Comment évaluer le coût écologique d’une œuvre XR ? Quels futurs ces premières études d’impact laissent-elles entrevoir ?Modération : Adrien Cornelissen, auteur et journaliste spécialiste en création numérique.avec
Jean-François Jégo : Maître de conférences au département Arts & Technologies de l’Image et dans l’équipe de recherche INREV – Image Numérique et Réalité Virtuelle, de l’Université Paris VIII.
Marc Lopato : Co-fondateur de Diversion cinema qui produit et diffuse des œuvres de réalité virtuelle (VR) depuis 2016.
Benoit Ruiz : Expert et consultant pour la transition bas-carbone et l’atténuation des dommages environnementaux des activités du numérique. Membre du projet CEPIR (Cas d’étude pour un immersif responsable).
Jean-François Jégo : Maître de conférences au département Arts & Technologies de l’Image et dans l’équipe de recherche INREV – Image Numérique et Réalité Virtuelle, de l’Université Paris VIII.
Marc Lopato : Co-fondateur de Diversion cinema qui produit et diffuse des œuvres de réalité virtuelle (VR) depuis 2016.
Benoit Ruiz : Expert et consultant pour la transition bas-carbone et l’atténuation des dommages environnementaux des activités du numérique. Membre du projet CEPIR (Cas d’étude pour un immersif responsable).
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00:00:00 Bonjour, je m'appelle Adrien Cornelissen, je suis journaliste, je travaille sur l'impact
00:00:07 des technologies dans le domaine de la création et notamment toutes les mutations engendrées
00:00:13 sur le champ des arts numériques, en l'occurrence les mutations écologiques, sociales, économiques.
00:00:19 Et aujourd'hui nous avons le plaisir de discuter avec trois experts sur cette question du coût
00:00:25 écologique du navrixer. Je vais d'abord présenter les intervenants et ensuite on va rentrer
00:00:29 dans les débats. Il y aura deux axes que je vais vous présenter. La première personne
00:00:35 que je vais introduire c'est Marc Lopato qui est cofondateur de Diversion Cinéma. J'ai
00:00:40 pris quelques notes parce que vous avez tous un CV qui est assez dense. Marc, tu as cofondé
00:00:47 donc Diversion Cinéma et tu diriges les opérations de recherche et développement. Tu interviens
00:00:53 régulièrement en tant qu'expert de la diffusion et distribution des œuvres verts, puisqu'en
00:00:57 l'occurrence Diversion Cinéma c'est un distributeur d'expériences immersives pour divers secteurs
00:01:04 d'activités, notamment muséales, etc. C'est ça, on se définit comme une agence spécialisée
00:01:13 dans les installations et les événements immersifs et on a également une activité
00:01:17 de distribution. Tout à fait. Tu peux nous citer une ou deux œuvres phares ? Oui, je
00:01:23 peux citer une œuvre sur laquelle on travaille en ce moment, qui est une œuvre hybride qui
00:01:27 s'appelle Energeia, qui a été réalisée par Hugo Arsac. Une très belle œuvre en
00:01:32 nuage de poing avec un discours écologique sur l'impact de la production de l'électricité,
00:01:39 qui est à la fois dans un masque mais également avec de la projection. Un jeune artiste marseillais
00:01:47 à suivre. Tout à fait, exactement. A ta droite, Jean-François Gégaud, tu es
00:01:55 maître de conférence au département Art, Technologie de l'image dans l'équipe de
00:01:59 recherche Images numériques et réalité virtuelle, autrement dit INREV à Paris 8,
00:02:05 et également tu as la spécificité d'être artiste et chercheur. Tu donnes des cours
00:02:11 d'écosophie, d'expérience immersive interactive et tu t'appuies sur des installations
00:02:17 numériques. Tu peux peut-être nous en dire un mot ou deux sur cette pratique hybride.
00:02:22 Oui, c'est vrai que j'ai un métier hybride. C'est vrai qu'à la fois j'étudie l'art
00:02:27 et l'histoire de l'art et l'évolution de l'art notamment avec les technologies,
00:02:30 et donc j'enseigne aussi sur ces enjeux là, surtout au regard de l'écologie en
00:02:35 ce moment. Et en parallèle, je propose des projets artistiques, des performances, des
00:02:41 installations qui hybrides réalité virtuelle et réalité augmentée notamment. Ça c'est
00:02:46 mon médium de création et donc c'est des projets que je fais avec différents collègues,
00:02:51 performeurs, aussi bien en musique, ça peut être danse, ça peut être théâtre aussi.
00:02:57 Avec une spécificité aussi sur l'écologie, à double titre, d'abord dans le master.
00:03:04 Oui, alors on est en train de progressivement sensibiliser les étudiants à ces questions
00:03:09 là, concrètement aussi comment dans les enseignements on peut parler d'écologie au sens large,
00:03:17 pas juste question environnementale, mais on traite l'écologie aussi mentale et sociétale.
00:03:21 J'en parlerai peut-être plus tard. Et sinon, les projets aussi, essayent d'intégrer
00:03:27 soit dans le processus de création, soit dans le discours, soit dans le processus de
00:03:31 diffusion, les différentes pistes qu'on a sur les questions écologiques.
00:03:37 Et le deuxième travail que tu fais autour de l'écologie et de l'impact environnemental,
00:03:41 c'est avec le ACNUM, qui est le réseau de la création numérique et des arts hybrides.
00:03:47 Voilà, donc avec le réseau, on anime un groupe sur l'éco-responsabilité des arts
00:03:54 numériques. Et je fais aussi partie du collectif de l'université Paris 8, Arts, Écologie,
00:04:00 Transition, qui depuis 2016 s'intéresse à ces questions écologiques dans les arts.
00:04:04 Et c'est tous les arts, donc pas forcément l'art numérique, c'est aussi musique,
00:04:08 danse, théâtre, philosophie.
00:04:10 Ce qui est peut-être d'ailleurs aussi une particularité des arts numériques, le côté
00:04:13 hybride et de voir comment ça diffuse sur d'autres champs disciplinaires. Benoît
00:04:18 Ruys, troisième personne invitée. Je vais lire mes notes parce que pour le coup, les
00:04:25 mots sont importants. Expert consultant pour la transition bas carbone et l'atténuation
00:04:30 des dommages environnementaux des activités du numérique. Qu'est-ce que ça veut dire
00:04:34 ?
00:04:35 Ça veut dire que je fais de mon mieux pour réduire l'impact des ICC sur la partie numérique,
00:04:44 mais également sur la partie plus physique. Par exemple, je travaille sur la construction
00:04:50 d'un grand studio de tournage à Montpellier. Comment dire ? Ça fait tellement longtemps
00:04:57 que je fais ça que j'ai du mal à expliquer.
00:04:59 On peut peut-être donner quelques références. Pour le coup, le CNC, le ministère belge
00:05:05 de la culture, l'UNESCO, la région Occitanie, la commission de films de Malte, le CNRS.
00:05:10 La commission européenne et tout.
00:05:13 Un CV quand même extrêmement riche d'expérience sur cette question d'impact environnementaux.
00:05:20 J'ai l'impression qu'en fait, j'ai encore tellement de choses à apprendre. Il y a tellement
00:05:24 de choses à faire que je ne sais pas.
00:05:29 Une dernière donnée qui est importante, et c'est peut-être aussi à ce titre-là
00:05:32 que tu es invité aujourd'hui, c'est les livrables de SEPIR. SEPIR, l'acronyme cas
00:05:39 d'étude pour un immersif responsable, qui est un groupe qui a été monté il y a 3
00:05:43 ans, en 2018-2019, et qui a rendu une partie de ses livrables il y a un peu plus d'un
00:05:51 mois avec l'empreinte carbone du neuron, XR, une calculatrice, des recommandations, etc.
00:05:58 Et des ACV aussi, de divers équipements de l'AVR. On a deux participants de SEPIR,
00:06:07 Marc l'est également. On peut peut-être, après ces présentations, commencer concrètement
00:06:13 le vide du sujet. Qu'est-ce que c'est l'AXR ? Pour cadrer le sujet, on parle de quoi quand
00:06:17 on parle de l'AXR ?
00:06:18 Je peux en parler, on est nos acteurs de ce secteur depuis 2016. Au tout début, on
00:06:30 parlait surtout de VR, de réalité virtuelle. Puis la R, la réalité augmentée, puis la
00:06:36 réalité mixte, on a commencé à parler de ça. Il a été décidé de regrouper ces
00:06:42 trois différentes typologies, technologies, sous le terme XR, pour Extended Reality,
00:06:49 réalité étendue. Mais c'est assez intéressant, parce que Christelle a légèrement changé
00:06:54 le titre en parlant d'immersif. Et c'est vrai qu'aujourd'hui, on va parler de XR,
00:06:59 on va parler d'immersif, puisqu'on se rend compte que la projection immersive n'est
00:07:04 peut-être pas si loin que la XR, ou en tout cas, beaucoup d'oeuvres peuvent passer d'un
00:07:11 côté ou de l'autre. Nous, en tant qu'entreprise, on se considère comme un des acteurs du
00:07:17 secteur immersif.
00:07:18 On parle de mapping, de full dome ?
00:07:21 Exactement, tout à fait, évidemment.
00:07:23 Cadrons spécifiquement peut-être sur ces cinq technologies, mapping, full dome, et
00:07:30 puis ensuite, réalité mixte, réalité augmentée, réalité virtuelle.
00:07:34 Maintenant sur l'écologie, est-ce qu'on parle d'impact environnemental ? Environnement,
00:07:39 écologie, durabilité ? C'est quoi ces différentes notions et appliquées aux champs des arts ?
00:07:45 Les Anglais, ils parlent toujours de sustainability et ça recoupe tout. Alors en fait, nous,
00:07:53 dans CEPIR, l'angle d'évaluation de l'impact de la XR au sens large, nous, c'est lié à
00:08:00 la soutenabilité. Alors la soutenabilité, qu'est-ce que c'est ? La soutenabilité,
00:08:05 ça consiste à préserver l'environnement, à préserver les frontières des limites
00:08:11 planétaires pour pouvoir léguer aux générations suivantes suffisamment de ressources pour
00:08:16 que leur bien-être soit au moins égal au nôtre.
00:08:19 Donc là, on voit, il y a un côté physique, il y a un côté sociétal, il y a un côté
00:08:24 économique et le but, c'est de faire rentrer dans la XR et voir si la XR peut rentrer dans
00:08:34 ce stock fini de ressources et d'impact qu'on peut encore continuer à émettre. Et donc,
00:08:41 voilà, voir est-ce que la XR, elle est viable, elle est pérenne sur le long terme.
00:08:45 Ça donne déjà une dimension politique des choses, d'une certaine façon, c'est les
00:08:48 orientations politiques qu'il faut faire quand on parle de soutenabilité, durabilité.
00:08:52 En fait, ça part vraiment d'un constat physique, en fait. Tout simplement, un casque VR, une
00:09:00 exposition immersive, ça va entraîner tant d'hommages et tant d'hommages, tant d'impact
00:09:08 et on a un stock qui est vraiment fini. Et donc là, je vous racontais avant le début
00:09:13 du meeting de la table ronde. Donc moi, j'enseigne dans un master de création numérique et cette
00:09:23 année, cette semaine, j'ai décidé de leur faire faire le bilan carbone et une ACV screening
00:09:28 en fait de l'analyse de cycle de vie du master. Et donc, en termes d'émissions carbone, en
00:09:36 fait, le master, il émet une vingtaine de tonnes de CO2 par an. Donc, il y a 19 étudiants.
