• il y a 4 mois
Christophe Gans est l’un des passeurs les plus érudits du cinéma hongkongais. À travers son travail de critique (Starfix, HK Magazine), d’éditeur (HK Vidéo) puis de réalisateur, il prolonge un même chant d’amour à ces films portés par une admirable énergie et une sidérante inventivité formelle.

Animée par Fabien Gaffez, cette rencontre a eu lieu le 05 juillet à 18h30, dans le cadre de la thématique Portrait de Hong Kong au Forum des images.
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Transcription
00:00:00Bonjour, bonjour à toutes et à tous, merci d'être présents et présentes pour cette
00:00:10rencontre avec Christophe Gans, nous sommes dans le dernier week-end, on entame le dernier
00:00:16week-end de ce Portrait de Hong Kong et le dernier week-end de notre saison, donc merci
00:00:21à vous d'être présents, on vous l'a dit, on le répète, on était dans cette dernière
00:00:27semaine avec un programmateur spécial, Christophe Gans pour cette carte blanche et à travers
00:00:32cette rencontre, on va retraverser un petit peu toutes ces influences venues de Hong Kong,
00:00:37donc merci d'accueillir sous un tonnerre d'applaudissements, Monsieur Christophe Gans.
00:00:42Alors vous aurez l'occasion, on va faire une conversation et ensuite vous pourrez évidemment
00:01:04poser vos questions, donc préparez-les, méditez-les pendant les images que vous verrez.
00:01:09En tout cas, pour ce Portrait de Hong Kong, on a eu plus de 100 séances, 4 mois ici et
00:01:16il nous a semblé qu'il y avait un invité inévitable qui était Christophe Gans, qui
00:01:21est vraiment pour nous et pour tout le monde, l'un des passeurs inévitables, importants
00:01:30hier, aujourd'hui et j'ai l'impression demain encore, parce qu'on va en parler, l'énergie
00:01:36de ce cinéma de Hong Kong passe ailleurs qu'à Hong Kong peut-être, mais vous êtes
00:01:41encore ici à l'affût pour voir où est l'énergie d'un cinéma, non pas pur, mais une énergie
00:01:46de cinéma en tout cas, une forme de magie, donc on va voir à travers cette petite conversation
00:01:53trois manières que vous avez, alors souvent elles sont mêlées évidemment, mais trois
00:01:57manières d'incarner et de vivre cette passion pour le cinéma hongkongais, le cinéphile
00:02:04bien sûr, le passeur, on le verra, à travers le travail de critique ou de distributeur
00:02:09mais aussi votre travail de cinéaste, donc on va commencer, et on a un petit écran de
00:02:15retour pour voir des petites images par la cinéphilie, et on en a déjà parlé ici
00:02:20mais on ne peut pas ne pas parler du commencement, à savoir Bruce Lee, au commencement était
00:02:27Bruce Lee, on fait toujours cette petite blague, au commencement était Bruce Lee parce que
00:02:32vous l'appelez votre dieu, en tout cas votre dieu, donc on peut évoquer Bruce Lee, à
00:02:39quel moment vous le voyez, vous le découvrez, en tout cas dans quelles circonstances, on
00:02:44en a déjà parlé un peu mais tout le monde n'était pas là.
00:02:46Bien sûr, en fait ce qui se passe c'est que, d'abord je découvre la Manifère, je vis
00:02:53à Antibes, et un soir avec les amis on va voir la Manifère, le poster était incroyable,
00:02:58Karateka en train de briser le titre, et le film était distribué en grand, c'était
00:03:03un film distribué par la Warner, et on avait vu les photos, on n'avait pas vu de bande-annonce
00:03:08évidemment, on avait vu les photos et les photos étaient incroyablement exotiques,
00:03:12colorées, insensées, on avait vraiment l'impression de voir des images sorties d'une bande dessinée,
00:03:18et donc on voit la Manifère, et là on se prend de plein fouet une espèce de formidable
00:03:26exotisme qu'on ne connaissait pas, on avait 12 ans, et on a vu ce film, en plus je pense
00:03:33que la cruauté du film, le film est assez violent, nous a infiniment frappé, c'était
00:03:39une cruauté qu'on ne connaissait pas, pour nous le sommet de la cruauté c'était vraiment
00:03:42la Horde Sauvage de Sam Peckinpah, et c'était les derniers westerns, mais c'était pas cette
00:03:48forme là de cruauté, c'est à dire ces combats incroyables avec ces types qui finissaient
00:03:52par ses nucléos, s'arracher les bras, enfin bon, c'était vraiment quelque chose d'absolument
00:03:56insensé, et donc deux mois exactement après, on est en 72, et deux mois exactement après
00:04:02la Manifère, on voit coup sur coup, Big Boss, avec Bruce Lee, et La Fureur de Vaincre,
00:04:11à l'époque les films sortent chez un distributeur qui s'appelle André Genovesse, souvent le
00:04:16nom de Bossier est associé à celui de René Chateau, mais en fait on découvre d'abord
00:04:20les premières sorties par ce distributeur, les films sont, je tiens à le préciser,
00:04:25en version intégrale, parce qu'après René Chateau s'amusera à les couper, à les réduire,
00:04:32à mettre par exemple son générique au lieu de la fameuse scène du cimetière au début
00:04:37de La Fureur de Vaincre, en fait il altérera complètement les montages, pour mieux les
00:04:41copyrighter, parce qu'en fait c'était son truc, et donc on découvre ces films en version
00:04:46intégrale, je me rappelle que Big Boss on doit faire des pieds et des mains parce que
00:04:50le film est interdit aux moins de 18 ans à l'époque, et on voit La Fureur de Vaincre,
00:04:54et c'est vrai que moi j'appartiens à ce moment-là à un club de judo, on fait avec
00:05:00les amis des arts martiaux, et on a un choc incroyable en voyant Bruce Lee, et ceci dit
00:05:11j'avais eu un petit avant-goût de ce qu'était Bruce Lee avant de voir ces deux films à
00:05:17ce moment-là, c'était je me souviens à Monsieur Cinéma, je sais pas si les gens
00:05:23se souviennent ici, Pierre Tcherniov faisait une émission qui s'appelait Monsieur Cinéma,
00:05:26et il posait des questions comme ça à des cinéphiles distingués, et entre les questions
00:05:32il y avait de temps à autre des extraits de films, et c'est à cette émission que
00:05:36j'ai vu pour la première fois Bruce Lee, puisqu'il propose à ce moment-là un petit
00:05:39extrait de la séquence de combat dans les souterrains d'Opération Dragon qui va sortir
00:05:44quelques mois plus tard, et je me rappelle très bien, on était un dimanche après-midi,
00:05:49j'étais seul à la maison, et j'ai vu ce phénomène, j'ai vu quelque chose sur l'écran
00:05:56qui était insensé, et qui ne laissait en rien présager la Mannefert, la Mannefert
00:06:00est un film formidable, mais évidemment le héros principal n'avait pas le charisme
00:06:05dévastateur qu'avait Bruce Lee, et donc quand les films, enfin on peut aller voir
00:06:10les films complets, en fait avec les potes on tombe complètement sous le charme de ce
00:06:15personnage, quand je dis charme, on tombe sous la fascination en fait d'un acteur qui
00:06:23n'est pas une star où on l'entend aujourd'hui, c'est-à-dire qu'il y a quelque chose qui
00:06:27émane de lui qui est une forme littéralement pathologique de violence, et ça, ça nous
00:06:33surprend et ça nous fascine, c'est-à-dire que cet homme incarne totalement sa violence,
00:06:41jusqu'à présent pour nous, et en plus pour nous pratiquants d'arts martiaux, les arts
00:06:45martiaux c'est le contrôle de soi, la sagesse, voire même l'idée de ne pas se battre,
00:06:51c'est-à-dire d'avoir conscience de sa force etc, chez lui au contraire c'est quelque
00:06:57chose qui jaillit d'une façon invraisemblable, et ça nous remue, c'est-à-dire qu'on n'en
00:07:06parle plus que de ça, ça devient littéralement la limite de notre monde, et c'est à ce
00:07:15moment-là que moi je me mets à faire des films super 8, et avec ces amis-là, des arts
00:07:20martiaux, et on commence à tourner des films super 8, et c'est des films genre de concours
00:07:27qu'on a mis, des films de concours, voilà, qu'on tourne dans l'arrière-région antiboise
00:07:35ou canoase, qui était encore préservée, il y avait encore des chambres d'avant à
00:07:38cette époque, et voilà, et on vit littéralement au rythme de Bruce Lee, c'est-à-dire que
00:07:46nos chambres sont tapissées littéralement de posters de Bruce Lee, et il n'y a plus
00:07:49que lui, il n'y a plus que lui qui existe, et ce qui est intéressant, et là je vais
00:07:54revenir à aujourd'hui, récemment j'ai fait l'interview d'un réalisateur indien qui s'appelle
00:08:01S.S. Rajamouli, qui est le réalisateur du film qui va clore ma carte blanche, R.R.R.,
00:08:07et qui est un film absolument incroyable, absolument insensé, et donc quand je vois
00:08:14ce film, j'appelle Rajamouli, on a une longue conversation en zoom tous les deux, et au
00:08:20bout de la troisième question, il me dit, vous savez, dans ma vie il n'y a qu'une personne
00:08:24qui a compté, c'est Bruce Lee, et brusquement je me retrouve à parler avec quelqu'un dont
00:08:30je viens de voir le film qui m'a absolument sidéré, et qui vit à l'autre bout du monde,
00:08:34et il me décrit sa chambre couverte de posters de Bruce Lee, et on se met brusquement à
00:08:40parler, ah oui tu te souviens de cette scène là, où il frappe l'adversaire et il regarde
00:08:44ailleurs, ah oui oui ça c'est extraordinaire, c'est-à-dire qu'il y a quelque chose de
00:08:48fascinant avec Bruce Lee, c'est que quand on a aimé ce mec, je veux dire, on peut rencontrer
00:08:53un hindou, et il devient votre frère instantanément, c'est-à-dire qu'il rejoint la secte, c'est-à-dire
00:08:59que c'est littéralement une secte, les gens qui ont aimé Bruce Lee sont en religion,
00:09:04absolument, c'est vrai.
00:09:05Ah mais oui c'est une religion tout à fait honorable, on va dire, et donc à ce moment-là
00:09:12le cinéma en dehors de Bruce Lee, le cinéma de Hong Kong, est-ce qu'il est déjà là,
00:09:17comment on le voit ?
00:09:18Le cinéma de Hong Kong à ce moment-là, c'est-à-dire qu'avec l'impact des films de Bruce Lee,
00:09:23l'immense succès des films de Bruce Lee, on voit débarquer très très vite des très
00:09:26bons films, d'abord les Griffes de Jade par exemple, un très très grand film, et L'Arrache
00:09:31du Tigre, L'Arrache du Tigre arrive derrière, alors là L'Arrache du Tigre ça a été là
00:09:36aussi un choc incroyable, le genre de film qu'on voyait, je sais pas, trois ou quatre
00:09:39fois pendant le week-end quoi, c'est-à-dire on allait le voir, on allait le revoir, on
00:09:43restait à deux séances le dimanche, c'est-à-dire ça devenait, il faut dire que bon les premiers
00:09:48films qui sont arrivés à ce moment-là, les premiers, les tout premiers films étaient
00:09:52des films de très bonne qualité, les distributeurs se posaient pas encore la question de savoir
00:09:58si, de faire de l'argent facile avec des films médiocres, c'est-à-dire qu'ils sortaient
00:10:03des bons films, donc La Manne Ferre était un très bon film, L'Arrache du Tigre était
00:10:07un excellent film, les Griffes de Jade un film magnifique et ainsi de suite, il y avait
00:10:10les Bruce Lee et tout ça, donc on était pris à l'intérieur d'une émulation, d'une
00:10:14exaltation de ce cinéma, qui évidemment très rapidement a commencé à infléchir
00:10:19puisqu'on a commencé à voir des productions médiocres qui sont finies par arriver, mais
00:10:25qu'on allait voir quand même, et puis surtout il y a eu les faux Bruce Lee, parce que ce
00:10:28qui est fascinant dans l'impact qu'a eu Bruce Lee sur nous, c'est que quand on a découvert
00:10:33ce personnage et qu'on s'est mis à l'idolâtrer instantanément, en même temps on savait
00:10:38qu'il était mort, ce qui est quelque chose qui n'arrive jamais, ça n'arrive jamais,
00:10:42c'est-à-dire que vous ne tombez pas en pamoisant devant votre idole en sachant que
00:10:48le type n'est plus de ce monde, ça n'existe pas normalement, on a tous craqué pour un
00:10:58chanteur rock, Kurt Cobain ou quelqu'un comme ça, et puis quelques mois, quelques années
00:11:03plus tard, bon il décède, c'est un choc, moi je me rappelle quand Jimi Hendrix est
00:11:06mort, ça a été un choc, parce que j'écoutais ses albums et tout, et je croyais que ce
00:11:12type allait vivre éternellement, mais voilà, il disparaît, mais là c'est quelque chose
00:11:17d'encore plus étrange, c'est-à-dire que vous voyez quelqu'un, vous dites que c'est
00:11:20le plus grand mec du monde, et il est mort, c'est là où il y a presque quelque chose
00:11:26qui devient religieux, c'est-à-dire que vous ne vous mettez pas à adorer quelqu'un
00:11:31dont vous attendez le travail, vous vous mettez à adorer quelqu'un qui est passé ailleurs,
00:11:36qui est parti.
00:11:37Et comment vous êtes, est-ce que déjà à cet âge vous voyez aussi l'apport, sinon
00:11:43dans la mise en scène, enfin en tout cas oui dans la mise en scène, dans la chorégraphie,
00:11:46c'est une révolution Bruce Lee aussi de ce point de vue-là ?
00:11:48Alors évidemment, on se met à, moi je sais qu'à l'époque j'étais déjà très très
00:11:53cinéphile, je passais ma vie dans les salles de cinéma, bon il faut dire que le début
00:11:59des années 70, à part la lecture et le cinéma, il n'y avait pas grand-chose, les jeux vidéo
00:12:03c'était éventuellement une virée en arcade avec les copains un samedi pluvieux, mais
00:12:08sinon il n'y avait pas d'autre source d'amusement pour nous, donc le cinéma c'était inouï,
00:12:15c'est là où on se retrouvait tous, en plus le cinéma du début des années 70 c'est
00:12:18un cinéma extrêmement transgressif, donc totalement fascinant, parce que d'abord c'est
00:12:23un cinéma qui vient de tous les coins du monde et qui est le cinéma d'horreur, le
00:12:28cinéma de thriller, d'épouvante, le film de science-fiction, donc il y a une espèce
00:12:33de truc formidable dans le cinéma, on va voir des films en espérant être choqué, en espérant
00:12:39voir des scènes dont on se souviendra jamais, même le cinéma français à l'époque est
00:12:46quand même aussi de cette tenue, je me souviens très bien le jour où j'ai vu La chair de
00:12:51l'orchidée de Patrice Chéreau ou L'importance est d'aimer de Zoulafsky, c'est des films
00:12:55qui nous prenaient à l'estomac, le cinéma de cette époque c'était du cinéma choc,
00:13:01ça tapait.
00:13:02Et oui, La Porte de Bruce Lee, on l'a tout de suite vu, c'est-à-dire que moi je sais
00:13:06que j'étais passionné par le cinéma et quand j'ai vu ce type, j'ai commencé
00:13:12à comprendre que c'était pas tant la caméra qu'il mettait en scène que lui qui mettait
00:13:17en scène la caméra, c'est quelque chose dont je me suis rendu compte, c'est-à-dire
00:13:21que la façon dont il bougeait dans le cadre faisait la mise en scène et je me souviens
00:13:27d'ailleurs quand j'ai présenté l'IDEC, l'IDEC était l'ancienne FEMIS, l'école
00:13:33de cinéma à Paris avant la FEMIS, j'ai présenté l'IDEC et mon dossier tournait
00:13:39autour de Bruce Lee, c'est-à-dire que je suis arrivé, les mecs ils n'y croyaient
00:13:43pas.
00:13:44C'est-à-dire que ce n'était pas dans l'orthodoxie.
00:13:46J'ai tout bâti mon raisonnement sur le fait qu'en fait il existe des cas dans l'histoire
00:13:52du cinéma où c'est le corps humain qui met en scène la caméra et évidemment je
00:13:56remontais au grand burlesque et tout ça, je faisais par exemple des relations avec
00:14:00Harold Lloyd ou avec Buster Keaton, etc.
00:14:04Donc en fait ils avaient adoré ça, ils avaient trouvé que c'était très pertinent et très
00:14:07étonnant et j'avais passé le concours du premier coup mais c'était vraiment ça,
00:14:13c'est-à-dire que c'était quelque chose qui m'avait frappé, c'était qu'effectivement
00:14:17si on veut faire du bon cinéma, il faut en fait mêler les deux, il ne faut pas filmer
00:14:22des gens statiques, il faut filmer des gens en mouvement avec une caméra en mouvement,
00:14:25c'était quelque chose qui...
00:14:26D'ailleurs c'est quelque chose que j'ai mis immédiatement à profit quand j'ai commencé
00:14:30à faire des films, je crois que c'est assez frappant, surtout dans mes premiers films.
00:14:33Et pour peut-être finir et pour évoquer notamment The Grand Master, un film qui est
00:14:38dans la carte blanche également, il y a le maître de Bruce Lee et je voulais vous
00:14:43entendre un petit peu sur ce hip man, en tout cas celui de Wong Kar-wai, The Grand Master,
00:14:49et cette saga avec Donnie Yen qui était d'ailleurs présent en forme des images pour l'étrange
00:14:55festival.
