Anne Lavaud, déléguée générale de l'association Prévention Routière
Anne Lavaud, déléguée générale de l'association Prévention Routière, réagit après l'accident dans lequel sept enfants à vélo ont été blessés, percutés par une voiture, à La Rochelle mercredi 5 juin. Elle appelle à la prudence sur l'âge de la conductrice et souligne l'importance d'abaisser la vitesse en ville.
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00:00Avec notre invitée, on revient François Petit-Demange sur le terrible accident qui a blessé sept enfants à vélo hier matin à La Rochelle.
00:07Ils ont été fauchés par une voiture conduite par une automobiliste de 83 ans.
00:11Pour en parler, nous sommes avec Anne Laveau, la déléguée générale de l'association Prévention routière.
00:16Bonjour Anne Laveau.
00:18Bonjour.
00:19Évidemment, on imagine tous que l'âge de la conductrice de 83 ans peut avoir joué un rôle dans cet accident.
00:25En fait, on n'en sait rien pour l'instant, il faut rester prudent.
00:29Oui, tout à fait.
00:30Pour notre association, c'est l'âge des petites victimes surtout qui nous touche beaucoup
00:34puisque vous savez que notre association, depuis 75 ans, mène des actions dans les écoles.
00:38Chaque année, c'est à peu près 200 000 enfants qui sont sensibilisés par nos bénévoles.
00:44200 000 enfants des primaires et des maternelles.
00:47Il faut le redire, les enfants qui étaient hier en promenade étaient parfaitement encadrés,
00:54avaient un casque, avaient le gilet rétro réfléchissant, tout était parfait de leur côté.
00:58Et en tout cas, c'est à signaler pour ce point-là.
01:02Ensuite, effectivement, la seule donnée tangible que l'on ait sur ce drame, c'est l'âge de la conductrice.
01:08Donc, tout se focalise aujourd'hui sur ce point-là.
01:11Mais on ne sait absolument pas les raisons de cet écart qu'elle a donné à son véhicule
01:16pour aller ensuite percuter ses enfants.
01:20Un âge avancé.
01:21Bien sûr, il faut être très prudent, parce que l'âge n'est pas une maladie.
01:27Et on peut très bien conduire de façon très sûre, quel que soit l'âge.
01:33Et d'ailleurs, vous savez, il faut aller chez les 18-24 ans pour trouver le même taux de conducteurs responsables
01:41des accidents dans lesquels ils sont impliqués que chez les 75 ans et plus, c'est-à-dire 80%.
01:46Et pour le reste de la population, on a 60% qui sont impliqués dans les accidents.
01:52Donc, vous voyez, l'âge n'est pas en doute et en question,
01:55puisqu'on a autant de conducteurs responsables chez les 18-24 ans
01:59que de conducteurs responsables chez les plus de 75 ans.
02:01Et pourtant, on évoque toujours dans ces cas-là d'éventuels examens obligatoires
02:06qu'il faudrait imposer à un certain âge pour continuer à conduire.
02:10C'est une bonne idée pour vous, ça, quand même ?
02:13Pour notre association, on s'est toujours positionnés contre,
02:16parce que même si on remarque que 14 pays européens ont mis en place ce type de dispositif,
02:21alors que ce soit le simple certificat médical, un peu comme celui qu'on demande
02:25pour la pratique du ping-pong ou de quelques sports,
02:28ou bien une visite médicale un petit peu approfondie tous les 10 ans ou tous les 5 ans,
02:33pour notre association, c'est très dangereux ce dispositif-là,
02:36parce que c'est souvent un anesthésiant.
02:38Pourquoi un anesthésiant ?
02:39C'est que souvent, ces pays-là ont pris justement ce type de réglementation
02:44après un drame, sous le coup de l'émotion,
02:46et ont considéré qu'ils avaient traité le problème en mettant en place ce dispositif.
02:51Et d'un autre côté, c'est un anesthésiant du côté des personnes qui passent ces visites médicales,
02:56parce qu'ensuite, si vous voulez, vous ne pouvez plus faire aucune action de prévention à leur égard,
03:02puisqu'ils vous brandissent ce certificat médical en disant
03:04« Écoutez, moi, un médecin m'a dit que je pouvais conduire pour les 10 ans qui viennent
03:08ou pour les 5 ans qui viennent, donc laissez-moi tranquille. »
03:11Vous voyez qu'il faut faire très attention, parce que c'est plutôt un facteur bloquant,
03:15et d'ailleurs, dans les pays européens où ça a été mis en place,
03:18ça n'a absolument eu aucun effet, ni sur la mortalité des seniors, ni sur la mortalité globale.
03:23Il est 7h52 sur France Bleu et France 3,
03:25nous sommes avec Anne Laveau, la déléguée générale de l'association Prévention routière.
03:29Qu'est-ce que vous proposez à l'association Prévention routière pour les personnes,
03:34alors pas forcément les personnes âgées, mais en tout cas les personnes inaptes à la conduite ?
03:39Alors déjà, il faut savoir qu'en France, on a choisi un dispositif
03:43qui n'est pas ce dispositif automatique de visite médicale,
03:46mais nous avons à peu près 4000 médecins agréés sécurité routière sur le territoire.
03:51Leur liste est sur les sites des préfectures,
03:54et il faut savoir que théoriquement, l'État va promouvoir le rôle de ces médecins agréés.
04:02En tout cas, c'est ce qui a été décidé l'année dernière en juillet
04:05dans le cadre du comité interministériel de sécurité routière,
04:08de manière à ce que les gens comprennent mieux le fonctionnement de ces médecins
04:11qui ont été vraiment formés pour mesurer l'aptitude de tout un chacun à la conduite.