00:09:43 Bon, voilà. Et le total, ça représentait un peu plus de 2,5% de 2,5 fois la consommation
00:09:51 d'une personne moyenne en France. Et on a fait cette ACV screening et en fait, on s'est
00:09:57 rendu compte que la consommation d'eau, elle était équivalente à la consommation moyenne
00:10:01 de 1072 personnes et la consommation moyenne d'une personne en France de 53 m3 par an,
00:10:08 53 000 litres d'eau. Donc, en fait, là, on parle beaucoup de changement climatique, mais
00:10:13 c'est vraiment un aspect du problème. Il y en a 16 autres. Il y a 16 impacts totaux.
00:10:17 On va en parler dans quelques minutes. Je veux bien entendre Jean-François quand même
00:10:21 sur ces différentes notions environnement, durabilité, sostenabilité.
00:10:24 Oui, j'ai amené quelques slides. Je ne sais pas si on peut diffuser l'image que j'ai
00:10:28 à l'écran en direct. Super, merci. C'est un dessin qui a été fait par ma collègue
00:10:34 Anne-Laure Georges-Molland, qui dirige le master de création numérique à Montpellier
00:10:38 3, Université de Montpellier 3. Et en fait, quand on s'est posé la question tous les
00:10:42 deux en 2021, finalement, c'est quoi l'impact carbone de notre pratique de l'art numérique
00:10:49 et notamment de la réalité virtuelle qu'utilisent les cartes graphiques de la dernière génération.
00:10:53 Parce qu'on fait du travail en temps réel, donc ça demande plus de puissance de calcul
00:10:57 notamment. En fait, on s'est dit, mais en fait, on est en train de scier la branche
00:11:02 sur laquelle on est assis. Parce que de faire face à cette question là, c'est que notre
00:11:05 médium est fondamentalement pas durable pour plein de raisons énergétiques, terres rares,
00:11:09 etc. Et donc, ça nous a fait poser la question de la posture à adopter face à ce paradoxe
00:11:17 en fait. Comment gérer le fait d'être un créatif qui utilise des outils qui sont
00:11:23 quelque part en opposition avec nos valeurs personnelles. Parce que elle et moi, on est
00:11:27 très conscients des enjeux écologiques et en fait, on s'est retrouvé assez décontencé
00:11:36 face à l'ampleur de la tâche. Et donc, ça nous a amené à se poser la question
00:11:40 de la posture à prendre. Donc là, j'ai listé cinq postures que j'ai identifiées
00:11:43 de mon côté. Soit on continue de créer comme avant et donc on consomme de l'énergie
00:11:48 et des terres rares et du matériel. On est en l'obsolescence programmée, etc. On pourra
00:11:53 peut-être en parler plus tard aussi. Et dans ce cas là, on est dans une optique de productiviste
00:11:56 en fait, qui s'inscrit dans un système capitaliste où il faut continuer de produire sinon le
00:12:00 système ne fonctionne plus.
00:12:02 C'est le système dans lequel on est.
00:12:03 Voilà, c'est le système dans lequel on baigne tous. La terre entière baigne actuellement,
00:12:06 même si certains pays ou certains groupes de personnes essayent d'imaginer d'autres
00:12:12 modèles. Et donc justement, ces autres modèles, il y a plein de choses qui existent. On parle
00:12:16 de durabilité ou de production durable. Donc ça, c'est souvent de l'écologie digestionnaire
00:12:22 pour reprendre le terme du philosophe Yves Citton. L'idée de l'écologie digestionnaire,
00:12:26 c'est qu'on mesure tout par des plans et ça se résume à la fin par planter des arbres
00:12:31 pour compenser notre bilan carbone, ce qui est quelque part une version très stéréotypée
00:12:37 de vouloir rendre vert la production. Pour ma part, je trouve que ce n'est pas la solution.
00:12:42 Ça ressemble à de l'optimisation finalement.
00:12:44 L'idée de l'optimisation, c'est de la compensation, mais de façon complètement disproportionnée.
00:12:49 De faire un vol en avion et de faire planter 10 000 arbres pour compenser le vol qu'on
00:12:53 a pris. Est-ce que ça a vraiment un sens ? Et donc les autres optiques qu'on a observées,
00:12:57 c'est pourquoi pas décroître. Alors le mot décroissance est parfois un peu mal pris
00:13:02 dans le sens où on a l'impression qu'on va perdre en confort, on va changer nos habitudes.
00:13:08 Donc on parle plutôt de post-croissance pour dire que c'est vraiment une alternative.
00:13:12 C'est tout ce qui est système de mutualisation, de penser différemment les choses. On pourra
00:13:19 aussi en parler après. Et les deux derniers, c'est bifurquer, c'est-à-dire se dire
00:13:23 je ne crée plus d'art numérique, je trouve d'autres médiums pour avoir le même discours
00:13:27 ou diffuser des imaginaires, mais sans technologie par exemple. Et enfin l'ermitage, faire
00:13:34 une pause et reconsidérer sa pratique.
00:13:35 Et tu l'as dit d'ailleurs, c'est souvent des discours qui sont difficilement entendables
00:13:39 sur le fait que la culture, la création construit des imaginaires et que ces imaginaires sont
00:13:44 nécessaires justement à faire émerger des nouveaux modèles. C'est une posture qui
00:13:49 est assez difficilement entendable par beaucoup d'acteurs et d'actrices.
00:13:52 En fait le rôle de l'art dans nos sociétés est parfois pas identifié. On ne se rend
00:13:58 pas compte que finalement, quand on s'est retrouvés tous enfermés chez nous en 2020,
00:14:04 notre seul échappatoire c'était les imaginaires. Donc le streaming a sauvé pas mal l'écologie
00:14:09 mentale de la population quelque part. Après je ne dis pas qu'il ne faut faire que des
00:14:13 œuvres en art en streaming.
00:14:14 - Pour le meilleur et pour le pire, on dira. Je veux bien qu'on revienne, Benoît, spécifiquement
00:14:20 sur la notion de limites, et notamment de limites planétaires, les 9 limites planétaires.
00:14:26 On en a dépassé 6. Qu'est-ce que c'est ce concept, et qu'est-ce qui permet de comprendre
00:14:33 sur, justement, peut-être limites planétaires, décarbonation ? Puisque là, aujourd'hui,
00:14:38 on va beaucoup parler de décarbonation. Tu peux nous en dire un peu plus ?
00:14:43 - Les limites planétaires, en fait, ça traduit les services que nous rend la Terre, par exemple
00:14:52 sur l'oxygène, le cycle de l'eau douce, sur les sols qui sont disponibles, sur la biodiversité.
00:14:59 Et donc, ça le traduit en frontières, c'est-à-dire il y a un seuil physique, quantitatif, qui
00:15:07 ne faut pas dépasser. Et donc, en fait, ce qu'on a constaté, c'est que là, à l'heure
00:15:13 actuelle, il y a 6 limites sur 9. Donc l'érosion de la biodiversité, le changement climatique,
00:15:20 l'affectation des sols, le cycle de l'eau, les cycles bio-géochimiques de l'azote et
00:15:28 du phosphate des sols qui ont été dépassés. Voilà. Donc, ce qui n'a pas encore été
00:15:32 dépassé, c'est la solidification des océans, l'ozone stratosphérique et les aérosols
00:15:39 dans l'atmosphère. C'est un peu technique, c'est la physique. Mais voilà. Donc, on a
00:15:43 dépassé 6 sur 9. Et en fait, donc, on vit à crédit.
00:15:47 - En l'occurrence, quand on parle du carbone, on parle du changement climatique.
00:15:51 - Oui, on parle du changement climatique. Donc, décarbonisation, c'est juste en fait
00:15:56 la limite planétaire sur le changement climatique.
00:16:00 - Ça donne quand même une difficulté aussi à cadrer le sujet parce qu'aujourd'hui, on
00:16:04 va parler de l'impact, notamment des travaux qui ont été réalisés, des premières études.
00:16:07 Ça veut dire que potentiellement, on peut pondérer aussi tous ces résultats ou du
00:16:12 moins le travail qui va être fait dans les années suivantes, on peut le pondérer par
00:16:14 rapport à l'une des limites planétaires qu'on prend.
00:16:16 - Exactement. Lorsqu'on fait une analyse de cycle de vie, en fait, on a le stock, on a
00:16:23 le stock de limites, on a la frontière. Donc, par exemple, on ne doit pas émettre plus
00:16:27 de au niveau mondial. Je crois que c'est 450 milliards de tonnes de CO2 et chaque année,
00:16:33 on en brûle environ 45 milliards. Donc, il nous reste 10 ans pour être en dessous de
00:16:37 1,5 degré de réchauffement. Et ça, c'est valable pour toutes les limites. En fait,
00:16:41 on a une limite quantifiée et donc tous les secteurs d'activité, ils tapent dans ces
00:16:45 limites et donc on doit arriver à rentrer dedans. Et la plupart ne sont pas renouvelables.
00:16:50 En fait, voilà, à part l'eau douce, c'est pas renouvelable.
00:16:52 - Et sur le sujet de la décarbonation, en l'occurrence, il y a des objectifs à 2030,
00:16:57 2040, 2050 avec le fameux objectif en 2050, le zéro net de carbone.
00:17:02 - Oui, nous, en fait, l'objectif, c'est moins 45% d'émissions de GES entre 2015 et 2030,
00:17:09 en fait, pour le numérique. Et nous, à ces pieds, en fait, on a calculé, on a calculé
00:17:14 quel est le budget carbone numérique individuel par personne en France et à l'international.
00:17:20 Donc, en fait, ce budget par utilisateur en France, il était en 2022 de 256 kilos de
00:17:28 CO2 et en 2030, on doit être à 210 et en 2050, on doit être à 136.
00:17:34 - Source ADEME, c'est ça ?
00:17:35 - Non, non, c'est en fait, c'est source ADEME, ARCEP. Et donc, on a fait des recalculs
00:17:40 pour l'avoir par personne. Et ce qu'il faut voir, c'est qu'en France, on a déjà beaucoup
00:17:44 de chance parce que ce budget numérique individuel, il est beaucoup plus faible à l'international.
00:17:50 Pour 2030, il est de 53 kilos et pour 2050, il est de 28 kilos. Voilà.
00:17:56 - Donc, c'est des chiffres qu'on vous redira, mais ils sont aussi à mettre en perspective,
00:18:01 par exemple, avec l'émission carbone d'un casque, d'un casque VR qui est à peu près de...
00:18:06 - De 19 kilos par an.
00:18:08 - Un peu plus sur le sépia, non ?
00:18:10 - Alors, 19 kilos par an, mais sans compter des data centers et les réseaux.
00:18:14 - Voilà.
00:18:15 - Juste le casque, en fait. Le casque et deux manettes.
00:18:17 - Presque d'une certaine façon, on aurait grillé son...
00:18:20 - 10%.