00:14:56Quelques mots sur ces deux sagas, il y en a une qui est peut-être plus conservatrice
00:15:00qu'une autre.
00:15:01C'est intéressant parce qu'en tant que pratiquant d'arts martiaux, j'avais donc un maître,
00:15:07enfin un professeur on va dire, c'est pas exactement un maître en France, un professeur,
00:15:11et donc qui était quelqu'un d'absolument extra, avec qui j'ai étudié le judo mais
00:15:17aussi le karaté, la boxe française, et en fait, évidemment ce qui était intéressant
00:15:22dans tout ce qu'on lisait sur Bruce Lee, parce qu'on s'est mis à dévorer tout ce qu'on
00:15:25pouvait trouver sur Bruce Lee, et on a lu des livres complètement farfelus d'ailleurs
00:15:29sur Bruce Lee, parce qu'il y a eu une espèce de, dû à sa mort et au fait que ça vendait
00:15:34tellement bien, il y a eu une pléthore de bouquins, il y a eu même un film, La légende
00:15:39du dragon, qui est sorti en salle, et qu'on allait voir en chialant parce que dedans on
00:15:42voyait le corps de Bruce Lee le jour de son enterrement, enfin bon, il y avait donc, et
00:15:48au milieu de toutes ces informations, il y en avait une qui était vraie, c'était qu'il
00:15:51avait appris le Wing Chun, qui est une forme de boxe, il avait appris le Wing Chun avec
00:15:57un professeur qui s'appelle Ip Man, et donc Ip Man a fait l'objet effectivement de plusieurs
00:16:03films, d'une manière plutôt récente, a fait l'objet de plusieurs films sur sa vie,
00:16:10parce que c'est quelqu'un qui a eu une vie absolument incroyable, qui est passé à travers
00:16:15notamment l'occupation de la Chine par les japonais, qui a fui, qui s'est retrouvé
00:16:19à Hong Kong, etc. et il a effectivement éduqué Bruce Lee aux prémices de l'art martial,
00:16:28avant que Bruce Lee crée son propre style, parce que Bruce Lee a créé son propre style
00:16:31qui est le Jeet Kune Do, et donc dans ma carte blanche j'ai mis The Grandmaster, qui
00:16:35est vraiment un des films les plus beaux que j'ai jamais vus, enfin là je parle du cinéma
00:16:40en général, je pense que c'est peut-être un des quelques très grands films poétiques
00:16:45faits sur les arts martiaux, c'est un film de Wong Kar Wai, qui généralement est plutôt
00:16:50le peintre de l'amour, de l'amour absolu et contrarié, et qui là traite avec la même
00:16:59sensibilité, le même lyrisme, l'histoire de Ip Man, mais Ip Man par ailleurs a fait
00:17:05l'objet d'une quadrologie de 4 films réalisés par Wilson Hipp, avec Donnie Yen, qui est
00:17:13un très grand artiste martial, et ces 4 films à mon avis sont très bien, sont vraiment
00:17:20extra, mais personnellement je pense qu'ils sont aussi quelque part un projet politique,
00:17:26c'est-à-dire que quand vous allez en Chine, j'ai eu l'occasion d'aller en Chine pas mal
00:17:30de fois et d'y rester un certain temps, vous vous promenez dans la Chine et vous arrivez
00:17:36sur des petites places et il y a des statues de Bruce Lee, des statues en bronze de Bruce
00:17:41Lee, dans la position d'ailleurs qu'on a vue juste avant, donc vous marchez, vous avez
00:17:46un supermarché et puis il y a une statue de Bruce Lee, et en même temps c'est intéressant
00:17:51parce que Bruce Lee n'était pas un vrai Chinois, c'était quelqu'un qui était né
00:17:58déjà d'une mère Eurasienne, ensuite il a été envoyé par sa famille aux Etats-Unis
00:18:04parce qu'il virait mal, il virait voyou, donc ils l'ont envoyé aux Etats-Unis, aux Etats-Unis
00:18:09il a étudié notamment la philosophie, il s'est marié avec une Américaine, Linda,
00:18:15avec laquelle il a eu plusieurs enfants, deux enfants, Shannon et Brandon, et donc
00:18:22quand il arrive à Hong Kong et qu'il joue à Hong Kong, il est en fait, il n'est pas
00:18:26un vrai Chinois, mais ce qui est intéressant dans sa démarche c'est qu'il essaye d'être
00:18:29plus Chinois que les Chinois, c'est ça qui est vraiment intéressant quand on regarde
00:18:33Big Boss, on se rend compte qu'il joue vraiment toutes les vertus qu'on attend d'un jeune
00:18:37homme Chinois, et notamment le respect à sa mère, puisque le film est bâti sur l'idée
00:18:42qu'il fait un serment à sa mère de ne pas utiliser sa force, et il porte un collier
00:18:47autour du cou et chaque fois qu'il a envie d'y aller, il prend le collier et il se retient
00:18:51et pendant la moitié du film il se retient, et donc il incarne pendant au moins la moitié
00:18:55du film toutes les valeurs cardinales, c'est le bon gars, gentil, qu'il respecte les aînés
00:19:00et tout ça, et en fait c'est pas le vrai Bruce Lee, c'est simplement Bruce Lee, il
00:19:06y a quelque chose chez lui qui est assez étonnant dans sa démarche, c'est qu'il sait qu'il
00:19:11a raté potentiellement une carrière américaine, parce qu'il a essayé avant d'arriver à Hong
00:19:15Kong d'être un acteur reconnu à Hollywood, parce qu'il avait un club d'arts martiaux
00:19:20qui était fréquenté par Steve McQueen, qui était fréquenté par James Coburn, par des
00:19:25sommités comme le scénariste Sterling Sillifant par exemple, mais ça n'a pas marché, ça
00:19:30n'a pas marché parce qu'il avait un accent à couper au couteau.
00:19:32Quand on regarde Opération Dragon en anglais, on est frappé par son accent, il parle vraiment
00:19:38avec un accent très fort, et cet accent lui a coûté en fait d'être reconnu comme
00:19:43un acteur qui pourrait en fait devenir bankable aux Etats-Unis, donc il a fini par arriver
00:19:48à Hong Kong, et à Hong Kong il essaye à ce moment là de se fondre, de devenir ce parfait
00:19:55chinois, et je crois que pour revenir à Ip Man, je crois que quelque part le projet
00:20:01de Ip Man, c'est de recentrer Bruce Lee par rapport à la Chine, grâce à son professeur
00:20:08parce que lui c'était un vrai chinois.
00:20:09Donc les Ip Man, le projet à mon avis souterrain des Ip Man, surtout dans la Chine d'aujourd'hui
00:20:15qui est quand même très rigoriste, c'est d'accord vous avez le droit de vénérer Bruce
00:20:22Lee, mais c'est l'élève de Ip Man qui lui est un vrai chinois.
00:20:26Donc je pense que le projet secret de Ip Man, politique des Ip Man, de la série de
00:20:31Wilson Hipp, c'est de dire voilà, Bruce Lee il a été ce qu'il a été, mais c'était
00:20:37le mec qu'il a éduqué, c'était un vrai chinois.
00:20:39Alors on va voir un premier extrait, Bruce Lee dans un film d'un grand studio, on l'a
00:20:47déjà évoqué, La Rage du Tigre, et on parlera peut-être du fait que Bruce Lee lui est allé
00:20:51toquer au studio, mais il s'est fait virer, en tout cas pas virer, il a pété embauché
00:20:57tout simplement.
00:20:58Mais voyons l'ouverture du film, La Rage du Tigre, que vous pourrez revoir demain à 17h30.
00:21:27La Rage du Tigre, c'est un film de Bruce Lee, c'est un film d'Ip Man, c'est un film
00:21:56d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est
00:22:25un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man,
00:22:53c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip
00:23:22Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un
00:23:51film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man,
00:24:18c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un film
00:24:47d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est
00:25:17un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est
00:25:46un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un film d'Ip Man, c'est un
00:26:16film de, voilà il faut voir les films de Chang Cheh. Il faut absolument les voir, lui,
00:26:21c'est un très grand. Donc on essaie de se retrouver, parce que c'est un raz de marée.
00:26:36Du jour au lendemain, y'avait eu des centaines de films, y'en avait partout. On prenait le
00:26:38bus, on allait dans des petites villes comme Vallodis, ou Grasse, pour aller voir des double
00:26:44avec des trucs. Soit c'était un spaghetti avec un kung fu, soit c'était un vieux péplum
00:26:50avec un kung fu. Mais il y avait toujours un kung fu. Et donc on allait voir ça. Et
00:26:56il n'y avait pas à l'époque d'organes de presse qui vraiment essayaient de s'y retrouver.
00:27:02Très rapidement, je me rappelle, il y avait une revue de cinéma et la seule critique
00:27:07qu'on lisait sur ces films-là c'est qui a raté le train, qui a raté le bus, c'était
00:27:13le jeu de mots. La seule critique qu'on vous lisait, La rage utile qui a raté le
00:27:17bus. D'ailleurs, il faut savoir, c'est que cette frustration qu'on a ressentie de voir
00:27:27ce cinéma qu'on aimait tant être traité de cette manière. D'ailleurs, ça me fascine
00:27:31de penser qu'aujourd'hui, il y a le forum, il y a la cinémathèque qui passe ces films-là
00:27:35carrément. Les gens sont invités, font des disgressions pendant des heures là-dessus.
00:27:40C'est incroyable parce que c'est un cinéma qui a été vraiment méprisé, méprisé.
00:27:44C'est-à-dire par les gens qui, à l'époque, étaient les tenants de la critique. Et cette
00:27:53frustration, elle est restée avec moi. C'est-à-dire que toute ma vie et surtout pendant mon parcours
00:28:00de critique de cinéma, je me suis souvenu que les films que j'aimais, les films qui
00:28:04m'avaient fondé en tant que cinéphile avaient été souillés par des gens qui ne les respectaient
00:28:11pas, qui n'essayaient même pas de les comprendre. Et ça explique l'aventure de Starfix, mais
00:28:15ça explique évidemment H.K. aussi, les deux revues que j'ai créées. Avec ce sentiment
00:28:21de revanche qu'il fallait prendre sur ça. Et ce qui est bien, c'est que finalement,
00:28:27tout a tourné en notre faveur. C'est-à-dire en faveur des gens qui avaient aimé ces films
00:28:31désespérément. Aujourd'hui, les gens viennent les voir avec respect et c'est formidable.
00:28:37C'est un sentiment très lié à Chang Cheh, un sentiment de vengeance, de revanche, ou
00:28:40à Bruce Lee.
00:28:41Oui, enfin, je n'irai pas jusqu'à me couper le bras.
00:28:43Pas jusqu'à couper le bras pour voir.
00:28:45Mais Chang Cheh, c'est un cinéma sur lequel il y a beaucoup de choses qui ont été dites,
00:28:51énormément de choses. Parce que c'est l'homme qui a en fait... Il faut savoir que dans l'histoire
00:28:57du cinéma de Hong Kong, il y a eu une grande partie du cinéma d'art martial qui était
00:29:01d'abord des films de sabre avec des héroïnes, avec des épéistes femmes. Et il est l'homme
00:29:08qui a ramené le masculin à l'intérieur du cinéma d'art martial. Donc c'est assez intéressant.
00:29:13Et pour ça, il y a eu beaucoup, beaucoup d'études qui ont été faites sur la façon
00:29:18dont y filmaient les hommes, avec une passion sauvage, on va dire, on va dire les choses
00:29:24comme ça. Et son cinéma est sans doute un exutoire à des choses, peut-être en tout cas à l'époque,
00:29:32à Hong Kong, en Chine, dans les années 70, inavouables. Mais dans lequel justement,
00:29:37et qu'il a détourné au profit de cette espèce d'extraordinaire lyrisme violent barbare qui
00:29:42était celui de ses films. Et c'est vrai que ça nous a vraiment frappé et électrisé. Moi,
00:29:47pendant très longtemps, j'ai cherché à rencontrer les gens qui ont fait ces films,
00:29:52qui ont travaillé avec Chang Cheh. D'ailleurs, un de mes proches collaborateurs était un proche
00:29:58collaborateur de Chang Cheh. Mon monteur, le monteur de Crying Freeman et du Pac des Loups,
00:30:03s'appelle David Vu. Et David Vu, il n'était pas seulement le monteur de John Woo, qui était d'ailleurs
00:30:09un ex-assistant de Chang Cheh, mais il avait été à 17 ans l'assistant monteur sur La Rage du Tigre.
00:30:14Donc quand il est venu travailler avec moi sur Crying Freeman, c'était un moment extraordinaire
00:30:21pour moi, parce que non seulement je travaillais avec quelqu'un qui avait connu le maître, mais
00:30:27surtout, il me racontait toutes les histoires, tout ce qui se passait sur les studios, etc.
00:30:31Et c'est intéressant parce qu'un jour, je suis allé à Hong Kong et avec un ami, on préparait
00:30:37un festival de cinéma japonais à Paris. Il m'avait confié la sélection des films et on s'est
00:30:46arrêté à Hong Kong et on est allé visiter les studios de la Show Rovers, ou du moins ce qu'il
00:30:49en restait, on était au début des années 90. Et j'ai vu le pont de La Rage du Tigre, parce que la scène
00:30:54finale se passe sur un immense pont. J'ai vu le pont, mais il était par terre. Et donc j'ai déambulé
00:31:00dans une petite auto, j'ai déambulé à travers les studios de la Show Rovers, qui était plus
00:31:06qu'un immense cimetière de tous les décors que je reconnaissais, que j'avais vus et qui
00:31:12maintenant étaient par terre. Parce que la Show Rovers en fait continuait à être en activité jusqu'en
00:31:171984, puis devient un studio de télévision, puis après est fracturé à la découpe, parce que
00:31:25les terrains valent très cher et est revendu à des promoteurs immobiliers. Et donc moi, quand j'y suis
00:31:30allé, avant que le studio disparaisse totalement, c'était plus qu'un cimetière de décors. Et au milieu
00:31:35de ces décors, par terre, il y avait ceux de La Rage du Tigre. Un sentiment étrange.
00:31:42Alors cimetière de décors et en fin de la Show Brothers, on va faire un bond avec un autre
00:31:47cinéaste important pour vous, c'est Choi Hark, qui propose comme un remake de ce sabreur manchot avec The Blade en 95.
00:31:58Donc on voit un petit extrait et on en parle après.
00:32:13Non.
00:32:22Non.
00:32:27Non.
00:32:31Non.
00:32:42Non.
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00:33:36Non.
00:33:38Non.
00:33:40Non.
00:33:43Non.
00:33:45Non.
00:33:47Non.
00:33:49Non.
00:33:51Non.
00:33:53Non.
00:33:55The Blade, alors 95, on est donc un remake d'Un seul bras les tue à tous, enfin annoncé en tout cas, qui est le premier volet de la trilogie de Chang Cheh. Qu'est-ce que...
00:34:08Ce qui est intéressant, c'est que pour comprendre, le cinéma de Hong Kong passe par des phases.
00:34:13Donc il y a cette phase dans les années 70 où tous ces films sortent, etc.
00:34:17Et puis ensuite ça retombe, le soufflet retombe, simplement parce qu'il y a trop de films et parce qu'ils sont de mauvaise qualité.
00:34:22Et puis au milieu des années 80, moi j'étais donc critique à ce moment-là encore, et on voit dans les marchés du film des films apparaître.
00:34:36Qui sortent tous d'une compagnie qui s'appelle Film Workshop. Film Workshop c'est la compagnie créée par Tsui Hark.
00:34:43Et on voit donc des films qui s'appellent le syndicat du crime, enfin Better Tomorrow, puis Better Tomorrow 2, puis Gunman de Kirk Wong, et puis Swordsman de Han Hoy, et puis...
00:34:54Voilà, et tous ces films sont produits, et certains sont réalisés, par quelqu'un qui s'appelle Tsui Hark.
00:35:00Et c'est le renouveau, c'est la nouvelle vague du cinéma de Hong Kong, qui est donc un moment absolument incroyable de revitalisation, non seulement du cinéma asiatique mais du cinéma tout court.
00:35:14Puisque finalement, ma génération elle est en attente de quelque chose, c'est-à-dire qu'elle est en attente d'un mouvement de fond.
00:35:21Et ce mouvement de fond va être amené par Hong Kong.
00:35:23Et on tombe totalement fou de ce cinéma, simplement parce que c'est pas seulement quelques films qui arrivent, c'est toute une cosmogonie qui se met en place.
00:35:32C'est-à-dire qu'on découvre qu'il y a plein de films, plein de cinéastes, des stars extraordinaires, Leslie Chung, Lin Shing-Sea, Anita Moy, tout ça.
00:35:41Et on se met à rentrer comme ça dans un monde incroyable, qui devait à mon avis ressembler à ce qu'a pu être la réaction des cinéphiles après la deuxième guerre mondiale,
00:35:50et sorti tous les films américains qui avaient été stoppés par l'occupant allemand.
00:35:53Il y a quelque chose qui arrive et on se retrouve ensevelis sous des tas de films qui ont tous un lien quelque part.
00:36:01Soit par leurs stars, soit par leurs scénaristes, soit par leurs monteurs, comme David Hu, avec qui je vais travailler, et ainsi de suite.
00:36:09Par leurs chorégraphes.
00:36:10Et donc on se met à dire, voilà, ça y est, on est face à quelque chose qui a une lame de fond qui va bouleverser le cinéma.
