royale percevait une partie du surcoût de ce produit.
20:52 -Chef de la diplomatie espagnole et ancien ambassadeur auprès de l'ONU,
20:56 Inocencio Arias a accompagné le roi Juan Carlos dans une quarantaine de pays.
21:01 Il se souvient des relations étroites entre le monarque
21:05 et les pays producteurs d'or noir.
21:07 -Le roi d'Arabie Saoudite avait dit que tant qu'il régnerait,
21:13 l'Espagne ne manquerait pas de pétrole.
21:16 Mise à part son amitié personnelle avec lui,
21:19 notre roi a réalisé alors que le monarque saoudien avait fait quelque chose d'important
21:23 non seulement pour lui, mais pour l'Espagne.
21:25 Le roi est toujours soucieux de l'avenir de l'Espagne.
21:28 Sa préoccupation, c'est l'Espagne, que l'Espagne aille de l'avant.
21:32 -La situation en Espagne reste tendue, pour trois raisons.
21:40 Une armée toujours nostalgique du franquisme,
21:44 un parti communiste légalisé désirant peser dans le nouvel échiquier politique
21:49 et une organisation terroriste basque, l'ETA, qui multiplie les attentats.
21:54 Face à ce cocktail explosif,
21:59 des poutchistes préparent en coulisses un coup d'Etat militaire.
22:04 -Piétez tout le monde !
22:06 -Tout à coup, un homme fait irruption dans mon bureau.
22:18 C'était un monsieur qui travaillait pour moi dans la section des dépêches
22:22 et il a l'air abasourdi, il me dit
22:24 "Directeur, directeur, il y a un assaut en cours au Parlement."
22:28 Moi, je ne comprenais pas ce qu'il me disait.
22:30 -Comment ça, un assaut ? Au Congrès ?
22:32 -Oui, des militaires ont donné l'assaut au Parlement.
22:35 -Toute cette incertitude et cette nervosité ont disparu vers minuit et demi
22:48 quand le roi est apparu en uniforme du chef de l'armée à la télévision espagnole
22:52 et a fait comprendre que tout cela devait se terminer,
22:55 qu'en fait, c'était terminé
22:57 et que l'Espagne voulait retrouver une vie législative et démocratique normale.
23:02 Juan Carlos, dès lors considéré officiellement comme le sauveur de la démocratie,
23:22 vit une véritable idylle avec un peuple espagnol reprenant goût à la liberté.
23:27 Il acquiert ainsi une stature internationale.
23:30 -Je trouve qu'il a très bien fait son rôle
23:34 parce qu'il y a eu un déséquilibre total, militaire et tout
23:38 et là, de nouveau, une peur de dire "Tiens, ça recommence, on finit jamais."
23:43 Alors que là, il y a eu un esprit, une sérénité pour parler aux Espagnols.
23:51 Il faut dire qu'il avait beaucoup de militaires en sa faveur,
23:55 ce qui a rassuré le peuple, que c'était très important.
23:58 En l'absence d'une déclassification des archives de l'époque,
24:02 le rôle exact joué par Juan Carlos dans ce coup d'État avorté reste à définir.
24:08 Le roi d'Espagne est au sommet de sa gloire.
24:11 On le voit partout.
24:12 Mondial de foot, Jeux Olympiques de Barcelone.
24:16 Adulé par une majorité d'Espagnols, Juan Carlos est alors intouchable.
24:21 Protégé par une constitution espagnole lui garantissant l'impunité,
24:25 rien ne semble alors lui résister.
24:28 -Il s'est constitué aussi un sentiment d'excès
24:30 au travers des multiples relations qu'il a eues avec des femmes,
24:33 également avec ce pouvoir, au fond, qu'il s'est octroyé sur les animaux.
24:38 Tuer un animal, tuer, il y a une jouissance de tuer.
24:45 Parce que c'est une prise de pouvoir sur la vie de l'autre.
24:48 Suivant la tradition des Bourbons,
24:51 Juan Carlos affectionne la chasse depuis toujours.
24:54 En 1998, lors d'un voyage dans le Caucase,
24:58 il ne boute pas son plaisir lorsque Nour Sultan Nazarbayev,
25:02 le maître autocratique du Kazakhstan,
25:04 lui offre une extraordinaire parure composée de peau de léopard des neiges,
25:08 l'une des espèces les plus menacées au monde.
25:12 Ancien maire d'Almaty, capitale économique du Kazakhstan,
25:16 l'opposant politique Viktor Krapunov a rencontré dans son pays en 2002
25:20 le roi d'Espagne, venu en voyage privé pour chasser.
