• il y a 6 mois
Cours de cinéma par Adrien Gombeaud, critique de cinéma, auteur de «Hong Kong et Macao mis en scènes». Entrée gratuite.

Il est né à San Francisco, en 1940.
Il est mort à Hong Kong, en 1973.
Il repose à Seattle, au-dessus du lac Washington.

C’est une histoire écrite entre les rives du Pacifique, entre Hong Kong et Hollywood.

C’est l’histoire d’un homme qui, toute sa vie, a tenté de joindre l’Orient et l’Occident : Bruce Lee.

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Transcription
00:00:00 [Musique]
00:00:28 Alors ce qui est bien c'est qu'au Forum des images, ils m'ont mis une table qui ressemble un peu à un orgue.
00:00:34 Et donc j'ai l'impression que...
00:00:37 Bon, les plus affûtés musicalement ont reconnu "The Impossible Dream" qui est une chanson de Tom Jones.
00:00:45 À ma connaissance, Bruce Lee n'a jamais rencontré Tom Jones.
00:00:50 Mais on sait que c'était une de ses chansons préférées.
00:00:53 Et à son enterrement, le 31 juillet 1973 à Seattle, on a entendu cette chanson de Tom Jones.
00:01:01 Et c'est une chanson qui sera reprise par Jacques Brel aussi sous le titre "La Quête".
00:01:06 C'est une comédie musicale qui s'appelle "L'homme de la Mancha".
00:01:09 Et Brel a interprété Don Quichotte.
00:01:12 Et à un moment, on demande à Don Quichotte quelle est sa quête.
00:01:17 Et il chante cette chanson en parlant de cette inaccessible étoile, de ce rêve impossible à atteindre.
00:01:24 Et on ne sait pas exactement pourquoi Bruce Lee a tant aimé cette chanson.
00:01:29 Mais la réponse est peut-être dans la chanson elle-même.
00:01:33 Et la question qu'elle nous pose, c'est-à-dire quelle est cette quête,
00:01:36 quelle est cette inaccessible étoile qu'il est allé chercher jusqu'après sa mort, le jour de son enterrement à Seattle.
00:01:44 Bruce Lee est né à San Francisco et il a construit tout son mythe cinématographique à Hong Kong,
00:01:50 tout en rêvant sans cesse d'aller à Hollywood et de devenir une superstar internationale.
00:01:55 Comme seul Hollywood sait en construire.
00:01:58 Et toute sa vie, ça a été celle d'un voyageur qui allait entre deux rives,
00:02:04 du Pacifique à la Californie, donc de Hong Kong, côté Asie, jusqu'aux États-Unis,
00:02:11 à la recherche d'une inaccessible étoile qui se trouve peut-être entre l'Asie et l'Amérique.
00:02:19 Et c'est cette vie de voyageur que je voulais explorer ce soir.
00:02:23 C'est une vie qui tient dans une très très grande scène de cinéma,
00:02:27 une des plus grandes scènes d'art martiaux de l'histoire du cinéma.
00:02:31 C'est ce fameux combat du colisée de la fureur du dragon.
00:02:35 Et on va en voir plusieurs bouts ce soir.
00:02:38 On l'a scindé en plusieurs morceaux pour bien comprendre ce qui fait cette scène
00:02:45 et ce qui reste après ce soir pour voir le film La fureur du dragon.
00:02:48 Vous pourrez bien sûr la voir dans la continuité et observer le côté génial de cette scène.
00:02:53 Donc on va d'abord regarder un premier extrait de La fureur du dragon.
00:02:57 C'est ce fameux moment où Bruce Lee et Chuck Norris s'échauffent avant de s'affronter.
00:03:04 Et ensuite on vous racontera pourquoi cette scène parle autant de Bruce Lee.
00:03:10 [Bruce Lee et Chuck Norris s'affrontent]
00:03:15 [Bruce Lee et Chuck Norris s'affrontent]
00:03:20 [Bruce Lee et Chuck Norris s'affrontent]
00:03:25 [Bruce Lee et Chuck Norris s'affrontent]
00:03:29 [Bruce Lee et Chuck Norris s'affrontent]
00:03:33 [Bruce Lee et Chuck Norris s'affrontent]
00:04:02 [Bruce Lee et Chuck Norris s'affrontent]
00:04:06 [Bruce Lee et Chuck Norris s'affrontent]
00:04:16 [Bruce Lee et Chuck Norris s'affrontent]
00:04:28 [Bruce Lee et Chuck Norris s'affrontent]
00:04:32 [Bruce Lee et Chuck Norris s'affrontent]
00:04:42 [Bruce Lee et Chuck Norris s'affrontent]
00:04:46 [Bruce Lee et Chuck Norris s'affrontent]
00:04:51 [Bruce Lee et Chuck Norris s'affrontent]
00:04:55 [Bruce Lee et Chuck Norris s'affrontent]
00:05:23 [Bruce Lee et Chuck Norris s'affrontent]
00:05:27 [Bruce Lee et Chuck Norris s'affrontent]
00:05:33 [Bruce Lee et Chuck Norris s'affrontent]
00:05:38 [Bruce Lee et Chuck Norris s'affrontent]
00:05:45 Voilà, les choses se mettent doucement en place.
00:05:49 Bruce Lee est né le 27 novembre 1940 à San Francisco.
00:05:53 C'est très important la date et le lieu, ça peut aussi prêter à confusion.
00:05:58 S'il est né à San Francisco, c'est pas parce que ses parents sont des immigrés,
00:06:02 mais parce que c'est des comédiens qui sont en tournée.
00:06:05 Et donc il va pas rester très très longtemps à San Francisco,
00:06:08 mais le fait qu'il soit né aux USA, ça va jouer un rôle tout à fait capital dans son destin.
00:06:14 C'est-à-dire que même s'il a pas la nationalité américaine,
00:06:17 le fait qu'il ait ce tampon sur son passeport, d'un point de vue administratif,
00:06:20 par rapport aux autorités américaines, ça va lui permettre beaucoup plus facilement
00:06:24 que quelqu'un d'autre d'aller s'installer en Amérique à un moment,
00:06:28 et évidemment d'y travailler et d'y fonder les bases de ce qu'il va devenir.
00:06:33 Faut maintenant s'interroger aussi sur l'arbre généalogique de Bruce Lee,
00:06:37 et notamment de sa mère.
00:06:39 Si on remonte très loin en arrière, l'arrière-grand-père de Bruce Lee s'appelle
00:06:44 Moses Hartog Bosman, et c'est un commerçant juif de Rotterdam.
00:06:49 Il s'était installé à Hong Kong au milieu du 19e siècle.
00:06:52 Il faisait un commerce qui était assez odieux, puisque suite à l'abolition de l'esclavage,
00:06:57 son travail c'était d'envoyer des coulis chinois, en gros se casser le dos aux USA,
00:07:01 dans des mines ou sur la construction des chemins de fer.
00:07:06 Et ce Moses Hartog Bosman va lui-même partir aux USA, quitter Hong Kong,
00:07:11 et il abandonne derrière lui plusieurs concubines, des enfants, dont un certain Ho Kham Tung,
00:07:17 qui lui va faire fortune à Shanghai, où là il entretient plusieurs maîtresses,
00:07:21 plusieurs concubines, dont une femme anglaise avec qui il va avoir une fille.
00:07:25 Cette fille s'appelle Grace, et c'est la mère de Bruce Lee.
00:07:29 Donc vous voyez, il y a énormément de métissages dans l'ascendance de Bruce Lee.
00:07:33 C'est une famille un peu particulière, entre ce arrière-grand-père hollandais,
00:07:40 cette grand-mère anglaise, et puis il y a aussi un métissage très particulier,
00:07:46 qui est un métissage social, puisque Grace est issue de cette très grande bourgeoisie shanghaïenne.
00:07:53 Elle s'installe à Hong Kong quand elle a 18 ans, chez un oncle qui est un milliardaire,
00:07:58 et là normalement, dans le déroulé habituel des choses, elle devrait épouser un homme de son rang.
00:08:06 Mais il se trouve qu'il y a une fête qui est organisée chez cet oncle,
00:08:10 et là il y a un chanteur d'opéra qui est engagé pour distraire l'assemblée,
00:08:15 et elle tombe amoureuse de cet homme, derrière ce masque d'opéra chinois.
00:08:19 C'est Li Hoichun, qui lui est un saltimbanque,
00:08:23 qui vient d'une famille d'artistes très pauvres de Fochan,
00:08:26 qui est une ville du Guangdong assez conséquente.
00:08:29 Et donc elle va faire un mariage d'amour, en renonçant à cette vie bourgeoise et confortable,
00:08:34 pour s'engager dans une existence foraine, plutôt précaire.
00:08:38 Et ça, ce n'est pas du tout habituel à l'époque, un mariage comme ça, ça ne se fait pas.
00:08:45 Donc ça témoigne quand même de cette grèce dont on sait assez peu de choses,
00:08:49 on a quelques photos d'elle, c'est tout, d'un caractère assez déterminé,
00:08:54 assez engagé, et qu'on retrouvera peut-être chez Bruce Lee bien plus tard.
00:09:00 En fait, je disais, la date est importante, parce que 1940, bien sûr, on est en pleine guerre.
00:09:05 Hong Kong, qui est une colonie britannique, est occupée par l'armée japonaise.
00:09:10 Le père de Bruce Lee et toute sa famille sont partis à ce moment-là en tournée aux Etats-Unis,
00:09:15 dans tous les Chinatowns de Chicago, de San Francisco, de New York, etc.
00:09:20 Pendant la guerre.
00:09:23 Et donc c'est pour ça qu'il va naître à San Francisco, presque par hasard,
00:09:26 il aurait pu naître ailleurs, à Chicago ou à New York.
00:09:29 Et ce père fréquente donc, au cours de cette tournée, le monde du spectacle des Chinatowns.
00:09:35 Et c'est ce qui fait que Bruce Lee, tout bébé, va jouer déjà dans un film.