00:36:19Et ces films, on les recherche, c'est-à-dire qu'on va d'abord dans le quartier chinois pour les louer, parce qu'ils sont en cassette dans le quartier chinois.
00:36:27Je me souviens, quand je réalise Ryan Freeman, le film est tourné à Vancouver, et Vancouver est une ville où il y a beaucoup de Chinois qui se mettent à arriver,
00:36:39simplement parce qu'il y a la rétrocession à la Chine, 1997, qui est pas loin.
00:36:44Et donc il y a plein de Chinois, la ville est à moitié chinoise, et je vais dans les vidéoclubs et je loue des laserdiscs que je duplique en VHS,
00:36:53et je loue tout, et je me mets là aussi à faire le tri, à faire le tri, qu'est-ce qui est bien, qu'est-ce qui est moins bien, etc.
00:37:01Et à voir tous ces films-là.
00:37:03Et ça, c'est pendant que je suis en train de faire Ryan Freeman.
00:37:06Et puis Ryan Freeman sort.
00:37:08Ryan Freeman est évidemment un film en hommage à ces films que personne ne voit.
00:37:12Donc c'est étrange.
00:37:15Le film remporte un succès inattendu.
00:37:18Et le producteur du film, qui est aussi distributeur, Samuel Adida, me dit,
00:37:22mais le film a marché, peut-être ce qu'on pourrait faire, c'est sortir les films, et toi tu les présentes.
00:37:30Donc on met en place une idée, une collection, qui est accompagnée d'un magazine, qui s'appelle HK.
00:37:39Et donc c'est le début, en fait, de la diffusion de ces films en France.
00:37:46D'ailleurs, je ne sors pas que des films de Hong Kong, je sors aussi des films japonais.
00:37:49Beaucoup de films japonais, notamment ceux de Seijun Suzuki, par exemple.
00:37:53Et donc, on donne la possibilité au public de voir ces films,
00:37:59et surtout de les replacer à l'intérieur de ce qui est l'organigramme du cinéma de Hong Kong.
00:38:04Et là aussi, c'est un très grand succès.
00:38:07C'est un très grand succès, les gens adorent ça.
00:38:11Et voilà, c'est ma deuxième expérience de presse, puisque ma première était Starfix.
00:38:17Et c'est ma deuxième expérience de presse, et elle est tout aussi gratifiante,
00:38:21parce qu'on a l'impression de faire un boulot qui sert à quelque chose.
00:38:25Et surtout, ça nous permet de vivre sans limite notre passion,
00:38:29parce qu'évidemment, on a pour ce cinéma-là une espèce de passion débordante, folle d'ailleurs, fétichiste littéralement.
00:38:38C'est-à-dire que tous ces films, on les voit, on les regarde, on les commente, etc.
00:38:42Ça devient, là aussi, on s'enferme dans cette bulle totalement hystérique de, voilà, ces films-là, c'est ça.
00:38:49Ils révolutionnent le cinéma, ils changent le cinéma.
00:38:51Et The Blade est un film qui n'a pas marché à Hong Kong, malheureusement,
00:38:56mais c'est sans doute le meilleur film de Tsui Hark.
00:38:59Et c'est un film sidérant, parce que c'est une espèce de façon de revisiter les films de Chang Cheh,
00:39:05mais avec un œil ultra moderne, avec des effets de montage, des effets de style qu'on connaissait plutôt,
00:39:12j'ose dire, dans le cinéma européen, notamment le cinéma de Pasolini,
00:39:16qui est transposé comme ça sur cette histoire classique du sabreur manchot.
00:39:21Et c'est vraiment un film absolument génial.
00:39:23Malheureusement, il n'y a pas pu avoir...
00:39:25Vous avez l'incapacité d'avoir une copie de ce film, mais c'est vraiment le plus beau film de Tsui Hark.
00:39:30Et c'est un film, évidemment, moi je me souviens très bien quand je suis allé le voir,
00:39:34le film s'appelait The Blade, je savais que c'était le nouveau de Tsui Hark,
00:39:37je me suis assis dans la salle, c'était un matin au festival de Milan,
00:39:42au Mi-Fête de Milan, qui était un marché du film,
00:39:44et je me suis assis, il était 9h du matin, j'ai commencé à regarder le film,
00:39:48et brusquement je me suis dit, bordel de merde, c'est le remake de La Rage du Tigre.
00:39:53Et ça m'a frappé comme une espèce à la fois d'évidence et en même temps de choc total,
00:39:59ce que je suis en train de voir c'est le remake par un des plus grands cinéastes actuels de La Rage du Tigre.
00:40:05C'est toujours la même chose, il y a un moment où il y a des films qui vous accompagnent toute votre vie,
00:40:11c'est-à-dire qu'ils ne vous lâchent pas.
00:40:13Et moi dans le cas présent, La Rage du Tigre ne m'a jamais lâché, jamais.
00:40:17D'ailleurs, Le Pacte des Loups est un remake secret de La Rage du Tigre, littéralement.
00:40:24C'est l'histoire de deux chevaliers qui affrontent une société secrète,
00:40:30et le chef de cette société secrète lui manque un bras, et ainsi de suite.
00:40:37Et l'un des deux meurt, l'autre récupère son identité martiale.
00:40:44Si vous regardez bien, c'est un remake de La Rage du Tigre.
00:40:48Vous pourrez voir Le Pacte des Loups et de La Rage du Tigre pour vérifier.
00:40:52Par exemple dans Silent Hill, le destin de la méchante du film,
00:40:56qui est tirée en l'air et cartelée, c'est la mort d'un des deux héros de La Rage du Tigre,
00:41:02qui a été cartelée en l'air.
00:41:04Et d'ailleurs c'est amusant parce que David Hu, le jour où je suis en train de tourner cette scène,
00:41:09le monteur David Hu débarque de Hong Kong, il rentre sur le plateau,
00:41:12et il me voit en train de pendre un mannequin gorgé de sang avec des fils,
00:41:18et de le déchirer comme ça en l'air.
00:41:20Et il me dit, toi t'es vraiment...
00:41:24Parce que c'est ce film sur lequel il a été monteur à 17 ans.
00:41:28Il arrive dans un studio à Toronto, il me voit en train de faire une séquence équivalente,
00:41:33et il me dit, quand t'as une idée, tu la prends au pied.
00:41:37Jusqu'au bout.
00:41:38Jusqu'au bout.
00:41:40La Rage du Tigre, pour revenir à ce film, c'est un film qui sous-tend tout ce que j'ai fait,
00:41:45et tout ce que j'ai aimé faire en tant que cinéaste.
00:41:49Oui, bien sûr.
00:41:50Alors on peut passer plus rapidement sur un autre film,
00:41:52dont on n'a pas pu parler tout à l'heure mais que vous avez pu voir.
00:41:55Mais au moins pour...
00:41:57Alors c'est la rencontre improbable entre John Carpenter,
00:41:59qui n'est pas forcément un cinéaste,
00:42:01enfin qui est un très bon cinéaste évidemment,
00:42:03mais qui n'a pas la virtuosité du cinéma de Hong Kong,
00:42:06et c'est l'un des premiers à l'importer dans le cinéma.
00:42:10On est en 86.
00:42:11Oui, c'est un film très important.
00:42:13C'est un film très important,
00:42:15et là aussi c'est un film qui n'a pas été reconnu à son époque.
00:42:19C'est un film très important parce qu'il montre l'impact souterrain du film de Hong Kong,
00:42:24et aussi du film de sabre japonais,
00:42:26sur le cinéma américain,
00:42:29et sur une certaine catégorie d'artistes aux Etats-Unis.
00:42:32On pourrait rapprocher ce film notamment du travail de Frank Miller,
00:42:35le très grand dessinateur et scénariste
00:42:39qui a notamment fait Dark Night Returns, Café 300,
00:42:43et qui a été lui aussi complètement obsédé par le film de samouraï,
00:42:49et par le cinéma de Hong Kong.
00:42:51C'est-à-dire que là aussi, aux Etats-Unis,
00:42:55c'est un cinéma qui n'est pas considéré,
00:42:58qui est plutôt méprisé,
00:42:59qui passe dans des salles « greened out »,
00:43:02c'est-à-dire des salles soit pour jeunes
00:43:07ou pour travailleurs.
00:43:10C'est des salles qui tournent toute la journée, etc.
00:43:14Donc c'est des films qui ne sont pas considérés,
00:43:16qui sont souvent d'ailleurs distribués avec des titres farfelus,
00:43:19doublés bizarrement, parfois coupés, etc.
00:43:23Mais néanmoins, quand on voit ce film-là,
00:43:25quand on voit Big Trouble in Little China,
00:43:27on comprend que John Carpenter, il est comme nous.
00:43:30C'est-à-dire que non seulement il est une de nos idoles,
00:43:33parce que Carpenter a toujours été une de nos idoles,
00:43:35moi je sais que c'est le cinéaste
00:43:37qui m'a le plus influencé au niveau du cadrage.
00:43:40C'est vrai que mon cinéma transpire le cadrage à la Carpenter,
00:43:44mais de savoir que, quand il fait ce film-là,
00:43:48de savoir qu'il s'intéresse comme nous à ces films-là
00:43:51et qu'il arrive à en donner une image très sympathique,
00:43:54parce que c'est un film extrêmement sympathique,
00:43:56qui raconte comment un héros américain un peu neuneu
00:43:58se retrouve plongé dans une guerre
00:44:00entre des clans qui pratiquent la magie noire chinoise.
00:44:03C'est un projet insensé, c'est un projet fou,
00:44:06mais il le fait avec une telle innocence,
00:44:11un tel plaisir et une telle dévotion.
00:44:13C'est un film que, je me rappelle très bien,
00:44:15quand je l'ai vu, je l'ai découvert au Club 13
00:44:17en projection de presse, ça m'a...
00:44:19Wouah !
00:44:20Je me suis dit, ouais, vraiment, Carpenter,
00:44:22non seulement c'est un grand cinéaste,
00:44:24mais en plus il est cool, il est cool ce type.
00:44:26Et vraiment, je dis bien, pareil,
00:44:30c'est un film qui a marqué au sens où
00:44:34commence à se dessiner une espèce de transfert d'idées
00:44:41de la pop culture à travers le monde.
00:44:43C'est-à-dire qu'on compte une cartographie
00:44:45de ce qui est la passion pour le cinéma de Hong Kong
00:44:47qui se met à rebondir à des endroits inattendus
00:44:49comme effectivement ce gros film hollywoodien
00:44:52financé par la Fox.
00:44:54Et on se dit, ah oui, d'accord.
00:44:56C'est-à-dire qu'on cherche ces signes-là,
00:44:58ces signes qui nous donnent raison,
00:45:00qui donnent raison à cette passion qu'on a,
00:45:02alors que tout le monde se moque de ça autour de nous.
00:45:06Alors on en a déjà parlé,
00:45:08il vient le moment du passeur, du critique, du distributeur.
00:45:12Starfix, comment on transforme justement cet amour
00:45:18pour le cinéma hongkongais ?
00:45:20Comment on le transforme dans cette revue critique ?
00:45:23Déjà un petit mot quand même,
00:45:24pourquoi fonder Starfix à ce moment-là ?
00:45:26C'est-à-dire qu'il manque quelque chose
00:45:28dans le paysage de la critique ?
00:45:30C'est le sentiment que vous avez en tout cas ?
00:45:32Oui, en fait au moment où on crée Starfix,
00:45:34on est en 81 et le cinéma de Hong Kong n'est plus là.
00:45:38Il faut dire les choses comme elles sont.
00:45:40Donc le cinéma de Hong Kong ne va réapparaître
00:45:42dans les pages de Starfix que bien après.
00:45:44Donc on crée simplement cette revue
00:45:46parce qu'il n'y a pas de revue
00:45:50qui traite sérieusement de ce cinéma-là.
00:45:52Il y a des revues qui le traitent
00:45:54d'une manière marrante,
00:45:56ou alors il y a des revues qui le traitent
00:45:58d'une manière tellement compassée,
00:46:00tellement cinéphilique,
00:46:02mais vraiment poussiéreuse,
00:46:04on va dire les choses,
00:46:06qu'on se dit non, il faut que nous,
00:46:08on arrive à faire transpirer dans les pages
00:46:10de cette revue notre passion pour ça.
00:46:12Donc on essaye d'avoir l'attitude
00:46:14de ce qu'on appelle le journalisme Gonzo,
00:46:16c'est-à-dire le journalisme hérité de Rolling Stone,
00:46:19c'est-à-dire où le critique se met en scène,
00:46:22c'est-à-dire met en scène sa propre passion,
00:46:24son propre itinéraire
00:46:26pour aller rencontrer les gens, etc.
00:46:30Donc on met en place Starfix,
00:46:32et il y a des gens,
00:46:34des ex de Metal Hurlant
00:46:36qui viennent nous rejoindre
00:46:38dans les pages de Starfix,
00:46:40et c'est très symptomatique
00:46:42parce que Metal Hurlant à ce moment-là
00:46:44est une grande revue,
00:46:46et pas seulement une revue de bande dessinée,
00:46:48c'est une revue dans laquelle on trouve
00:46:50la littérature fantastique,
00:46:52de science-fiction, mais aussi au cinéma,
00:46:54et tout ça.
00:46:56Et donc on essaye de dire
00:46:58on va faire une revue qui ait la même énergie
00:47:00que ces fameuses pages culture
00:47:02dans Metal Hurlant,
00:47:06et qui se rapproche un peu
00:47:08d'une version cinéma
00:47:10de Rolling Stone.
00:47:12C'était l'idée.
00:47:14En fait ce qui se passe au départ,
00:47:16c'est que moi je finis mes études
00:47:18à l'IDEC,
00:47:20et en parallèle,
00:47:22je gagne un peu d'argent
00:47:24en éditant une collection
00:47:26dans un éditeur qui s'appelle Skerzo,
00:47:28qui est un petit éditeur,
00:47:30mais je lui fais acheter des films
00:47:32étranges que j'organise
00:47:34en collection, etc.
00:47:36Et ça marche bien.
00:47:38Et c'est le moment où
00:47:42la presse de jeux,
00:47:44de vidéos,
00:47:46commence à émerger.
00:47:48La presse sur les cassettes VHS.
00:47:50Et donc
00:47:52ils viennent me voir en disant
00:47:54toi qui as été journaliste,
00:47:56parce que je suis passé par Mad Movies
00:47:58et par l'écran fantastique,
00:48:00ils me disent mais toi qui as été journaliste
00:48:02tu pourrais pas nous faire une revue ?
00:48:04Et je leur dis ouais d'accord,
00:48:06on va faire une revue,
00:48:08et donc c'est eux qui financent en fait cette revue.
00:48:10C'est cet éditeur vidéo qui finance cette revue.
00:48:12Il y a d'ailleurs quelques pages dédiées
00:48:14de vidéos,
00:48:16pas exclusivement les leurs d'ailleurs,
00:48:18mais un peu tout le monde.
00:48:20Et Starfix sort
00:48:22en janvier 82,
00:48:24et on met en couverture
00:48:26le film qui va devenir,
00:48:28on le sait pas encore,
00:48:30le grand prix d'Avoriaz
00:48:32qui est Dark Crystal.
00:48:34Et la revue se vend
00:48:36instantanément à
00:48:3880 000 exemplaires.
00:48:40Et c'est un choc.
00:48:42Une revue qui sort à ce moment-là
00:48:44que personne n'a vu arriver,
00:48:46qui n'est pas édité par un groupe de presse
00:48:48et qui vend 80 000 exemplaires,
00:48:50c'est un truc...
00:48:52Et donc ça lance la revue.
00:48:54C'est-à-dire que tout le monde se dit,
00:48:56il y a une revue très colorée,
00:48:58très amusante,
00:49:00très anticonformiste,
00:49:02et tous les gens à l'intérieur de la rédaction,
00:49:04moi je suis quasiment un des plus vieux,
00:49:06tous les gens à l'intérieur de la rédaction,
00:49:08ils ont entre 18 et
00:49:10une vingtaine d'années.
00:49:12Et donc le ton
00:49:14marche.
00:49:16C'est-à-dire que les gamins qui achètent ça
00:49:18parce que c'est la revue où on peut lire
00:49:20des articles sur les films qu'ils vont voir
00:49:22mais qui malheureusement sont toujours traités
00:49:24un petit peu par-dessus la jambe dans les revues
00:49:26de cinéma conventionnel,
00:49:28ils se reconnaissent dans le ton.
00:49:30Ils se reconnaissent dans la rédaction.
00:49:32Donc on finit même
00:49:34par créer une espèce de club de lecteurs
00:49:36qui s'appelle la Star Force, etc.
00:49:38Et tous les dimanches matins,
00:49:40on montre les films.
00:49:42Et c'est les meutes.
00:49:44On fait ça
00:49:46au Max Linder notamment.
00:49:48Et je me rappelle un jour,
00:49:50il y avait tellement de gens qu'ils ont enfoncé
00:49:52carrément les portes en verre.
00:49:54Ils font exploser les portes en verre.
00:49:56Il y a tellement de gens qui viennent.
00:49:58Et Star Fix devient la revue
00:50:00un peu anticonformiste
00:50:02un peu anticonformiste
00:50:04qui essaye de faire un lien
00:50:06entre le cinéma qui nous plaît
00:50:08en tant que cinéphile, c'est-à-dire le cinéma de
00:50:10Howard Hawks notamment, et John Carpenter.
00:50:12Et puis voilà, entre Hitchcock
00:50:14et Brendan Palma, et ainsi de suite.