25:24 Il lui fait visiter la région, lui offre un sabre,
25:27 et il est présent à l'aéroport lorsque le monarque s'apprête à repartir.
25:32 Il raconte alors ce qu'il a vu.
25:34 -A l'époque, une de mes fonctions était d'accueillir des monarques
25:38 ou des présidents lors de leur arrivée à Almaty
25:41 et de raccompagner ses hôtes VIP également lors de leur départ.
25:45 Normalement, j'arrive à l'avance à l'aéroport pour m'assurer que tout est en ordre.
25:48 Ce jour-là, j'ai vu en arrivant à l'aéroport l'avion de Juan Carlos
25:51 stationné à côté de la salle VIP.
25:54 Ils étaient en train d'embarquer dans la soute toute une série de trophées de chasse,
25:58 des têtes de mouflons avec leurs cornes en spirale,
26:00 des sangliers sauvages et plein d'oiseaux.
26:09 Mais Viktor Krapunov a aussi assisté à une scène étrange.
26:13 -J'étais dans la salle VIP quand les deux chefs d'État du Kazakhstan et d'Espagne sont arrivés.
26:21 Ils sont sortis des voitures pour gagner la salle VIP.
26:25 Et c'est là que j'ai vu des hommes de la sécurité personnelle du président du Kazakhstan
26:33 apporter quatre mallettes dans la cabine de l'avion de Juan Carlos.
26:38 Quand l'avion était prêt à décoller, Noursultan Nazarbayev, qui était à côté de moi,
26:43 m'a dit à propos de Juan Carlos, "Tu vois, lui, c'est un roi, mais il est pauvre,
26:47 et je dois l'aider comme je peux."
26:49 Selon un ancien dirigeant des services secrets kazakhs,
26:53 ces mallettes auraient contenu 5 millions de dollars.
26:56 Le gouvernement kazakh actuel n'a pas souhaité détailler le contenu des mallettes.
27:00 Quoi qu'il en soit, des entreprises espagnoles ont suite à ces mallettes
27:05 décrochées de gros contrats au Kazakhstan,
27:08 à l'exemple d'une commande d'un milliard d'euros pour les trains Talgo en 2012.
27:13 Ces voyages privés à l'étranger du roi se sont multipliés
27:22 sans que, curieusement, l'opinion publique en soit informée.
27:26 Comme si un pacte de silence protégeait ces agissements.
27:30 "D'où vient ce pacte ? C'est le grand pacte de la transition,
27:36 protéger la monarchie.
27:38 Qui est derrière cette entente ?
27:40 Les grands groupes de communication, les grandes banques et certains partis politiques,
27:44 précisément ceux qui se sont partagé le pouvoir en alternance
27:48 tout au long de ces dernières années."
27:50 Ce n'est pourtant pas en Espagne, mais depuis le Botswana,
27:54 qu'un événement va soudainement faire émerger un nouveau roi.
27:57 Dans cette vidéo publique provenant du site 777ranch.com
28:01 et visible sur Youtube,
28:03 l'organisateur de Safari Deluxe, Jeff Rahn,
28:06 vante une chasse réservée à une certaine élite.
28:09 C'est au cours d'une chasse similaire que Juan Carlos abat un autre éléphant.
28:18 Cette photo fait le tour du monde.
28:20 Le scandale éclate, et le paysage est en danger.
28:23 Le roi de la Chasse à l'éléphant.
28:26 Le scandale éclate, faisant les manchettes de la presse mondiale.
28:30 Ancien ministre de la Défense et président du Parlement,
28:37 José Bono a eu des contacts pratiquement quotidiens avec le roi.
28:41 Il se souvient de cette chasse à l'éléphant.
28:44 "Je vais vous raconter ce qui m'est arrivé cette nuit-là.
28:49 Ma fille, âgée de 11 ans à cette époque,
28:53 qui m'avait souvent entendu parler du roi,
28:56 m'a demandé,
28:58 'Papa, dis-moi que ce n'est pas vrai que le roi a tué un éléphant'
29:03 Et à ce moment-là, quand j'ai dû lui répondre que c'était vrai,
29:08 j'ai réalisé que d'avoir tué cet éléphant
29:11 allait causer au roi beaucoup plus de problèmes
29:14 que ce qu'il aurait pu imaginer quand il est parti chasser."
29:17 La contestation gagne la rue dans une Espagne touchée par la crise économique.