00:18:21 - On aurait grillé son quota carbone avec la consommation...
00:18:24 - Alors, typiquement, en fait, la XR va consommer 48 kilos de CO2, à peu près,
00:18:31 en scénario moyen en 2023. Donc, ça...
00:18:34 - Par an ?
00:18:35 - Oui, par an. Donc, ce qui veut dire que c'est environ 25% de son budget.
00:18:40 - On va revenir sur tout ça. Je veux bien entendre Jean-François et Marc sur les post-carbone.
00:18:44 De quoi on parle concrètement quand on est une agence ou quand on est un artiste ?
00:18:48 De quoi on parle, en fait, en termes de post-carbone ?
00:18:50 - Alors, moi, je vais avoir une approche un peu plus macro, peut-être, après, si tu veux bien parler
00:18:54 sur des choses plus terrain. Je veux bien montrer un slide aussi que j'ai à l'écran, ici.
00:18:59 En fait, j'ai repris cette image du rapport du GIEC, donc le fameux rapport qu'on a envie
00:19:04 de parler dans les médias, le ICCP, en anglais, qui fait plus de 3000 pages.
00:19:11 Donc, c'est un rapport qui est compliqué à aborder, mais il y a des synthèses accessibles,
00:19:15 tout est en accès libre sur Internet. Et donc, il y a aussi des images.
00:19:18 Donc, j'ai repris ici une illustration qui me paraît assez claire des impacts, à gauche,
00:19:24 de l'activité humaine sur la Terre et, à droite, de, finalement, toutes les solutions
00:19:29 qui existent et qui sont identifiées. Moi, ce qui m'a sidéré dans ce rapport,
00:19:34 c'est que la culture et l'art sont quasiment inexistants. Il n'est pas question de ces enjeux,
00:19:39 à part, éventuellement, la sauvegarde du patrimoine immatériel de l'humanité
00:19:42 ou de certains sites archéologiques. Mais alors, les enjeux, qu'est-ce que les artistes
00:19:46 pourraient proposer, les imaginaires qui pourraient être mobilisés, les solutions qui pourraient
00:19:50 être imaginées différemment que par des solutions d'ingénierie, n'apparaissent pas.
00:19:54 Et donc, j'ai fait deux grands cercles sur ce dessin, en disant "ok, nous, en tout cas
00:19:59 dans notre secteur de la création numérique, et plus spécifiquement de la création numérique
00:20:02 avec des outils d'XR, il y a au moins deux endroits où on pourra être "levier",
00:20:08 c'est un terme un peu particulier, utilisé dans ce contexte, c'est les questions de
00:20:12 l'énergie et des matériaux, donc c'est ce qui est entouré en haut, et la question
00:20:19 du bien-être humain, parce que finalement, ces créations qui sont faites en XR, mobilisent
00:20:25 aussi l'écologie mentale. Et donc, si déjà, je parle d'écologie mentale au regard d'un
00:20:32 concept philosophique qui s'appelle l'écosophie, qui relie trois écologies, et donc le postulat
00:20:37 de l'écosophie, ça vient de deux philosophes, le premier c'est Arne Nes, qui dans les années
00:20:41 70 a identifié que l'homme ne se situerait pas au sommet de l'hierarchie du vivant,
00:20:47 mais bien en interrelation avec d'autres espèces, ce qui est pas le repris par le
00:20:51 philosophe Philippe Descola. Et la deuxième chose, c'est Félix Guattari, philosophe
00:20:56 français, qui a proposé le concept d'écosophie sous le nom de trois écologies, en expliquant
00:21:01 que finalement la question environnementale ne serait résolue que si elle est traitée
00:21:06 de concert avec l'écologie sociétale, donc comment on vit ensemble, comment on collabore,
00:21:12 comment on fait société. Et pour que cette écologie collective fonctionne, il faut déjà
00:21:17 que l'individu soit bien, quelque part, dans sa peau, dans sa tête, etc. Donc c'est l'écologie
00:21:23 mentale. Et donc, quand on parle d'écologie, en tout cas, quand je parle d'écologie, je
00:21:29 m'adresse aux trois types d'écologie, parce que finalement, la question environnementale,
00:21:33 si déjà à titre individuel, on n'arrive pas à payer son loyer, se nourrir, les enjeux
00:21:39 écologiques derrière ne vont jamais pouvoir être questionnés, testés et mis en œuvre.
00:21:44 Donc voilà, je pense que sur ces enjeux écologiques, par rapport aux considérations mondiales
00:21:51 que l'on voit dans le rapport du GIEC, la question du bien-être humain devient centrale.
00:21:55 - Ça c'est la toile de fond, et effectivement c'est important de le rappeler. Sur l'aspect
00:22:02 artistique, est-ce qu'il y a des postes, on a évoqué tout à l'heure la dimension
00:22:08 entre nous, en coulisses, sur la dimension production, diffusion, conservation, est-ce
00:22:14 qu'on peut essayer de citer un peu les principaux postes, ou comprendre un peu où est-ce qu'on
00:22:19 pollue, d'une certaine façon ?
00:22:20 - Tu veux dire un mot ?
00:22:22 - Oui, oui, oui, je peux.
00:22:26 - Oui, nous on est diffuseurs, distributeurs d'œuvres de réalité immersive, de réalité
00:22:38 virtuelle, on a fait notre bilan carbone l'an dernier, c'était motivé notamment
00:22:45 par le travail du CEPIR, ou en tout cas ce qui était à l'origine du travail de CEPIR,
00:22:49 par Landia et Amori, qui ont fait une œuvre pour essayer d'illustrer une œuvre immersive,
00:22:53 qui essaie d'illustrer Okawari, qui essaie d'illustrer un petit peu l'impact que la
00:23:01 production immersive a, et la diffusion a, et ça nous a motivés pour nous questionner
00:23:06 sur ces questions, on a commencé à faire, on a fait donc un bilan, on a été assez
00:23:12 surpris de ce bilan, parce qu'on s'est rendu compte que le premier poste d'émission,
00:23:15 comme une petite entreprise de 10 personnes, c'était en fait nos voyages professionnels.
00:23:19 - Les déplacements ? - Les déplacements, exactement, et en fait
00:23:23 surtout nos voyages en avion, on savait évidemment qu'on avait un impact là-dessus, mais on
00:23:26 n'imaginait pas que ça allait être le premier poste de notre activité.
00:23:29 Puis ensuite vient le deuxième poste, qui est le matériel qu'on revend à nos clients,
00:23:35 en fait on fait pas mal d'installations pérennes pour nos clients, donc on a ça,
00:23:38 puis le troisième poste, c'est tout le matériel qu'on utilise pour faire nos prestations,
00:23:42 surtout nos masques, nos ordinateurs, etc. Ça c'est que le troisième poste, et moi
00:23:46 j'avais en tête l'impact de l'utilisation des serveurs, du cloud, avec toutes les expériences
00:23:54 qu'on doit télécharger, qu'on doit envoyer, etc.
00:23:56 - L'infrastructure ? - L'infrastructure, mais au niveau du carbone,
00:23:58 c'est en fait tout petit. Et donc ça m'a ouvert les yeux sur une chose, notamment avec
00:24:02 le travail du SEPIR, c'est qu'il faut aller regarder les autres impacts, donc l'utilisation
00:24:06 de l'eau, les terres rares, etc. Et c'est pas simple, tout à l'heure en parlant avec
00:24:14 Benoît il m'a ouvert les yeux aussi sur la complexité de la chose, lui aussi évoque
00:24:20 cela dans son propre travail, je pense que c'est vraiment pas simple de regarder ça.
00:24:25 Après il y a une autre problématique qui est loin d'être évidente, c'est qu'aujourd'hui
00:24:32 on n'a pas vraiment de contrainte, en tant qu'entreprise privée, on n'a aucune contrainte
00:24:37 qui nous impose d'avoir un impact inférieur à telle ou telle valeur. Donc il n'y a que
00:24:44 notre bonne volonté qui va faire en sorte qu'on va avancer sur ces questions-là. D'ailleurs
00:24:52 je tiens à te remercier, à remercier le Festival d'organiser ce genre de conférences,
00:24:55 parce que ce genre de conférences c'est l'occasion de parler, de partager, mais aussi de se dire
00:24:59 oui, bon, il faut que je me motive, il faut que j'y aille, même si j'ai pas forcément
00:25:02 d'obligation à faire ça, parce qu'évidemment quand on dirige une entreprise, il y a énormément
00:25:06 de choses qu'on a à faire, il faut faire vivre l'entreprise, il faut penser au bien-être
00:25:08 des salariés, il faut penser à...
00:25:10 Il n'y a pas forcément de responsable de la RSE ou du moins de compatibilité écologie
00:25:16 et XR, ça n'existe pas encore.
00:25:18 Oui, si il y en avait un, je pense que j'aurais ce rôle, mais en tant qu'également dirigeant,
00:25:24 et ma sœur qui est dirigeante, je suis co-dirigeant, ne me dit pas, oui, il faut absolument mettre
00:25:30 en place ça pour réduire notre impact carbone, notre impact d'utilisation d'eau, parce qu'il
00:25:34 n'y a rien qui nous oblige à le faire et on doit avant tout penser à la survie de
00:25:38 l'entreprise et au bien-être des employés, à l'évolution commerciale, etc., la stratégie.
00:25:43 Et il faut, je pense clairement, le sépire ce genre de moments pour essayer d'avancer
00:25:52 ensemble et également il faut qu'il y ait, je pense, le sépire avance là-dessus aussi
00:25:56 pour essayer de faire avancer le CNC sur ces questions.
00:26:00 Eco-prod qui existe aujourd'hui, qui fait pas mal de choses au niveau du cinéma, il
00:26:04 faut que ce soit étendu à des secteurs comme la XR.
00:26:06 On parlera tout à l'heure des enjeux de structuration qui sont effectivement aussi
00:26:10 assez vertigineux.
00:26:12 Peut-être sur Okawari, puisqu'on l'a cité, le bilan carbone du navire XR, c'est une
00:26:18 initiative qui est très nouvelle, il n'y avait pas forcément ces données et en l'occurrence
00:26:23 c'est l'un des aspects délivrables de ces pires.
00:26:27 Est-ce qu'on peut dire une œuvre XR comme Okawari ?
00:26:33 Je n'ai pas le chiffre en tête.
00:26:37 On va se faire engueuler par l'endurance.
00:26:40 C'est 53 tonnes.
00:26:42 Oui, entre 49 et 60.
00:26:44 Cette perspective qui est aussi une complexité supplémentaire, d'inclure les déplacements
00:26:51 des FestiValley.
00:26:52 Ce n'est pas une contrainte supplémentaire.
00:26:57 Ça fait partie du périmètre réglementaire d'un bilan carbone.
00:27:02 Ce que je voulais juste dire, c'est que c'est Landia qui est à l'origine du projet
00:27:08 Cepir et en fait, elle devait aller en Australie pour présenter Okawari et en fait, elle s'est
00:27:17 rendue compte que le déplacement en avion, ça allait rentrer dans l'impact de fabrication,
00:27:24 dans l'impact de son travail.
00:27:27 Et là, elle s'est dit oui, peut-être qu'il faut creuser davantage.