00:09:42 Alors on va voir une photo de Bruce Lee dans son tout premier film.
00:09:45 Vous reconnaissez Bruce Lee, c'est celui qui est au milieu dans le berceau, je précise,
00:09:51 pas celui qui est à gauche.
00:09:54 Et il joue le rôle d'une petite fille.
00:09:58 Ça ne se voit pas beaucoup.
00:10:00 Le film s'appelle "Golden Gate Girl".
00:10:03 C'est un film d'Esther Ng.
00:10:05 Esther Ng, c'est une cinéaste méconnue aujourd'hui, qui est née aux Etats-Unis,
00:10:10 mais qui a tourné plusieurs films à Hong Kong.
00:10:12 Et puis ensuite, elle s'est installée à San Francisco,
00:10:14 où elle a tourné des films en cantonnée,
00:10:17 destinés uniquement à la diaspora chinoise américaine.
00:10:22 C'est une des pionnières du cinéma, comme Alice Guy, comme Dorothy Eisner.
00:10:28 C'était aussi une femme qui était lesbienne et complètement assumée.
00:10:32 Bruce Lee n'a évidemment aucun souvenir d'Esther Ng,
00:10:35 mais c'est vous dire le monde que pouvaient fréquenter ses parents
00:10:39 et qui a été ce monde familial un peu à part.
00:10:42 Ce n'est pas dans toutes les familles qu'on fréquentait des artistes comme ça.
00:10:47 Bruce Lee n'aura aucun souvenir de ses débuts à San Francisco,
00:10:52 puisque dès 1941, ils vont rentrer à Hong Kong.
00:10:55 Il passe les premières années de sa vie dans des quartiers populaires de Hong Kong,
00:10:59 qui est encore sous le joug japonais.
00:11:01 Ce n'est pas encore la fin de la guerre.
00:11:03 Et il entend les bombes américaines qui bombardent, évidemment,
00:11:07 les infrastructures japonaises du port.
00:11:09 C'est quand même quelque chose d'assez violent, on peut imaginer,
00:11:13 pour un enfant, de vivre à cette époque-là, dans cette ville-là.
00:11:18 Et puis surtout, pour ceux qui ont vu "La fureur de vaincre",
00:11:22 il y a quand même quelque chose du personnage du Japonais
00:11:25 qui va rester dans le psyché de Bruce Lee.
00:11:28 Le personnage des Japonais est évidemment lié à cette époque
00:11:32 que cette génération, la sienne, et surtout celle de ses parents, ont connue.
00:11:37 Néanmoins, ils ne sont pas ruinés.
00:11:40 C'est-à-dire que le père de Bruce Lee était assez doué en affaires,
00:11:43 il a acheté quelques appartements, et ce n'est pas du tout la misère pendant la guerre.
00:11:48 Et puis surtout, c'est quelqu'un d'assez avisé.
00:11:51 C'est-à-dire que dès la libération, le père de Bruce Lee comprend
00:11:55 qu'il se passe quelque chose avec le cinéma,
00:11:58 et que peut-être que lui, en tant qu'acteur,
00:12:01 peut avoir une nouvelle carrière dans cet art,
00:12:04 ce nouvel art populaire qui s'installe dans la ville.
00:12:07 Et donc il se lance dans le cinéma.
00:12:09 Et il va placer son fils sur plusieurs tournages.
00:12:13 Et bizarrement, si vous regardez la filmographie de Bruce Lee,
00:12:16 c'est vraiment dans les années 50 qu'il tourne le plus grand nombre de films.
00:12:19 Il tourne vraiment beaucoup plus de films en tant qu'enfant qu'en tant qu'adulte,
00:12:23 même si ces films-là sont beaucoup plus oubliés que ceux qu'il a tournés adultes.
00:12:28 Et le rôle qu'il a, c'est souvent des rôles d'orphelins,
00:12:31 des petits gamins malicieux.
00:12:33 Et c'est assez passionnant à voir, si vous arrivez à les choper sur Internet,
00:12:37 c'est qu'il invente déjà pas mal d'attitudes qu'il va avoir dans ses films d'art martiaux.
00:12:41 Vous savez, ces gestes comme ça, ce côté un peu bravage qu'il va reprendre bien plus tard.
00:12:46 Bruce Lee enfant invente déjà Bruce Lee adulte.
00:12:51 Donc le cinéma dans sa vie commence assez tôt.
00:12:54 C'est vraiment un enfant de la balle qui sait ce que c'est qu'un plateau de cinéma,
00:12:57 qui sait comment ça s'éclaire, qui sait ce qu'est une caméra,
00:13:00 qui sait où se placer avant de faire des arts martiaux.
00:13:03 C'est un acteur de cinéma enfant et il devient assez connu d'ailleurs.
00:13:07 Même si évidemment, ce n'est pas les cachets qu'on a aujourd'hui.
00:13:11 Ses films ont un certain succès, un certain retentissement.
00:13:14 Bon, néanmoins, il reste quand même un enfant puis un adolescent.
00:13:19 Et donc, il va à l'école, au lycée entre ses tournages.
00:13:23 Et là, il est très mauvais.
00:13:26 C'est quelqu'un qui chahute, qui est viré d'à peu près tous les établissements,
00:13:30 tous les classes, il les redouble.
00:13:33 C'est terrible.
00:13:34 Et surtout, après les cours, au moment de la sonnerie, il devient un petit voyou.
00:13:39 Alors, je ne parle pas du grand gangstérisme ni quoi que ce soit.
00:13:44 En gros, c'est un petit con qui emmerde tout le monde.
00:13:48 C'est vraiment le genre de gars insupportable.
00:13:51 Et il a témoigné après, il a dit "moi, je me suis mis au kung fu uniquement pour pouvoir me battre
00:13:56 contre les bandes rivales".
00:13:59 Il n'avait pas du tout une approche du kung fu philosophique ni profonde.
00:14:04 Il y a plusieurs maîtres en ville, ils se tournent vers Ip Man.
00:14:09 Et là, c'est intéressant parce que Ip Man, lui aussi, est un immigré, est un étranger.
00:14:15 Si vous avez vu ce magnifique film de Wong Kar Wai qui s'appelle "The Grand Master",
00:14:18 on voit vraiment comment cet homme, qui était un officier du Kuomintang,
00:14:23 se retrouve à Hong Kong au moment où les troupes communistes s'emparent de la Chine.
00:14:28 Et donc, il est un exilé.
00:14:30 Encore une fois, Bruce Lee croise dans sa vie non seulement un grand maître d'art martiaux,
00:14:35 mais aussi quelqu'un qui, comme lui, est un étranger, quelqu'un qui vient d'ailleurs.
00:14:41 Et donc là, on lui enseigne le Wing Chun, une boxe du sud de la Chine, dans ce quartier de Jiomatei.
00:14:48 Et ça, c'est très connu.
00:14:49 Je veux dire, beaucoup de gens vont insister sur l'influence de Ip Man sur Bruce Lee.
00:14:55 Puis, il se passe un truc un peu bizarre, c'est que Ip Man va devenir un mythe à cause de son élève,
00:15:00 ce qui d'habitude est un peu le trajet inverse.
00:15:04 Mais il y a autre chose dans ces années-là qui est vraiment capitale pour comprendre Bruce Lee,
00:15:09 c'est qu'à cette époque, il découvre une passion tout aussi importante que le Kung Fu,
00:15:15 c'est le Cha Cha Cha.
00:15:17 Un peu de musique encore une fois, pour se mettre dans l'ambiance de Bruce Lee.
00:15:22 [Musique]
00:15:37 [Musique]
00:16:05 Ça, c'est Enrique Rorin, Trompeta Sen Cha Cha Cha.
00:16:10 Le Cha Cha Cha, c'est une danse cubaine, et c'est encore une affaire de diaspora finalement.
00:16:17 Parce que c'est un voyage qui amène le Cha Cha Cha jusqu'à Bruce Lee.
00:16:23 Hong Kong, c'était un port immense, même dans les années 50, dont on parle, années 50-60,
00:16:28 où transite le monde entier.
00:16:31 Le Cha Cha Cha arrive à Hong Kong, non pas directement de Cuba, mais via les Philippines.
00:16:38 Parce que, même encore aujourd'hui, si vous prenez un bateau,
00:16:42 vous aurez régulièrement dans les soutes une main d'oeuvre philippine.
00:16:45 Les Philippines sont vraiment les grands ouvriers des navires dans le monde entier.
00:16:50 Et donc, ils dansent le Cha Cha Cha.
00:16:52 Et Bruce Lee se passionne pour le Cha Cha Cha, et il va avoir une prof de Cha Cha Cha,
00:16:57 qui est beaucoup moins connue que Hitman, mais qui va être essentielle,
00:17:00 et qui va se passer autant de temps qu'avec Hitman.
00:17:02 Une petite photo de Bruce Lee dansant le Cha Cha Cha.
00:17:06 Vous voyez, vraiment avec les robes de l'époque.
00:17:11 Et donc, il prend des cours de Cha Cha Cha, et ça le passionne.
00:17:16 On va retrouver dans ses archives des carnets où il a tout noté les pas de Cha Cha Cha,
00:17:21 avec des chorégraphies.
00:17:24 Et il va même encore gagner un concours de Cha Cha Cha,
00:17:30 qui s'appelle le All Hong Kong Dance Championship,
00:17:33 où il danse le Cha Cha Cha à deux avec son petit frère.
00:17:36 Donc, il faut imaginer comment harmoniser le corps de Bruce Lee avec celui de son petit frère.
00:17:42 Et toute sa vie, ça va l'accompagner.
00:17:45 Et si vous regardez maintenant autrement les combats de Bruce Lee,
00:17:50 vous vous apercevez que ça se joue quand même à deux,
00:17:54 qu'on n'est pas dans un vrai combat sportif,
00:17:57 on est dans du cinéma, dans quelque chose d'esthétique, dans une représentation.