29:21 Mais cette affaire révèle aussi la présence d'une femme,
29:24 Corinna Zuzyn-Wittgenstein,
29:26 dont l'image inonde les réseaux sociaux.
29:29 Divorcée en 2004 d'un prince allemand,
29:32 elle rencontre cette année-là le roi Juan Carlos
29:35 au cours d'une partie de chasse, et devient son amante.
29:38 L'apparition médiatique de cette femme choque l'opinion publique
29:42 et entame profondément l'image de la femme.
29:45 "Là, il n'a pas été correct, ni avec sa famille,
29:48 ni avec son peuple, ça c'est clair.
29:52 Et ça a diminué un peu dans l'estime.
29:57 C'est pas très joli."
30:00 Ancien directeur adjoint du quotidien El Mundo,
30:04 Eduardo Hinda a créé en 2015 OK Diario.
30:08 Ce média digital est à la pointe dans le domaine des enquêtes d'information.
30:12 Et en particulier sur l'affaire de la chasse au Botswana.
30:16 "Comment est-ce qu'on a su qu'il était en train de chasser des éléphants,
30:22 et qu'il était avec Corinna ?
30:25 Parce qu'il était en pleine savane, dans une cabane,
30:28 un lodge de luxe.
30:31 Il est tombé du lit et il s'est fracturé la hanche.
30:35 Il a dû aller à la chambre,
30:38 il est tombé du lit et il s'est fracturé la hanche.
30:42 Il a dû être rapatrié en urgence.
30:45 Il était accompagné par 3 ou 4 gardes du corps,
30:48 mais ne disposait pas de l'infrastructure officielle
30:51 qui entoure habituellement le chef de l'Etat, le roi d'Espagne.
30:54 On a dû le ramener en Espagne.
30:57 Les médias ont alors ébruté qu'il s'était fracturé la hanche.
31:00 Ils ont dévoilé que c'était au cours d'une chasse à l'éléphant,
31:03 et ils ont raconté qu'il était avec Corinna, qui était sa maîtresse à l'époque.
31:06 Quand il a eu la révention et qu'il sort de l'hôpital,
31:09 il prononce cette phrase célèbre, un peu bête, de petit enfant,
31:12 et je ne sais pas qui a bien pu la lui souffler.
31:15 Je suis très désolé.
31:18 Je me suis fait mal et ça ne va pas reprendre.
31:21 On savait déjà depuis longtemps qu'il chassait des éléphants
31:27 et qu'il avait participé à de nombreuses parties de chasse.
31:30 Même le soi-disant scandale d'être accompagné par son amante
31:33 avait des précédents, d'autres affaires antérieures.
31:36 Mais Botswana et l'éléphant du Botswana
31:39 ont réussi à briser le silence des médias les plus conservateurs
31:42 et la nouvelle a fait la une des revues et des journaux télévisés
31:45 des grandes chaînes de télévision.
31:48 Ignacio Sembrero est un journaliste espagnol
31:55 spécialisé dans les enquêtes politiques.
31:58 En 2012, c'est vraiment la dernière fois
32:01 que l'on voit l'événement de la chasse.
32:04 En 2012, c'est vraiment l'année du tournant,
32:07 c'est l'omerta, la loi du silence que s'est imposée
32:10 d'abord la classe politique et ensuite la grande presse
32:13 de Madrid et de Barcelone se rend avec ce voyage du roi
32:16 avec Corina, l'arsène et son fils au Botswana.
32:19 Corina et Juan Carlos partagent une passion commune pour la chasse.
32:22 Quand elle rencontre le roi d'Espagne,
32:25 elle travaille pour BOS ENCO, plus ancien armurier de Londres,
32:28 et organise des safaris VIP.
32:31 Je pense que cette femme lui a résisté.
32:34 Et là, ça l'a coincé.
32:37 C'est comme un gibier qui lui échappe.
32:40 Et là, il a plongé.
32:43 En novembre 2020,
32:46 accompagné par Manuel Cerdan,
32:49 chef de la cellule enquête de OK Diario,
32:52 Eduardo Hinda réalise à Londres une interview exclusive
32:55 de Corina Zuzain-Wittgenstein, visible sur leur site public.
32:58 Des extraits nous ont été accordés.
33:01 Le safari au Botswana n'a pas été rendu public
33:04 d'une manière classique.
33:07 Normalement, un paparazzi vole une photo
33:10 ou quelqu'un commet une indiscrétion.
33:13 Puis soudainement, la nouvelle est reprise par tous les médias.