00:50:16Le cinéma d'Eastwood, etc.
00:50:18Et ça marche.
00:50:20Et ça marche.
00:50:22Et la revue va durer.
00:50:24Au début des années 90, c'est ça ?
00:50:26Et après, il y a eu
00:50:28plusieurs revues. Et d'ailleurs, il y a eu
00:50:30un reboot en tout cas, très récemment.
00:50:32Oui, il y a eu un coffee table.
00:50:34Un espèce de numéro prestige
00:50:36dans lequel j'ai fait un grand article
00:50:38sur S.S. Rajamouli,
00:50:40le réalisateur de R.R.R.
00:50:42Tout à fait. Parce que pour moi,
00:50:44ce qui est important dans l'idée
00:50:46de faire une revue, c'est de parler
00:50:48de choses auxquelles les gens
00:50:50n'ont pas accès.
00:50:52Et de leur donner l'envie de les voir.
00:50:54Moi, ça a toujours été...
00:50:56Quand par exemple, ils ont fait ce numéro
00:50:58spécial de Star Fix, tout de suite, j'ai dit
00:51:00je veux faire un article sur ce cinéaste indien.
00:51:02Parce que,
00:51:04pour moi, c'est la vraie fonction
00:51:06du critique de cinéma.
00:51:08C'est pas d'ergoter
00:51:10ce sur quoi tout le monde parle.
00:51:12C'est de donner envie aux gens
00:51:14d'aller vers quelque chose
00:51:16qui est totalement inconnu.
00:51:18Et de trouver les mots pour les galvaniser.
00:51:20Donc ça a toujours été
00:51:22la chose qui m'a driveé
00:51:24dans ma carrière de journaliste.
00:51:26Donc j'ai toujours été un peu
00:51:28le chien truffié
00:51:30de Star Fix.
00:51:32Celui qui allait voir des films un peu bizarres,
00:51:34un peu excentrés,
00:51:36qui allait vers des cinématographies
00:51:38un peu étranges,
00:51:40un peu exotiques, pour aller voir
00:51:42s'il n'y avait pas quelque chose
00:51:44qui pouvait un peu exciter,
00:51:46qui pouvait un peu remuer le cocotier.
00:51:48Parce que, ce qui est terrible
00:51:50aujourd'hui, c'est que tout est
00:51:52lénifiant.
00:51:54On n'a pas la sensation qu'on découvre des choses.
00:51:56Et c'est un peu dommage.
00:51:58Mais aussi parce qu'il y a
00:52:00les réseaux
00:52:02internet qui a pris le relais.
00:52:06Et on se perd à l'intérieur
00:52:08de toutes ces informations, etc.
00:52:10Mais c'est vrai qu'à l'époque,
00:52:12un journal avait vraiment sa place.
00:52:14Et pouvait donner, galvaniser les gens.
00:52:16Quand les gens enfoncent
00:52:18l'entrée du
00:52:20Max Linder,
00:52:22c'est parce qu'on va passer
00:52:24un film qui s'appelle Razorback,
00:52:26un film réalisé par Russell Mulcahy,
00:52:28le futur réalisateur de Highlander.
00:52:30C'est un film que j'ai vu
00:52:32dans une séance privée dans laquelle
00:52:34je n'étais pas admis. J'ai vu le film allongé entre deux fauteuils.
00:52:36Pour ne pas me faire repérer
00:52:38au Festival de Cannes. Je vois le film
00:52:40par terre, tout le long.
00:52:42Et je fais mon papier, etc.
00:52:44Et je monte la sauce,
00:52:46mais tellement fort qu'après
00:52:48les mecs arrivent en masse
00:52:50pour voir le film.
00:52:52Et c'était fun.
00:52:54C'est un super film.
00:52:56C'était cette idée
00:52:58qu'on essayait de faire passer.
00:53:00C'est-à-dire que
00:53:02il y avait des choses qui se passaient
00:53:04et il ne fallait pas les rater.
00:53:08La chose pour moi
00:53:10qui est la plus intéressante en ce moment, c'est le cinéma indien.
00:53:12Il y a un renouveau du cinéma indien.
00:53:14C'est pour ça qu'il a récupéré
00:53:16une partie de l'héritage de Hong Kong.
00:53:18C'est pour ça que dans ma carte blanche, j'ai demandé de passer à RRR.
00:53:20Il y a très peu de gens
00:53:22qui ont vu ce film absolument extraordinaire.
00:53:24Les gens m'ont entendu parler.
00:53:26Et j'imagine que dimanche soir,
00:53:28il va y avoir du monde pour aller voir ce truc.
00:53:30Mais c'est ça qui est dommage
00:53:32qu'on trouve de moins en moins aujourd'hui.
00:53:34C'est cette espèce d'émulation
00:53:36autour de quelque chose qui n'est pas
00:53:38dans votre environnement normal,
00:53:40logique. Pour moi, le cinéma,
00:53:42ça doit être ce que j'ai connu
00:53:44quand j'étais dans les années 70.
00:53:46C'est-à-dire des choses étranges, étonnantes,
00:53:48choquantes, dérangeantes.
00:53:50Des choses qui m'emmenaient ailleurs.
00:53:52Qui me sortaient du quotidien.
00:53:54J'essaye de garder ça en tête.
00:53:56Des choses qui sortaient du quotidien,
00:53:58on en a eu beaucoup.
00:54:00Moi, j'appartiens aussi à une génération
00:54:02pour qui cette collection HK Vidéo
00:54:04a été très importante. C'est pour ça que je souhaitais
00:54:06qu'on voit aussi des VHS. Il y a eu des DVD,
00:54:08évidemment, après.
00:54:10Il y avait un petit extrait de l'Enfer des armes
00:54:12qu'on n'aura pas le temps de voir.
00:54:14Mais je voulais que vous nous racontiez un petit peu
00:54:16l'histoire de ce film en particulier.
00:54:18Une anecdote qui fait que vous avez une importance
00:54:20dans le fait d'avoir retrouvé
00:54:22l'Enfer des armes.
00:54:241980, Treyarch, film
00:54:26très violent, très chaotique.
00:54:28C'est intéressant parce que c'est un film
00:54:30que j'ai sorti, l'Enfer des armes,
00:54:32et d'ailleurs c'est moi qui ai créé le titre,
00:54:34dans la collection Scare Zoo dont je parlais.
00:54:36Ceux qui ont financé Starfix.
00:54:38C'est un des films que j'ai sorti dans cette collection.
00:54:40Le film avait un titre
00:54:42assez...
00:54:44Don't play with fire, quand on l'a acheté.
00:54:46Et donc moi je voulais quelque chose de plus percutant
00:54:48donc j'ai créé l'Enfer des armes.
00:54:50Ca me fait plaisir aujourd'hui de voir que le titre est resté.
00:54:52Mais...
00:54:54Quand on décide
00:54:56d'en parler dans HK, on sait que
00:54:58le film a été largement
00:55:00censuré à Hong Kong.
00:55:02La version qui est sortie, la version que j'ai
00:55:04distribuée, la version officielle, c'est en fait
00:55:06un lointain reflet
00:55:08de ce qu'était le film original.
00:55:10Et il y a toujours aussi
00:55:12pour les cinéphiles, la légende du film perdu.
00:55:14Ca c'est un truc important.
00:55:16C'est à dire qu'il y a toujours les cinéphiles,
00:55:18les vrais cinéphiles, ils vous disent
00:55:20je vous donnerai tout pour voir une copie de ce film
00:55:22ou une copie de celui-là, etc.
00:55:24On vit avec ces espèces de
00:55:26grâles perdus.
00:55:28Je crois savoir que
00:55:30c'est un film de Chang Cheh que vous
00:55:32souhaiteriez voir autour.
00:55:34Oui, il y a un film de Chang Cheh dont le négatif
00:55:36a été détruit
00:55:38parce que c'était un film en noir et blanc que je rêverais de voir.
00:55:40C'est le seul film de Chang Cheh que j'ai pas vu.
00:55:42Donc on vit
00:55:44avec cette idée
00:55:46qu'il y a des films magnifiques
00:55:48qu'un jour on retrouvera. Il y a quelqu'un qui ouvrira
00:55:50une grange et puis sous des bottes de foin
00:55:52ils vont trouver des bobines d'un film.
00:55:54Ca arrive d'ailleurs.
00:55:56De temps à autre, il y a un mec aux Etats-Unis
00:55:58ou dans les pays de l'Est qui ouvre un tiroir
00:56:00et tombe sur une copie
00:56:02d'un film de John Ford. C'est arrivé encore récemment.
00:56:04Mais là,
00:56:06nous on rêvait de voir la version
00:56:08intégrale de l'Enfer des armes et un jour
00:56:10on est à Hong Kong et on interview
00:56:12un metteur en scène
00:56:14formidable qui s'appelle Raymond Lee
00:56:16qui était un ancien assistant de Tsui Hark
00:56:18et on lui parle de...
00:56:20Oui, tu étais sur le tournage de Don't Play With Fire
00:56:22etc...
00:56:24Et puis on dit, on rêverait de voir
00:56:26le montage original.
00:56:28Et puis il nous dit, mais je l'ai.
00:56:30J'ai dit, quoi ?
00:56:32Quoi ? Oui, je l'ai.
00:56:34J'avais une copie en VHS
00:56:36qui avait été faite, une copie de contrôle
00:56:38qui avait été faite du premier montage.
00:56:40Il dit, tu l'as toujours ?
00:56:42Oui, je dois l'avoir toujours.
00:56:44Et il la retrouve.
00:56:46Il retrouve la copie
00:56:48et donc, ce qu'on a fait
00:56:50c'est qu'avec un ami à moi
00:56:52qui est un de mes monteurs
00:56:54de cinéma, on a extirpé
00:56:56de cette VHS tous les moments
00:56:58qui avaient été coupés
00:57:00et on les a réintégrés à l'intérieur
00:57:02du film
00:57:04du film
00:57:06du seul connu
00:57:08et on a reconstitué
00:57:10la version originale
00:57:12de
00:57:14l'Enfer des armes
00:57:16et donc, c'est sorti chez HK
00:57:18en même temps que la version remontée
00:57:20et voilà, ça arrive comme ça
00:57:22ça arrive et pour nous
00:57:24on était très fiers, c'était un coup fumant
00:57:26on venait de faire un coup fumant
00:57:28c'est à dire qu'on pouvait montrer
00:57:30enfin ce film qui avait été
00:57:32honni, banni pour des raisons
00:57:34politiques, puisque c'est un film politique
00:57:36du cinéma
00:57:38de Hong Kong
00:57:40c'est là où le métier sert à quelque chose
00:57:42c'est là où le métier
00:57:44de critique de cinéma sert aussi à quelque chose
00:57:46c'est à dire, c'est pas
00:57:48seulement quelqu'un qui vient, qui regarde un film
00:57:50vaguement ennuyé, puis après qui va écrire
00:57:52trois lignes dessus, pour moi
00:57:54c'est pas le métier de journaliste
00:57:56et de critique de cinéma
00:57:58ça non, ça c'est du parasitage
00:58:00non, ce qui est vraiment
00:58:02important, c'est quand vous pouvez
00:58:04vraiment avoir une fonction
00:58:06qui permet aux gens de découvrir
00:58:08des films et qui permet aux gens de voir des choses
00:58:10qu'on leur a interdit de voir
00:58:12etc, c'est là où ça devient vraiment intéressant
00:58:16alors il y a eu cette
00:58:18désolé, on ne verra pas l'extrait de l'Enfer des armes
00:58:20donc on a ce moment
00:58:22HK
00:58:24magazine
00:58:26on l'appelait Orient Extreme Cinema
00:58:28donc jusqu'en 2000, de 96 à 2000
00:58:30et donc on n'a pas
00:58:32le temps de passer à travers tout ça
00:58:34mais je vais vous montrer un extrait
00:58:36non pas du syndicat du crime, qu'on voit sur ce
00:58:38numéro 1, enfin pour tout dire
00:58:40je crois qu'on l'avait dit tout à l'heure, il y a eu un numéro 0
00:58:42que l'on voit tout en haut à gauche
00:58:44et le succès fait que le magasin
00:58:46est créé
00:58:48c'est ça, c'est à dire qu'on publie un premier numéro
00:58:50où il y a Zu
00:58:52et Garry de la Montagne Magique en couverture
00:58:54sur Yard, toujours, et c'est Lin Jing Xia
00:58:56qui est sur la couverture
00:58:58l'héroïne aussi de Bride with White Hair
00:59:00que j'ai passé dans mon cycle
00:59:02et donc les gens adorent ça
00:59:04les gens disent mais c'est super, on regarde le film
00:59:06et puis
00:59:08vous nous dites ce qu'il faut comprendre du film
00:59:10parce qu'évidemment c'est des films
00:59:12qui reflètent aussi
00:59:14une culture
00:59:16pour laquelle on n'a pas tout
00:59:18on ne connait pas tout
00:59:20on n'a pas toutes les
00:59:22clés de décryptage
00:59:24donc nous on aide les gens
00:59:26à comprendre mieux
00:59:28ça c'est tiré de la mythologie
00:59:30ça c'est inventé
00:59:32et puis il y a des interviews
00:59:34des gens qui les ont fait
00:59:36et ça aide les gens
00:59:38et les gens adorent ça
00:59:40Et là on a un petit extrait
00:59:42pour le plaisir
00:59:44pour parler un petit peu de John Woo
00:59:46vous allez vite reconnaître
00:59:56C'est quoi ça?
00:59:58C'est quoi ça?
01:00:00C'est quoi ça?
01:00:02C'est quoi ça?
01:00:04C'est quoi ça?
01:00:06C'est quoi ça?
01:00:08C'est quoi ça?
01:00:10C'est quoi ça?
01:00:12C'est quoi ça?
01:00:14C'est quoi ça?
01:00:16C'est quoi ça?
01:00:18C'est quoi ça?
01:00:20C'est quoi ça?
01:00:22C'est quoi ça?
01:00:24C'est quoi ça?
01:00:54C'est quoi ça?
01:01:01C'est quoi ça?
01:01:14J'ai déblowing
01:01:18J'ai Joe
01:01:20J'ai Joe
01:01:22Ce n'est pas un policier.
01:01:23Non.
01:01:24Il a un pass.
01:01:26C'est ton frère.
01:01:28Combien de fois dois-je te le répéter ?
01:01:30Je ne suis pas un policier.
01:01:32Tu es ton seul ennemi.
01:01:34Tu n'as qu'à te battre.
01:01:35Tu n'as qu'à te battre.
01:01:40Attends.
01:01:53Cette année,
01:01:54Je suis encore un policier.
01:01:55Je ne vais pas me battre pour ça.
01:01:56C'est cela.
01:01:58C'est tout mon possession.
01:01:59Je ne peux plus mourir.
01:02:00Et je n'ai pas le droit.
01:02:11Je veux voir cette histoire.
01:02:13Je l'ai eu dans un bar de Wine.
01:02:14Dis-moi ce que tu as vu.
01:02:17Je l'ai tué.
01:02:19Comment tu te sens ?
01:02:20Comme vous venez de le voir, c'est tourné en un seul plan.
01:02:39Mais il y a une chose, déjà c'est extraordinaire de penser,
01:02:43parce que là, on est avant le numérique.
01:02:44Donc tout ce que vous voyez, ça a été mis en place et donc tout
01:02:47le monde fait exactement, suit la chorégraphie.
01:02:50Mais là où c'est encore plus fort, c'est que quand ils prennent
01:02:52l'ascenseur, c'est un décor de studio.
01:02:55En fait, ils ne montent pas dans un autre étage.
01:02:56Ils restent à l'étage et pendant que les deux acteurs discutent
01:02:59dans l'ascenseur, ils changent le décor.
01:03:02Et donc, quand les portes s'ouvrent, ils sortent dans le même décor
01:03:05qui a été réarrangé entre temps, en quelques dizaines de secondes
01:03:09et hop, c'est reparti.
01:03:11C'est un truc de dingue.
01:03:13C'est véritablement un truc de dingue parce que, je dis bien,
01:03:17c'est avant le numérique, c'est avant qu'on puisse faire
01:03:18des coupes invisibles.
01:03:19Donc, quand John Woo décide de faire ce plan, là, toute sa virtuosité
01:03:24est en place.
01:03:25C'est-à-dire que c'est vraiment à regarder.
01:03:27C'est extraordinaire.
01:03:28L'homme qui a réglé cette séquence s'appelle Philip Kwok.
01:03:32C'est lui qui a réglé les combats du pacte des loups.
01:03:36Donc, il est venu spécialement.
01:03:38Évidemment, le film est monté par David Hu, celui-là.
01:03:41Et donc, David Hu et Philip Kwok se retrouvent sur le pacte des loups.
01:03:47Et Philip Kwok parle pas un mot de français et parle pas un mot
01:03:51d'anglais.
01:03:52Et je travaille avec lui et on a une expression.
01:03:56Donc, il met en place les combats sur le film, etc.
01:03:59Et quand ça ne me plaît pas, je fais aïe, ce qui veut dire,
01:04:04en hongkongais, non, ça ne va pas.
01:04:07Et quand ça marche, je dis ce qui veut dire pas de problème.
01:04:11Et donc, avec ces deux mots, j'ai travaillé avec Philip Kwok
01:04:15pendant des mois sur les scènes d'action du pacte des loups.
01:04:18Et Philip Kwok était à un passé parce qu'il est chorégraphe.
01:04:22Mais avant ça, il était un des acteurs de Chang Che, donc la boucle
01:04:26sous boucle.