00:27:30 Donc, elle a rencontré Marie Véronique, qui est une des meilleures expertes françaises
00:27:37 du bilan carbone.
00:27:38 La coopérative carbone.
00:27:39 Voilà, la coopérative carbone.
00:27:41 Et avec Marie, on travaille ensemble depuis longtemps.
00:27:44 Et donc, c'est pour ça que moi, je suis arrivé sur le projet.
00:27:47 Et donc, elle a commencé à se dire, oui, mais donc, la XR, ça correspond à quoi ? Et
00:27:53 donc, de mettre en regard l'impact avec l'utilité et comme dit Jean-François, le sens aussi.
00:28:00 Quel est le sens de ce qu'on fait ?
00:28:02 Je crois que c'est à peu près de mémoire 20% des émissions carbone qui sont dues à
00:28:07 la production et le reste après sur la distribution, donc la diffusion.
00:28:11 Ça, c'est une donnée qui est intéressante aussi.
00:28:13 En fait, comment dire ? Si on segmente pour une œuvre XR, si on segmente entre la fabrication,
00:28:23 la distribution et la consommation, il y a un impact croissant.
00:28:28 Mais en fait, c'est les choix qui vont être faits au niveau de la fabrication qui vont
00:28:32 impacter et la consommation et la distribution.
00:28:35 Si par exemple, sur l'application, vous avez un build, une application XR, vous avez un
00:28:39 build qui est extrêmement important.
00:28:40 Je ne sais pas, je dis un chiffre au hasard, mais on va dire 20 gigas.
00:28:45 Si par exemple, vous avez un build de 10 gigas, en fait, tout de suite, ça va diminuer l'impact
00:28:50 de la distribution et ça va diminuer l'impact de la consommation.
00:28:53 Donc, c'est tous les choix de fabrication qui vont être essentiels.
00:28:56 C'est ce qu'on appelle des effets rebonds ?
00:28:57 Alors, les effets rebonds, ce n'est pas tout à fait ça.
00:29:01 Les effets rebonds, c'est en fait, on s'est rendu compte que chaque fois qu'on améliorait
00:29:07 l'efficacité énergétique en matière, l'efficacité énergétique d'un process, en fait, on assistait
00:29:16 à soit une stabilisation de l'impact, soit un peu plus.
00:29:21 Par exemple, un truc facile à comprendre, une 2 chevaux, elle consommait 4,5 litres
00:29:27 au 100.
00:29:28 Maintenant, on a des moteurs qui sont vachement plus performants et tout, et qui consomment
00:29:35 4 ou 5 litres au 100.
00:29:38 Mais en fait, c'est dans des SUV qui font 1 tonne 500 alors que la 2 chevaux, elle faisait
00:29:45 je ne sais pas, elle ne faisait même pas 500 kilos.
00:29:47 C'est le rapport poids-émission.
00:29:48 Voilà.
00:29:49 Et donc, en fait, chaque fois qu'on facilite l'accès à un produit, on diminue son impact,
00:29:54 tout de suite, en fait, on se rend compte qu'il y a une hausse des impacts derrière.
00:30:00 Donc, c'est comme si on n'avait rien fait.
00:30:02 Ok.
00:30:03 J'aimerais bien entendre Jean-François sur, notamment en tant que participant ou pilote
00:30:10 du groupe Éco-Responsabilité au sein d'Acnum, et notamment des initiatives qui sont prises
00:30:16 dans des collectifs d'artistes, dans des studios.
00:30:17 Je pense notamment au studio Le Mercier qui est à Bruxelles.
00:30:21 Après une discussion avec Johanny Le Mercier, il me disait que son plus gros post-carbone,
00:30:27 c'était la passoire thermique de son studio.
00:30:29 C'était le fait de mal avoir isolé son studio.
00:30:32 C'est quand même intéressant ça aussi.
00:30:33 Comment on calcule et est-ce que tu peux nous en parler aussi au sein du groupe Éco-Responsabilité ?
00:30:38 Alors, au sein d'Acnum, je coanime le groupe avec Vianney et Kignon, je précise quand même.
00:30:45 On a trois pôles pour réfléchir à ces questions.
00:30:48 Les enjeux de pratique, dites bonnes pratiques ou pratiques alternatives pour pouvoir produire
00:30:53 des œuvres et les diffuser différemment.
00:30:55 Les enjeux des imaginaires, qu'est-ce que les artistes identifient, les territoires
00:31:02 d'imaginaire qui sont traités sur la question écologique.
00:31:04 Et le troisième, c'est les enjeux de formation, comment déjà nous, on se forme nous-mêmes
00:31:08 et comment on donne accès à de la formation aux différents publics, que ce soit producteurs,
00:31:15 créateurs, diffuseurs et grands publics.
00:31:16 Donc ça, c'est nos actions, on va dire, globales au sein d'Acnum.
00:31:22 Et c'est vrai que dernièrement, j'ai pu faire intervenir Johanny Lemercier au sein
00:31:26 du collectif Archéologie Transition.
00:31:28 Il expliquait effectivement qu'il a, avec Juliette Bibas, donc ils sont tous les deux
00:31:32 au studio Lemercier.
00:31:33 Ils ont fait un travail de fond, à la fois sur leur démarche artistique.
00:31:38 Johanny s'est rendu compte qu'il était à quelques kilomètres de la plus grande mine
00:31:43 de l'Ignit, qui est du charbon.
00:31:45 À ciel ouvert d'Europe, on peut faire entrer la taille de Paris, hauteur comprise dans
00:31:49 le gouffre qui a été creusé.
00:31:51 Et cette mine, en plus, est en train d'avaler des villages entiers, détruire des bâtiments
00:31:55 historiques.
00:31:56 Donc Johanny a à la fois témoigné de la destruction de ce patrimoine et met en place
00:32:03 du coup, avec ses outils de projection lumineuse, aide des groupes activistes à avoir des messages
00:32:08 plus forts.
00:32:09 Il a réussi à projeter des logos de collectifs sur, notamment Buckingham Palace ou le Parlement
00:32:15 de Bretagne dernièrement.
00:32:16 Donc il utilise en fait la caisse de résonance médiatique pour pouvoir sensibiliser à ses
00:32:21 enjeux locaux.
00:32:22 Et à côté de ça, il a fait la mesure carbone de son propre studio.
00:32:25 Donc effectivement, le transport, c'est un des points essentiels, de transporter les
00:32:30 oeuvres, transporter les équipes.
00:32:31 Donc il a mis en place, avec Juette Bibas, des process de commissariat d'exposition
00:32:36 et de diffusion des oeuvres où ils peuvent faire construire à distance.
00:32:40 Ils essaient de prendre le train au maximum.
00:32:42 Si jamais l'exposition est à l'autre bout du monde, ils essayent de négocier que l'exposition
00:32:47 soit diffusée dans les festivals autour ou des territoires autour pour vraiment que le
00:32:53 déplacement ne soit pas juste pour un aller-retour de quelques jours dans le pays en question.
00:32:58 Et enfin, il a identifié que son studio était très mal isolé et donc il a mis beaucoup
00:33:04 d'énergie, c'est le cas de le dire, à l'isoler pour du coup avoir moins besoin de chauffage.
00:33:10 Et donc, au bout de chaîne, c'est l'économie d'énergie aussi, l'électricité, etc.
00:33:18 Et d'ailleurs cette question d'énergie aussi, elle est questionnable, comment elle
00:33:20 est produite, où elle est produite.
00:33:22 En fonction des pays, c'est évidemment des productions, un mix énergétique qui est
00:33:25 très différent.
00:33:26 Ça aussi, ça donne de la complexité, du fil à retordre d'une certaine façon.
00:33:30 L'impact d'une oeuvre produite ou diffusée, une oeuvre XR, en France ou aux Etats-Unis
00:33:36 ou en Chine n'est pas du tout le même parce qu'en France, on a de l'énergie principalement
00:33:40 nucléaire qui est considéré comme bas carbone mais on connaît aussi les problèmes à très
00:33:45 long terme qui peuvent apparaître.
00:33:47 En tout cas, c'est des choix politiques, ça amène à des choix politiques.
00:33:49 Alors qu'aux Etats-Unis ou en Chine, c'est beaucoup de centrales encore à charbon ou
00:33:53 à pétrole.
00:33:54 Donc l'impact carbone est d'un coup multiplié par...
00:33:59 60 en France, 450 en Chine et environ 500 aux Etats-Unis.
00:34:06 16 en Norvège.
00:34:10 Après avoir fait ce panorama, évidemment on vous invite à aller voir les livrables
00:34:16 de plusieurs études.
00:34:17 Cepir, une étude préalable aussi, qui n'avait rien à voir avec Cepir mais avait été faite
00:34:23 deux ans auparavant par Stérolux et le collectif Cheval Vert qui était intéressant aussi,
00:34:29 sur l'ACV d'une oeuvre d'art, qu'est-ce qu'elle consomme, etc.
00:34:33 Des livrables qui sont complètement accessibles, open source pour Cepir.
00:34:38 Une fois qu'on a évalué un petit peu cet impact, parce que j'ai l'impression que la
00:34:43 photographie c'est une étape indispensable, on fait la photographie, on se met d'accord
00:34:46 sur la méthodologie, on fait la photographie et maintenant on passe à l'action.
00:34:50 Alors comment on passe à l'action ? C'est quoi les leviers de passage à l'action ? D'un
00:34:54 point de vue structurel et d'un point de vue individuel ?
00:34:57 Question ouverte, on voit ce qu'on en fait.
00:35:01 Point de vue individuel, dans Cepir, on a fait un petit outil pour que chacun puisse
00:35:08 calculer son empreinte numérique individuelle.
00:35:12 Donc vous rentrez le type d'équipement que vous avez, une tablette, une télé, etc.
00:35:17 Et ça vous calcule votre poids carbone qui intègre les data centers et les réseaux.
00:35:24 Et donc, je fais ça à mes étudiants, mais aussi à Paul Valéry et donc en fait, il y
00:35:30 en a qui arrivent à être dans les 210 kilos pour 2030 assez facilement et d'autres, c'est
00:35:37 beaucoup plus compliqué.
00:35:38 En fait, ce qu'on voit, c'est que plus il y a un empilement de supports numériques,
00:35:43 d'outils numériques, de devices numériques et avec des services numériques utilisant
00:35:50 beaucoup de données, il y a un empilement qui nous empêche d'être soutenable.
00:35:59 Alors que si on se contentait peut être d'un smartphone, d'un laptop, si on n'avait pas
00:36:06 de télé parce que la télé, ça pollue beaucoup, parce que la pollution est fonction de la
00:36:10 taille et du poids des objets.
00:36:12 On s'en sortirait.
00:36:14 Alors, est ce qu'un casque VR, est ce que la XR peut rentrer dans ce budget soutenable?
00:36:19 Peut être si elle remplace d'autres choses, par exemple, si on remplace les ordinateurs,
00:36:26 les télévisions.
00:36:27 Mais pour l'instant, on n'en est pas sûr parce que tout ce qu'on se rend compte qu'en
00:36:32 fait, il y a un empilement des devices et ils ne se remplacent pas les uns les autres,
00:36:37 ils s'ajoutent.