33:16 Dans ce cas, notre voyage a été rendu public délibérément
33:23 selon son propre aveu par le général Sanz-Roldan.
33:26 Ancien chef des services secrets espagnols,
33:29 le général Félix Sanz-Roldan avait dans son radar Corina.
33:32 Je crois que ceux qui ont filtré l'information
33:35 du voyage au Botswana,
33:38 c'est le Centre national d'intelligence
33:41 et les services secrets espagnols.
33:44 Car il y avait de nombreuses pressions,
33:47 à commencer par la famille royale,
33:50 et à la famille espagnole,
33:53 comme Corina.
33:56 Sanz-Roldan a une responsabilité dans la destruction
33:59 de notre relation, et je pense que sa mission
34:02 était de la détruire, car il ne m'approuvait pas.
34:05 Et il n'était probablement pas le seul dans ce cas.
34:08 Juan Carlos m'a confié en 2011 avoir été mis au courant
34:11 de conversations secrètes qui se sont déroulées
34:14 au palais derrière son dos.
34:17 Il a été considéré comme un déu-trône,
34:20 car elle avait beaucoup plus d'influence sur son fils
34:23 que sur son mari.
34:26 Voilà exactement ce qu'il m'a dit.
34:29 Je suis convaincue qu'il a été victime d'un complot
34:32 pour le pousser à abdiquer.
34:35 Corina a été la victime des services secrets
34:38 de ce pays. Ils l'ont harcelée, menacée.
34:41 Ils ont même cambriolé son appartement de Monaco
34:44 et ils ont laissé l'appartement sans dessus-dessous.
34:47 Quand votre maison et votre bureau ont été cambriolés
34:53 et que les agents secrets d'un pays comme l'Espagne
34:56 passent la frontière en toute illégalité pour y mener
34:59 des opérations clandestines, en empiétant la souveraineté
35:02 d'autres pays et sans respecter les protocoles
35:05 s'appliquant normalement pour ce type d'opérations,
35:08 vous réalisez qu'ils peuvent vous atteindre
35:11 où ils veulent. Ce même jour, je me suis rendue en Suisse.
35:14 J'ai découvert qu'on avait déposé dans mon appartement
35:17 de Villars un livre sur la mort de la princesse Diana.
35:20 On avait donc réussi à pénétrer également dans mon appartement
35:23 en Suisse. J'ai aussi reçu un appel téléphonique
35:26 et une voix m'a rappelé qu'il existait beaucoup de tunnels
35:29 entre Monaco, où je réside, et Nice.
35:32 Mais Corina Zuzajn-Wittgenstein était aussi une femme d'affaires
35:35 profitant de sa relation intime avec le roi d'Espagne.
35:38 C'est en février 2006, à Stuttgart,
35:41 que tout se joue. En tailleur crème,
35:44 une femme suit à peu de distance le roi Juan Carlos
35:47 en visite en Allemagne. En accompagnant le roi
35:50 comme consultante, elle représente alors, officieusement,
35:53 les intérêts de l'Espagne à l'étranger.
35:56 Lors d'une réception chez le consultant allemand Manfred Osterwald,
35:59 qui entoure sur cette photo Juan Carlos et Corina,
36:02 on discute grands projets. Mais...
36:05 Pourquoi les services secrets espagnols lui en voulaient ?
36:08 En savait-elle trop ?
36:11 À ma connaissance, je n'ai jamais possédé
36:14 de documents sensibles ou classifiés reliés à des politiciens espagnols
36:17 ou à des intérêts de l'Espagne.
36:20 Toutes ces révélations éclatent
36:23 quand un ancien policier, habitué des intrigues de haut niveau,
36:26 la piège en l'enregistrant.
36:29 Dans ses audios rendus publics par Ok Diario,
36:32 elle incrimine en privé le roi pour avoir touché
36:35 des commissions illicites et ouvert des comptes opaques en Suisse.
36:38 En juillet 2018,
36:41 une source nous transmet l'enregistrement d'une conversation
36:44 entre un commissaire espagnol, le commissaire Villarejo,
36:47 et Corina Susanne Wittgenstein.
36:50 Dans ces enregistrements, Corina parle sans équivoque
36:53 du roi, de sa participation à des commissions opaques,
36:56 des comptes en banque qu'il aurait cachés dans des paradis fiscaux,
36:59 et même si elle le rapporte en privé,
37:02 lorsque nous publions ces enregistrements,
37:05 l'affaire éclate, et ça pousse Yves Berthessat
37:08 à démarrer son enquête, qui se poursuit de nos jours
37:11 et dont j'espère qu'elle aboutira bientôt.