01:04:27Il était un des dernières vedettes imposées par Chang Che dans un
01:04:32groupe de combattants qui s'appelait les Cinq Venins, Five Venom.
01:04:36Et voilà.
01:04:37Et donc, avec lui aussi, j'ai pu parler très longuement de
01:04:40Chang Che et de la façon dont fonctionnaient les studios de la
01:04:45Shaw Brothers.
01:04:46Evidemment, avec l'aide d'un interprète.
01:04:47Parce que autant David Duke parle un anglais parfait, autant
01:04:50Philip Kwok, non.
01:04:51Voilà.
01:04:53Alors, on doit avancer, car le temps passe, pour vous
01:04:58passer ensuite la parole.
01:05:00Là, c'était pour évoquer éventuellement Sammo Hung, mais on
01:05:04n'aura malheureusement pas le temps.
01:05:05Enfin, on peut en dire peut être quelques mots, en tout cas aussi
01:05:07sur l'importance du chorégraphe aussi.
01:05:11Oui, justement, c'est intéressant parce que Philip Kwok fait partie
01:05:17de la génération suivante, puisqu'il y a une génération de chorégraphes.
01:05:20Il faut savoir que le cinéma Hong Kong, à partir de 1976,
01:05:24il est pris en charge par les chorégraphes.
01:05:26Avant, c'était vraiment un cinéma de cinéastes.
01:05:28Et puis, brusquement, il y a l'accession au poste de cinéaste
01:05:31de tous les grands chorégraphes.
01:05:32Il y a Liu Xiaoyang, il y a Sammo Hung.
01:05:34Sammo Hung, on le connaît parce qu'il est un peu enveloppé et il se
01:05:38bat contre Bruce Lee dans le fameux premier combat de l'opération
01:05:41dragon.
01:05:42Et c'est un immense acteur, mais c'est un acteur plutôt comique.
01:05:46Mais c'est un immense chorégraphe.
01:05:47C'est le chorégraphe des films de Jackie Chan, notamment.
01:05:50Et c'est une de mes idoles absolues.
01:05:54Malheureusement, je ne l'ai jamais rencontré.
01:05:56J'ai rencontré beaucoup, beaucoup de gens de Hong Kong, mais je n'ai
01:05:58jamais rencontré Sammo Hung, qui est un type qui est, par études,
01:06:02une espèce d'ogre incroyable.
01:06:04Et d'ailleurs, il est toujours actif.
01:06:06A plus de 80 ans, on le voit faire le coup de poing dans les films,
01:06:08ce qui est absolument, absolument incroyable.
01:06:11Mais il est dans le tout dernier film.
01:06:13On parlera peut être de Limbo, que vous pourrez revoir dedans,
01:06:16de demain.
01:06:17Mais le City of Darkness, nouveau film, Sammo Hung est dedans.
01:06:23Sammo Hung est dedans, je sais, tout à fait.
01:06:25Et là, c'était L'Exorciste chinois, un film merveilleux.
01:06:29Les deux, c'était pour vous montrer.
01:06:31Alors, on avance un petit peu parce que je voudrais vous faire réagir
01:06:34justement sur un autre cinéaste qui n'est pas un cinéaste de genre,
01:06:39en tout cas, pas à proprement parler.
01:06:40On en a parlé un petit peu tout à l'heure.
01:06:42C'est Wong Kar Wai avec Chucking Express.
01:06:44Je sais que c'est un film très important pour vous.
01:07:04Chucking Express, c'est un film qui a été réalisé par Chucking Express.
01:07:07C'est un film qui a été réalisé par Chucking Express.
01:07:10C'est un film qui a été réalisé par Chucking Express.
01:07:12C'est un film qui a été réalisé par Chucking Express.
01:07:14C'est un film qui a été réalisé par Chucking Express.
01:07:16C'est un film qui a été réalisé par Chucking Express.
01:07:18C'est un film qui a été réalisé par Chucking Express.
01:07:21C'est un film qui a été réalisé par Chucking Express.
01:07:23C'est un film qui a été réalisé par Chucking Express.
01:07:25C'est un film qui a été réalisé par Chucking Express.
01:07:27C'est un film qui a été réalisé par Chucking Express.
01:07:29C'est un film qui a été réalisé par Chucking Express.
01:07:31C'est un film qui a été réalisé par Chucking Express.
01:07:34C'est un film qui a été réalisé par Chucking Express.
01:07:36C'est un film qui a été réalisé par Chucking Express.
01:07:38C'est un film qui a été réalisé par Chucking Express.
01:07:40C'est un film qui a été réalisé par Chucking Express.
01:07:42C'est un film qui a été réalisé par Chucking Express.
01:07:45C'est un film qui a été réalisé par Chucking Express.
01:07:47C'est un film qui a été réalisé par Chucking Express.
01:07:49C'est un film qui a été réalisé par Chucking Express.
01:07:51C'est un film qui a été réalisé par Chucking Express.
01:07:53C'est un film qui a été réalisé par Chucking Express.
01:07:55C'est un film qui a été réalisé par Chucking Express.
01:07:58C'est un film qui a été réalisé par Chucking Express.
01:08:00C'est un film qui a été réalisé par Chucking Express.
01:08:02C'est un film qui a été réalisé par Chucking Express.
01:08:04C'est un film qui a été réalisé par Chucking Express.
01:08:06C'est un film qui a été réalisé par Chucking Express.
01:08:09C'est un film qui a été réalisé par Chucking Express.
01:08:11C'est un film qui a été réalisé par Chucking Express.
01:08:13C'est un film qui a été réalisé par Chucking Express.
01:08:15C'est un film qui a été réalisé par Chucking Express.
01:08:17C'est un film qui a été réalisé par Chucking Express.
01:08:20C'est un film qui a été réalisé par Chucking Express.
01:08:22Le lendemain, je suis arrivée.
01:08:24Je sais qu'il y avait beaucoup de monde à 8h.
01:08:26J'arrivais à 7h30.
01:08:28C'était très froid.
01:08:30J'ai regardé la fenêtre.
01:08:33J'ai vu le Casablanca en pleine pluie.
01:08:37Je voulais savoir si l'autre Casablanca avait beaucoup de soleil.
01:08:41J'ai donc donné un an à moi-même.
01:08:45Aujourd'hui, c'est aussi froid que le lendemain.
01:08:49J'ai regardé la fenêtre.
01:08:51J'étais seule.
01:08:55Je ne sais pas s'il m'a envoyé un message.
01:09:21Désolé.
01:09:52Chucking Express.
01:09:57C'est un film que j'ai vu pendant que je tournais Crying Freeman.
01:10:00J'étais à Vancouver.
01:10:03Dans le quartier chinois, il y avait plusieurs cinémas réservés aux Chinois.
01:10:09Il passait Chucking Express.
01:10:12C'est un film que j'ai vu dans une salle entourée de Chinois.
01:10:16C'est un film que je trouve absolument merveilleux.
01:10:18C'est un film qui,
01:10:22à l'aube du rattachement à la Chine populaire,
01:10:26montre le sentiment amoureux qu'on peut avoir pour Hong Kong.
01:10:30Qu'on peut avoir pour ce petit bout de territoire
01:10:34qui va bientôt être redonné à la grande Chine.
01:10:38C'est un film de spleen.
01:10:40C'est un film de mélancolie romantique.
01:10:44Je me suis rendu compte en le regardant que c'était la mienne.
01:10:48J'avais fini par créer un sentiment amoureux avec Hong Kong.
01:10:52Je suis allé plusieurs fois.
01:10:56A travers le cinéma, c'était créé cette espèce de relation sensuelle, amoureuse.
01:11:00Ce film l'a défini totalement.
01:11:04Il y a une douceur dans ce film.
01:11:08Une forme de rêverie romantique
01:11:12qui correspond à mon état d'esprit quand je tournais Crying Freeman.
01:11:14C'était pour moi le film que je donnais en gage
01:11:18à cette passion que j'avais pour ce cinéma-là.
01:11:24C'est intéressant.
01:11:26Ce spleen amoureux,
01:11:28on le retrouve dans tous les films de Bong Kar-wai.
01:11:30Y compris Grandmaster,
01:11:32qui est pourtant un film sur les arts martiaux.
01:11:36Ça reste ce qui définit le mieux son cinéma.
01:11:38Ce moment amoureux
01:11:40qu'il arrive à retranscrire
01:11:42par la grâce de ses images,
01:11:44par le choix des musiques.
01:11:48C'est un film absolument éblouissant.
01:11:52Il produit un effet très durable.
01:11:58Des années plus tard, j'ai rencontré Bong Kar-wai.
01:12:02C'est une anecdote intéressante.
01:12:06Je préparais un film en Chine.
01:12:08J'étais à Shanghai.
01:12:12Bong Kar-wai demande à me voir.
01:12:16J'étais super flatté.
01:12:18J'ai tellement d'admiration pour lui.
01:12:20Je le retrouve dans un restaurant
01:12:22qui semblait d'ailleurs parfaitement sortir d'un de ses films.
01:12:24Toute la déco était en verre soufflé.
01:12:26Vraiment magnifique.
01:12:28Je retrouve le Bong Kar-wai
01:12:30qu'on connaît tous,
01:12:32ce grand bonhomme avec ses lunettes de soleil
01:12:34qu'il n'enlève jamais,
01:12:36à 8h du soir.
01:12:38Je m'assois en face de lui.
01:12:40J'essaie de lui parler de son cinéma.
01:12:42C'est normal.
01:12:44Je suis là.
01:12:46Je suis résateur comme lui.
01:12:48Je suis un ancien critique de cinéma.
01:12:50J'essaie de lui parler de son cinéma.
01:12:52La seule chose qui l'intéressait,
01:12:54c'est de savoir à qui j'allais louer le matériel
01:12:56pour faire mon film.
01:12:58Lui, il avait une société
01:13:00de location de matériel.
01:13:02Il voulait que ce soit cette société que j'utilise.
01:13:04J'essayais de parler à Bong Kar-wai
01:13:06de son cinéma.
01:13:08Et le mec, il n'y avait qu'une chose en tête,
01:13:10c'était le business.
01:13:12Il m'avait invité.
01:13:14Il était un peu désappointé.
01:13:16Il me disait, vous savez,
01:13:18je peux vous faire un prix fantastique
01:13:20sur les projecteurs.
01:13:22J'étais là et j'essayais de lui dire,
01:13:24je suis un gigue express.
01:13:26Je me suis rendu compte
01:13:28qu'en fait le mec a deux casquettes
01:13:30et que ce soir-là, j'avais le business man.
01:13:32J'avais pas l'immense metteur en scène
01:13:34que j'admire tant.
01:13:36C'est une rencontre un peu étrange.
01:13:40Est-ce que vous avez loué le matériel finalement ?
01:13:42Non, non.
01:13:44La grippe aviaire a déboulé
01:13:46et le film ne s'est pas fait.
01:13:48Avant de vous passer la parole,
01:13:50justement, on passe à vous.
01:13:54Évidemment, on ne va pas pouvoir vous parler
01:13:56de tous les films.
01:13:58Mais voilà, c'est très beau de voir ça.
01:14:00C'est un film de quatre longs-métrages.
01:14:02On ne parle pas de Necromicon
01:14:04qui est juste un premier film.
01:14:06C'est un sketch en fait.
01:14:08Un sketch où il y en avait trois,
01:14:10je crois, au total.
01:14:12Vous parliez de Crying Freeman
01:14:14tout à l'heure.
01:14:16J'aimerais qu'on voit un extrait
01:14:18tout de même sans le dévoiler trop
01:14:20pour ceux qui ne le connaîtraient pas.
01:14:22On est dans la première scène
01:14:24où l'on voit,
01:14:26très bien,
01:14:28une tribu au cinéma hongkongais.
01:14:30Ça se passe à Vancouver.
01:14:32Regardez simplement.
01:14:34On en parle un peu après.
01:14:36Vous pouvez voir le film demain
01:14:38à 20h30.
01:14:40J'essaie de ne pas spoiler.
01:14:58...
01:15:08...
01:15:18...
01:15:28...
01:15:38...
01:15:48...
01:15:58...
01:16:08...
01:16:18...
01:16:28...
01:16:38...
01:16:48...
01:16:58...
01:17:08...
01:17:18...
01:17:28...
01:17:38...
01:17:48...
01:17:58...
01:18:08...
01:18:18...
01:18:28...
01:18:38...
01:18:48...
01:18:58...
01:19:08Qu'est-ce que ça vous fait quand vous revoyez
01:19:10par exemple cette séquence ?
01:19:12En fait,
01:19:14quand je revois cette séquence,
01:19:16je ne revois pas tant la séquence que je revois
01:19:18les conditions dans lesquelles ça a été tourné.
01:19:20Je revois, évidemment,
01:19:22je repense aux gens,
01:19:24je repense aux petits incidents.
01:19:26L'explosion était tellement forte
01:19:28qu'il y a un coffre,
01:19:30il y a tout le dessus d'une voiture qui est partie en l'air
01:19:32et on l'a regardée comme ça,
01:19:34en ne sachant pas où il allait atterrir.
01:19:36Carrément la partie supérieure d'une
01:19:38cadillac.
01:19:40On s'est resté comme ça et finalement
01:19:42on s'est tombé safe.
01:19:44Mais ce n'était pas prévu.
01:19:46Et puis il y a dans un des plans où
01:19:48Craig Freeman court et il croise des gens,
01:19:50il y a mes parents, mon père et ma mère
01:19:52qui sont là et qui se retournent
01:19:54dans le passé.
01:19:56J'attends ce moment où je vois mon père et ma mère
01:19:58dans le coin. Ils étaient venus
01:20:00à Vancouver nous voir tourner
01:20:02cette séquence complètement délirante
01:20:04qu'on a tournée un dimanche sur la place principale
01:20:06de Vancouver.
01:20:08Parce qu'on bloquait tout,
01:20:10on bloquait la circulation
01:20:12pour pouvoir faire cette scène.
01:20:14On voit stylistiquement qu'il y a quelque chose de très
01:20:16affirmé, quelque chose qui...
01:20:18Là c'est un hommage.
01:20:20Le film fonctionne comme un hommage à un cinéma
01:20:22auquel les gens n'avaient pas encore vraiment accès.
01:20:24C'est clair.
01:20:26Il existe
01:20:28un cinéma qui est fait de cette façon.
01:20:30Et comment ça se passe
01:20:32quand on construit ce genre de séquences ?
01:20:34C'est de l'écriture ?
01:20:36D'où viennent les idées
01:20:38à un moment d'appliquer
01:20:40ce style à telle ou telle séquence ?
01:20:42C'est en vous ?
01:20:44Vous vous sentez parfois inhibé
01:20:46par cette cinéphilie ?
01:20:48Non, en fait
01:20:50il faut se dire
01:20:52que le projet de Karim Freeman
01:20:54c'est un projet de Samuel Adida
01:20:56qui était mon producteur
01:20:58et de moi.
01:21:00Au départ, on cherche à faire un film ensemble.
01:21:02Lui cherche à devenir producteur
01:21:04et moi je cherche à devenir réalisateur.
01:21:06Lui est distributeur de films
01:21:08et moi je suis critique de cinéma.
01:21:10On va manger
01:21:12une raclette à
01:21:14Vauriaz et puis il me dit
01:21:16tu veux faire ce boulot tout le temps ?
01:21:18J'ai dit non, je veux être réalisateur.
01:21:20Il me dit ça tombe bien parce que moi je veux être producteur.
01:21:22Parce que nos goûts sont les mêmes.
01:21:24Donc on cherche à faire un film.
01:21:26J'écris un premier script
01:21:28pour lui mais qui est trop cher.
01:21:30Et puis un jour
01:21:32je suis à New York et je vais visiter
01:21:34un grand artiste de comic book américain
01:21:36qui s'appelle Michael Kaluta
01:21:38qui est le créateur de The Shadow.
01:21:40Michael Kaluta me montre
01:21:42des films d'animation
01:21:44japonais
01:21:46qui ne sont pas encore en Occident
01:21:48et parmi ces films il y a le dessin animé
01:21:50qui est tiré d'une bande dessinée japonaise
01:21:52qui s'appelle Crying Freeman
01:21:54et il me montre le dessin animé.
01:21:56Je regarde ça en disant
01:21:58Waouh ! C'est exactement
01:22:00les films de Hong Kong
01:22:02qu'on fait aujourd'hui.