04:18Et donc, en réalité, d'ores et déjà, aujourd'hui, vous pouvez,
04:21si vous êtes les forces de l'ordre, ou si vous êtes dans l'entourage d'un conducteur
04:25dont vous avez des doutes sur sa capacité à conduire,
04:29de manière à ce que le préfet convoque cette personne à une visite médicale de sécurité routière.
04:34Et dans ces cas-là, vous aurez un médecin qui sera vraiment en capacité
04:39de mesurer cette aptitude à conduire.
04:41Concernant des enfants à vélo, comme ceux qui ont été victimes de l'accident d'hier matin à La Rochelle,
04:46ce type d'accident avec des enfants à vélo, ça arrive souvent en France ?
04:51Heureusement, ça arrive très rarement.
04:54Il faut rassurer quand même les parents.
04:56Même si ce drame va sans doute limiter la confiance que certains parents vont avoir
05:02dans ces sorties qui sont organisées à vélo, c'est vraiment très très rare.
05:07L'année dernière, on a eu 5 enfants de moins de 13 ans victimes d'accidents de vélo.
05:15Donc vous voyez, c'est très rare.
05:18Mais néanmoins, il faut que cette pratique du vélo soit sérieuse.
05:23Que les enfants respectent, ce qui n'était pas du tout le cas dans cet accident,
05:29mais de manière générale, il faut que les enfants aient accès à des actions
05:33de sensibilisation, de formation, de manière à ce qu'ils connaissent les règles.
05:37Et puis, quand ils sont en dessous de 12 ans, il faut qu'ils circulent avec un adulte.
05:44Mais vous savez qu'il y a un programme qui a été mis en place,
05:47qui s'appelle le Savoir rouler à vélo,
05:49et qui est délivré justement dans les écoles primaires,
05:52avec comme objectif que les enfants puissent aller au collège seuls à vélo.
05:56Et c'est là où effectivement, beaucoup de parents nous disent
05:59« moi je veux bien que mon enfant aille à vélo au collège,
06:03mais il faut qu'il puisse circuler sur des voies qui soient réservées aux cyclistes,
06:08je ne veux pas qu'il circule sur des voies de circulation
06:11qui sont partagées avec les automobilistes, avec les camions, avec les bus, etc. »
06:15Donc il y a quand même une crainte de la part des parents
06:18à laisser leurs enfants partir en solo au collège à vélo.
06:24On peut dire que La Rochelle justement est une ville
06:26où les aménagements cyclables sont plutôt nombreux,
06:29évidemment il n'y en a pas partout.
06:30La ville est aussi entièrement passée à 30 km heure depuis peu,
06:33c'est utile ce genre de mesure ?
06:35Oui tout à fait, et d'ailleurs La Rochelle est une ville
06:38qui a été labellisée par notre association.
06:40Vous savez que notre association a créé un label qui s'appelle
06:43« Villes et villages prudents ».
06:45On a bientôt 500 communes qui sont labellisées sur le territoire,
06:50excusez-moi,
06:52et La Rochelle a un niveau de labellisation qui est au niveau 3 sur 5,
07:00donc c'est vraiment une commune qui agit en termes de sécurité routière
07:04et pas uniquement sur les infrastructures,
07:06elle agit aussi dans les actions de sensibilisation
07:09auprès des différents publics.
07:12Il se trouve en effet que l'emplacement où a eu lieu ce drame
07:15est un emplacement en zone 30 mais sans pistes ou voies cyclables.
07:21C'est vrai que dans ces cas-là, au niveau du partage de la route
07:26qui se diversifie de plus en plus,
07:28on a de plus en plus de modes de déplacement dans les villes,
07:31dans les centres-villes,
07:33peut-être qu'il faut non seulement baisser la vitesse à 30,
07:36mais passer sur ce qu'on appelle des zones de rencontres,
07:39ce sont des zones de partage de l'espace
07:42où finalement on privilégie ce qu'on appelle les modes de déplacement doux,
07:46c'est-à-dire la marche, le vélo,
07:48et la voiture, elle, doit redescendre à 20 km heure.
07:52Avec un inconvénient, c'est qu'il y a encore beaucoup d'automobilistes
07:56qui ont du mal à respecter ce genre de contraintes.
08:00Oui, mais bien sûr, c'est toujours ce qu'on dit,
08:03on dit ne faisons rien parce que les gens ne respectent pas la règle.
08:06Mais il est évident que si vous avez une agglomération à 50,
08:12les gens vont peut-être rouler à 55 ou 60,
08:14si l'agglomération est à 30, ils vont peut-être rouler à 35 ou 40,
08:18si on est à 20, ils vont peut-être rouler à 25 ou 30.
08:21Donc de toute façon, même s'ils ne respectent pas la règle,
08:24collectivement, ils vont abaisser leur vitesse,
08:27et puis il y a aussi le regard social des autres
08:30versus ces automobilistes qui s'autorisent parfois à rouler plus vite.
08:35Mais vous savez, ce n'est pas anodin.
08:37Sans doute que cette voie aurait été à 50 km heure.
08:41Aujourd'hui, ce sont des victimes, ce sont des tués
08:44qu'on pleurerait par rapport à ces enfants.
08:46Parce que dans un accident qui est à 30 km heure
08:50entre un véhicule et un cycliste ou un piéton,
08:54les risques de tuer sont de 10%.
08:57C'est le même accident à 50 km heure,
09:00les risques d'être tués sont de 80%.
09:03Si on descend à 20 km heure,
09:05on réduit également ce risque de mortalité.
09:08Merci Anne Laveau, déléguée générale de l'association Prévention routière.