37:14 Le procureur genevois Yves Berthessat
37:17 ouvre une enquête pour blanchiment de capitaux.
37:20 Il demande l'aide de la justice espagnole dans ce document
37:23 que nous nous sommes procurés.
37:26 C'est une histoire traduite en espagnol
37:29 où le procureur indique que, à partir de 2006,
37:32 l'Arabie saoudite lance un concours international
37:35 pour construire un train à grande vitesse
37:38 reliant Médine à la Mecque.
37:41 Pour gagner ce concours d'un montant estimé
37:44 à plus de 6,3 milliards d'euros,
37:47 plusieurs entreprises espagnoles se sont portées candidates
37:50 en offrant un rabais de 30% à l'Arabie saoudite.
37:53 "From Mecca to Medina"
37:56 Construit par un consortium espagnol,
37:59 ce train, que l'on voit dans ce film promotionnel
38:02 visible sur Youtube, est désormais en fonction.
38:05 Une question demeure.
38:08 Le rabais offert aux Saoudiens
38:11 a-t-il été accordé en échange du paiement de commission ?
38:14 Yves Berthessat étoffe son enquête
38:17 en se basant sur les déclarations de Korinatou Zainvidgenstein,
38:20 affirmant que Juan Carlos
38:23 avait perçu des commissions illégales
38:26 liées à des contrats publics obtenus par des entreprises espagnoles
38:29 et que l'ancien roi d'Espagne
38:32 aurait réclamé le paiement d'une commission illicite
38:35 d'un montant de 80 à 100 millions d'euros
38:38 pour sa participation à l'adjudication
38:41 à un consortium d'entreprises espagnoles chargé de construire
38:44 la ligne reliant Médine à la Mecque.
38:47 Le roi aurait aussi caché une partie de ces fonds
38:50 dans des comptes bancaires à Genève au nom d'hommes de paille,
38:53 parmi lesquels un avocat et un gérant de fortune.
38:56 Inversement intrigue le procureur Berthessat.
38:59 65 millions d'euros,
39:02 l'équivalent de 100 millions de dollars,
39:05 virés par l'Arabie saoudite.
39:08 Le roi affirme qu'il s'agit d'une donation.
39:11 Mais, comme le relate la presse suisse,
39:14 ne pourrait-il pas provenir de commissions liées au train du désert ?
39:17 Sachant que dans ce pays,
39:20 les gros travaux ne sont possibles qu'après la bénédiction
39:23 des monarques saoudiens,
39:26 le roi d'Espagne avait préparé un voyage à Riyad,
39:29 où il avait notamment retrouvé une femme d'affaires,
39:32 opérant dans la sphère saoudienne,
39:35 l'Iranienne Shapari Zanganeh.
39:38 Qui est Shapari Zanganeh ?
39:41 C'est une intermédiaire iranienne de haut niveau,
39:44 très connue dans les milieux financiers internationaux,
39:47 recommandée comme par hasard par Juan Carlos,
39:50 et c'est elle qui touche la presque totalité
39:53 des plus de 200 millions d'euros qui ont été payés en commission,
39:56 dans le cadre de l'octroi du contrat de construction
39:59 du train de haute vitesse Lamec-Medina à des entreprises espagnoles.
40:02 Dans l'enregistrement qui a déclenché l'enquête du procureur Berthessat,
40:05 Corinna Zuzain-Wittgenstein dit que le roi Juan Carlos
40:08 avait réclamé sa part dans cette affaire.
40:11 Depuis, elle affirme publiquement ne pas reconnaître sa voix
40:20 dans ses bandes-sons enregistrées à son insu.
40:23 Selon les médias espagnols, l'auteur présumé de ces audios,
40:26 le commissaire Villarero, aurait été piloté
40:29 par les services secrets espagnols afin d'établir
40:32 ce que savait Corinna sur ses affaires d'Etat.
40:35 Et qu'en est-il de ces 65 millions ?
40:38 Yves Berthessat a découvert que le roi Juan Carlos
40:41 s'est mis en contact avec l'avocat et le gérant de fortune genevois
40:44 pour qu'il crée un montage financier afin de recevoir
40:47 une donation de la part du monarque saoudien.
40:50 En 2008, les deux hommes de paille créent au Panama
40:53 la fondation Loukoum au nom de Juan Carlos.