01:22:04Je récupère ce film
01:22:06d'animation et je le montre
01:22:08à mon producteur. Evidemment le film est en japonais
01:22:10donc on ne comprend rien à ce qu'il se dit
01:22:12mais ce n'est pas grave parce qu'on
01:22:14on comprend l'histoire
01:22:16instinctivement par l'image
01:22:18et je lui dis que ce serait génial
01:22:20si on faisait une adaptation de ça
01:22:22de Crying Freeman
01:22:24et il me dit banco
01:22:26et donc on part tous les deux
01:22:28et on rencontre des acheteurs
01:22:30de films et puis
01:22:32j'essaie de leur expliquer mon idée
01:22:34on rencontre Brandon Lee
01:22:36ça a été aussi quelque chose d'incroyable
01:22:38évidemment pour jouer
01:22:40Crying Freeman ma première idée
01:22:42c'est Brandon, le fils de Bruce Lee
01:22:44et je le rencontre
01:22:46dans un bar
01:22:48à East LA
01:22:50je le vois débarquer sur sa moto
01:22:52il est habillé en cuir noir
01:22:54et on prend un café ensemble
01:22:56un café dégueulasse
01:22:58et je le regarde
01:23:00de l'autre côté de la table en me disant
01:23:02bon dieu c'est le fils de Bruce Lee
01:23:04c'est le fils de dieu
01:23:06et
01:23:08c'est un truc bizarre parce que
01:23:10Bruce Lee comme je dis bien quand je l'ai découvert
01:23:12il était mort mais là de l'autre côté de la table
01:23:14j'avais son fils, j'avais donc la preuve
01:23:16qu'il avait quelque part existé
01:23:18j'avais ce type qui était
01:23:20je m'en souviens
01:23:22très sombre, vraiment une personnalité
01:23:24très sombre, un astre noir
01:23:28et on se dit qu'on va se revoir
01:23:30pour pouvoir parler de
01:23:32Crying Freeman, il connait la bande dessinée japonaise
01:23:34il est au courant
01:23:36il est au courant
01:23:38il connait la bande dessinée
01:23:40et le projet l'intéresse
01:23:42et donc nous on rencontre
01:23:44après les ayants droit de Crying Freeman
01:23:46les ayants droit de Crying Freeman
01:23:48c'est des japonais qui sont à ce moment là
01:23:50à Hollywood, ils tournent des petits films
01:23:52de série B à Hollywood
01:23:54des petits trucs
01:23:56et le producteur
01:23:58le producteur
01:24:00japonais va en fait devenir
01:24:02célèbre beaucoup plus tard, c'est lui qui va produire
01:24:04et Grudge Juhon
01:24:06et donc il va devenir
01:24:08immensement riche et célèbre
01:24:10mais là il en est encore à tourner des petits séries B à Los Angeles
01:24:12et on part avec Samuel Adida
01:24:14voir ce type, et c'est au moment des émeutes
01:24:16à Los Angeles, c'est à dire qu'on arrive
01:24:18et on va voir le mec pendant le couvre-feu
01:24:20c'est à dire que Los Angeles est en train de cramer
01:24:22il y a des panaches de fumée
01:24:24noire au dessus de Los Angeles
01:24:26et nous on décide quand même d'y aller
01:24:28on va prendre la voiture et on va
01:24:30essayer d'éviter les flics qu'il y a partout
01:24:32les flics partout qui bouchent les rues
01:24:34et on se rend au rendez-vous pour rencontrer
01:24:36ce producteur japonais
01:24:38pour parler de Crying Freeman
01:24:40et donc il dit ok
01:24:42mais bon Christophe il n'a jamais fait un film
01:24:44donc il me propose, il est en train
01:24:46de produire un film à sketch
01:24:48et avec un sketch réalisé par
01:24:50un américain, un sketch réalisé par un japonais
01:24:52et un sketch réalisé par un européen
01:24:54cet européen c'est Michele Sohavi
01:24:56et Sohavi leur a claqué entre les doigts
01:24:58il est parti, il a quitté le projet
01:25:00il me dit tu veux pas faire le
01:25:02le sketch, je dis ouais
01:25:04donc je saute
01:25:06dans la réalisation de ce sketch
01:25:08et le film
01:25:10il y a quelques critiques qui sortent
01:25:12et il se trouve que c'est mon sketch qui est le plus apprécié
01:25:14donc je reçois
01:25:16la bénédiction pour faire Crying Freeman
01:25:18et donc on fait Crying Freeman
01:25:20mais Crying Freeman c'est vraiment
01:25:22pour expliquer que c'est vraiment une aventure
01:25:24que j'ai vécu conjointement avec ce producteur
01:25:26avec Samuel qui malheureusement
01:25:28est mort depuis
01:25:30et voilà donc c'est vraiment
01:25:32c'était le genre de cinéma
01:25:34qu'il aimait et c'est le genre de cinéma
01:25:36que je voulais faire, mais ça n'aurait pas pu exister
01:25:38sinon, c'est à dire qui
01:25:40aurait en France eu l'idée de produire
01:25:42un truc pareil quoi
01:25:44d'ailleurs quand le film sort
01:25:46les gens croient que c'est pas un français qui a fait le film
01:25:48ils croient que c'est un québécois
01:25:50j'ai lu dans la presse française que j'étais un québécois
01:25:52parce que ils arrivent pas
01:25:54à se dire mais c'est pas possible quoi
01:25:56c'est pas un français
01:25:58qui a fait ça quoi
01:26:00et c'est marrant c'est que
01:26:02la presse qui va soutenir le film
01:26:04c'est pas la presse cinéma, j'ai quelques bons articles
01:26:06dans la presse cinéma, généralement d'ailleurs
01:26:08fait par des copains
01:26:10mais c'est surtout la presse
01:26:12de jeux vidéo
01:26:14qui va s'emparer du film
01:26:16parce que la presse de jeux vidéo s'intéresse
01:26:18au manga et donc
01:26:20il y a
01:26:22une espèce de lien qui existe entre les jeux vidéo
01:26:24qui sont souvent japonais
01:26:26et les mangas japonais
01:26:28et c'est eux qui s'emparent en fait
01:26:30de Crying Freeman et vont vraiment
01:26:32m'aider à ce que le film devienne un succès
01:26:34c'est la presse de jeux vidéo
01:26:36donc d'ailleurs un peu plus tard dans ma carrière
01:26:38j'adapterai un jeu vidéo qui est Silent Hill
01:26:40qui est un jeu japonais
01:26:42donc il y a quelque part quelque chose qui est logique dans tout ça
01:26:44c'est à dire que effectivement
01:26:46le cadre du cinéma français
01:26:48que je respecte énormément
01:26:50n'était pas vraiment fait pour moi
01:26:52mes rêves, mes aspirations
01:26:54les choses que je voyais
01:26:56elles n'étaient pas cataloguées dans le cinéma français
01:26:58même si John Woo
01:27:00est vastement inspiré par Melville
01:27:02quelque part
01:27:04faire un film de gangster comme celui-là
01:27:06en France en 1993
01:27:08c'était complètement
01:27:10absurde, complètement ubuesque
01:27:12mais ça s'est révélé payant
01:27:14et vous le disiez tout à l'heure
01:27:16donc le succès du film vous permet
01:27:18de lancer HK
01:27:20oui c'est à dire que quelque part
01:27:22je ne quitte pas ma casquette de cinéphile
01:27:24et de journaliste
01:27:26c'est à dire que je mets en place
01:27:28un journal pour
01:27:30et c'est intéressant, c'est qu'en fait tout se mêle
01:27:32c'est à dire que
01:27:34souvent les critiques de cinéma
01:27:36deviennent réalisateurs
01:27:38surtout en France, il y a une tradition évidemment de critiques
01:27:40qui deviennent réalisateurs
01:27:42comme Truffaut, Rohmer ou Chabrol
01:27:44mais après c'est fini, ils n'y retournent pas
01:27:46alors que moi je vais et je viens
01:27:48entre la presse, les films
01:27:50que j'ai envie de faire
01:27:52et puis après il y a le pack des loups
01:27:54et le pack des loups est un tel succès
01:27:56international
01:27:58mais HK existe toujours
01:28:00il y a toujours des films qui sortent
01:28:02à HK etc
01:28:04et donc pour
01:28:06vraiment avant de vous passer la parole
01:28:08voilà à quoi ressemble
01:28:10si vous l'avez vu masqué
01:28:12Marc Dacascos
01:28:14donc pas Brandon Lee mais
01:28:16Marc Dacascos
01:28:18moi j'apprends la mort de Brandon Lee pendant que je suis en train de tourner
01:28:20le petit sketch qu'on me demande de tourner
01:28:22c'est à dire que je suis en train de tourner
01:28:24le dernier plan de mon sketch
01:28:26et il y a quelqu'un sur le plateau qui vient me voir
01:28:28en me disant Brandon est mort
01:28:30je dis quoi ? c'est pas possible
01:28:32il y a un truc qui se passe à ce moment là
01:28:34qui est une déflagration parce que
01:28:36son père meurt
01:28:38à 33 ans
01:28:40et on m'annonce la mort de Brandon Lee
01:28:42de manière tragique sur un tournage
01:28:44tué par une balle
01:28:46qui fait écho à un film de Bruce Lee
01:28:48où il y a aussi je crois
01:28:50les gens d'urban
01:28:52mais
01:28:54il y a quelque chose
01:28:56de l'ordre de la fatalité
01:28:58je me souviens très bien de ce moment
01:29:00où on vient me voir, je suis sur un parking
01:29:02je suis en train de tourner un plan
01:29:04où le héros de mon sketch
01:29:06dans l'échronomique on sort par la verrière d'un château
01:29:08et on m'annonce que
01:29:10Brandon est mort
01:29:12et plus tard
01:29:14Silent Hill sera produit par le producteur
01:29:16de The Crow
01:29:18le film sur lequel mort Brandon
01:29:20et il m'explique
01:29:22longuement ce qui s'est passé
01:29:24et dans quelles conditions Brandon est mort
01:29:26et en fait ce qui se passe c'est qu'après je jette
01:29:28mon dévolu sur un acteur qui s'appelle Jason Scott Lee
01:29:30qui vient de faire un film, qui vient de faire
01:29:32une biographie de Bruce Lee, Dragon
01:29:34donc je rencontre
01:29:36Jason Scott Lee qui est partant pour faire le film
01:29:38et puis il y a une obscure histoire de contrat
01:29:40avec Universal, qu'il a signé avec Universal
01:29:42et finalement il ne peut pas le faire
01:29:44et je suis un peu dépité et je reviens
01:29:46à la maison de production
01:29:48à Los Angeles et dans la salle d'attente
01:29:50il y a un jeune mec qui m'attend
01:29:52et qui connait la bande dessinée de Screaming Freeman
01:29:54il est d'origine
01:29:56philippino-grec
01:29:58et ses deux parents sont des champions d'arts martiaux
01:30:00il est lui même
01:30:02il a été éduqué à la dure, à la spartiate
01:30:04par ses deux parents, par son père et sa mère
01:30:06dans le respect des arts martiaux
01:30:08et c'est Marc Dacascos
01:30:10avec qui je vais faire deux films
01:30:12puisqu'il va être Screaming Freeman et puis ensuite
01:30:14il sera l'indien dans
01:30:16Le pacte des loups
01:30:18qu'on voit manier
01:30:20et donc voilà
01:30:22c'est comme ça que ça se passe
01:30:24et ce qui était intéressant c'est que Marc Dacascos
01:30:26comme personne ne le connaissait
01:30:28les gens se désintéressent
01:30:30totalement de mon projet
01:30:32les gens se disent
01:30:34quand c'était Brandon c'était super
01:30:36quand c'était John Scott Lee c'était bien
01:30:38mais maintenant Marc Dacascos, rien à foutre
01:30:40donc les gens se désintéressent totalement
01:30:42du film et on commence le film malgré tout
01:30:44le budget est coupé par
01:30:46quatre, c'est effrayant
01:30:48mais on décide de faire
01:30:50quand même le film avec Samuel Adida
01:30:52et pendant très longtemps
01:30:54les gens ne s'intéressent pas au film
01:30:56et puis on fait un petit
01:30:58montage dans lequel il y a notamment
01:31:00la scène que vous avez montrée
01:31:02et en fait l'intérêt redémarre
01:31:04les gens disent
01:31:06ah cool, un film comme
01:31:08les films de Hong Kong mais qui est tourné en Occident
01:31:10et hop l'intérêt repart
01:31:12et ce qui est marrant
01:31:14c'est que quand j'ai la réunion
01:31:16à Canal+, puisque c'est Canal+, qui finançait
01:31:18le Pacte des Loups
01:31:20et que
01:31:22deux années plus tard
01:31:24j'ai la réunion pour le Pacte des Loups
01:31:26et je dis à un moment donné
01:31:28on me demande
01:31:30mais c'est qui pour jouer l'Indien ?
01:31:32et les mecs autour de la table me disent
01:31:34il va être d'accord ?
01:31:36c'est-à-dire que le mec dont personne ne voulait
01:31:40les gens me disaient
01:31:42non c'est fini, t'as joué
01:31:44un mauvais cheval
01:31:46brusquement je me retrouvais face au financier
01:31:48de Canal+, et quand j'annonçais que c'était
01:31:50Marc Dacascos qui allait jouer l'Indien, c'était comme la réunification
01:31:52des Beatles
01:31:54c'est-à-dire qu'il y avait un truc complètement dingue
01:31:56c'est ça le cinéma, c'est-à-dire qu'un jour
01:31:58vous êtes rien, le lendemain
01:32:00vous êtes quelqu'un d'autre
01:32:02le Pacte des Loups
01:32:04on en parlera aussi juste après
01:32:06pour ceux qui vont rester
01:32:08il y aura aussi un débat
01:32:10mais c'est un moment important en tout cas
01:32:12je me souviens qu'on se disait
01:32:14il doit y avoir un après
01:32:16il y a un avant et un après
01:32:18le Pacte des Loups
01:32:20dans ce moment où vous essayez
01:32:22de renouer
01:32:24des traditions d'un cinéma français
01:32:26d'aventure populaire en y apportant
01:32:28et c'est vrai qu'à l'époque peut-être
01:32:30les gens sont surpris de voir d'un seul coup
01:32:32un Indien débarquer faire du Kung-Fu
01:32:34mais
01:32:36le film a un gros succès
01:32:38mais il n'y a pas d'industrialisation après en tout cas
01:32:40pour vous ou pour d'autres
01:32:42non, parce que c'est le cinéma français
01:32:44c'est un cinéma
01:32:46qui n'a jamais été dans ce qu'on appelle l'exploitation
01:32:48c'est-à-dire si le film a été
01:32:50fait en Italie ou a été fait aux Etats-Unis
01:32:52il aurait engendré des copies, des suites
01:32:54mais en France
01:32:56non, les gens n'ont pas cet instinct
01:32:58c'est-à-dire si il y a quelque chose qui marche
01:33:00ils ne vont pas nécessairement emboîter derrière
01:33:02on peut le percevoir comme une force
01:33:04on peut le percevoir aussi
01:33:06comme un gâchis
01:33:08c'est-à-dire qu'effectivement
01:33:10le film a rapporté
01:33:12énormément d'argent, a marché partout
01:33:14et il continue d'ailleurs à fonctionner
01:33:16j'ai récemment fait une restauration
01:33:18qui d'ailleurs va être montrée ce soir
01:33:20et le film à nouveau ressort partout
01:33:22voilà
01:33:24mais non
01:33:26parce que c'est un film français
01:33:28le film reste finalement sans descendance
01:33:30mais quelque part
01:33:32ça joue en ma faveur
01:33:34parce que le film est resté sans descendance
01:33:36finalement les gens s'en souviennent
01:33:38c'est-à-dire qu'il n'est pas noyé dans la masse
01:33:40souvent il y a des films qui engendrent
01:33:42des tas de copies
01:33:44et ils finissent par être noyés
01:33:46par leur propre progéniture
01:33:48mais ce n'est pas le cas de ce film
01:33:50il sera resté
01:33:52un objet bizarre
01:33:54étrange qui effectivement
01:33:56a accaparé la lumière pendant un moment
01:33:58un peu partout
01:34:00alors je vais vous passer la parole
01:34:02je voulais qu'on parle un petit peu
01:34:04de votre collaboration
01:34:06sur les storyboards
01:34:08notamment avec Thierry Ségur
01:34:10mais il faut passer
01:34:12la parole parce que le temps passe
01:34:14et je voulais qu'on parle de David Wu
01:34:16mais vous l'avez fait
01:34:18donc c'est très bien, on voit son visage ici
01:34:20on va voir ce qu'il y a de travailler avec un monteur
01:34:22et ce qu'il pouvait vous apporter
01:34:24mais peut-être que vous poserez vous-même la question
01:34:26et pour finir je voulais
01:34:28qu'on évoque là rapidement
01:34:30précisément
01:34:32la fin
01:34:34d'un certain cinéma de Hong Kong avec Limbo
01:34:36et une énergie qui
01:34:38se diffuse ailleurs avec RRR
01:34:40Oui, le cinéma de Hong Kong
01:34:42l'acte testamentaire du cinéma de Hong Kong
01:34:44c'est un film qui s'appelle Limbo
01:34:46et qui est véritablement
01:34:48le dernier film de Hong Kong
01:34:50d'ailleurs le film a connu un destin un peu bizarre en Chine
01:34:52il a été interdit à l'exportation
01:34:54par la censure chinoise
01:34:56je pense que c'est un film
01:34:58que le gouvernement chinois ne veut pas voir
01:35:00être diffusé
01:35:02et pendant très longtemps ils l'ont gardé sous le coude
01:35:04en interdisant à ce que le film soit diffusé
01:35:06et finalement
01:35:08le film a fini par sortir
01:35:10un peu partout
01:35:12mais finalement
01:35:14c'est parce que la Chine
01:35:16veut montrer de Hong Kong
01:35:18et veut montrer d'une de ses provinces
01:35:20c'est un film extrêmement organique
01:35:22extrêmement dur
01:35:24c'est un film qui nous remet