00:18:03 Et donc, je pense que ce n'est vraiment pas à négliger cette danse latine,
00:18:08 qui ne pouvait arriver qu'à Hong Kong, en Asie, parce que c'était ce grand port,
00:18:13 de ce jeune homme qui était né aux Etats-Unis,
00:18:16 qui s'intéressait à toutes sortes de choses au Kung Fu et à la danse latine.
00:18:19 Je pense que ce n'est pas du tout négligeable dans ce qui va faire son succès.
00:18:24 Et c'est vrai que si vous y réfléchissez bien, il a un talent d'artiste martial absolument inouï.
00:18:29 On va voir ça tout à l'heure dans la suite de ce combat.
00:18:32 Mais il y en a d'autres.
00:18:33 Vous avez d'autres grands acteurs hongkongais qui ont un grand talent d'artiste martial.
00:18:38 Il a aussi une connaissance de la danse latine qui est visiblement assez élevée.
00:18:43 Il y en a d'autres.
00:18:44 Mais qui sait faire les deux ? Il n'y en a qu'un.
00:18:46 Je ne pense pas qu'il y ait d'autres artistes martials qui sachent danser le cha-cha-cha
00:18:50 comme Bruce Lee savait le danser.
00:18:53 Je pense que c'est quelque chose qui va être fondateur et qu'il faut, à mon avis, réévaluer.
00:19:00 Et évidemment, sur le bateau qui va l'amener aux Etats-Unis, il gagne un peu d'argent,
00:19:05 non pas en donnant des cours de Kung Fu, mais des cours de cha-cha-cha.
00:19:08 Puisque sur les grands paquebots, il y avait évidemment dansé.
00:19:11 Et Bruce Lee faisait sensation entre Hong Kong et San Francisco.
00:19:17 Parce que bien sûr, pour devenir Bruce Lee, il va falloir qu'il passe de nombreuses années aux Etats-Unis.
00:19:24 Pourquoi a-t-il quitté Hong Kong ?
00:19:26 Alors ça, c'est une grande question qui reste assez obscure.
00:19:29 Il semble qu'il y a plusieurs raisons variées.
00:19:32 Il n'y a pas un incident qui aurait déclenché ce départ de Bruce Lee vers les Etats-Unis.
00:19:39 Essentiellement, c'est lié à son comportement.
00:19:42 La police vient plusieurs fois taper chez son père en disant que Bruce Lee est au commissariat.
00:19:48 Et puis, il y a le fait que Bruce Lee, qui ne doute de rien, envisage une carrière de médecin
00:19:54 qui lui est absolument impossible de poursuivre à Hong Kong, vu qu'il est en échec scolaire.
00:19:59 Et que, en gros, pour lui, il n'y a rien.
00:20:03 C'est-à-dire que si vous ratez votre scolarité à Hong Kong, vous ne pouvez pas mener une carrière importante de médecin ou autre.
00:20:11 Et là, son père se rappelle que sur ce passeport, il y a marqué "né à San Francisco",
00:20:18 qu'il a fait le nécessaire à l'époque, non pas pour lui offrir la nationalité,
00:20:21 mais pour vraiment le déclarer comme né aux Etats-Unis.
00:20:24 Et que c'est tout à fait possible de l'envoyer là-bas pour retrouver une seconde chance, une seconde vie.
00:20:32 Et donc, le père décide d'envoyer Bruce Lee aux Etats-Unis.
00:20:36 On ne sait pas bien si Bruce Lee a accueilli ça avec enthousiasme ou pas,
00:20:39 mais en tout cas, il se retrouve sur ce bateau à donner des cours de cha-cha-cha en attendant d'arriver à San Francisco.
00:20:47 Ce qui est très amusant quand on observe ce premier voyage,
00:20:50 ce second voyage de Bruce Lee dans l'autre sens à travers le Pacifique,
00:20:54 c'est qu'on voit aussi que c'est vraiment un produit de ces familles cantonaises qui ont des cousins un peu partout.
00:20:59 Et que donc, il fait escale au Japon.
00:21:03 Et là, il y a son frère qui est en train de faire ses études.
00:21:05 Ensuite, il s'arrête à Hawaii. Il y a des amis de son père qui sont là.
00:21:09 Et il est accueilli à San Francisco par également un ami de son père qui connaît une femme
00:21:15 qui tient un grand restaurant chinois à Seattle qui s'appelle Rubicho.
00:21:20 Et Rubicho va engager Bruce Lee pour qu'il gagne un petit peu d'argent de poche et qu'il puisse faire ses études.
00:21:28 Les années de Seattle de Bruce Lee ont laissé une photo que j'aime beaucoup, que je voulais vous montrer.
00:21:35 Ça c'est Bruce Lee devant chez Rubicho.
00:21:38 J'adore cette photo parce que je trouve qu'elle dit énormément de Bruce Lee, y compris à l'époque.
00:21:44 Comme je vous disais, Bruce Lee est engagé chez Rubicho pour faire la plonge et laver la cuisine après le service.
00:21:52 Mais quand vous regardez la photo, vous avez l'impression qu'il vient d'acheter le restaurant de Rubicho.
00:21:57 C'est-à-dire que le gars est tout férox alors qu'il est là parce qu'il a tout foiré à Hong Kong et qu'il a un boulot de seconde zone.
00:22:05 Et Rubicho, qui est une grande figure vraiment de la diaspora de Seattle,
00:22:10 qui va même, je crois, avoir un rôle politique à la mairie, a parlé de Bruce Lee.
00:22:15 Elle dit qu'elle en avait un souvenir absolument épouvantable, qu'il ne faisait rien de ce qu'on lui disait,
00:22:20 qu'il menaçait de temps en temps de se battre avec les chefs et qu'elle la gardait uniquement par amitié et par relation avec son père.
00:22:32 Mais néanmoins, il se calme, il reprend ses études, ça se passe plutôt bien.
00:22:39 Et non seulement il n'a pas abandonné le cha-cha-cha, mais il n'a pas abandonné les arts martiaux.
00:22:44 Et c'est là où vraiment va se créer la base de son mythe puisqu'il arrive à un moment où les USA découvrent ces méthodes de combat asiatiques,
00:22:56 parce qu'ils sont parfaitement exotiques pour ce pays-là, et notamment via les soldats américains qui sont stationnés au Japon.
00:23:06 Et ces soldats s'intéressent aux arts martiaux et c'est pour ça que les premiers arts martiaux qui vont être découverts par les Américains,
00:23:15 c'est essentiellement le judo et le karaté.
00:23:17 Et le karaté qui sera ensuite découvert en France, et c'est pour ça que les films de Bruce Lee, longtemps ici à Paris,
00:23:23 on dira que ce sont des films de karaté, parce que c'est le seul mot qu'on connaît.
00:23:27 Et lui, Bruce Lee, il ne pratique pas du tout le karaté, il fait du Wing Chun, du Kung Fu,
00:23:32 mais il va participer à divers événements de démonstration, et là tout à coup ça tranche.
00:23:37 Déjà parce qu'il est très bon, mais aussi parce qu'il fait quelque chose que les autres ne font pas.
00:23:41 C'est-à-dire que tous les autres montrent ce que c'est que du judo, les gens applaudissent, on montre un peu de karaté,
00:23:46 et puis toutes les semaines il y a ça, et lui il arrive avec quelque chose qui n'est pas connu, qui est plus fluide, qui ne ressemble pas du tout à ça.
00:23:55 Et il n'est pas particulièrement expert, quand on regarde dans la chronologie, ça ne fait que trois ans qu'il fait du Kung Fu.
00:24:02 Mais là où il est, c'est exceptionnel, ça en jette.
00:24:07 Alors il n'est pas le seul à faire du Kung Fu aux Etats-Unis, il y a des clubs dans les Chinatowns,
00:24:12 simplement il y a très peu d'étrangers qui s'y rentrent, ils n'y sont pas invités,
00:24:16 et c'est un monde très chinois, très fermé sur lui-même,
00:24:19 ce ne sont pas des gens qui cherchent à participer à ces grandes démonstrations dans les foires et à montrer leur art.
00:24:26 Et donc Bruce Lee se fait remarquer à Seattle dans ces petites démonstrations,
00:24:31 et spontanément il y a des jeunes gens qui viennent le voir et qui lui disent "mais qu'est-ce que tu fais là ?
00:24:37 Est-ce que tu ne veux pas m'apprendre ? Moi je fais du karaté, je fais du judo,
00:24:40 mais ça m'intéresserait de voir, d'aborder cet art martial que tu fais".
00:24:47 Et lui assez généreusement il dit "oui, pourquoi pas, très bien, ça permet de se faire des amis dans ce nouveau pays,
00:24:53 puis ça le met également en valeur", sauf qu'il n'y a absolument pas de structure autour de ça,
00:24:59 ce sont juste des gens qui viennent le voir.
00:25:01 Et donc les cours ont lieu dans l'arrière-cour de chez Rubic's Show,
00:25:06 et vous allez retrouver ces combats d'arrière-cour de restaurant dans La Fureur du Dragon,
00:25:12 c'est-à-dire que tout le monde du restaurant de La Fureur du Dragon vient beaucoup de Rubic's Show,
00:25:17 et l'idée qu'on va se battre derrière dans la cour, c'est quelque chose que Bruce Lee a vraiment vécu.
00:25:25 Ce qui est très intéressant c'est aussi les gens qui viennent le voir,
00:25:29 c'est-à-dire que ce sont des gens qui ne sont pas allés à Chinatown,
00:25:32 ce sont des gens un peu particuliers, vous avez par exemple un ami très fidèle
00:25:37 qui va l'accompagner toute sa vie qui s'appelle Jesse Glover,
00:25:40 Jesse Glover c'est un jeune noir qui a été victime de violences policières,
00:25:44 il s'est fait taper dessus à coup de lampe torche.
