• il y a 6 mois
La France commémore les 80 ans du Débarquement des Alliés sur les plages normandes ce jeudi. Que s'est-il passé ensuite dans les Pyrénées-Orientales ? Quelles ont été les répercussions ? L'historien perpignanais Georges Sentis l'a raconté à France Bleu Roussillon.

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Transcription
00:00 Et avec notre invité, on va revenir sur les 80 ans aujourd'hui du D-Day.
00:03 Les forces navales alliées ont commencé ce matin le débarquement des armées alliées
00:09 sur les côtes nord de la France.
00:11 Le débarquement des alliés sur les côtes normandes pour libérer la France de l'Allemagne
00:15 nazie, c'était il y a pile 80 ans.
00:17 Ce débarquement, il a aussi évidemment eu des répercussions chez nous, dans les Pyrénées
00:21 orientales.
00:22 C'est ce que va nous raconter votre invité, Suzanne Chojaï.
00:25 Bonjour Georges Sentis.
00:26 Bonjour.
00:27 Vous êtes Perpignanais, historien et spécialiste de la Seconde Guerre mondiale.
00:33 Alors, racontez-nous, on est le 6 juin 1944, les alliés débarquent en France, en Normandie.
00:38 Est-ce que la nouvelle arrive vite jusqu'ici dans les Pyrénées orientales ?
00:42 Alors, il faudrait quand même rappeler qu'à l'époque, la plupart des postes de radio
00:47 avaient été confisqués par Vichy puis par les Allemands.
00:51 Donc la seule source d'information était l'indépendant.
00:54 Et l'indépendant, bien sûr, qui est devenu de plus en plus collaborateur depuis la récession
01:00 de son directeur, va donner, va faire de la sous-information.
01:05 Je vais vous citer deux, trois titres.
01:08 9 juin, le commandant de la Wehrmacht est largement satisfait de la situation de ses
01:13 troupes qui se battent avec une grande volonté de vainqueur.
01:17 16 juin, en Normandie, après dix jours de combat, un tiers du potentiel de l'armée
01:23 d'invasion est anéanti.
01:24 17 juin, l'acharnement des combats en Normandie se limite à des affaires locales.
01:30 Donc en fait, ça met plusieurs jours à la nouvelle arriver.
01:33 La nouvelle arrive, mais elle est présentée comme étant quasiment une défaite.
01:37 On parle de troupes d'invasion d'abord, c'est très clair.
01:41 Et vous voyez, le 17 juillet, il n'y a plus rien.
01:46 Est-ce qu'ensuite, quasiment immédiatement, il y a des conséquences dans le département ?
01:50 Alors attendez, ça c'est l'information du grand public.
01:53 Vous avez ensuite l'information des cadres de la résistance, qui se fait par des radios.
02:00 Ils écoutent Radio Londres, dans l'espoir d'entendre des messages les concernant.
02:05 Alors, il faut dire aussi, ils savent que le débarquement a lieu.
02:09 La BBC, ils ont des idées un peu plus précises sur l'ampleur des combats.
02:14 Mais comme dans ce département, vous voyez les fameux plans, les vélos de l'automne,
02:19 ainsi de suite, il n'y en a pas.
02:21 Nous ne sommes pas concernés par les plans d'action pour soulager le débarquement en Normandie.
02:27 Donc, on sait, les cadres savent, et ils vont donc prendre des mesures.
02:31 - C'est-à-dire ?
02:32 - Alors ces mesures, par exemple, à Serré.
02:35 Si vous voulez, Serré, c'est une exception dans ce département.
02:37 Il y avait un comité qui réunissait toutes les organisations de résistance.
02:41 Et donc, la nuit du 6 au 7, on va du même, du débarquement,
02:45 ils se réunissent dans un casote et ils décident de créer un maquis.
02:50 Ils vont appeler le maquis 44 et ils vont désigner 35 personnes pour monter au maquis.
02:55 Voilà, ça c'est un exemple de décision quasiment unique.
02:59 C'est vrai qu'après, il va y avoir des conséquences.
03:02 - Mais alors, quelles conséquences justement ?
03:03 - Alors, conséquences sur le plan, si vous voulez, des résistants.
03:07 Dans les jours qui avaient précédé, c'est-à-dire fin mai, début juin,
03:14 on a vu des jeunes monter au maquis.
03:16 Monter dans ce qu'on appelle les maquis.
03:18 C'est comme ça que se crée un premier maquis à Rambouillet,
03:21 d'un côté sur le verre la glie,
03:24 qu'un deuxième maquis va se renforcer énormément,
03:26 c'est le maquis FTP Henri Barbus qui lui est sur le conflant.
03:31 Et donc, les maquis commencent à monter, disons, on va dire,
03:35 un peu avant et vont subir,
03:39 vont voir affluer les jeunes à partir du débarquement.
03:42 - Et à ce moment-là, il y a beaucoup d'Allemands dans le département ?
03:44 - Alors, à ce moment-là, il y a énormément d'Allemands dans le département.
03:48 Je ne citerai que deux chiffres, trois chiffres.
03:51 Vous avez à peu près 1000 hommes en Cerdagne pour 10 000 habitants,
03:55 c'est déjà le ratio, et vous avez 2500 hommes à Collioure-Port-Vendre.
04:01 Et vous en avez partout.
04:03 Alors, tout le monde connaît Saint-Philippe-d'Amon,
04:05 tout le monde va régulièrement à Saint-Philippe-d'Amon.
04:07 Eh bien, il y avait 25 Allemands à Saint-Philippe-d'Amon.
04:09 - Et qu'est-ce qu'ils font, eux, au moment où ils apprennent la nouvelle ?