01:35:26dans le cinéma de Hong Kong
01:35:28tel qu'il a été à une certaine époque
01:35:30il nous remet dans l'apocalypse
01:35:32parce qu'il y avait quelque chose
01:35:34fondamentalement, on a vu des extraits
01:35:36des films de Hong Kong
01:35:38mais il y avait quelque chose d'assez apocalyptique
01:35:40dans le cinéma de Hong Kong pour une simple raison
01:35:42c'était qu'ils allaient être attachés
01:35:44à la Chine populaire
01:35:46et les gens pensaient que
01:35:48en 1997 les chars allaient rentrer
01:35:50à Hong Kong
01:35:52et tout le monde allait être tué
01:35:54c'est pour ça qu'ils se sont tous enfuis
01:35:56si David Hu
01:35:58a sauté sur Crying Freeman
01:36:00quand je lui ai proposé
01:36:02c'est parce que ça lui permettait d'avoir la carte
01:36:04d'immigration au Canada aussi
01:36:06pas seulement parce que le projet l'intéressait
01:36:08mais aussi pour ça
01:36:10c'est pour ça que John Woo est allé tourner aux Etats-Unis
01:36:12et tous les cinéastes
01:36:14se barraient
01:36:16et donc il y avait ce sens
01:36:18un peu terminal
01:36:20c'est-à-dire que c'est un cinéma
01:36:22qui vivait aussi
01:36:24constamment
01:36:26avec cette idée que tout allait se terminer
01:36:28finalement les chars ne sont pas rentrés à Hong Kong
01:36:30le problème est venu
01:36:32bien plus tard avec la révolte des étudiants
01:36:34on le sait ce qui s'est passé
01:36:36mais toujours est-il
01:36:38que Limbo c'est le dernier
01:36:40film qui montre Hong Kong
01:36:42comme une ville au bord
01:36:44du gouffre
01:36:46finalement
01:36:48son anéantissement par un pouvoir
01:36:50par un pouvoir
01:36:52sans partage
01:36:54qui est celui de Xi Jinping
01:36:56donc Limbo
01:36:58c'est un film extraordinaire
01:37:00et c'est pour moi très certainement le film testamentaire
01:37:02il y aura d'autres films
01:37:04bien faits par des cinéastes de Hong Kong
01:37:06mais à mon avis ce sera beaucoup plus des films
01:37:08nostalgiques
01:37:10des films bilans
01:37:12qu'un film comme Limbo
01:37:14qui encorche en lui
01:37:16la puissance, la vivacité, l'énergie
01:37:18qui était celle du cinéma de Hong Kong
01:37:20Le film date de 2021
01:37:22et vous pourrez le voir demain
01:37:24et Rerer on en a déjà parlé
01:37:26Oui
01:37:28puisque la question qui flotte
01:37:30c'est qu'est-ce qui est devenu
01:37:32cet héritage, c'est-à-dire qu'est devenu le cinéma de Hong Kong
01:37:34très curieusement
01:37:36C'est un cinéma qui a été complètement nivelé
01:37:38par l'industrie du cinéma chinois
01:37:40c'est-à-dire que l'énergie qu'il y avait dans le cinéma de Hong Kong
01:37:42a été absorbée
01:37:44et rendue
01:37:46inoffensive
01:37:48politiquement
01:37:50neutre
01:37:52dans le cinéma chinois d'aujourd'hui
01:37:54parce que tu as continué
01:37:56à tourner
01:37:58les cinéastes de Hong Kong sont toujours en train de tourner
01:38:00mais ce qu'ils font c'est
01:38:02des films qui ne dérogent pas
01:38:04de l'image que la Chine veut projeter
01:38:06d'elle-même à l'extérieur
01:38:08donc ce cinéma
01:38:10est mort, ce cinéma a disparu
01:38:12avec tout son incandescence
01:38:14sa folie, etc
01:38:16c'est un cinéma qui n'existe plus
01:38:18comme je dis bien Limbo est certainement
01:38:20le dernier feu de ce cinéma
01:38:22mais il y a un cinéma qui a récupéré
01:38:24le cinéma de Hong Kong
01:38:26qui a récupéré son énergie
01:38:28ses trucs, ses gimmicks
01:38:30sa façon parfois
01:38:32étonnante de filmer
01:38:34l'action et tout ça
01:38:36c'est le cinéma indien
01:38:38et quand j'ai appelé Rajamouli et qu'il s'est mis
01:38:40à me parler de Bruce Lee, c'était d'une évidence
01:38:42absolue
01:38:44quand j'ai découvert ce film, je l'ai découvert dans
01:38:46une des salles ethniques
01:38:48dans la banlieue parisienne
01:38:50peu de personnes le savent
01:38:52il y a plusieurs cinémas qui passent des films pour indiens
01:38:54qui sont soit en Tamil, soit en Telugu
01:38:56soit en Malayalam
01:38:58dans les grandes salles, Pathé ou Gaumont
01:39:00il y a 3-4 salles dévouées
01:39:02au cinéma indien dans la couronne
01:39:04de Paris
01:39:06et j'avais entendu fortuitement
01:39:08parler de ce film
01:39:10et j'y suis allé un soir avec un pote
01:39:12et on a pris une baffe
01:39:14on a pris une baffe
01:39:16on n'en croyait pas nos yeux
01:39:18on n'en croyait pas nos yeux
01:39:20mais après quand j'ai commencé à analyser
01:39:22la sensation que m'avait procuré ce film
01:39:24qui est inouï, 3 heures
01:39:26de film épique qui se passe
01:39:28pendant la décolonisation de l'Inde
01:39:32avec deux personnages
01:39:34qu'on voit d'ailleurs sur l'affiche
01:39:36un gendarme qui semble travailler pour les anglais
01:39:38et puis un chasseur de tigres
01:39:40qui est le monsieur barbu à côté de lui
01:39:42qui sont en fait des réincarnations des dieux Rama et Hanuman
01:39:44des réincarnations humaines
01:39:46de ces dieux
01:39:48et qui vont donc lutter contre l'occupant anglais
01:39:50et donc c'est un film incroyable
01:39:52c'est un film à la fois épique, mystique, religieux
01:39:54amusant, c'est une bande dessinée folle
01:39:56c'est vraiment un film
01:39:58complet
01:40:00c'est un film qu'on peut voir plein de fois
01:40:02sans jamais s'enlacer
01:40:04et au bout d'un moment en analysant
01:40:06la sensation que ce film m'avait procuré
01:40:08je me suis dit mais en fait
01:40:10c'est l'héritier du cinéma de Hong Kong
01:40:12et le fait qu'ensuite j'ai appelé Rajamouli
01:40:14après avoir regardé tous les autres films qu'il a fait
01:40:16je l'ai appelé et il m'a confirmé
01:40:18au détour d'une phrase
01:40:20que pour lui le monde s'était arrêté
01:40:22en regardant les films de Bruce Lee
01:40:24c'est normal
01:40:26mais le cinéma indien depuis 2013
01:40:28il y a eu une sorte de
01:40:32résurgence
01:40:34c'est vrai qu'avant le cinéma indien c'est un peu
01:40:36l'image qu'on en a, c'est à dire un peu le calendrier des postes
01:40:38avec des gens qui chantent
01:40:40mais en fait maintenant c'est tenu par des vrais cinéastes
01:40:42il y a des vrais stars
01:40:44ils utilisent des techniques
01:40:46très particulières
01:40:48ils sont au niveau
01:40:50où sont les américains
01:40:52c'est sans doute la grande force
01:40:54ce qui les rapproche du cinéma de Hong Kong
01:40:56le cinéma de Hong Kong était auto-suffisant
01:40:58c'est pour ça que c'était un grand cinéma
01:41:00c'est un cinéma qui n'avait
01:41:02qui n'a pas eu besoin pendant très longtemps
01:41:04de s'exporter
01:41:06le public de la colonie
01:41:08hongkongaise suffisait
01:41:10à faire marcher ce cinéma
01:41:12c'est pour ça que ce cinéma a fini par créer une espèce d'écosystème
01:41:14de stars, de techniciens
01:41:16de metteurs en scène avec leur thème
01:41:18avec leur particularisme etc
01:41:20c'est exactement ce qui se passe en Inde
01:41:22ils ont un public tellement nombreux
01:41:24qu'en fait ils sont auto-suffisants
01:41:26ils n'ont pas besoin qu'on aime leur film
01:41:28ils n'ont pas besoin que nous on leur dise
01:41:30ce qu'il faut faire
01:41:32donc un film comme R.R.R. c'est un choc
01:41:34parce que ça ne répond à rien de ce qu'on connait
01:41:38c'est autre
01:41:40et c'est en même temps parfaitement
01:41:42accessible
01:41:44à un spectateur occidental
01:41:46mais il y a le plaisir que moi j'ai ressenti
01:41:48quand j'avais 12 ans en regardant la main de fer
01:41:50d'un dépaysement total
01:41:52d'un exotisme fou
01:41:54qui brusquement vous absorbe
01:41:56et vous emmène dans des territoires
01:41:58qui étaient ceux dont vous rêviez
01:42:00quand vous aviez 12 ans
01:42:02c'est un très grand film
01:42:04si on n'a toujours pas envie de le voir
01:42:06je vous propose de voir la bande-annonce
01:42:08non sous-titrée là tout de suite
01:42:10pour faire la transition avec vos questions
01:42:12ensuite à Christophe Gonzon
01:42:14la bande-annonce non sous-titrée mais
01:42:16que vous allez comprendre assez vite
01:42:18de quoi on parle
01:42:46...
01:42:48...
01:42:50...
01:42:52...
01:42:54...
01:42:56...
01:42:58...
01:43:00...
01:43:02...
01:43:04...
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01:43:08...
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01:44:50...
01:44:52...
01:44:54...
01:44:56...
01:44:58...
01:45:00...
01:45:02...
01:45:04...
01:45:06Voilà, ça sera dimanche, dimanche à 20h45.
01:45:24Je peux vous dire, trois heures, vous n'allez pas les voir passer.
01:45:27C'est inouï, inouï et c'est d'une vraie beauté visuelle, c'est ça qui est extraordinaire.
01:45:34C'est pas du cinéma Fauchemann dans un coin, non, c'est absolument sublime.
01:45:38C'est un blockbuster, comme on aimerait en voir.
01:45:42Et bien, maintenant, vous pouvez avoir des réactions, des questions.
01:45:46Un micro va passer dans la salle.
01:45:53Ah pardon, ici, oui.
01:45:54Bonsoir, merci pour cette masterclass.
01:46:00Toutes ces anecdotes, c'était vraiment très intéressant.
01:46:03Juste pour rebondir sur le cinéma hollywoodien, je ne peux que conseiller la Dénar's Ascension en date,
01:46:09qui est calquée 2898.
01:46:12Je dois le voir mardi soir.
01:46:14Je l'ai vu samedi dernier, c'est bien.
01:46:16La première partie était un peu longue, mais la dernière, après l'entracte, c'est que du plaisir.
01:46:23C'est un blockbuster.
01:46:26Mardi soir, c'est ce que j'ai prévu de faire.
01:46:27Qui mélange aux sciences fictions.
01:46:29C'est la réponse indienne à Dune.
01:46:31Il y a un peu de tout, il y a du Mad Max, il y a du Dune, mais c'est vraiment extraordinaire.
01:46:39J'avais une question très, très précise sur, parlant de l'influence hongkongaise et notamment de la grande importance dans le cinéma hongkongais de John Woo.
01:46:51Quel regard portes tu sur son cinéma aujourd'hui?
01:46:55Depuis, notamment depuis Les Trois Royaumes, Redcliffe et qu'attendre de son propre remake de The Killer avec Omar Sy?
01:47:06Est ce que tu l'attends avec curiosité, impatience, avec crainte?
01:47:13C'est toujours la même chose, je pense que l'âge d'or de John, je le connais vraiment bien.
01:47:18Je connais bien John Woo, puisque j'ai fait sortir ses films en salle.
01:47:23J'ai eu l'occasion de le rencontrer plusieurs fois, etc.
01:47:25C'est quelqu'un que j'admire profondément et c'est un monsieur merveilleux.
01:47:30Maintenant, c'est vrai que son passage à Hollywood, on peut aimer certaines choses et beaucoup moins aimer certaines autres.
01:47:38J'adore Volteface, je pense que c'est un très grand film, peut être le mieux réalisé d'ailleurs qu'il ait jamais fait.
01:47:43Mais c'est vrai que son moment est passé.
01:47:49Je ne dis ça pas comme une considération critique, je dis simplement que c'est
01:47:53il y a les mots de passe et qu'aujourd'hui, je trouve qu'on le traite un peu durement.
01:48:00Par exemple, son film Silent Night, qui a été traité un peu par dessus la jambe, est vraiment un très beau film.
01:48:09C'est un film sans paroles, puisque le héros reçoit une balle dans la gorge et il ne peut plus s'exprimer.
01:48:16Et tout le film est fait sans dialogue.
01:48:18C'est un film vraiment étonnant.
01:48:21Il est sur Amazon, il n'est pas sorti en salles, il est sorti sur Amazon.
01:48:24C'est un film que j'ai beaucoup aimé, mais on sent dans ce film, notamment, une espèce de mélancolie.
01:48:34Une mélancolie un peu mortifère de sa part.
01:48:38On sent qu'il sait qu'aujourd'hui, il est passé de mode en quelque sorte.
01:48:45Mais moi, je continue à l'aimer.
01:48:47J'irai bien sûr voir The Killer maintenant.
01:48:49Est-ce que j'en attends quelque chose ?
01:48:51C'est difficile à dire.
01:48:52C'est difficile à dire.
01:48:55Merci, je vous en prie.
01:48:58Bonjour.
01:48:58Bonjour.
01:48:59Déjà, merci beaucoup pour tout votre travail depuis toutes ces années.
01:49:02Je pense que vous n'imaginez pas l'impact que vous avez eu sur plein de petits cinéphiles du dimanche, comme moi.
01:49:08Je voulais savoir ce que vous pensiez des deux films The Red qui, pour ma part,
01:49:13je trouve, ont apporté quelque chose dans le cinéma d'art martiaux, dans le montage et les chorégraphies, notamment.
01:49:19Les deux films, deux ?
01:49:20Les films The Red.
01:49:23Qu'est-ce que j'en pense ?
01:49:24J'aime surtout le deux.
01:49:27Je trouve que le premier film a fait beaucoup parler de lui.
01:49:31Mais finalement, je n'y trouvais pas...
01:49:33J'avais l'impression de revoir les films comme Tiger Cage ou In the Line of Duty.
01:49:39Cette période-là, avec Donnie Yen et Ian Whooping à la réalisation.
01:49:42Je trouvais qu'il y avait ce côté-là.
01:49:43Mais The Red 2 est un film très impressionnant.
01:49:46Je sais que, quand je l'ai découvert, il y a notamment cette séquence insensée où un type résiste à des vagues d'adversaires
01:49:53en se mettant à l'intérieur du box d'étoilettes d'une prison.
01:49:57J'ai trouvé cette scène absolument incroyable.
01:50:00C'est intéressant parce que c'est un film réalisé en Indonésie.
01:50:06C'est ça, oui.
01:50:07Et il est fait par un occidental.
01:50:10C'est par un occidental qui a bouffé, un anglais, qui a bouffé du cinéma de Hong Kong.
01:50:16Au point de régurgiter.
01:50:18Donc j'ai toujours cette sensation que je fais partie de cette tribu de metteurs en scène
01:50:25qui, à un moment donné, ont absorbé tellement qu'ils sont obligés de régurgiter tout ça.
01:50:29On ne peut pas garder tout ça sur l'estomac, quelque part.
01:50:34Merci beaucoup.
01:50:36Il y a une question...
01:50:38Ah, pardon.
01:50:42En fait, comme on est dans la télé...
01:50:44Vous êtes dans l'ombre, c'est pour ça.
01:50:46Vous êtes de dos, c'est pour ça.
01:50:48Alors, comme on est dans la thématique des arts martiaux, entre autres de Hong Kong,
01:50:52j'ai une question, en fait.
01:50:53Déjà, merci beaucoup pour le pacte des loups, Crying Freeman et vos nombreux films.
01:50:58Vous êtes un puits de science et toujours aussi intarissable, c'est très sincère.
01:51:02Je voulais savoir, hormis Pat Laborde ou Galaxy Railways,
01:51:07qui, je crois, si je ne dis pas de bêtises, avait été envisagé un temps,
01:51:11si vous aimeriez adapter...
01:51:14Alors, je ne parle pas de Silent Hill, dont il y aurait peut-être une suite.
01:51:17Là aussi, je parle toujours au conditionnel, en 2025.
01:51:20Si vous aimeriez adapter un autre manga ou jeu vidéo, genre...
01:51:24Là, pour les arts martiaux, je pense à Coke de combat,
01:51:27Ranma ½ ou Dragon Ball, pour être dans cette thématique,
01:51:29ou, hors thématique arts martiaux, ça peut être un Monster de Urazawa,
01:51:34voire pourquoi pas un Sanctuary, qui était aussi des auteurs de Crying Freeman.
01:51:39Il y a des centaines de mangas que j'aimerais adapter.
01:51:42Je suis un énorme consommateur de mangas.
01:51:44J'ai deux pièces entières, chez moi, entièrement tapissées,
01:51:49de bandes dessinées japonaises, et puis il y a une autre partie
01:51:52où il y a tous les comic books américains,
01:51:53et puis il y a une autre partie où il y a d'autres choses.
01:51:56Ce que je veux dire, c'est que je suis un collectionneur compulsif,
01:51:59et je suis un très gros mangeur, en fait, de culture pop,
01:52:05depuis mon plus jeune âge.
01:52:08Et je continue à absorber énormément de choses,
01:52:12et effectivement, la force du manga,
01:52:15puisque le manga est devenu la littérature favorite des jeunes,
01:52:19aujourd'hui, en France notamment,
01:52:22c'est intéressant, parce que c'est une bande dessinée
01:52:25qui est en noir et blanc,
01:52:27et quelque part, ce qui intéresse d'abord les gens qui le lisent,
01:52:31c'est souvent qu'on me dit, le manga, c'est de la bande dessinée,
01:52:35les gamins aujourd'hui, ils ne savent plus lire un livre,
01:52:37mais en fait, si on regarde attentivement ce que sont les mangas,
01:52:39ce sont d'abord des objets narratifs, plutôt que des objets graphiques.