40:56 Le roi d'Arabie saoudite transfère 65 millions d'euros
40:59 sur le compte de la fondation Loukoum
41:02 à la banque Mirabo.
41:05 En 2012, Juan Carlos transfère une partie des fonds à Corinna.
41:08 L'argent passe de Genève à Nassau au Bahamas
41:11 à la banque Gonet, qui n'a pas souhaité clarifier son rôle.
41:14 Entre 2016 et 2017, après des achats immobiliers,
41:17 Corinna vire l'argent restant, 42 millions de dollars,
41:20 dans une banque américaine.
41:23 En décembre 2018, l'avocat et le gérant de fortune,
41:26 la banque Mirabo ainsi que Corinna Zuzein Wittgenstein
41:29 sont prévenus, c'est-à-dire soupçonnés
41:32 de blanchiments aggravés.
41:35 En cas de jugement, ils risquent jusqu'à 5 ans de prison.
41:38 En l'état de l'enquête, tous bénéficient
41:41 de la présomption d'innocence.
41:44 Aucun des prévenus je ne vois via leurs avocats respectifs
41:47 n'ont souhaité s'exprimer.
41:50 Pour des raisons légales, nous avons choisi de ne pas divulguer
41:53 les noms de l'avocat et du gérant de fortune,
41:56 mais la banque Mirabo indique avoir agi conformément
41:59 aux droits et à ses devoirs.
42:02 Maître Vincent Jeanneret, avocat et expert en matière bancaire,
42:05 donne son point de vue.
42:08 - Je ne peux pas m'exprimer sur la procédure en cours.
42:11 Une banque qui accepte de l'argent
42:14 vérifie son origine, les circonstances
42:17 dans lesquelles cet argent lui est remis
42:20 et ne l'accepte qu'après un certain nombre de vérifications.
42:23 - Tout dépend de l'avis que se fait la banque
42:26 sur le régime en place à l'étranger.
42:29 Mais à partir du moment où il émane d'une autorité valablement
42:32 constituée et constituée au regard du droit international public,
42:35 il n'y a pas d'interrogation spécifique à avoir.
42:38 Le pays que vous citez ne fait pas partie des pays mis à ban
42:41 de la communauté internationale ou qui fassent l'objet d'un embargo
42:44 ou d'une mesure décrétée par le Conseil fédéral à son endroit.
42:47 Je ne vois pas qu'à partir du moment où de l'argent
42:50 est remis au ministère des Finances, on puisse avoir un problème
42:53 quant à la licéité à l'origine de l'argent.
42:56 - Lors de son interview à OK Diario, dans un extrait visible
42:59 sur leur site que l'on reproduit avec le raccord,
43:02 Corinna Zuzain-Wittgenstein donne sa version des faits.
43:05 - Ces 65 millions étaient un cadeau qu'il avait reçu
43:08 de l'ancien roi Abdallah d'Arabie Saoudite en 2008.
43:11 Nous savons que les familles royales espagnoles et saoudiennes
43:14 ont noué des liens étroits d'amitié.
43:17 Quand Juan Carlos était très malade en 2011,
43:20 il a commencé à me parler de sa volonté testamentaire.
43:23 Il voulait offrir un certain nombre de choses à mon fils.
43:26 Il était préoccupé que sa famille ne respecte pas sa volonté
43:29 s'il la consignait dans un testament classique.
43:32 Il a voulu donc nous faire un don.
43:35 Je n'ai jamais cherché à comprendre.
43:38 Je n'ai jamais discuté avec lui du montant.
43:41 Vous devez comprendre que je ne suis pas une personne
43:44 qui ne peut jamais discuter avec lui du montant.
43:47 Vous devez comprendre que je ne lui ai jamais demandé
43:50 quoi que ce soit.
43:53 Tout cela relevait de son désir personnel et on ne peut pas
43:56 discuter avec un homme sur ce qu'il veut vous donner.
43:59 J'ai reçu cette somme très élevée.
44:02 C'était un cadeau extrêmement généreux.
44:05 Pour moi, cela a été une grande surprise.
44:08 - Mais ces 65 millions versés par les Saoudiens à Juan Carlos
44:11 ne sont pas en 2012 cadeau ou, comme le relate la presse
44:14 internationale, commission opaque liée à ce contrat
44:17 du train du désert.
44:20 Le procureur Bertossa doit encore le démontrer.
44:23 - Je crois que le procureur Bertossa veut faire un certain
44:26 nombre de vérifications et puis il arrivera un moment
44:29 où il devra prendre la décision soit de classer,
44:32 soit de renvoyer au jugement.