00:36:38 - Donc on calcule, à l'échelle individuelle, c'est quoi les autres leviers, d'une certaine
00:36:44 façon, vous l'avez dit tout à l'heure aussi, sur l'aspect réglementaire et législatif,
00:36:49 est ce que c'est la contrainte des acteurs, d'industrie culturelle et créative, qui fait
00:36:55 qu'on passe à l'action ou on passe à l'échelle ?
00:36:57 - Ouais, je pense qu'il y a la contrainte, mais il y a aussi des mécanismes, dans le
00:37:05 secteur des ICC, le CNC est très présent, en tout cas pour tout ce qui est audiovisuel
00:37:11 et l'éco-conditionnalité qui est en train d'avancer, mais je pense qu'il va être un
00:37:16 point hyper important.
00:37:17 C'est le cas, par exemple, pour les violences sexistes et sexuelles.
00:37:20 Aujourd'hui, pour avoir une aide du CNC, le dirigeant de l'entreprise qui demande l'aide
00:37:27 est obligé d'avoir fait la formation sur les VSS.
00:37:30 Typiquement, on devrait avoir un mécanisme comme ça, avec une éco-conditionnalité qui
00:37:34 nous oblige, dans un premier temps, à faire un bilan, à être conscient de l'impact qu'on
00:37:38 a et pour chaque projet qui est présenté, faire ça.
00:37:41 Ça peut être quelque chose d'intéressant.
00:37:44 Après, pour parler un peu plus de ce qu'on fait, nous, comment on passe à l'action,
00:37:53 je pense que nous, on a un modèle où on réutilise beaucoup le matériel qu'on a, on est capable
00:38:00 d'amortir, ça fait sens économiquement, d'acquérir du matériel, de l'utiliser, de l'utiliser
00:38:08 le plus possible, de l'amortir autant qu'on peut.
00:38:11 Après, je pense que, je disais tout à l'heure, il y a les déplacements professionnels qui
00:38:15 sont très importants et je reviens à ce que tu disais également, à ce que Johannine
00:38:19 Lomercie visiblement fait, mais clairement, réfléchir à chaque voyage en avion qu'on
00:38:23 va faire, le distanciel.
00:38:25 Il y a des festivals, par exemple, qui m'ont demandé d'intervenir, d'être membre de jury,
00:38:29 qui m'ont dit "Viens 4 jours à Hong Kong pour être le jury du festival", je leur ai dit
00:38:34 "Ecoutez, non, je ne vais pas venir 4 jours juste pour être jury du festival, les offres,
00:38:37 je peux les voir chez moi et on peut faire des rendez-vous en distanciel, ça a très
00:38:41 bien fonctionné.
00:38:42 Et clairement, au niveau du carbone, je pense que chaque voyage en avion peut avoir un impact
00:38:48 relativement important.
00:38:49 Après, je pense qu'il y a un point qui est très important, c'est la communication, c'est
00:38:56 communiquer aux pairs ce qu'on fait, les difficultés qu'on a, des initiatives de mutualisation
00:39:02 de matériel, et ça, ça rend du coup dans le cadre de la communication avec les pairs,
00:39:06 qu'est-ce qu'on peut faire collectivement pour faire avancer les choses.
00:39:08 Là, il se trouve qu'on a une position un peu particulière, vu qu'on a beaucoup de
00:39:16 matériel, on va le mettre à disposition de nos clients, qui vont pouvoir l'utiliser
00:39:21 pour un certain nombre de choses.
00:39:22 Et notre action aussi, on est beaucoup plus sur la diffusion physique des offres que sur
00:39:31 la diffusion en ligne.
00:39:32 Par nature, une diffusion physique veut dire que un lieu va...
00:39:36 Des déplacements aussi, ça demande des déplacements.
00:39:38 Ça demande des déplacements...
00:39:40 Au moins des festivaliers, ou des visiteurs, des spectateurs.
00:39:42 Oui, tout à fait, dans le cas des festivals, absolument.
00:39:44 Là, je parlais plus de, par exemple, on équipe des cinémas aux Pays-Bas, les habitants
00:39:50 des villes où ces cinémas sont équipés, n'ont pas forcément besoin de s'équiper
00:39:53 de masques chez eux pour assister à des œuvres, ils vont se rendre au cinéma, qui est au
00:39:58 coin de leur rue, et ils peuvent voir des œuvres.
00:40:00 Et les masques qui sont dans ces cinémas vont être utilisés beaucoup plus que des
00:40:04 masques individuels.
00:40:05 Là, on parle également de mutualisation du matériel.
00:40:09 En tout cas, ce que j'entends aussi, c'est la difficulté, si on compare avec un secteur
00:40:14 il y a quelques années qui n'était pas forcément structuré, celui des déchets,
00:40:17 où on a eu aussi des opérateurs de déchets, une vraie puissance industrielle d'une certaine
00:40:21 façon.
00:40:22 Le 3R, là, pour l'instant, il n'y est pas.
00:40:25 Réduire, recycler et réparer, il n'y est pas.
00:40:29 Ça demande vraiment une structuration de filière, ça demande de pouvoir se rencontrer,
00:40:32 ce qui n'est pas forcément le cas pour l'instant des acteurs.
00:40:34 Peut-être aussi une démarche de lobbying, c'est-à-dire faire entendre sa voix par
00:40:40 rapport à des intérêts de certains géants qui ne seraient pas forcément les intérêts
00:40:45 d'autres, en tout cas qui iraient dans le sens de l'écoresponsabilité.
00:40:49 Oui, non, comment vous réagissez par rapport à ça ? Sur la structuration de la filière,
00:40:53 vraiment au sens lobbying, activité ?
00:40:56 De façon macro, moi ce que j'ai identifié, c'est que les deux points assez importants,
00:41:03 c'est mutualisation.
00:41:04 Parce que tout matériel qui n'est pas produit, c'est des déchets en moins.
00:41:08 Donc ça peut être mutualisation de dispositifs XR, mais ça peut être aussi la question
00:41:14 des festivals, quand on fait déplacer 1000 ou 2000 personnes dans un site pour un festival,
00:41:19 il y a pas mal d'initiatives qui se font de covoiturage, d'acheter le billet du festival
00:41:25 et d'avoir dans le billet offert un covoiturage ou une réduction sur une plateforme de covoiturage.
00:41:30 Donc il y a des choses dans la mutualisation qui pour moi sont essentielles.
00:41:34 Et le deuxième point, c'est l'accessibilité, aussi bien en termes d'écologie mentale,
00:41:39 d'inclusivité, etc.
00:41:40 Pour reprendre la comparaison que tu as fait avec D3R, ou plutôt la gestion des déchets,
00:41:45 où il a fallu mettre en place des infrastructures, ce qui fonctionne c'est quand localement,
00:41:50 c'est mis en place et que si je n'ai pas accès à une déchetterie à moins de 50
00:41:53 kilomètres, je ne vais pas y aller.
00:41:55 Et donc cette notion de rendre accessible les choses, pour moi c'est un des leviers
00:42:03 hyper importants dans cette question-là.
00:42:05 Alors je rajouterai à la mutualisation et à l'accessibilité l'allongement de la
00:42:10 durée de vie des devices, parce que c'est ça qui pèse le plus.
00:42:15 Par exemple pour faire un casque OLED, l'impact de fabrication c'est 90 kilos de CO2.
00:42:20 Pour l'Apple Vision Pro c'est 207,7.
00:42:23 Donc plus on va augmenter la durée de vie, plus ça va permettre justement de lisser
00:42:32 cet impact sur le temps.
00:42:34 Après on parle beaucoup de recyclage, mais il faut parler de réutilisation beaucoup,
00:42:40 de reconditionnement, c'est extrêmement important.
00:42:43 Et le dernier point sur lequel il faut insister, je viens de perdre l'idée que j'avais,
00:42:52 ça ne va pas du tout.
00:42:53 Je peux peut-être te relancer sur les déchets, c'est-à-dire que d'une certaine façon
00:42:57 si on continue de réfléchir sur cette question de déchets, là on est quand même sur des
00:43:01 déchets électroniques.
00:43:02 Ça veut dire aussi, je ne parle même pas des questions de souveraineté, mais d'une
00:43:05 production qui est pour le coup sur des composants extrêmement petits, où on n'a pas forcément
00:43:11 accès aux pièces.
00:43:12 En tout cas Marc, c'est ce que tu me disais sur ton parc d'équipement.
00:43:13 Nous on veut bien réparer, mais comment on fait pour réparer ? On ne peut pas.
00:43:17 Même l'accès aux machines à l'intérieur ou aux composants est impossible.
00:43:20 Voilà, j'ai retrouvé mon idée.
00:43:22 En fait, il y a cet aspect recyclage, l'impossibilité d'avoir des pièces détachées.
00:43:29 Donc en fait, il faut cannibaliser les anciens matos, il faut les conserver.
00:43:34 Mais il y a un autre aspect qui est extrêmement important, c'est de ne pas développer, enfin
00:43:40 de développer, d'être multiplateforme en fait.
00:43:42 Parce que si on développe que sur une plateforme, parce que là, en fait, tout le monde va vouloir
00:43:46 développer sur Apple Vision Pro et le problème, ça va entraîner l'obsolescence matérielle
00:43:50 en fait des autres devices.
00:43:52 Et là, ça, c'est un effet dévastateur en fait sur l'empreinte parce qu'on a utilisé
00:43:57 beaucoup de ressources pour faire ces casques VR et ces manettes et elles vont être utilisées.
00:44:02 Donc, bien sûr, on va pouvoir les recycler, mais recycler, ça coûte de l'argent.
00:44:06 Et ce qu'il faut savoir, c'est qu'il y a une filière de recyclage qui se monte uniquement
00:44:10 quand c'est rentable.
00:44:11 Donc pour l'argent, pour l'or, un peu pour le cobalt et encore pour le cuivre.
00:44:18 Et puis c'est tout.
00:44:19 Et la majeure partie des composants ne sont pas récupérés.
00:44:22 Et j'aimerais ajouter sur la question des imaginaires, parce qu'on n'a pas vraiment
00:44:27 parlé des enjeux esthétiques ou artistiques des œuvres, c'est que finalement, les œuvres
00:44:31 elles-mêmes ont un discours, proposent des solutions, soit dans leur démarche, soit
00:44:35 dans le fait que l'histoire qui est racontée nous sensibilise à ces questions-là.
00:44:39 Et en fait, pour moi, c'est un des enjeux aussi.
00:44:45 Est-ce que l'œuvre qui va être produite, déjà, a un sens d'être faite en XR ? Si
00:44:50 c'est par exemple juste un film en mode traditionnel cinématographique, de le diffuser dans un
00:44:56 casque s'il n'y a pas d'intérêt d'immersivité 360, et en ce cas-là, il vaut mieux le diffuser
00:45:02 sur des médias classiques, cinéma ou VOD ou streaming.
00:45:06 C'est un peu le risque avec les arts numériques ou la technologie, c'est la surenchère
00:45:09 de la technologie.
00:45:10 C'est ça.
00:45:11 Qui est aussi corrélée à ce qu'on a discuté tout à l'heure un petit peu en coulisses,
00:45:14 au techno solutionniste, c'est-à-dire à chaque fois de créer et puis on trouverait
00:45:18 un peu l'usage ou on trouverait un petit peu la finalité.