00:25:47 Vous avez Takiki Mura qui est un japonais qui était immigré aux Etats-Unis,
00:25:52 et vous savez pendant la guerre de nombreux japonais ont été mis dans des camps aux Etats-Unis par les Américains,
00:25:59 et donc c'est quelqu'un qui a un rapport à l'Amérique.
00:26:01 Takiki Mura qui est très particulier, il a dit dans ses écrits que lui se sentait américain,
00:26:07 et tout à coup les Américains l'ont mis dans un camp.
00:26:10 Puis vous avez aussi James DeMille qui lui est un redneck, un repris de justice,
00:26:14 qui sort de prison, qui n'a pas de boulot,
00:26:16 et bref autour de Bruce Lee se constitue une drôle de bande de gens qui vont se mettre au Kung Fu,
00:26:21 et dont Bruce Lee sera le maître.
00:26:24 Ce club un peu bizarre, non officiel, au bout d'un moment il va falloir le professionnaliser,
00:26:32 parce que Rubi Cho ne va pas accepter bien longtemps que ce gars qui en plus fait mal la vaisselle
00:26:36 amène des gens dans l'arrière-cour pour se battre en poussant des cris, ce n'est pas possible.
00:26:41 Il commence à naître dans sa tête l'idée qu'il peut devenir professeur de Kung Fu,
00:26:46 que ça peut être un métier d'enseigner le Kung Fu, qu'a priori il y a une petite clientèle,
00:26:51 et donc il va ouvrir une première école de Kung Fu,
00:26:55 il quitte Rubi Cho et il décide de gagner sa vie comme ça.
00:26:59 Ce qui est très intéressant c'est qu'il va vite s'installer à Auckland,
00:27:03 donc Auckland qui est près de San Francisco mais pas dans San Francisco,
00:27:08 et donc il ne va pas se mettre du tout dans le fameux Chinatown de San Francisco,
00:27:11 mais dans ses marges, et c'est quelqu'un qui va toujours être dans les marges, Bruce Lee finalement,
00:27:15 qu'il l'est par nature, et sa première école de Kung Fu se situe à Auckland,
00:27:20 en face, mais pas dans ce monde chinois.
00:27:25 Et puis il y a sa correspondance qui témoigne de quelqu'un qui,
00:27:31 dans cette expérience de Seattle et cette nouvelle vie, est devenu adulte,
00:27:36 il écrit à ses amis, et là il semble avoir un vrai projet, pour la première fois un vrai projet professionnel,
00:27:42 qui n'est pas du tout un projet de cinéma, mais qui est vraiment lié au Kung Fu.
00:27:46 C'est-à-dire qu'en fait, ces lettres témoignent d'une ambition qui est en gros de faire le basic fit du Kung Fu.
00:27:54 Il se dit "je vais ouvrir une franchise, qui sera une académie de Kung Fu,
00:27:58 et bientôt dans les principales villes américaines, il y aura des clubs de Kung Fu, qui seront des clubs Bruce Lee".
00:28:05 Donc ce n'est pas bête du tout, et pour quelqu'un qui va lui-même devenir plus tard une franchise,
00:28:10 quelque part une marque, il a un peu mis la charrue avant les bœufs,
00:28:13 c'est-à-dire qu'il a eu l'idée de créer une franchise autour de lui-même, avant de devenir célèbre,
00:28:17 mais finalement des clubs de sport, qui ne sont pas forcément des clubs de Kung Fu,
00:28:22 mais des clubs de sport franchisés, il y en a pas mal.
00:28:25 Donc il a quand même une vision commerciale qui est assez pertinente.
00:28:31 Alors, quand on regarde dans le détail la façon dont il enseigne,
00:28:36 ce qui est très curieux aussi, et ce qui fait sa particularité,
00:28:40 c'est qu'il ne reproduit pas du tout dans son école, ce que lui a connu comme enseignement à Hong Kong.
00:28:48 En gros, il invente un dojo qui est très californien.
00:28:53 C'est-à-dire que vous avez des sacs de boxe, des sacs de frappe, vous avez des cordes à sauter,
00:28:59 donc on est vraiment dans une configuration de club de boxe,
00:29:03 et surtout, son idée, c'est que chacun est unique.
00:29:07 C'est-à-dire que ce n'est pas un club où les gens vont faire tous ensemble le même mouvement.
00:29:11 Il a l'idée que chacun s'entraîne séparément et que lui supervise chacun différemment,
00:29:18 parce que pour lui, on est d'abord un individu,
00:29:22 et donc si vous faites 1m70 ou 1m95, si vous êtes plus ou moins large, plus ou moins fin,
00:29:28 vous n'avez pas à avoir le même entraînement.
00:29:31 Chacun est unique.
00:29:34 Et plus il va progresser dans cette école de Kung Fu,
00:29:36 plus il va s'éloigner de l'enseignement qu'il a reçu à Hong Kong pour inventer quelque chose à lui.
00:29:43 Donc, par exemple, il ne supporte pas qu'on l'appelle "maître".
00:29:47 Tout le monde va l'appeler "Bruce".
00:29:49 Il n'y a pas de courbette.
00:29:51 Les gens se serrent la main, on s'appelle par son prénom,
00:29:54 et puis il découvre la boxe, alors il amène des gants de boxe, il amène des protèges dents,
00:29:58 et les coups vont être véritablement portés.
00:30:01 Et puis plus tard, il va ouvrir un autre club, on y reviendra à Los Angeles,
00:30:05 et là, on va retrouver le cha-cha-cha, puisqu'il va mettre des congas,
00:30:09 et les gens vont s'entraîner au rythme des percussions.
00:30:15 C'est vraiment une époque où il invente une vision des arts martiaux
00:30:19 qui est complètement unique à sa personne.
00:30:23 Et puis surtout, comme il est aux États-Unis,
00:30:26 il peut découvrir d'autres sports, d'autres arts martiaux.
00:30:29 Alors il regarde la télé, et il est évidemment fasciné,
00:30:32 parce que c'est la grande époque, par Mohamed Ali,
00:30:34 qui fascine d'ailleurs tout le monde, mais Bruce Lee aussi.
00:30:37 Et c'est là où il découvre cet homme qui sautille sur le ring,
00:30:41 avec ce petit jeu de jambes de danseuse,
00:30:44 qui n'a évidemment pas dans les arts martiaux avant lui,
00:30:48 et il va lui emprunter ça dans ses films.
00:30:51 Mais il n'y a pas que ça, il se passionne pour l'escrime.
00:30:54 Il voit à l'université des gens qui font l'escrime à l'occidentale,
00:30:58 et dans sa bibliothèque, plus tard, on va retrouver d'anciens traités italiens d'escrime,
00:31:03 avec ces déplacements latéraux qu'il va reprendre plus tard dans ses films.
00:31:09 Il découvre les arts martiaux français aussi, la cane, la savate,
00:31:13 qui sont des choses qu'il n'aurait jamais pu approcher s'il était resté à Hong Kong,
00:31:18 et puis d'autres arts martiaux asiatiques,
00:31:20 qui n'étaient pas forcément très pratiqués à Hong Kong,
00:31:23 notamment le taekwondo coréen, qui va beaucoup l'intéresser.
00:31:27 C'est quelqu'un qui est un homme de diaspora,
00:31:34 mais qui ne reste pas dans ce monde chinois,
00:31:37 mais qui profite de ce séjour américain pour prendre tout ce qu'il peut prendre des Etats-Unis,
00:31:42 c'est-à-dire un échantillon d'à peu près tout ce qui passe en Californie,
00:31:46 et plus tard, il va théoriser tout ça,
00:31:49 et rassembler tout ça dans son propre art martial, qui est le Jeet Kune Do.
00:31:53 Donc, si vous voulez, Bruce Lee, aujourd'hui, c'est un grand symbole chinois,
00:31:59 mais quelque part, ce symbole chinois ne pouvait naître que sur la côte ouest,
00:32:06 que sur la côte ouest des Etats-Unis,
00:32:08 c'est-à-dire dans ce monde qui est multiculturel,
00:32:11 qui est extrêmement américain, mais qui est un brassage d'un peu tout,
00:32:14 où vous êtes bien sûr en contact avec l'Europe qui a été digérée par les Etats-Unis,
00:32:22 et puis vous êtes aussi en contact de ce monde mexicain, du monde latin,
00:32:27 et Bruce Lee est vraiment né de ce terreau-là.
00:32:30 Et puis bon, on est au Forum des images, je sais, c'est très sérieux,
00:32:36 mais il faut quand même passer un peu par la vie privée de Bruce Lee
00:32:38 pour comprendre ce trajet qu'il a dans ces années-là.
00:32:42 En 1963, il a rencontré une jeune femme qui s'appelle Linda Emery.
00:32:48 Donc voilà, ce n'est pas pour faire du voici, mais un couple mixte à l'époque,
00:32:53 ce n'est vraiment pas fréquent.
00:32:55 Les mariages interratiaux en 1963 aux Etats-Unis sont même interdits dans 17 Etats.
00:33:00 Alors ce n'est pas le cas dans l'Etat de Washington, ni en Californie,
00:33:03 ce qui fait qu'ils vont pouvoir se marier en 1964, ils vont avoir deux enfants.
00:33:08 Donc c'est une famille un peu particulière pour l'époque.
00:33:11 Et puis on est en plein Flower Power,
00:33:13 il y a une photo aussi que j'aime beaucoup de Bruce Lee à sa famille,
00:33:17 vous allez voir que là vraiment, c'est la Californie,
00:33:22 les mamas and papas, et c'est la famille de Bruce Lee en Californie.
00:33:29 Donc il est là avec ce club de sport et il n'a aucune intention de revenir à Hong Kong.
00:33:36 Et il n'a absolument aucune intention de revenir au cinéma non plus.
00:33:41 Ces années de jeunes stars du cinéma de Hong Kong sont loin.
00:33:45 Il a ce projet de club de sport qui commence vaguement à marcher.
00:33:50 Et ils sont complètement fauchés.
00:33:53 Le jour de son mariage d'ailleurs, il n'avait même pas de quoi lui offrir une bague.