44:35 J'ai le sentiment qu'il doit surmonter ces deux obstacles
44:38 d'une part la démonstration d'un crime préalable et d'autre part
44:41 savoir quel type d'infraction il peut reprocher concrètement
44:44 dans le cas d'espèce.
44:47 - C'est vrai, l'histoire des 5 millions, ça fait beaucoup.
44:50 Pour un roi de l'Arabie Saoudite qui s'achète par exemple
44:53 un joueur de foot de 5 millions, 300 millions,
44:56 c'est rien du tout.
44:59 C'est vrai qu'il aurait dû les déclarer, ça c'est une bonne chose
45:02 mais je dois dire qu'à l'époque, tous les gens qui gardaient
45:05 beaucoup d'argent, c'est une espèce de chose naturelle
45:08 d'essayer de cacher l'argent à tous les niveaux.
45:11 - Mis sous pression par tous ces scandales,
45:14 le roi abdique en 2014.
45:17 Son fils Félipé lui succède et suite à l'affaire saoudienne,
45:20 finit par renoncer à l'héritage de son père.
45:23 Mais la colère gronde contre une monarchie que le rappeur
45:26 Pablo Hassell estime héritée de la dictature de Franco.
45:29 - Je suis un peu déçu, je suis un peu déçu.
45:32 - Pablo Hassell estime héritée de la dictature de Franco.
45:35 Comme sur cette image qui illustre son clip.
45:38 - La monarchie est une institution qui nous coûte
46:01 des millions d'euros, qui devrait aller dans le financement
46:04 des droits comme la santé, l'éducation, le logement, etc.
46:07 Mais qui sont dilapidées pour entretenir une famille
46:10 que nous n'avons même pas élue pour qu'elle puisse vivre
46:13 dans le luxe à nos frais.
46:16 Et en plus, ils exercent la répression afin d'empêcher
46:19 que l'on divulgue tout ce qu'ils font.
46:22 - Nous avons interviewé Pablo Hassell à Madrid,
46:25 quelques jours avant son entrée en prison.
46:28 Pour la 1re fois en 2015, pour "Apologie du terrorisme",
46:31 il a écopé le 16 février de 9 mois de prison
46:34 pour injure à la couronne et aux forces de l'ordre.
46:37 D'autres procédures en cours pourraient aggraver sa peine.
46:40 Pour la 1re fois en Europe, un rappeur est incarcéré
46:43 pour délit d'opinion.
46:46 Un collectif de rappeurs lui rend hommage
46:49 dans ce clip tourné à la prison Modelo de Barcelone.
46:52 - Rappeur, ce n'est pas un crime.
46:55 Dans la prison, les plus faibles et les plus pauvres, non.
46:58 En Ginebra, les patriotes se cachent.
47:01 Liberté, restriction.
47:04 En prenant des positions.
47:07 Les prisons sont des tombes.
47:10 Les corps sont des lamiens.
47:13 - Avocat spécialisé dans la défense de militants
47:16 et des 15 rappeurs poursuivis par la justice, dont Pablo Hassell,
47:19 défend une liberté d'expression qu'il estime violée en Espagne.
47:22 - À part le cas de Pablo Hassell,
47:28 d'autres rappeurs ont aussi eu des condamnations fermes.
47:31 Certains sont même en exil, dans l'attente de leur extradition
47:34 en Espagne et de leur incarcération.
47:37 Et quel est leur délit ? Chanter.
47:40 Ils sont condamnés à cause de leur démarche artistique critique
47:43 envers les pouvoirs établis, la monarchie, etc.
47:46 Le roi est intouchable, la banque est intouchable,
47:49 l'Eglise catholique est intouchable,
47:52 l'Espagne est le pays des intouchables.
47:55 - Pablo Hassell a choisi le bagne.
47:58 L'alternative qu'il a refusée aurait été de partir en exil,
48:01 comme Valtonik, autre rappeur espagnol réfugié à Bruxelles
48:04 et condamné à 3 ans et demi de prison pour injure à la couronne.
48:07 - J'ai longuement médité sur la question de l'exil
48:13 en partant d'une analyse politique, j'ai décidé de rester en Espagne.
48:16 Car si on nous réprime, c'est pour tenter de réduire au silence notre message.
48:19 Devant choisir entre la prison ou l'exil,
48:22 j'ai choisi l'option donnant le plus de poids au message
48:25 pour lequel j'ai démarré dans le rap.