01:52:44Même si le graphisme est formidable,
01:52:45c'est quand même en noir et blanc,
01:52:47et ce qui ressort, c'est la force des histoires.
01:52:49Et certains ont, si je puis me permettre,
01:52:51parfois un découpage cinématographique intéressant,
01:52:53ce n'est jamais que mon humble avis.
01:52:55Tu sais, quand j'ai décidé de devenir metteur en scène,
01:52:59la première chose que j'ai fait,
01:53:00c'est de faire des storyboards des scènes que j'imaginais,
01:53:05et le manga qui est...
01:53:06Donc, je travaillais avec quelqu'un qui s'appelle Thierry Ségur,
01:53:11qui est un dessinateur important de la bande dessinée en France,
01:53:16et bien, le manga qu'on a disséqué pour savoir comment on allait faire
01:53:21les storyboards, c'est évidemment Akira de Otomo,
01:53:23parce que pour nous, les pages de Akira,
01:53:26c'était littéralement des images qui bougeaient, quoi.
01:53:29Et pour nous, c'était le storyboard parfait.
01:53:31Donc, on a regardé comment Otomo mettait en place ses personnages, etc.
01:53:37Comment il recréait la sensation de vitesse
01:53:39avec simplement des dessins en 2D, quoi.
01:53:42Et pour moi, le manga a toujours été un outil extraordinaire
01:53:51pour transférer certaines idées qui sont purement graphiques à l'écran.
01:53:55Mais je continue à consommer énormément de manga,
01:54:00même si je pense que j'en achète plus que je ne peux en lire, en fait.
01:54:04Mais ça, c'est le problème des collectionneurs.
01:54:08Bonsoir. Vu votre amour pour le cinéma de Hong Kong,
01:54:13vous avez évoqué un peu la petite anecdote avec Wong Kar Wai
01:54:16quand vous l'avez rencontré pour un projet.
01:54:17Je me demandais si vous aviez essayé d'aller tourner là-bas.
01:54:21Non, parce que quand j'ai découvert le cinéma de Hong Kong,
01:54:25il y avait cette date de 1997 qui faisait que les gens se barraient, quoi.
01:54:34Mais j'ai des amis à moi, de très bons amis à moi,
01:54:36qui sont allés tourner un film là-bas.
01:54:39Julien Carbon ?
01:54:40Oui, Julien Carbon, absolument, et Laurent Courtiot,
01:54:43ils sont allés tourner là-bas.
01:54:44Ils y sont allés, ils ont travaillé sur des scripts avec Johnny To
01:54:48et ils ont fait un film là-bas,
01:54:50Les nuits rouges du bourreau de Jade,
01:54:53qui est un très beau film
01:54:56et qui a été un peu, malheureusement, qui est passé un peu sous le radar.
01:55:00Mais eux, ils ont réussi ce coup-là, ils l'ont voulu et ils y sont allés.
01:55:05Mais ça a été, à mon avis, le fruit d'une abnégation de leur part incroyable
01:55:10parce qu'ils me racontaient qu'ils campaient en attendant des réponses de producteurs
01:55:15qui ne venaient jamais.
01:55:16Ils campaient en mangeant des nouilles, des soupes à la nouille.
01:55:20Pendant des mois et des mois et des mois dans des hôtels miteux à Hong Kong et tout.
01:55:25Mais ils y sont arrivés, ils y sont arrivés.
01:55:27Et eux, ils ont vraiment connu la fin du cinéma, de l'industrie de Hong Kong.
01:55:32Le moment où, justement, la date fatidique de 97 arrivait à toute vitesse.
01:55:36Et voilà.
01:55:39Bonsoir, merci beaucoup pour tout cet échange très riche.
01:55:44On n'a pas parlé de musique et moi, c'est quelque chose que je trouve important dans le cinéma.
01:55:48C'est quand même tout ce qui est bande originale
01:55:50et quand je dis ça, je pense vraiment à Silent Hill qui est pour moi la musique.
01:55:54En tout cas, la BO, c'est vraiment un personnage à part entière et il y a beaucoup d'effets sonores.
01:56:00Comment vous appréhendez justement pour vos films un petit peu la musique ?
01:56:03Comment vous imaginez ça ?
01:56:05Là aussi, je suis un gros collectionneur de musiques de films et en particulier de la musique italienne.
01:56:11Ennio Morricone est mon dieu.
01:56:13Il ne s'est jamais passé une journée sans que j'écoute son travail.
01:56:18Moi, j'ai commencé à collectionner les disques de musiques de films italiens
01:56:23parce que j'habitais sur la côte d'Azur, j'allais à Ventimi en train
01:56:26et j'allais acheter les 45 tours dans les boutiques en Italie
01:56:31et que je ramenais, que j'ai toujours d'ailleurs.
01:56:33C'est ça qui est marrant, c'est tout ce que j'ai accumulé quand j'étais môme, je l'ai toujours.
01:56:40C'est toujours dans mes collections.
01:56:42Mais c'est vrai que la musique de films, c'est quelque chose d'extrêmement important.
01:56:45Les premiers émois que j'ai eus, ça a été Sergio Leone et la musique de Morricone
01:56:51et la façon dont la musique était disposée dans les films.
01:56:53Parce qu'aujourd'hui, la musique de films, c'est ce qu'on appelle du wallpaper.
01:56:57C'est-à-dire qu'on tapisse le film avec de la musique.
01:57:02Alors que la force, par exemple, du travail de Morricone avec Leone,
01:57:06c'est évidemment ce qu'on appelle le spotting,
01:57:08c'est-à-dire là où commence la musique et là où elle finit.
01:57:10Ça, c'est vraiment la force de la musique de films pour moi.
01:57:14C'est plus important là où commence une musique que ce qu'elle est réellement.
01:57:19C'est quelque chose de très particulier.
01:57:22Et toujours est-il que oui, je travaille énormément sur les musiques de films,
01:57:27sur les musiques de mes films.
01:57:30D'ailleurs, ça m'est arrivé, par exemple, de proposer à un compositeur
01:57:35de faire la musique de films et finalement de dire non, ça ne marche pas.
01:57:39Par exemple, Crying Freeman, c'était Richard Youn
01:57:42qui a fait la musique magnifique de Bride with White Hair,
01:57:45qui avait fait le premier score du film et ça ne marchait pas.
01:57:50J'avais adoré son travail sur Bride with White Hair,
01:57:55mais malheureusement, ça ne marchait pas avec le film.
01:57:58Et David Vu, qui était là, m'a dit ne t'inquiète pas, etc.
01:58:03Et David Vu, non seulement c'est un fin connaisseur de montage,
01:58:10mais c'est aussi un monteur musique.
01:58:12Et donc, c'est lui qui a mis, par exemple, la musique de Pat O'Hearn,
01:58:19puisque c'est la musique qu'on entendait dans l'extrait.
01:58:22C'est une musique faite par un ancien musicien de Frank Zappa
01:58:27qui s'appelle Patrick O'Hearn.
01:58:28Et en fait, ça m'a été inspiré par le fait que David Vu m'a dit,
01:58:30regarde, qu'est-ce que tu penses de cette musique sur ton film ?
01:58:34Et ça marchait instantanément.
01:58:37Et donc, on est allé demander à Patrick O'Hearn, etc.
01:58:40Donc, la musique de film, c'est un long processus.
01:58:42Parfois, on se trompe.
01:58:44Par exemple, c'est Kanji Kawai qui devait, au départ,
01:58:46faire la musique du Pacte des loups.
01:58:50Et puis, pareil, ça ne fonctionnait pas.
01:58:52Il m'a envoyé deux morceaux.
01:58:54Je les ai mis sur le film et c'était bizarre.
01:58:57Et finalement, c'est Jôlo Duka qui a fait le score.
01:59:02Mais c'est vrai que la musique de film, c'est un processus très particulier
01:59:07parce qu'on peut aimer parfaitement la musique d'un compositeur,
01:59:11mais sans savoir ce qu'il va vous fournir
01:59:13ou ce qui va l'inspirer sur votre travail.
01:59:15Et parfois, il tombe à côté.
01:59:17Donc, je sais que la musique de film, pour moi,
01:59:20c'est un moment qui m'angoisse en général.
01:59:23Pas sur Silent Hill, pas sur le nouveau Silent Hill que je viens de finir,
01:59:26parce que c'est Akira Yamaoka qui est le compositeur des musiques des jeux
01:59:31dont est inspiré ces deux films, qui en fait fait la musique.
01:59:35En fait, j'ai accès aux musiques originales et à toute sa librairie de musique,
01:59:39de morceaux, de variations de morceaux, etc.
01:59:42Donc là, je suis vraiment à confort.
01:59:45Mais en général, par exemple, La Belle et la Bête,
01:59:46ça a été aussi un très gros travail qu'on a fait.
01:59:53Et je sais que le compositeur, je l'ai poussé vraiment à fond.
01:59:56J'avais vu son travail dans une publicité de Prestige pour Dior.
02:00:02Et j'avais trouvé le morceau que j'avais entendu magnifique, donc je l'avais contacté.
02:00:06Mais je sais que ce que je lui ai demandé,
02:00:10je lui ai demandé parfois de refaire certains morceaux cinq, six fois, etc.
02:00:15Je me rappelle d'un soir où je l'ai appelé en lui disant non,
02:00:17le morceau que tu m'as envoyé ne marche pas.
02:00:19Et le mec s'est mis à tomber en larmes au téléphone.
02:00:22Il s'est mis à pleurer, etc.
02:00:23parce qu'il était au bout de sa résistance.
02:00:27Mais c'est vrai que la musique de film, pour moi,
02:00:29ça compte tellement que je suis prêt à aller vraiment à pousser les limites au bout,
02:00:35pour avoir finalement une musique de film que je trouve sans sas.
02:00:41Mais c'est un travail, c'est un travail terrible, la musique de film.
02:00:44Vraiment, vraiment terrible.
02:00:46Et je suis tellement reconnaissant quand je fais Silent Hill de savoir
02:00:52que j'ai simplement à me baisser, à ramasser la musique des jeux,
02:00:55à la mettre dans le film.
02:00:57Parce que c'est vraiment, vraiment, vraiment compliqué.
02:01:00C'est vraiment compliqué.
02:01:01Les gens ne se doutent pas à quel point c'est compliqué
02:01:04et à quel point ça procède de choses qui sont irrationnelles,
02:01:08qui sont de l'ordre de l'impressionnisme.
02:01:11On ne sait pas ce qu'on va avoir.
02:01:12On ne sait pas comment ça va résonner dans notre tête.
02:01:15La musique, c'est quelque chose qui ne se décide pas.
02:01:17Ce n'est pas de l'ordre de la mathématiques.
02:01:20C'est quelque chose de l'ordre de l'inspiration.
02:01:23Et parfois, ça fonctionne ou ça ne fonctionne pas.
02:01:25C'est très compliqué.
02:01:27Merci beaucoup.
02:01:29Alors, deux questions avant de libérer la salle, s'il vous plaît.
02:01:33Bonsoir.
02:01:34Là-haut.
02:01:35Oui, merci pour votre travail de passeur et de cinéaste.
02:01:40J'avais une question.
02:01:41Est-ce que dans les cinémas héritiers de Hong Kong,
02:01:43il n'y a pas aussi le cinéma coréen ?
02:01:46Absolument.
02:01:47C'est l'autre cinématographie qui m'intéresse le plus,
02:01:49à part le cinéma indien.
02:01:51C'est l'autre cinématographie qui me plaît le plus en ce moment.
02:01:55Et c'est intéressant parce qu'au début du cinéma,
02:01:57quand on s'est mis à découvrir les films coréens,
02:02:01à la fin des années 90,
02:02:02en fait, c'était des copies du cinéma de Hong Kong.
02:02:04Et ce n'était pas terrible.
02:02:06Ce n'était pas terrible du tout.
02:02:07Je me rappelle, j'avais vu un film de Sap qui s'appelait Bichunmou.
02:02:09Et je regardais ça en me disant,
02:02:11oh là là, c'est vraiment les mecs qui copient pas très bien.
02:02:14Et puis, au fur et à mesure, ils ont raffiné le truc.
02:02:17Et aujourd'hui, je veux dire,
02:02:19ils font quelque chose qui leur appartient complètement.
02:02:21Et ils ont des immenses cinéastes là-bas.
02:02:24Et ils font non seulement des films,
02:02:25mais également des séries télé absolument fantastiques.
02:02:28Et le cinéma coréen, c'est l'autre cinéma qui m'excite le plus aujourd'hui,
02:02:33à part le cinéma indien.
02:02:34Je continue à regarder ça avec énormément de passion.
02:02:38Vraiment.
02:02:39Merci.
02:02:41Et là-bas ?
02:02:43Alors, en fait, j'aurais une question.
02:02:46Vous avez dit que vous aussi, c'est un peu votre dieu.
02:02:48Alors, quand un grand réalisateur,
02:02:52un réalisateur dont la renommée n'est plus à faire,
02:02:54comme Quentin Tarantino, se moque de Bruce Lee,
02:02:57qu'est-ce que ça vous fait ?
02:02:58Alors, c'est intéressant comme question.
02:03:02D'abord, je connais bien Quentin.
02:03:04Je connais très bien Quentin parce que mon producteur Samuel Adida
02:03:07avait produit True Romance et avait produit Killing Zoe,
02:03:13qui est donc un film qu'il coproduisait avec Quentin.
02:03:16Et c'est également Samuel Adida qui avait sorti en France Reservoir Dogs.
02:03:21Donc, c'est l'époque où moi, je passe à la réalisation.
02:03:23Donc, je me retrouve à Los Angeles et les gens que je fréquente là-bas,
02:03:26c'est Roger Avary, qui d'ailleurs signera le script de Silent Hill,
02:03:31mais aussi en douce a fait les dialogues de Crane Freeman.
02:03:36Et c'est évidemment, Roger Avary, c'est le meilleur pote de Quentin.
02:03:39Donc, on se retrouve en train le soir à Los Angeles
02:03:44avec Julie Delpy et Maria de Medeiros à parler de Sergio Corbucci.
02:03:49Donc, je connais bien Quentin, il est fun, j'adore ce qu'il fait.
02:03:55Il y a un film que je n'aime pas trop, et il le sait d'ailleurs,
02:03:58je lui ai parlé, c'est Kill Bill,
02:04:01parce que ça se moque un peu du cinéma que j'aime.
02:04:04Je ne suis pas très fan de ce film.
02:04:06Le film est brillant, on va pas se leurrer,
02:04:08le film est incroyablement brillant, mais je n'arrive pas à adhérer
02:04:12parce que je trouve qu'il se moque un peu de ce que moi,
02:04:15j'aime vraiment, complètement.
02:04:17Ça me fait un film un peu ricanant.
02:04:19Et maintenant, j'imagine que tu fais allusion à la fameuse scène
02:04:22dans Once Upon a Time in Hollywood, où on voit Bruce Lee.
02:04:26Tu veux que je te dise, moi, cette scène, elle est passée
02:04:30pour une simple raison, c'est que j'adore Bruce Lee.
02:04:33Je connais beaucoup de choses sur lui et je sais que c'était
02:04:35le plus grand crâneur du monde.
02:04:38Et j'y peux rien, je le sais,
02:04:41j'ai rencontré plein de gens qui le connaissaient très bien.
02:04:44Le mec, c'était un poseur de folie, quoi.
02:04:47C'était un crâneur.
02:04:49Et je crois que, et même quand tu regardes ses films,
02:04:52et même quand tu regardes ses films, quand il est enfant,
02:04:54il crâne déjà.
02:04:56Parce qu'il a réalisé des films quand il avait 12 ans.
02:04:59Eh bien, il crâne déjà, c'était un crâneur.
02:05:01Donc, qu'ils le définissent comme un crâneur dans cette scène,
02:05:05ça ne m'a pas choqué outre mesure.
02:05:06C'est vrai que moi, je connais beaucoup de gens qui ont été choqués
02:05:09parce qu'ils ont dit, ah, vraiment, là, Quentin, il va un peu fort.
02:05:13Bruce Lee, il est un peu malmené dans cette scène.
02:05:16Mais personnellement, j'ai tendance à penser qu'il est plus malmené
02:05:19dans Kill Bill, incidemment, parce que le film est un peu ricanant,
02:05:23plutôt que dans Once Upon a Time in Hollywood.
02:05:25Mais il y a beaucoup de choses à dire.
02:05:26C'est-à-dire, après, oui, comment on ressent les choses,
02:05:30selon sa propre perspective, on ne sait jamais.
02:05:33Mais je sais que moi, personnellement, je pense que Quentin
02:05:36est un des plus grands cinéastes actuels.
02:05:39Et Once Upon a Time in Hollywood, ça m'avait séché, quoi.
02:05:42J'ai trouvé ça splendide, de bout en bout.
02:05:45Mais oui, non, cette scène, elle est passée pour moi, elle est passée.
02:05:49Alors, je voulais, on va devoir libérer la salle et je vous demanderai
02:05:52de bien vouloir la libérer.
02:05:54Je voulais remercier Muriel Dreyfus, Laurence Brio et Isabelle Vanini,
02:05:59coprogrammatrice de ce portrait de Hong Kong et pour aujourd'hui,
02:06:03Quentin et Pierre en régie et Nicolas, qui a fabriqué les extraits
02:06:09et qui est actuellement derrière cette caméra, ces deux caméras.
02:06:12Et merci, évidemment, à Christophe Gans qu'on peut applaudir.

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