04:12 - Ils sont là en train de voir un peu par où le débarquement va avoir lieu.
04:19 Et alors, les Allemands, c'est très étonnant,
04:21 pensent que le débarquement, ce débarquement qu'il y a chez nous,
04:24 aura lieu sur la côte Rocheuse.
04:26 On va renforcer la côte Rocheuse.
04:29 Et puis, il y a une autre idée étonnante,
04:31 ils envisagent peut-être que le débarquement ait lieu du côté de Rosas,
04:36 et donc ils vont envoyer de l'artillerie lourde pour bloquer le col du Pertus.
04:41 - Alors, à la suite de ce débarquement,
04:44 il y a eu aussi une vague d'arrestations dans le département, il faut le noter.
04:46 - Alors, ça c'est la deuxième partie.
04:48 Comment réagissent les Allemands ?
04:50 En renforçant les côtes, bon, la côte Vermeille.
04:53 Et deuxièmement, ils ont arrêté à travers tout le département
04:57 ce qu'on va appeler des prisonniers otages.
05:01 Alors, ces prisonniers otages, c'est une liste à l'après-verre.
05:04 - Et c'est qui ?
05:05 - C'est par exemple le président du tribunal,
05:09 c'est deux avocats, c'est le directeur de l'hôpital,
05:12 mais c'est aussi l'employé de la société électrique.
05:17 Si vous prenez les petits villages,
05:20 à Rillat, c'est le directeur de la société des hauts fourneaux,
05:24 mais au Boulot, c'est un menuisier.
05:26 - Et ils deviennent quoi ensuite ces gens ?
05:28 - Un certain nombre sont enfermés à la citadelle,
05:30 et puis une vingtaine vont être déportés,
05:33 avec un statut spécial,
05:35 ils vont être déportés dans des camps de concentration,
05:37 mais ils vont garder leurs vêtements,
05:39 ils vont garder leurs affaires, ils ne travailleront pas.
05:42 Alors pourquoi ils ont arrêté ?
05:45 Est-ce que c'était pour décapiter la résistance,
05:48 et on se disait que ces gens-là
05:50 vont pouvoir jouer un rôle dans la France libérée,
05:53 ou est-ce qu'ils voulaient avoir une monnaie d'échange ?
05:56 Une monnaie d'échange avec un menuisier,
05:58 je ne vois pas trop l'intérêt, c'est un peu complexe.
06:01 - Il est 8h10 sur France Bleu,
06:03 aussi on Suzanne Chaudrier et notre invité,
06:05 Georges Senti, historien à Perpignan, spécialiste de la Seconde Guerre Mondiale.
06:08 - Est-ce que c'était, les Pyrénées-Orientales,
06:10 est-ce que c'était un département très résistant à l'époque,
06:12 par rapport aux départements voisins par exemple ?
06:15 - Alors, ce qu'il fait, c'est un département rouge,
06:19 c'est un département du Lac-Rodonc rouge,
06:21 donc il y a une résistance forte.
06:24 Résistance forte due aussi à la présence
06:27 de très nombreux républicains espagnols,
06:29 qui coincédent dans ce département,
06:31 dans des compagnies de travailleurs étrangers,
06:33 vont, dès que c'est possible,
06:36 s'organiser en groupe de guerriers-héros.
06:38 Donc il y avait une présence forte.
06:40 Maintenant, il faut dire deux choses,
06:42 c'est que pour les autorités de Londres et d'ailleurs,
06:46 en partie alliées,
06:48 ce département est un lieu de passage
06:51 de courriers et de personnes vers l'Espagne,
06:54 et donc vers le monde libre.
06:56 - Donc sensible en fait, un lieu sensible.
06:58 - On a mis l'accent là-dessus.
07:00 Et donc il y a eu très très peu de parachutage,
07:02 ce qui fait que les maquis ont été très peu armés,
07:04 et très tardivement,
07:06 ce qui a limité leur action.
07:07 - Et finalement, quand est-ce que la ville de Perpignan est libérée ?
07:09 - La ville de Perpignan est libérée le 19 août,
07:13 de façon un peu, j'allais dire chaotique,
07:17 puisque l'un des problèmes qui va se poser
07:21 dès le lendemain du débarquement,
07:22 c'est qu'on s'aperçoit que la résistance
07:26 n'a pas réussi à mettre en place d'organisme unique.
07:29 Il n'y a pas de commandement des FFI,
07:31 il n'y a pas de comité de libération.
07:33 - Et ça, ça met longtemps à se mettre en place.
07:35 - Et ça met longtemps, puisque le comité de libération, ce sera le 10 août,
07:37 et l'état-major FFI le 7 août.
07:39 Donc ce qui veut dire qu'ils seront peu opérationnels
07:43 au moment de la libération.
07:45 Avec des tensions,
07:47 il y a eu une tension par exemple extraordinaire,
07:49 le commissaire de la République de Montpellier
07:51 nomme un préfet pour Perpignan,
07:53 et le comité départemental de libération
07:57 refuse ce préfet, et choisit un préfet lui.
08:00 Donc, vous voyez des tensions politiques
08:03 qui apparaissent très très vite
08:05 au moment de la libération.
08:07 - Et les commémorations du débarquement des alliés,
08:09 les 80 ans du débarquement du D-Day,
08:11 c'est cet après-midi sur les plages normandes
08:13 avec Emmanuel Macron, mais aussi plusieurs chefs d'état
08:15 comme le président américain, Joe Biden.
08:17 Merci beaucoup Georges Santis
08:19 de nous avoir raconté ce moment,
08:21 vu d'ici dans les Pyrénées-Orientales,
08:23 vous êtes, je rappelle, historien à Perpignan,
08:25 spécialiste de la seconde guerre mondiale.

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