48:28 Ce qui va m'aider à supporter cette incarcération,
48:31 qui sera probablement longue, c'est la conscience.
48:34 Le fait de savoir que ce que je fais est une modeste contribution
48:37 pour apporter un message de confiance,
48:40 le fait de savoir que ce que je fais est une modeste contribution
48:43 pour apporter des changements,
48:46 c'est ce qui me donne de la force et du courage
48:49 pour affronter toute difficulté, y compris la prison.
48:52 Je connais beaucoup de groupes qui me disent "nous pensons comme toi,
49:07 nous sommes aussi républicains, nous aimerions faire des chansons
49:10 contre la monarchie, mais nous ne voulons pas finir en prison".
49:13 Ils ont réussi à nous imposer une autocensure
49:16 qui nous empêche par exemple de faire plus de chansons contre la monarchie.
49:19 Son entrée en prison est couverte par l'ensemble des médias internationaux.
49:24 Des émeutes éclatent dans les principales villes d'Espagne.
49:53 200 personnalités des milieux artistiques,
49:56 dont le cinéaste Pedro Almodovar et l'acteur Javier Bardem,
49:59 se mobilisent pour sa libération.
50:02 En Espagne, le débat se centre désormais sur la pertinence de la monarchie.
50:05 Je ne suis pas monarchiste.
50:11 Je ne suis pas prêt à défendre que l'on puisse hériter d'un état
50:14 comme on hérite d'une maison ou d'un immeuble.
50:21 Je crois fermement que tout pouvoir émane du peuple
50:24 et qu'il doit se renouveler périodiquement.
50:27 Dans ce sens, je suis républicain, mais je suis accidentaliste.
50:30 Et la monarchie nous a été bénéfique.
50:33 En 1978, les Espagnols ont signé un pacte constitutionnel
50:36 en vertu duquel, nous, les socialistes,
50:39 nous avons accepté ce qui ne nous plaisait pas, la monarchie.
50:42 D'un point de vue parlementaire,
50:50 c'est difficile d'instaurer une république,
50:53 surtout à cause des partis politiques qui dominent le Parlement
50:56 et qui protègent la monarchie,
50:59 en empêchant par exemple la création de commissions d'enquête
51:02 pour des questions comme celles des dépenses de Juan Carlos à Abu Dhabi.
51:05 Exilé depuis août 2020 à Abu Dhabi,
51:17 le roi y vivrait désormais dans une somptueuse villa
51:20 après avoir été logé dans le palace le plus luxueux de l'émirat.
51:23 À plus de 10 000 francs la nuit,
51:26 cette dépense accentue la polémique
51:29 sur ce comportement toujours aussi scandaleux.
51:32 Le roi était obligé de partir.
51:36 Ils l'ont mis à la porte.
51:39 Donc il devait bien aller quelque part.
51:42 Alors il a choisi un pays où le gouvernement l'apprécie
51:45 et où il dispose d'une sphère privée
51:48 qu'il ne pourrait pas avoir dans un autre pays.
51:51 J'espère qu'il va rentrer dans son pays
51:54 et qu'on oublie un peu toutes ces histoires
51:57 et qu'on le laisse en paix parce qu'il a mérité 37 ans de métier,
52:00 vous savez, c'est pas agréable.
52:03 C'est pas un métier très excitant de faire le roi.
52:06 Enfin, pour qui n'a pas d'ambition.
52:12 Juan Carlos est dans une impasse.
52:15 S'il rentre au pays, il devra s'expliquer face à la justice.
52:18 S'il ne rentre pas, il risque de mourir en exil,
52:21 perpétuant la malédiction de ses ancêtres.
52:24 Tous les regards se tournent désormais vers son fils Felipe,
52:27 roi d'Espagne depuis bientôt 7 ans.
52:30 Saura-t-il vraiment se détacher de l'image de son père ?
52:33 Et saura-t-il préserver une monarchie
52:36 dont l'image a été aussi sévèrement atteinte ?
52:40 ...
52:43 - Fidèle à sa règle d'objectivité,
52:57 Temps présent a sollicité en vain une interview
53:00 avec le roi Juan Carlos lui-même via le service de presse du Palais Royal.
53:03 Nous avons également essuyé un refus de son avocat,
53:06 mais nous avons reçu des deux procureurs espagnols en charge du dossier
53:09 ainsi que du procureur Genevois, Yves Berthossat.
53:12 Belle soirée et belle semaine.
53:15 Continuez à bien prendre soin de vous et à bientôt.
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