00:33:56 Donc ils ont emprunté la bague à une copine pour pouvoir lui passer une bague en disant
00:34:00 "quand j'aurai les moyens, j'achèterai une vraie bague".
00:34:04 Ils vivent chez des amis, mais son ambition c'est l'enseignement du Kung Fu aux Etats-Unis.
00:34:12 Mais il se trouve que parmi ses premiers étudiants, il y a un type qui s'appelle J.C. Brink,
00:34:19 qui n'est pas tout à fait dans le cinéma, il est coiffeur.
00:34:23 Mais il est le coiffeur du tout Los Angeles, c'est-à-dire les plus grands acteurs,
00:34:28 les plus grands producteurs vont se faire les mèches chez J.C. Brink.
00:34:33 Et il y a ce côté très américain où on a toujours une affaire pour quelqu'un,
00:34:38 on connaît quelqu'un, et parmi les clients de J.C. Brink, il y a un gars qui s'appelle
00:34:43 William Dozier, qui est un producteur de télévision, qui a produit notamment les Batman.
00:34:48 Et il a un vague projet de série télé avec un personnage qui ferait des arts martiaux.
00:34:56 Ça ne marche pas très bien.
00:34:58 Puis finalement, il y a un deuxième projet qui arrive, qui s'appelle Le Frelon Vert.
00:35:02 Et là, C.B. lui dit "mais moi j'ai un type extraordinaire, je suis ses cours d'arts martiaux,
00:35:08 tu devrais t'inscrire".
00:35:10 Il s'appelle Bruce Lee et je pense qu'il serait bien qu'il ait un rôle dans Le Frelon Vert
00:35:16 parce que vraiment, les gens à la télé seraient fascinés par ce qu'il fait.
00:35:21 Et donc Bruce Lee va passer ce casting et il décroche un rôle dans cette série,
00:35:26 Le Frelon Vert, où il joue, pour ceux qui connaissent la série Le Frelon Vert,
00:35:29 il joue le rôle d'un chauffeur, il est le chauffeur du héros.
00:35:32 Donc pour Bruce Lee, ce n'est pas tout à fait quelque chose de si glorieux que ça,
00:35:39 mais néanmoins, il a un salaire conséquent pour la première fois depuis qu'il est arrivé aux Etats-Unis.
00:35:46 C'est-à-dire que là, il va pouvoir nourrir sa famille, avoir un appartement.
00:35:52 Et étant Bruce Lee, comme vous l'avez vu devant le restaurant de Rubicho tout à l'heure,
00:35:56 il commence par tout flamber, c'est-à-dire qu'il s'achète une sublime voiture,
00:36:00 il prend une location d'un appartement magnifique à Los Angeles,
00:36:05 et c'est le rêve américain de Bruce Lee, il croit y être arrivé.
00:36:09 Il se dit qu'à partir du Frelon Vert, il va mener une très grande carrière,
00:36:13 et tout à coup, naît ce rêve de devenir une grande star internationale de cinéma avec les arts martiaux.
00:36:20 Il faut voir qu'aujourd'hui, ça peut paraître évident,
00:36:23 mais à l'époque, il n'y a pas de star internationale d'arts martiaux.
00:36:26 Vous avez des stars d'arts martiaux à Hong Kong,
00:36:29 vaguement des gens qui ont fait un peu de judo dans quelques films,
00:36:32 mais ça n'existe pas une star internationale d'arts martiaux.
00:36:35 Et lui, il a cette vision qui s'avérera très juste,
00:36:38 qu'on peut devenir une super star internationale quand on est doué dans les arts martiaux.
00:36:43 Le problème, c'est qu'il n'y a que lui qui a cette vision-là.
00:36:47 La série ne va pas être reconduite.
00:36:50 Et lui, s'il veut toujours être acteur,
00:36:54 au fond, il est comme 90% des acteurs de Los Angeles,
00:36:59 c'est-à-dire que c'est un acteur au chômage.
00:37:02 Donc il est retombé, il a frôlé ce rêve américain pendant quelques mois,
00:37:07 et tout à coup, il redevient, il retombe, c'est un acteur au chômage.
00:37:13 La plupart des acteurs au chômage à Los Angeles, vous les voyez,
00:37:17 ils sont serveurs, mais lui, il va reprendre son activité d'enseignant d'arts martiaux.
00:37:24 Il a déjà cette petite clientèle.
00:37:26 Et alors là, on n'est plus du tout dans cette idée du fitness park,
00:37:29 de franchiser, là, il fait plutôt du coaching personnalisé.
00:37:33 C'est 500 dollars pour 10 leçons,
00:37:36 ce qui peut paraître pas grand-chose aujourd'hui,
00:37:38 mais c'est quand même assez conséquent pour l'époque.
00:37:40 Et son idée, ce n'est pas de continuer là-dedans,
00:37:43 mais que s'il arrive à avoir des clients pour recevoir des cours d'arts martiaux
00:37:49 à 500 dollars pour 10 leçons, parmi eux, il y aura peut-être des gens
00:37:52 qui vont s'intéresser à lui, après tout, c'est ce qui vient de lui arriver
00:37:55 pour le Front Long Vert, et qui vont l'aider à devenir une star de cinéma.
00:38:00 Donc les premiers recrues, c'est toujours ce fidèle Jay Sebring,
00:38:04 qui tout en faisant des mèches et en faisant des mises en pli,
00:38:07 dit "vous devriez faire du kung fu avec Bruce Lee".
00:38:09 Et c'est comme ça que James Coburn, ce grand acteur américain,
00:38:12 va devenir un des élèves de Bruce Lee.
00:38:14 Il y aura ensuite Steve McQueen, Roman Polanski,
00:38:17 qui amène sa femme Sharon Tate, Dean Martin,
00:38:20 tous ces gens vont être des élèves de Bruce Lee.
00:38:24 Et lui, bien sûr, se dit qu'à un moment, ils vont lui proposer un rôle.
00:38:30 Sauf qu'il n'a pas compris que ce n'est pas du tout comme ça que ça marche,
00:38:35 et que ce n'est pas parce que vous prenez des cours d'arts martiaux avec quelqu'un
00:38:39 que ces gens-là vont vous amener au cinéma.
00:38:43 Ça ne fonctionne pas comme ça à Hollywood.
00:38:46 Mais il s'entête là-dedans.
00:38:48 Au bout d'un moment, il voit bien que ça ne marche pas.
00:38:51 Et donc il a ce réflexe qu'ont à peu près tous les gens qui veulent percer.
00:38:56 Alors aujourd'hui, vous écriviez par exemple un one-man show.
00:38:59 Vous dites "puisque personne ne veut de moi, je vais faire un seul en scène,
00:39:02 et puis là, les gens vont me remarquer".
00:39:04 Et lui, il décide d'écrire un synopsis pour le premier grand film d'arts martiaux américain.
00:39:10 Et il va voir la personne dont il est le plus proche à Hollywood,
00:39:14 c'est-à-dire Steve McQueen.
00:39:16 Et là, il fait une erreur fatale.
00:39:19 C'est-à-dire qu'il oublie que Steve McQueen, il est très sympa
00:39:21 quand on lui donne des cours d'arts martiaux,
00:39:24 mais c'est une star de cinéma américaine.
00:39:27 Alors McQueen, quand il reçoit à ce moment-là Bruce Lee,
00:39:32 il a cette réponse qu'ont toutes les stars américaines
00:39:35 quand on leur propose quelque chose, c'est "parlez-en à mon associé",
00:39:38 ce qui veut dire "non".
00:39:40 Et Bruce Lee ne comprend pas.
00:39:42 Alors il retourne voir Steve McQueen,
00:39:45 et là McQueen, un peu plus fermement, va lui dire "écoute, non".
00:39:52 Et l'autre, il insiste encore.
00:39:54 Et Sterling Silliphant, qui était un ami de Bruce Lee et de Steve McQueen,
00:40:00 qui était présent, il a témoigné de la dernière phrase de Steve McQueen à Bruce Lee.
00:40:06 Il lui dit "écoute", parce que McQueen a très bien compris,
00:40:10 "toi, tu viens me proposer un film qui va faire de toi une star.
00:40:14 Moi, je suis une star.
00:40:16 Je ne suis pas là pour aider les autres à devenir des stars.
00:40:19 Donc moi, je t'aime bien, mais compte pas sur moi pour monter sur mes épaules."
00:40:24 Et là, Bruce Lee vit ce moment vraiment très, très, très, très, très douloureusement.
00:40:29 Il comprend que depuis des années, il est en train de mettre en place une stratégie qui est une impasse.
00:40:35 Et là, on en est à la deuxième phase de ce fameux combat du colisée,
00:40:40 c'est-à-dire l'attaque en ligne droite qui échoue.
00:40:44 On reprend cet extrait de "La foi du dragon".
00:40:50 "La foi du dragon"
00:40:54 "La foi du dragon"
00:40:57 "La foi du dragon"
00:41:20 "La foi du dragon"
00:41:44 Et voilà où en est Bruce Lee à ce moment-là de sa vie face à l'Amérique,
00:41:50 c'est-à-dire KO, quoi.
00:41:52 KO, mis KO par Steve McQueen, dont on peut voir peut-être un double dans Chuck Norris ici.
00:41:59 Même si Bruce Lee va rester ami avec Steve McQueen,
00:42:05 il y a une anecdote assez terrible où bien des années plus tard,
00:42:09 Bruce Lee a réussi à Hong Kong, il a un rendez-vous à Los Angeles,
00:42:15 et il descend dans un hôtel très chic de Los Angeles.
00:42:20 Et il appelle Steve McQueen, il lui dit "ben voilà, je suis revenu, ce serait sympa qu'on se voit".
00:42:27 Steve McQueen dit qu'il n'a pas le temps.
00:42:31 Mais il fait déposer à l'hôtel de Bruce Lee une enveloppe,
00:42:35 et dans cette enveloppe il y a une photo de Steve McQueen dédicacée,
00:42:40 et il y a marqué "à Bruce Lee, mon plus grand fan, Steve McQueen".