00:45:19 Ou une solution à l'écologie en l'occurrence.
00:45:22 En fait, c'est le paradigme, on est dans une économie de l'expérience.
00:45:26 Tout est expérience en fait.
00:45:28 Et on est même au-delà de ça, c'est que même la publicité s'empare de tout ce
00:45:32 qui a été créé dans les arts numériques de plus en plus parce que l'idée c'est
00:45:36 de faire une expérience client, une expérience produit, alors que les œuvres, le théâtre,
00:45:42 les arts numériques ou même les arts traditionnels, le but c'était vraiment de nous emmener
00:45:46 dans un imaginaire et donc nous faire vivre une expérience séparée.
00:45:49 Et le philosophe Edmond Coucher a même identifié qu'on est dans l'expérience de l'expérience
00:45:53 aujourd'hui, dans une forme beaucoup plus méta, c'est-à-dire quand j'ai Instagram
00:45:57 et que je vais filmer quelque chose que je vis qui est artistiquement fort ou intéressant,
00:46:03 je vais avoir un plaisir qui va être décuplé du fait que je partage l'expérience que
00:46:07 je vis.
00:46:08 C'est les reacts d'une certaine façon.
00:46:09 Voilà, c'est ça.
00:46:10 Et donc en fait… Filmer sa réaction.
00:46:12 C'est ça, cette économie de l'expérience de l'expérience, on le fait tous, on témoigne
00:46:15 au quotidien maintenant avec les réseaux sociaux et quelque part le plaisir… Si
00:46:20 on nous prive de notre smartphone lorsqu'on va à un concert ou à un spectacle, il y
00:46:23 a une frustration qui de fait émerge souvent.
00:46:28 Et en fait, on en oublie que le but c'est de vivre une expérience artistique qui nous
00:46:36 sort de notre quotidien, notre confort, qui nous emmène ailleurs.
00:46:40 Et donc l'enjeu c'est de savoir avec quoi on crée cette expérience, est-ce qu'on
00:46:44 peut la faire avec des moyens beaucoup plus frugaux, simplifiés, etc.
00:46:47 Peut-être puisqu'on prend un peu de perspective, j'aimerais… Dernière question et ensuite
00:46:52 je vais laisser la parole au public.
00:46:54 Que vous me disiez ce qui va devenir dans les prochains mois, pour Sepir, pour tes activités,
00:47:03 Jean-François en l'occurrence en tant qu'artiste, pour Diversion Cinéma, par rapport au sujet
00:47:08 qui nous intéresse évidemment, quid des activités et des perspectives de structuration,
00:47:14 on passe à l'action ou à l'échelle maintenant ?
00:47:16 Voilà, la XR a la chance d'avoir l'appel à projet Culture immersive et métavère,
00:47:29 en fait, qui va permettre de structurer la filière parce que toutes les 90% des dépenses
00:47:38 éligibles vont dépendre de la transition environnementale.
00:47:43 C'est-à-dire que les projets ne pourront se faire, il pourrait y avoir des investissements
00:47:50 que si ça obéit vraiment à une logique de réduction d'impact, une logique de réduction
00:47:55 d'impact, consommation d'eau, consommation d'énergie, réduction d'émissions de
00:48:00 GES. Donc, en fait, ça va accélérer très vite la transition du secteur. Alors, nous,
00:48:10 dans Sepir, on a fait une modélisation prospective pour savoir quel va être l'impact, quels
00:48:16 peuvent être les scénarios de la XR à 2030. Et en fait, on s'est rendu compte que cet
00:48:23 appel à projet, il va permettre de passer de 48 kilos de CO2 d'impact carbone d'utilisation
00:48:31 de la XR à 39. Donc, ça a un effet très, très important par habitant, par utilisateur
00:48:40 de la XR. Et donc, ça va avoir vraiment un effet parce qu'il va y avoir notamment l'allongement
00:48:48 de la durée de vie des casques, des devices, etc. Donc, c'est une grande chance pour la
00:48:53 XR. Les autres secteurs se sont emparés du thème de la transition écologique bien avant
00:48:59 la XR. Et là, la XR a la chance d'avoir ce véhicule pour transformer et pour financer
00:49:07 sa transition qui est là.
00:49:09 C'est une monnaie importante en plus, c'est 260 millions d'euros.
00:49:12 Voilà. Et puis, bon, voilà. Il n'y aura pas un euro qui va être financé si ça n'obéit
00:49:18 pas à une logique de réduction d'impact.
00:49:20 Je voulais aussi te questionner sur le fait que CEPIR a une démarche très particulière,
00:49:25 le fait d'avoir des studios du secteur du numérique et puis aussi de l'ESS avec la
00:49:31 coopérative carbone, on l'a dit tout à l'heure, et d'avoir travaillé avec pas mal d'acteurs
00:49:34 historiques pour le coup, et notamment Chiffre Project, pour le site, c'est peut-être le
00:49:37 plus le plus connu. Alors, Quinn, maintenant de la structuration, est-ce qu'on rend les
00:49:40 choses plus politiques en disant voilà, on a les bilans, on a l'impact, on a le réseau,
00:49:45 on est en train de parler entre nous. Maintenant, on passe à l'échelle davantage politique.
00:49:50 C'est une responsabilité que je te mets.
00:49:55 Oui, grosse responsabilité. Je ne fais pas de politique d'habitude. Non, c'est juste
00:49:59 nous, on est très pragmatique. On a plus une culture d'ingénieur. Les limites planétaires
00:50:04 sont là. La XR, elle a tel impact. Il faut trouver un moyen de la faire rentrer dedans.
00:50:10 Alors, c'est pas à nous de le dire. On n'est pas des politiques. On a fait des recommandations
00:50:16 aux pouvoirs publics qui sont dans les livrables sépires et c'est à eux de s'en emparer
00:50:22 maintenant. Donc, on a fait ce travail, bien sûr, pour qu'il y ait une réponse politique.
00:50:27 Mais voilà, maintenant, ça ne nous concerne plus.
00:50:30 C'est une belle esquive qu'on aurait pu prendre aussi sur le politique et la politique. Pour
00:50:35 le coup, de faire de la politique. Il y a aussi cette notion de faire des choix dans
00:50:40 les prochaines années. Est-ce que la XR est prioritaire par rapport à un autre secteur ? Comment
00:50:43 on la structure, etc. ? Quelles contraintes on pose ? Ça aurait pu être une réponse.
00:50:50 Oui, mais nous, en fait, on a besoin d'avoir une certaine objectivité quand même. En fait,
00:50:59 nous on donne des résultats d'impact, on donne des recommandations. Des fois, ça paraît
00:51:03 un peu technocratique, mais on ne peut pas être jugé parti et on ne peut pas non plus
00:51:08 être trop devant la scène en disant il faut faire ci, il faut faire ça. Nous, on a plus
00:51:12 un rôle de conseiller et de pousser les bonnes pratiques et les recommandations.
00:51:17 À titre personnel, je suis très curieux de voir ce que va devenir Sepyr et l'évolution
00:51:22 qu'il va prendre. Jean-François ?
00:51:24 Oui, alors je peux prendre un angle politique, pour le coup, en disant que là, ce qui m'intéresse
00:51:31 actuellement, c'est de me projeter dans du long terme, voire très long terme. Je vais
00:51:35 prendre un exemple concret. Là, je compte à la 500 ans. Est-ce qu'une œuvre XR aujourd'hui,
00:51:41 dans 500 ans, sera diffusable ? La réponse, c'est clairement non.
00:51:45 Est-ce que tu vas évoquer le sujet de la conservation ?
00:51:49 C'est ça. En fait, c'est ça qui m'intéresse, c'est qu'en tant que chercheur, l'un de mes
00:51:55 objectifs, c'est d'étudier les choses sur des temporalités très longues. J'ai des
00:51:59 collègues chercheurs dans le nucléaire. S'ils ne posent pas des questions à 1000
00:52:02 ans, c'est dramatique parce que la gestion des déchets, leur conservation, leur enfouissement
00:52:07 ou leur recyclage, là, pour le coup, va impacter l'humanité entière et les autres espèces.
00:52:11 Bref, vous voyez le topo. En art, effectivement, on a moins de dangers
00:52:16 imminents, je dirais, à ne pas traiter la question. Mais quand même, sur la santé
00:52:19 mentale ou sur les imaginaires et ce qu'on transmet aux générations d'après, qu'est-ce
00:52:23 qu'on conserve d'une œuvre XR ? Je pars de ce constat-là grâce au travail
00:52:29 de collègues. C'est un projet qui a été conduit à la
00:52:35 Bibliothèque nationale de France avec l'équipe INREV dont je fais partie. Les collègues
00:52:41 se sont posés la question, qu'est-ce qu'on conserve d'une œuvre d'art numérique ?
00:52:44 Ça s'applique aussi à la XR. Est-ce que c'est toute la partie, l'histoire de la
00:52:49 génèse de l'œuvre, le contexte avec les artistes, les groupes d'artistes qui se sont
00:52:53 retrouvés, un peu comme les surréalistes, quand on regarde dans l'histoire de l'art,
00:52:56 il y a toujours eu des groupes d'artistes qui se sont regroupés et on crée des nouveaux
00:53:00 courants artistiques, de nouveaux mouvements. Ensuite, comment l'œuvre a été créée,
00:53:04 je peux faire un zoom sur l'aspect création, ça va aussi bien dans les étapes de conception
00:53:08 que la réalisation effective de l'œuvre, les logiciels mis en œuvre, etc.
00:53:15 Et puis après, toute la chaîne où l'œuvre a été diffusée, est-ce qu'on conserve
00:53:19 les moments, est-ce qu'on filme les spectateurs en train de tester l'œuvre, de l'activer,
00:53:24 leurs réactions ? Qu'est-ce qu'on archive ? Est-ce qu'on archive le logiciel, l'histoire,
00:53:29 le scénario, etc. La vidéo des gens filmés, les retours des spectateurs, etc.
00:53:34 Donc en fait, il y a tout un ensemble.
00:53:36 Et ça, c'est un point écologique.
00:53:37 C'est un point écologique, mais quelque part, quand on parle de durabilité, la question
00:53:41 de la postérité, pour moi, est essentielle. C'est que l'œuvre doit être durable en
00:53:45 termes de consommation à l'instant présent, aux années à venir, est-ce qu'on peut la
00:53:52 réactiver ? Mais surtout, comment on la préserve le plus longtemps possible pour les générations
00:53:59 suivantes ?
00:54:00 L'andia de Sépierre me disait que c'est le poste qui est exponentiel, qui est continu
00:54:06 en fait. Le poste carbone continue, l'idée de la conservation. À la BNF, on met une
00:54:10 date, on va les conserver. Et là, pour le coup, on a pu la main sur...
00:54:15 J'ai juste une petite anecdote très rapide. Vous connaissez Toy Story 1, le dessin animé
00:54:20 en 3D. En fait, quand ils ont voulu faire le 2, ils ont perdu le master des fichiers
00:54:24 qui a été fait sur Silicon Graphics. Et donc, ils ont payé pendant 6 mois une équipe
00:54:30 pour essayer de retrouver les fichiers pour pouvoir le faire. Alors maintenant, l'archivage
00:54:36 par exemple des films se fait de façon passive sur LTO, Linear Type Open. En fait, c'est
00:54:42 un support physique. Il n'y a pas de consommation énergétique et on peut les ressortir. En
00:54:47 fait, c'est ce qu'il faut garder les lecteurs et c'est la solution la plus durable.