00:42:44 Ce qui va rendre fou, Bruce Lee.
00:42:47 Et voilà, McQueen était comme ça,
00:42:51 et Bruce Lee, je pense qu'il savait qu'il énervait Bruce Lee,
00:42:55 et peut-être qu'il avait envie de le voir en fureur, parce qu'au fond il l'aimait bien, je sais pas.
00:42:59 Mais il se trouve que le frelon vert, qui n'a pas marché aux USA,
00:43:03 est plutôt bien diffusé à Hong Kong.
00:43:06 Ce que Bruce Lee soupçonne, mais il mesure pas ça,
00:43:10 et puis à un moment il est de retour à Hong Kong pour voir sa famille,
00:43:14 et là il s'aperçoit qu'il y a une vraie curiosité autour de sa personne,
00:43:17 il est même invité dans un grand talk show,
00:43:20 et là soudain, les Hongkongais découvrent ce Chinois qui a l'air de Steve McQueen.
00:43:27 C'est-à-dire qu'il est habillé de façon complètement différente,
00:43:31 il a une attitude très cool, très détendue, très drôle, assez bravache,
00:43:38 et aucun acteur hongkongais n'a l'air de Bruce Lee.
00:43:43 Donc il déclenche une vraie vague de curiosité autour de sa personne,
00:43:47 il porte un jean en blanc, il est très beau, en plus les gens l'avaient complètement oublié,
00:43:52 parce que la dernière fois qu'on l'avait vu, c'était quand il était enfant à Hong Kong,
00:43:55 dans ses fameuses productions.
00:43:58 Donc il découvre ce jeune Chinois occidentalisé, et ça crée une vraie curiosité.
00:44:04 Et à Hong Kong, il y a un producteur qui s'appelle Raymond Cho,
00:44:08 qui vient de fonder un studio, la Golden Harvest,
00:44:11 et ce gars lui tape dans l'œil.
00:44:15 Bruce Lee est complètement fauché, il va retourner à Los Angeles,
00:44:21 et puis Raymond Cho poursuit ce jeune acteur,
00:44:25 et finalement, pourquoi pas ?
00:44:28 Pourquoi pas retourner à Hong Kong ?
00:44:31 C'est quand même un échec, on n'a pas réussi aux Etats-Unis,
00:44:34 mais d'abord, il n'y a pas le choix, parce qu'il y a quand même deux enfants à nourrir,
00:44:38 si ça ne marche pas aux Etats-Unis, il faut bien que ça marche quelque part.
00:44:42 Donc il va repartir vers Hong Kong, et là c'est de nouveau,
00:44:46 on franchit le Pacifique, on va vers cet autre monde,
00:44:50 pour essayer d'y réussir.
00:44:53 Et Raymond Cho, il a tout à y gagner,
00:44:56 parce qu'il cherche des gens, il a besoin de nourrir ce jeune studio qu'il a ouvert,
00:45:02 et il se dit qu'avec ce jeune gars-là,
00:45:05 il va peut-être pouvoir avoir un atout par rapport aux autres,
00:45:09 qui est l'atout de la jeunesse.
00:45:12 Ce n'est pas évident, la jeunesse.
00:45:15 Quand vous faites le pari de quelqu'un de jeune,
00:45:20 c'est qui tout double, ça peut plaire ou ça peut complètement déplaire.
00:45:24 Et donc il lui met dans les pattes pour ce premier film,
00:45:28 un vieux réalisateur, Lo Wei, qui lui est un gros routier du cinéma hongkongais,
00:45:34 et Lo Wei et Bruce Lee ne vont pas s'entendre du tout.
00:45:38 Bruce Lee méprise Lo Wei, en fait.
00:45:41 Il se dit que Lo Wei ce n'est pas un grand cinéaste,
00:45:45 ce n'est pas exactement ce dont il rêvait,
00:45:48 est-ce que Steve McQueen tournerait avec Lo Wei ?
00:45:51 Ça ne se fait pas.
00:45:53 Mais néanmoins, l'alliance de ces deux-là va donner Big Boss.
00:45:57 Et Big Boss va être un succès phénoménal,
00:46:01 parce que les gens découvrent Bruce Lee,
00:46:04 parce qu'il bouge comme aucun autre acteur hongkongais avant lui.
00:46:09 Et puis Big Boss, ce n'est pas le nom de Bruce Lee,
00:46:14 Big Boss ce n'est pas Bruce Lee,
00:46:17 Big Boss c'est la personne qui va affronter Bruce Lee,
00:46:20 et c'est un patron chinois de la diaspora en Thaïlande,
00:46:23 donc on est encore dans l'idée d'un voyage.
00:46:27 Et Bruce Lee interprète le jeune prolo,
00:46:30 qui découvre que ce vieux patron chinois est en fait un proxénète,
00:46:34 un trafiquant de drogue, et qui en gros va lui casser la gueule.
00:46:38 Et à cette époque, la ville de Hong Kong est en pleine effervescence,
00:46:43 on est vraiment dans les grandes années du Médi-Hong Kong,
00:46:47 vous avez des usines verticales,
00:46:49 où les gens travaillent comme ça dans ces grands immeubles,
00:46:52 et évidemment ils travaillent dans des conditions très difficiles,
00:46:55 donc il y a des tas de mouvements sociaux,
00:46:57 des revendications salariales, des grèves, des violences,
00:47:00 et l'idée que le Big Boss se fasse étriper par un jeune,
00:47:04 c'est plutôt pas mal.
00:47:07 Et donc le film va connaître un énorme succès aussi pour ça,
00:47:11 parce que vous avez un jeune gars un peu arrogant qui va tuer un vieux.
00:47:15 Et il y a une révolte chez Bruce Lee,
00:47:18 avec les capacités physiques qui vraiment parlent aux gens.
00:47:23 Raymond Cho, lui, avant même que le film sorte,
00:47:26 se dit "ça va être un carton",
00:47:28 il sent tout de suite que ça va marcher,
00:47:30 et il met en chantier tout de suite un autre film,
00:47:32 qui sera "La fureur de vaincre",
00:47:34 encore réalisé par Lo Wei,
00:47:36 qui est toujours pas remonté dans l'estime de Bruce Lee au passage,
00:47:40 c'est-à-dire que Bruce Lee pense que tout le succès de Big Boss, c'est lui,
00:47:45 et que Lo Wei est quand même un cinéaste très médiocre.
00:47:48 Mais néanmoins, ce duo va faire un autre film qui va encore mieux marcher.
00:47:52 Et là, on est au 19e siècle, à Shanghai,
00:47:55 c'est la seule fois où quelque part, Bruce Lee ira à Shanghai,
00:47:59 mère patrie de sa mère,
00:48:02 il va le visiter dans des décors en carton de cinéma,
00:48:06 et on est au 19e siècle,
00:48:07 donc cette période très humiliante pour les Chinois,
00:48:10 donc là encore, Bruce Lee est un voyageur qui arrive dans une situation de Chinois exploité,
00:48:16 cette fois non pas par un Big Boss, mais par des Japonais,
00:48:20 et là, on jubile de voir Bruce Lee rendre la justice.
00:48:26 Et là, soudain, Bruce Lee, effectivement, avec ses deux films, devient une super star.
00:48:32 Mais sa correspondance montre qu'il n'est pas entièrement satisfait,
00:48:38 c'est-à-dire qu'il n'est pas arrivé là où il souhaitait,
00:48:41 pourtant, il a absolument tout ce dont il rêvait,
00:48:43 c'est-à-dire qu'il a une Mercedes, il a toujours aimé les très belles voitures,
00:48:47 il a une très belle villa,
00:48:49 donc voilà, c'était son rêve de posséder un toit pour sa famille,
00:48:54 il a des très beaux costumes, parce qu'il est très coquet aussi,
00:48:57 mais seulement, la Mercedes est immatriculée à Hong Kong,
00:49:02 la villa est à Kowloon, lui il veut être à Malibu,
00:49:05 Steve McQueen n'habite pas Hong Kong,
00:49:09 et en plus, il sait toujours que Lo Wei, ce n'est pas Roman Polanski,
00:49:14 et lui, il voulait faire un film avec Roman Polanski.
00:49:17 Bon, le prochain film, il se dit "je vais tout faire moi-même",
00:49:20 et là, enfin, il va pouvoir faire un film qui lui ressemble,
00:49:24 de façon vraiment très très nette, et c'est "La fureur du dragon".
00:49:28 Dans "La fureur du dragon", que vous allez voir si vous restez ce soir,
00:49:33 vous avez encore un personnage qui est un grand voyageur,
00:49:36 cette fois il va à Rome, Bruce Lee arrive à Rome,
00:49:40 et également pour aider des Chinois dans la difficulté,
00:49:43 ce sont des restaurateurs, donc on retrouve ce décor de Rubicho,
00:49:47 qui sont raquettés par la mafia italienne.
00:49:51 Et donc là, Bruce Lee va inscrire son art du Kung Fu,
00:49:56 dans un monde qui est le monde de son temps, le monde d'aujourd'hui,
00:50:00 avec des gens de toutes sortes de nationalités,
00:50:04 vous avez vu Chuck Norris qui est américain,
00:50:07 mais vous avez vraiment des gens qui viennent de toutes sortes de disciplines,
00:50:10 donc là on retrouve l'essence de ses cours d'art martiaux,
00:50:13 de ce qu'a été les arts martiaux pour lui,
00:50:16 le karaté avec Chuck Norris, mais vous avez le taekwondo,
00:50:19 l'Italie, Rome et le Colisée,
00:50:23 bien sûr on est dans le symbole du combat occidental,
00:50:27 l'arène antique de l'Occident, dans lequel ce gladiateur chinois va triompher,
00:50:33 et puis Rome ça l'intéresse aussi,
00:50:35 parce que Bruce Lee est très intrigué par Clint Eastwood,
00:50:41 Clint Eastwood comme lui vient d'une série télé,
00:50:44 comme lui il avait du mal à démarrer dans le cinéma,
00:50:47 et comme lui il est parti vers Hong Kong,
00:50:52 mais Clint Eastwood est parti de l'autre côté,
00:50:54 il est parti à Rome, il était à Cinecittà,
00:50:57 il a fait ses fameux westerns italiens,
00:50:59 qui lui ont permis de devenir une super star,
00:51:01 et de revenir aux Etats-Unis et de devenir Clint Eastwood,
00:51:04 donc ce trajet là trotte dans la tête de Bruce Lee,
00:51:07 et Rome l'intéresse pour ça,
00:51:09 et vous avez vu au début qu'il a fait un pur plan de western,
00:51:13 avec les jambes écartées, la perspective, l'adversaire derrière,
00:51:17 et que la bande-son a évidemment piqué deux accords à Ennio Morricone,
00:51:22 donc vraiment il est dans cette idée que oui,
00:51:24 il est en train de faire un film d'art martiaux,
00:51:26 mais c'est quand même aussi un petit peu un western italien,
00:51:30 quand vous verrez le film, ou ceux qui l'ont déjà vu,
00:51:32 vous constaterez que c'est aussi un film de mafia,
00:51:34 c'est aussi un polar,
00:51:36 donc on est dans cette grande idée de Bruce Lee du métissage,
00:51:39 c'est-à-dire que le genre art martiaux tout à coup n'est plus un genre en soi,
00:51:44 c'est le réceptacle de tout un monde qui passe de l'Occident, de l'Orient,
00:51:49 et tout ça va se jouer dans le cinéma hongkongais,
00:51:55 incarné par Bruce Lee qui lui-même vient des Etats-Unis,
00:51:59 et son idée avec ce film, c'est de toucher un public,
00:52:02 qui n'est pas seulement le public de Hong Kong,
00:52:05 mais qui est un très large public,
00:52:06 c'est-à-dire que puisqu'il a toutes ces références,
00:52:08 après tout peut-être que le monde entier pourra se reconnaître,
00:52:11 et peut-être qu'il va pouvoir lui-même atteindre son but
00:52:14 d'aller à Hollywood avec ce nouveau film-là.
00:52:19 Et là, c'est la troisième partie, déjà l'échauffement, l'échec,
00:52:24 la troisième partie de ce fameux combat du Colisée,
00:52:27 c'est-à-dire que vous allez voir comment il a échoué dans la ligne droite,
00:52:31 et il va faire face à Chuck Norris exactement ce qu'il a fait en allant à Rome,
00:52:36 c'est-à-dire un détour, et on retrouve cette idée d'être comme l'eau,
00:52:40 c'est-à-dire d'être souple, de ne pas être rigide,
00:52:43 de ne pas suivre une ligne droite, mais d'épouser le nivellement,
00:52:48 d'épouser le terrain et de s'adapter.
00:52:50 Voilà la suite et la fin du fameux combat contre Chuck Norris,
00:52:54 qui est le combat de la vie de Bruce Lee.
00:52:57 [musique]
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00:58:20 - Wow !
00:58:22 Donc vous avez vu ce qui s'est passé, il a changé de stratégie.
00:58:25 Il est passé complètement à autre chose.
00:58:28 Alors évidemment tout ça est une chorégraphie extrêmement étudiée.
00:58:31 Il y a des dessins de Bruce Lee où tout est noté.
00:58:35 La façon dont il prend Chuck Norris par le cou, etc.
00:58:39 Il avait soumis tout ça à Chuck Norris.
00:58:42 Chuck Norris qui avait été champion du monde de karaté.
00:58:46 Et Norris a raconté cette anecdote assez marrante.
00:58:49 Il a reçu ça, lui il n'avait pas fait de cinéma.
00:58:52 Et puis il a dit à Bruce Lee "en fait tu veux battre le champion du monde de karaté".
00:58:56 Et Bruce Lee a répondu "non, je veux tuer le champion du monde de karaté".
00:59:00 [rires]
00:59:04 Ce qui est très drôle c'est que Chuck Norris ne s'est jamais vraiment remis de cette scène là.
00:59:08 Il a fait toute une carrière que vous connaissez peut-être au cinéma, extrêmement brillante.
00:59:14 Walker Texas Ranger, et à chaque fois qu'on l'interroge, on lui parle de cette scène.
00:59:19 Et on sent bien que ça l'énerve en fait.
00:59:21 D'un côté c'est la scène qu'il a lancée, qui a fait de lui un acteur de cinéma alors qu'il venait du sport.
00:59:28 D'autre côté, la grande marque de Chuck Norris dans l'histoire du cinéma, c'est comment il se fait tuer par Bruce Lee.
00:59:34 Et arracher les poils quand même.
00:59:37 Une séquence très intéressante.
00:59:40 J'avais essayé de le contacter parce que je voulais qu'il fasse la préface de mon livre sur Bruce Lee,
00:59:44 et puis je n'ai jamais eu de réponse.
00:59:46 Mais je ne sais pas si la demande lui est parvenue.
00:59:49 En tout cas, le film connaît un succès phénoménal à Hong Kong, dans toute l'Asie.
00:59:55 Et là, enfin, Warner Brothers l'appelle.
01:00:00 C'est-à-dire qu'il va pouvoir retourner en Amérique, faire son premier grand film américain.
01:00:09 Il va imposer le titre au studio.
01:00:12 Il dit que ça doit s'appeler "Enter the Dragon".
01:00:14 Le dragon arrive, le dragon entre.
01:00:17 Au début, au studio, ils ne sont pas très chauds.
01:00:22 Puis finalement, à la Warner, les gens se disent que c'est pas mal "Enter the Dragon".
01:00:26 Parce que si ça marche bien, on va pouvoir faire "Return of the Dragon".
01:00:29 Donc déjà, il y a l'idée que ce gars peut porter sur lui une franchise.
01:00:34 Un peu à la façon d'un James Bond.
01:00:37 Et d'ailleurs, "Opération Dragon", comme on dit en français, c'est un peu une sorte de James Bond d'art martiaux.
01:00:45 Pour la première fois, il a le droit à un réalisateur américain.
01:00:49 Alors, c'est toujours pas Roman Polanski, comme il en est arrivé.
01:00:52 C'est Robert Klaus, qui n'est pas une énorme star de la réalisation américaine.
01:00:56 Mais c'est déjà un bon début.
01:01:00 Et surtout, "Opération Dragon" est vraiment un film qui porte les idées de Bruce Lee.
01:01:07 C'est-à-dire qu'autour de lui, vous avez des gens de toutes les nationalités, de toutes les origines.
01:01:12 Vous avez toutes sortes d'arts martiaux.
01:01:14 On y tue encore une fois un vieux maître qui est très méchant.
01:01:19 Et puis, à la fin du film, on amène ce génial compositeur argentin, qui est Lalo Chiffrin.
01:01:26 Et lui, Lalo Chiffrin, il comprend tout.
01:01:28 C'est-à-dire qu'il va composer, à mon avis, une de ses plus belles bandes-sons pour "Opération Dragon".
01:01:34 Si vous écoutez cette géniale musique d'"Opération Dragon", vous avez un côté un peu orientalisant.
01:01:40 Très "Chinatown", un peu cliché.
01:01:44 Mais vous avez du jazz, vous avez des accords funky derrière.
01:01:47 Je me demande, je ne suis pas assez mélomane, s'il n'y a pas un peu de "cha-cha-cha" quand même dans la bande-son d'"Opération Dragon".
01:01:53 Donc c'est vraiment quelque chose qui ressemble à l'ambition de Bruce Lee à ce moment-là,
01:01:59 d'ouvrir les arts martiaux à quelque chose de plus grand.
01:02:02 Le tournage a été dantesque, épouvantable.
01:02:06 Quand vous verrez le film, par exemple, il y a un moment où il doit se battre contre un serpent.
01:02:11 Mais le serpent, il est tout ramolli parce qu'il fait trop chaud.
01:02:14 Alors bon, il tape le serpent pour lui donner un petit peu de pep.
01:02:17 Puis finalement, le serpent va mordre Bruce Lee.
01:02:19 Heureusement, il est vidé de son venin.
01:02:21 Il y a tout un tas de problèmes avec la figuration.
01:02:25 Ils n'ont pas trouvé d'actrices assez nombreuses pour se dénuder.
01:02:29 Donc ils sont allés prendre des prostituées dans les bafons de Hong Kong.
01:02:32 Sauf qu'elles, elles ont réclamé un salaire supérieur aux figurants.
01:02:35 Ce qui fait que les figurants n'étaient pas contents.
01:02:37 Mais bon, au bout d'un moment, Robert Close a dit,
01:02:41 je crois qu'il a dit "j'ai passé trois mois en Hong Kong, j'ai l'impression d'avoir perdu trois ans de ma vie tellement c'était horrible".
01:02:48 Mais le résultat est là.
01:02:50 C'est vraiment un film d'arts martiaux de facture hollywoodienne, Warner Brothers.
01:02:57 Et pour Bruce Lee, il touche au but.
01:03:00 C'est à dire que là enfin, il est persuadé qu'avec ce film là,
01:03:05 il va devenir la grande star hollywoodienne qu'il a toujours rêvé d'être.
01:03:08 On voit des lettres qu'il envoie à son avocat où il a plein de projets.
01:03:12 Notamment un projet de dessin animé autour de sa personne.
01:03:16 Où il deviendrait lui-même un personnage de dessin animé.
01:03:18 C'est une idée que Jackie Chan va emprunter plus tard.
01:03:24 Tout ceci n'aura pas lieu puisque le 20 juillet 1973,
01:03:30 Bruce Lee à Hong Kong succombe à une overdose médicamenteuse.
01:03:34 Donc en fait, au moment où il arrive à toucher ce rêve américain,
01:03:39 sa vie s'arrête et en même temps ne fait que commencer.