00:54:51 Merci pour ces précisions. Marc, les perspectives vers son cinéma ?
00:54:59 Pour nous, je pense qu'il y a un vrai travail, je pense, avec Ecoprod que j'aimerais bien
00:55:10 lancer pour essayer de voir ce qui a été fait, comment est-ce qu'ils ont appréhendé
00:55:16 le travail avec le secteur du cinéma et voir comment est-ce que nous, en tant que diffuseurs,
00:55:19 puisqu'on est diffuseurs, distributeurs, comment est-ce qu'on peut appliquer ça chez nous.
00:55:23 On est distributeurs, on a une cinquantaine d'oeuvres aujourd'hui qu'on représente
00:55:28 à l'international, qu'on représente, qu'on essaie de monétiser, qu'on essaie
00:55:32 de diffuser le plus possible. Donc on est en rapport constant avec les créateurs et
00:55:39 on doit leur demander en fait de commencer à réfléchir à ces aspects-là. Mais bon,
00:55:46 c'est lié donc à Ecoprod et au travail qu'a fait Sepir et comment est-ce qu'on
00:55:50 peut les accompagner pour qu'ils soient conscients de l'impact qu'ils ont. Nous,
00:55:54 on a toujours accompagné les créateurs pour leur donner des conseils, pour faire en sorte
00:56:03 que leur oeuvre soit le plus vue possible. Vu qu'on est diffuseurs, on est conscients
00:56:06 de l'impact économique, du coût de représentation d'une oeuvre. Donc on les accompagne de
00:56:12 ce côté-là. Il faudrait qu'on réussisse à devenir accompagnateur aussi sur l'impact
00:56:18 parce qu'on a une position assez clé vu qu'on s'occupe à la fois d'aller chercher
00:56:24 des oeuvres qui vont être faites ou qui sont faites et de les accompagner dans leur vie,
00:56:29 dans la présentation au public.
00:56:30 Ça demande peut-être aussi de réfléchir à la question de la formation pour le coup.
00:56:34 Est-ce qu'il y a des filières de formation qui répondent à des besoins et qui justement
00:56:40 peuvent peut-être à l'échelle des opcos par exemple ? Ou je ne sais pas, comment
00:56:47 on fait aussi pour vous, professionnels, pour que vous puissiez être formés ?
00:56:50 Non, non, tout à fait. Merci pour cette question puisqu'en fait, on est en train de développer
00:56:56 notre activité de formation à la XR d'une façon générale. Et clairement, c'est quelque
00:57:01 chose qu'on pourrait ajouter à notre art, qu'on travaille avec plusieurs instituts
00:57:06 également qui forment de façon plus générale sur la XR. Et c'est des questions qu'il
00:57:10 faut qu'on inclue.
00:57:11 Et puis de la même façon, tu prenais l'exemple avec l'égalité femmes-hommes et les violences
00:57:15 sexistes et sexuelles, il y a des référents à égalité dans les entreprises. Il pourrait
00:57:18 y avoir des référents environnementaux, impacts environnementaux dans le secteur de la XR.
00:57:23 Peut-être que je rêve.
00:57:24 Non, ce qu'on aperçoit, c'est que chaque secteur, quand il commence à entamer sa
00:57:32 mue et sa transition, il y a toujours une partie des professionnels qui s'emparent
00:57:36 du thème et qui, à côté des experts environnementaux stricto sensu, ils vont créer justement un
00:57:42 véhicule, un moyen juste pour propager la connaissance.
00:57:47 Donc là, c'est ce que propose faire Marc. Nous, ce qu'on fait aussi à notre niveau
00:57:53 à Sépire. Et je trouve ça très bien. Il faut qu'il y ait vraiment une rencontre
00:57:58 entre tous, entre les professionnels, les spécialistes de l'environnement, les chercheurs,
00:58:04 le public. C'est un travail en commun. Il y a beaucoup de choses à faire. Il faut
00:58:10 qu'on travaille tous main dans la main et sur un pied d'égalité pour qu'on ait
00:58:17 une XR qui soit belle, utile, qui satisfasse les besoins sociétaux et qui soit compatible
00:58:27 avec les limites planétaires.
00:58:28 Donc si la question était, une XR est-elle compatible avec les enjeux environnementaux,
00:58:34 on dirait oui, mais peut-être.
00:58:35 Je vais passer le micro dans le public.
00:58:42 Merci beaucoup pour ce panel, c'était très intéressant. C'est la première fois que
00:58:54 j'écoute un panel sur ce sujet et en effet, ça donne beaucoup de réponses. Moi, je suis
00:58:59 une ancienne étudiante en ingénierie 3D. J'ai découvert la réalité virtuelle grâce
00:59:03 à diversion cinéma notamment en 2016 au Paris VR Festival à l'époque. Quand j'ai fait
00:59:10 mes études en ingénierie, jamais on n'a parlé de tous ces sujets-là. C'était très productiviste,
00:59:16 puis la santé mentale, on oublie. Moi, ça m'a fait partir du monde de la production,
00:59:22 c'est-à-dire qu'après je me suis orientée vers de l'exploitation cinématographique
00:59:25 pour MK2. On exploitait des oeuvres immersives. Après, je suis allée dans les festivals
00:59:30 où pareil, on s'en foutait un peu de... comme d'hab quoi. Aujourd'hui, je vois cet effet
00:59:35 de mode dans les festivals, notamment sur ces panels. Je me dis donc pour les prochains
00:59:40 ingénieurs, pour les prochains artistes, aujourd'hui mais aussi en tant que jeune professionnel
00:59:44 de mon côté qui organise des événements, qui s'intéresse à la production immersive,
00:59:48 quelle est la méthodologie pour continuer à avancer en prenant en compte vos recommandations
00:59:54 parce qu'au final, les politiques, comme vous le savez, je ne suis pas sûre que ça
00:59:58 va bouger très vite de leur côté. Voilà, c'est ça ma question.
01:00:01 Dans ces pires, on a fait un peu un précis d'éco-conception des oeuvres. Ce qui est
01:00:10 vraiment génial parce que j'avais participé à d'autres, c'est que là, c'est un studio
01:00:15 qui s'appelle Novelab qui a vraiment testé chacune des méthodes. On ne les a pas exprimées
01:00:23 en termes de solutions, mais en termes de problèmes principaux. Et comment est-ce
01:00:28 qu'on pouvait les adresser de la façon la moins impactante possible? Donc, c'est très,
01:00:32 très opérationnel, très, très technique et c'est vraiment chouette. Je crois que ça
01:00:37 n'avait jamais été fait. Et puis après, bon, voilà, il faut essayer de se poser la
01:00:41 question. Est ce que ce que je fais est utile? Ce n'est pas parce que ça va être éco-conçu,
01:00:46 éco-distribué que c'est souhaitable aussi. Donc, c'est vraiment interroger sa pratique
01:00:52 professionnelle. Et puis après, Jean-François, il parlait. Est ce qu'il faut bifurquer?
01:00:56 Moi, chaque année, j'ai deux ou trois étudiants sur 20. Ils partent vraiment sur une logique
01:01:03 plus environnementale et il ne se passe pas un mois sans que je sois sollicité pour aider
01:01:08 un étudiant sur des mémoires, sur les coproductions, sur comment concilier la création artistique
01:01:16 et la réduction des impacts. Donc, en fait, c'est un chemin difficile, très difficile,
01:01:23 mais que chacun d'entre nous doit entreprendre. Il faut que ce soit vous qui trouviez votre
01:01:29 votre votre angle d'attaque parce que vous êtes ingénieur, donc utiliser peut être
01:01:35 l'angle ingénierie. Voilà, il ne faut pas oublier ce que vous avez fait avant, mais
01:01:40 essayer d'utiliser cet angle et cette multiplicité d'informat d'expérience que vous avez eu.
01:01:45 Peut être pour pour intégrer le futur mouvement de marque sur la réduction de l'impact de
01:01:51 la XR. Elle est là. Voilà donc ça pourrait être super. Votre expérience pourrait être
01:01:56 très intéressante. Mais voilà, c'est à chacun de nous d'apporter notre singularité,
01:02:00 nos compétences à ce combat là. Mais donc, est ce que vous invitez? J'ai entendu que
01:02:07 vous, Jean-François, vous étiez à Paris 8. Quelles sont les formations aujourd'hui
01:02:11 à la fois où moi, par exemple, je m'autoforme après? Est ce que vous invitez les professionnels
01:02:16 justement à intervenir plus en école? En école d'ingénierie, en école d'art, peu
01:02:20 importe. Quels sont les programmes de formation qui propose ça aujourd'hui?
01:02:25 Alors, dans le cas de ma formation, c'est un master en création numérique et c'est
01:02:31 de notre initiative qu'on est en train de changer nos maquettes pédagogiques pour pour
01:02:35 les prochaines années, pour pouvoir inclure ces questions éco responsables. En tout cas,
01:02:40 après, il y a des masters qui existent déjà, qui sont soit intermaster, donc c'est des
01:02:44 masters transdisciplinaires. Je sais qu'à Montpellier 3, à Paul-Valéry, il y a un master
01:02:49 sur la question écologique qui s'est ouvert, qui touche à plein de disciplines. Donc,
01:02:53 il peut y avoir de l'ingénierie, mais aussi sciences sociales, philosophie, botanique
01:02:59 éventuellement. Enfin, c'est vraiment pour ouvrir l'esprit. Donc, ça peut être pris
01:03:03 en tant que formation en tant que candidat libre, mais on peut aussi faire une formation
01:03:09 nue pendant la vie. Il y a quand même beaucoup de masters qui se montent là-dessus, en tout
01:03:14 cas à ma connaissance. Niveau licence, c'est un peu moins présent encore parce que c'est
01:03:18 des formations plus initiales, moins expertes. Et ensuite, pour compléter la réponse de
01:03:24 Benoît qui était excellente pour le coup vis-à-vis de comment se positionner par rapport
01:03:28 en tant qu'ingénieur face à ces enjeux. Ce que j'ai pu discuter avec certains étudiants
01:03:34 et étudiantes de mon master, c'est qu'il ne faut pas se culpabiliser ou être dans les
01:03:38 coups d'anxiété permanente parce qu'en fait, ça démobilise beaucoup. Et ce n'est pas
01:03:42 à des étudiants et étudiantes de subir le poids d'un système productiviste, capitaliste.
01:03:48 On sait très bien qu'à la sortie de l'école ou d'université, on a besoin de travailler.
01:03:52 Et donc, on prend souvent l'offre d'emploi qui est la plus en phase avec au moins nos
01:03:56 aptitudes ou notre localité. Et ensuite, par contre, d'avoir en tête que c'est possible
01:04:04 de bifurquer, de faire des pauses, d'ermitage, de peut-être travailler dans des sociétés
01:04:09 plus éco-responsables. Ça après, c'est notre choix et en fait, il faut se donner le
01:04:14 temps de le faire. Mais il ne faut pas tout de suite, pour moi, se culpabiliser ou se stresser
01:04:21 parce que c'est notre système tout entier, on hérite d'un système productiviste et
01:04:25 de changer les choses, ça va se faire collectivement, progressivement. L'avoir en tête, je pense
01:04:30 que c'est déjà une grosse première étape.
01:04:34 Excusez-moi, vous parlez anglais ?
01:04:38 Oui.
01:04:39 Ok, j'ai utilisé le Google Translator pour tous les évènements, j'espère que j'ai
01:04:43 compris. Mon nom est Maxime Khrouchov, je travaille en tant que designeur de son, et
01:04:50 je vous invite également à voir notre défilé Shift ici au Planetarium. Et pour vous, j'ai
01:04:56 une question, parce que je travaille en tant que designeur de son pour les véhicules électriques,
01:05:01 et je comprends que l'XR n'est probablement pas seulement le visuel, c'est peut-être
01:05:07 aussi le son. Parce que par exemple, nous créons des sons d'engines et des sons
01:05:13 UI/UX pour aider à faire plus d'intérêt pour les gens qui veulent changer leurs voitures.
01:05:21 Et en Europe, il n'est pas possible de produire des voitures à combustion en 10 ans, je pense.
01:05:29 Et ici, je pense que moi, en tant qu'artiste, je peux contribuer aux gens, au monde,
01:05:38 pour le rendre plus écologique et amiable. Et j'ai aussi entendu que BASF, par exemple,
01:05:44 a donné des centaines de milliers d'euros aux musiciens et aux gens de l'art pour développer
01:05:52 leur art. Et le prochain grand défilé sera en un mois, mais ici, je ne pense pas que
01:05:57 cela peut vraiment aider BASF à devenir plus carboneutrale ou écologique, comme écofriendly,
01:06:04 ils se dépensent juste des impôts pour soutenir les musiciens et les gens de l'art.
01:06:08 Et ici, j'ai une question pour vous. Quelle type d'art et quel type d'artiste
01:06:16 peut-il devenir une partie de l'XR? Et peut-être, quelles sont les meilleures
01:06:26 façons de faire de notre vie quotidienne plus écologique, plus carboneutrale avec cette technologie?
01:06:36 Merci pour vos questions. En fait, en termes de pratique quotidienne,
01:06:49 je pense que faire tout seul ou tout ensemble peut être une option intéressante pour l'artiste.
01:06:56 Même si l'XR est assez difficile à créer seul, car le matériel et la software sont très
01:07:06 complexes à désigner, mais je peux vous donner un exemple. En fait, quand on parle de l'XR,
01:07:16 bien sûr, cela inclut l'audio spatiale et l'audio en temps réel, car c'est principalement l'XR visuel,
01:07:24 mais vous pouvez aussi travailler avec le son et explorer la haptique, la physique,
01:07:30 comment votre corps ressent le matériel, la pression, la chaleur, etc. Vous pouvez aussi travailler
01:07:36 avec ce genre de dispositifs. L'XR est plus large que les visuels, donc bien sûr, il inclut l'audio artiste.
01:07:42 Et aussi, quand on parle de l'XR, on parle de la mappage vidéo, par exemple,
01:07:48 de la mappage vidéo interactive, quand vous contrôlez l'image en temps réel.
01:07:52 Je peux parler d'une collectivité qui s'appelle OYE, ils sont français, et ils créent des projecteurs
01:08:02 avec des technologies analogiques, revisitant la mappage vidéo qui était utilisée avec des ordinateurs.
01:08:09 Ils gardent donc la même esthétique, mais ils essayent de le faire d'une manière plus simple.
01:08:15 Ils créent leurs propres dispositifs avec des projecteurs LED, et ils dessinent en temps réel les bâtiments.
01:08:23 C'est donc un autre genre d'interactivité, pas plus d'utilisation des technologies numériques,
01:08:27 mais ils reviennent complètement à l'esthétique et au concept de la mappage vidéo numérique.
01:08:33 Donc, ça peut être un changement radical, mais c'est un mélange de DIY, de performance,
01:08:41 et l'audience peut aussi jouer avec vous et performer avec vous sur le bâtiment.
01:08:47 C'est une initiative récente qui mélange ces idées.
01:08:54 Donc, vous êtes profondément en son, peut-être que vous avez une certaine compétence,
01:09:04 et vous devez trouver de nouvelles façons de mitiger l'impact de votre travail.
01:09:11 Chaque année, la première chose que je dis à mes étudiants,
01:09:19 c'est que nous sommes maintenant en 2023, et vous devrez constamment trouver de nouvelles façons
01:09:27 de réduire l'impact des pipelines de création numérique jusqu'à la fin de votre vie de travail.
01:09:35 Donc, vous devez apprendre plus, vous pouvez apprendre par vous-même l'impact environnemental,
01:09:43 et vous utilisez votre spécialité en son pour trouver de nouvelles façons d'innover,
01:09:49 de mitiger l'impact, comme les gars d'Oyez.
01:09:55 C'est très intéressant, donc vous pouvez envisager des pratiques ou des façons de réduire l'impact en bas de la technologie.
01:10:04 Mais utilisez votre background, apprenez à l'impact environnemental, et trouvez votre propre solution.
01:10:11 Et disséminez la solution que vous trouvez pour vos secteurs, et tous autour de vous.
01:10:24 Bonjour, merci beaucoup pour cette table ronde, c'était très instructif.
01:10:28 J'ai une question qui peut amener à un débat assez long, j'imagine qu'on n'aura pas le temps d'explorer tout ça aujourd'hui.
01:10:39 Mais Jean-François, vous parliez de l'écologie mentale qui est nécessaire avant l'écoresponsabilité, en tout cas avant cette question-là.
01:10:47 Vous disiez également que l'art est nécessaire à cette écologie mentale, que ça fait partie de tout ça.
01:10:54 Et j'ai deux questions, si cette création est énergivore, est-ce que c'est bien productif finalement ?
01:11:01 Et l'autre question, c'est qu'est-ce que vous pensez de la légitimité d'artistes d'utiliser des moyens très énergivores
01:11:13 pour incarner un discours écologique ou écoresponsable ?
01:11:18 Est-ce que l'impact du discours prévaut aux moyens ?
01:11:23 Quel est l'impact de ce discours-là par rapport à l'impact qu'il a dans son coût écologique ?
01:11:30 Et est-ce qu'il y a eu des moyens de le mesurer ?
01:11:38 En fait, de tout temps, les artistes ont toujours traité la question écologique de différentes formes.
01:11:45 On peut prendre les grottes, les grottes ornées, c'était l'approche naturaliste.
01:11:50 On dépeint la nature parce qu'on est émerveillé par elle, etc. et on veut la transmettre aux autres.
01:11:55 En plus, entre les grottes très connues comme Chauvet ou Lascaux, il y a eu entre-temps le fait qu'on ait eu l'agriculture et la domestication.
01:12:05 Donc même le rapport à la nature a déjà changé entre Chauvet et Lascaux.
01:12:08 Parce que d'un coup, l'animal, on était fasciné par lui et on le vénérait pour potentiellement pouvoir mieux le chasser et se nourrir.
01:12:15 Et plus tard, c'est juste le dépeindre parce qu'il est beau éventuellement et parce qu'on a maîtrisé la nature.
01:12:20 Donc, rien que là, déjà, il y a un rapport de l'humanité à la nature qui a pas mal changé la donne, on va dire.
01:12:26 Et depuis, on a des approches beaucoup plus écologiques, écologistes, écosophistes.
01:12:32 Je vais détailler les trois. Les approches écologiques, c'est des artistes qui vont sensibiliser à la question écologique.
01:12:40 Les écologistes, là où ils auront une approche beaucoup plus activiste, c'est plutôt faire des choses de terrain, de condamnation, etc.
01:12:50 de sabotage, éventuellement. Et les artistes écosophistes, c'est des artistes qui essaient de sensibiliser à l'écologie de façon plus large,
01:12:57 de façon collective, avec des ateliers, avec du jeune public, par exemple, etc.
01:13:02 Il y a plein d'approches et il y a aussi des paradoxes. Je vais prendre l'exemple de Olafur Eliasson,
01:13:07 qui est un artiste contemporain, qui, pour la COP à Paris, avait fait venir du Groenland, il me semble, un iceberg en cargo.
01:13:15 Donc déjà, faire découper un iceberg, le faire venir en cargo, qu'il utilise du pétrole, le faire venir en camion,
01:13:21 tout ça pour le découper en douze devant le Panthéon à Paris. Il a disposé les douze blocs de glace pour faire une horloge,
01:13:30 qui symbolisait le temps qui passe avant qu'on arrive à un point de non-retour.
01:13:35 Et donc, sa démarche, de façon hyper polluante et complètement scandaleuse, donnait à voir, sans limite, l'impact de l'activité humaine.
01:13:45 Et donc, le public se pressait pour venir voir l'iceberg fondre. Ça devait durer une semaine, ça a duré trois jours.
01:13:52 Parce qu'en plus, il faisait très chaud à cette période-là de la COP à Paris.
01:13:56 Donc, effectivement, c'est complètement paradoxal. On se moque de nous, quelque part.
01:14:02 Mais en fait, les artistes, je préfère qu'un artiste fasse ça, et qu'on soit choqués, sensibilisés, et qu'on en parle ensuite,
01:14:09 que, quelque part, on continue des démarches industrielles, massivement polluantes, mais invisibilisées.
01:14:17 Et donc, quelque part, les discours artistiques sont un des moyens de pouvoir le faire.
01:14:25 C'est sûr que la question éthique, toujours, va planer. Mais pour moi, il semble essentiel que les artistes aient une parole libre,
01:14:32 et des façons de penser complètement alternatives, décalées, des moyens parfois légalement discutables, en fonction des pays.
01:14:40 Mais le but de l'artiste, c'est quand même de prendre la température du monde, de montrer, d'être sensible,
01:14:50 de sentir les choses à l'instant présent, et aussi de sentir ce qui arrive dans le futur.
01:14:56 C'est un paradoxe, mais je pense qu'il est nécessaire.
01:15:02 Très court, une réponse très courte.
01:15:04 Moi, quand je commençais à travailler pour Ecoprod, en 2011, les producteurs nous disaient "non, non, on ne peut pas réduire l'impact,
01:15:11 parce que ça brise notre liberté artistique". Donc les producteurs dans l'audiovisuel, ce ne sont pas des artistes,
01:15:18 mais ils disaient, ils invoquaient ça tout le temps, "ça brise notre liberté artistique".
01:15:24 Moi, je pense qu'un artiste doit être un trubillon, mais il n'est pas en dehors du monde aussi.
01:15:31 Donc si lui aussi, il pouvait se renseigner et savoir quel est son impact, ça serait bien aussi.
01:15:37 On va conclure par ces mots. Je vous invite à échanger peut-être avec les invités si vous le souhaitez.
01:15:42 Marc, Jean-François, Benoît, merci pour ces échanges.
01:15:47 Et bon courage dans la structuration et le sujet qui nous intéresse pour les mois à venir.
01:15:53 Merci. Les années, les décennies. C'est ça.
01:15:56 [Applaudissements]
01:16:02 [Silence]