01:03:43 Puisque le mythe de Bruce Lee, au niveau international, va naître.
01:03:49 Il est encore totalement inconnu aux Etats-Unis.
01:03:53 Le 21 juillet, le New York Times publie une nécrologie mais qui est vraiment minuscule.
01:03:58 Il n'y a que quelques lignes. Je voulais les dernières lignes de cette nécrologie.
01:04:04 Ces films étaient fabriqués à Hong Kong. Ils ont connu un succès local.
01:04:08 Et ils commençaient à trouver leur public en Amérique latine.
01:04:12 Et ça s'arrête là. Donc les gens ne savent pas du tout qui il est.
01:04:16 Et bizarrement, Bruce Lee, comme il a toujours vécu, il va être enterré deux fois.
01:04:22 Enterré de façon évidemment métaphorique. Il n'est enterré qu'une fois.
01:04:27 Mais il y a deux funérailles en tout cas.
01:04:30 Une sur chaque rive du Pacifique. Et donc une à chaque lieu qui aura compté pour lui.
01:04:36 À Hong Kong, c'est un traumatisme.
01:04:40 Il y a des fans qui passent la nuit entière devant le funérarium qui est rempli de fleurs.
01:04:45 Il y a évidemment toute sa famille qui est là.
01:04:48 Il y a le showbiz de la ville qui va défiler sur sa tombe.
01:04:54 Tout le monde est en blanc bien sûr.
01:04:57 Et sur le cercueil, il y a une phrase. Il y a marqué "une étoile disparaît dans l'océan de l'art".
01:05:03 Et on retrouve évidemment cette idée d'une inaccessible étoile.
01:05:07 Et cette chanson de Tom Jones qu'on va réécouter.
01:05:13 [Musique]
01:05:19 Il faut s'imaginer que maintenant, le cercueil de Bruce Lee va retraverser le Pacifique.
01:05:27 En avion cette fois. La première fois étant en bateau. Donc le temps a passé.
01:05:32 Et il arrive là où tout a commencé pour lui en tant qu'homme.
01:05:36 À Seattle.
01:05:38 Qui est la ville évidemment de son épouse. La ville de ses débuts.
01:05:43 Et là, pour l'enterrement de Bruce Lee au Lakeview Cemetery, il y a environ douze personnes. Pas plus.
01:05:51 Tellement il est inconnu.
01:05:53 Il y a les copains des débuts. Il y a Jesse Glover dont je vous ai parlé. Il y a Takiki Mura.
01:05:57 Et qui porte le cercueil ? C'est Steve McQueen.
01:06:01 Et donc Steve McQueen, enfin, prend Bruce Lee sur son épaule. Maintenant qu'il est mort.
01:06:08 Mais bon, il l'a fait.
01:06:11 La suite, vous la connaissez. C'est "Opération Dragon" qui sort.
01:06:15 Il y a un monde fou dès l'avant-première à Los Angeles.
01:06:19 Évidemment au Chinese Theatre.
01:06:21 Et des gens qui habituellement ne vont jamais au cinéma.
01:06:24 Des gens qui vont vraiment constituer la base du public de Bruce Lee.
01:06:28 C'est-à-dire le peuple. Des gens qui sont des ouvriers.
01:06:31 Des gens qui sont comme lui des immigrés.
01:06:33 Et qui vont aller voir "Opération Dragon".
01:06:36 Qui vont redécouvrir par la suite "Big Boss".
01:06:38 Ces films vont arriver après en France sur les grands boulevards.
01:06:43 En français, bien sûr.
01:06:45 Et toucher ce public d'immigrés.
01:06:48 Aujourd'hui, vous allez n'importe où. En Afrique, en Amérique Latine.
01:06:55 Vous aurez toujours un poster de Bruce Lee quelque part.
01:06:58 Et Bruce Lee donc atteint ainsi, après sa mort, cette inaccessible étoile.
01:07:05 On peut maintenant réfléchir.
01:07:08 Qu'est-ce que c'était que l'inaccessible étoile ?
01:07:13 Cette inaccessible étoile de Tom Jones, de Jacques Brel.
01:07:18 Bien sûr, on peut avoir une vision très superficielle des choses.
01:07:22 Je veux dire que cette quête, comme chantait Jacques Brel, c'était celle de Bruce Lee.
01:07:27 C'est-à-dire le rêve américain, tout simplement.
01:07:30 L'idée qu'un jeune chinois de diaspora peut réussir dans le cinéma.
01:07:36 Mais vous avez compris ce que je voulais dire ce soir.
01:07:39 C'est qu'il y a autre chose, à mon avis, bien plus profond.
01:07:42 Une quête qui est beaucoup plus grande, beaucoup plus grandiose.
01:07:45 Qui correspond beaucoup mieux à cette chanson.
01:07:48 Qui dépasse Bruce Lee et le cinéma.
01:07:50 Sur sa tombe, il n'y a pas écrit acteur de cinéma d'ailleurs.
01:07:53 Il n'y a pas écrit producteur, il n'y a pas écrit réalisateur.
01:07:56 Il y a écrit fondateur du Jeet Kune Do.
01:07:58 Donc créateur d'une école d'arts martiaux.
01:08:01 Ça veut dire que pour lui, le cinéma, c'était juste une façon de mettre dans des images
01:08:08 cette idée géniale et généreuse d'une fusion entre Est et Ouest.
01:08:16 Entre les arts martiaux et le reste du monde, y compris le cha-cha.
01:08:23 Il a rêvé, bien sûr, de devenir riche et célèbre.
01:08:26 Mais il a rêvé d'un monde plus grand que lui.
01:08:29 D'un monde qui ressemblerait à sa famille, à sa personne, à ce qu'il était.
01:08:34 D'un monde où tous les mélanges étaient possibles.
01:08:36 Où on pouvait faire de la boxe, vous l'avez vu tout à l'heure, sautiller comme Mohamed Ali.
01:08:40 Ou peut-être du cha-cha-cha, où on pouvait faire de l'escrime, du kung fu.
01:08:45 Et c'est pour ça que je pense qu'on regarde encore cet homme et ses films aujourd'hui en 2024.
01:08:51 Et qu'on est toujours aussi fasciné par lui.
01:08:54 Parce que cette étoile inaccessible, c'est toujours d'actualité aujourd'hui.
01:09:00 Je veux dire, l'Est et l'Ouest sont toujours dans un rapport de rivalité, d'incompréhension.
01:09:05 Et lui, il a essayé de dépasser ça.
01:09:08 Et aussi parce que, bien sûr, il est chinois.
01:09:11 Bien sûr, il est un symbole chinois.
01:09:13 Mais il ne s'est jamais revendiqué d'une communauté bruce lee.
01:09:17 Ou alors, sa communauté, c'était celui qu'il allait fonder à travers ses arts martiaux,
01:09:22 à travers ces gens de toutes origines qu'il y a dans ses films et qu'il y avait autour de lui.
01:09:27 Il ne s'intéressait pas à l'origine des gens.
01:09:30 Les gens qui ne pouvaient pas recevoir un enseignement d'arts martiaux en Chinatown,
01:09:34 lui, il les accueillait.
01:09:36 Donc pour lui, c'était une quête, comme dit la chanson.
01:09:39 S'il y avait une communauté, ce n'est pas une communauté d'extraction d'origine,
01:09:43 mais c'est une communauté d'un projet commun, d'un projet pour l'avenir,
01:09:48 pas tourner vers le passé.
01:09:51 Et donc, il a fait ces films-là, ces quelques films qui vraiment lui ressemblaient.
01:09:55 Et autant que son agilité, sa vitesse, cette énergie d'aller toujours de l'avant,
01:09:59 on la sent vraiment dans ses combats, y compris dans ce qu'on a vu ce soir.
01:10:03 Et c'est ce qui nous fascine encore aujourd'hui.
01:10:05 C'est vraiment cette façon de toujours avancer.
01:10:08 Alors dans ses archives, il y a un autre film.
01:10:11 On a retrouvé des bouts, il avait commencé à tourner.
01:10:14 Un film que Bruce Lee a toujours présenté comme le plus grand film d'arts martiaux
01:10:18 de tous les temps, qui est "Le jeu de la mort".
01:10:21 Il n'a jamais terminé ce film, puisqu'il est mort, mais néanmoins,
01:10:25 il en a tourné des bouts.
01:10:27 Et c'est donc un film inachevé qui a été achevé, mais pas par lui,
01:10:32 par d'autres, d'une façon un peu grotesque, mais qui néanmoins,
01:10:36 contient des petits bouts de ce que Bruce Lee a tourné.
01:10:40 Il y a une scène absolument fascinante dans ses archives,
01:10:44 dans les débris du naufrage qu'a été "Le jeu de la mort",
01:10:49 qui est un combat où là, on n'est plus dans le cha-cha-cha,
01:10:53 on n'est plus dans le kung fu, on arrive à ce que Bruce Lee amène du basketball.
01:10:58 Il était parmi ses élèves, il y avait Karim Abdul-Jabbar,
01:11:02 ce grand champion de basket, et il l'a convoqué à Hong Kong,
01:11:06 entre deux matchs, pour tourner cette scène très étrange,
01:11:11 mais qui nous dit où Bruce Lee voulait aller peut-être dans la suite.
01:11:15 C'est-à-dire que là, on n'est plus dans la feuer du dragon,
01:11:20 on est pratiquement dans le cinéma fantastique,
01:11:22 c'est-à-dire que le kung fu est dans une nouvelle étape,
01:11:25 et dans l'échelle des deux combattants, dans l'échelle hallucinante,
01:11:30 qui sépare Bruce Lee de Karim Abdul-Jabbar,
01:11:35 vous avez cette idée de cette inaccessible étoile que chantaient Tom Jones et Jacques Brel.
01:11:41 Je voulais terminer par ce combat extraordinaire de Bruce Lee contre Karim Abdul-Jabbar
01:11:46 dans "Le jeu de la mort".
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