• il y a 6 mois
Transcription
00:00 [Musique]
00:13 Tu t'inclines et tu la fermes.
00:16 Salope.
00:18 Sale négresse.
00:20 Tes arrières-grands-parents ont la main coupée ?
00:23 Léopold II a une idée géniale.
00:26 Couper la main des nègres.
00:28 Quelle belle époque.
00:30 Je reviendrai m'occuper de ton cas.
00:32 Et cette fois, armée.
00:35 Chut.
00:38 Sale négresse.
00:40 Signe-la, car c'est ton évaluation de fin d'année.
00:44 Mais, ce sont des propos mensongers.
00:48 Je n'ai jamais fait ce que vous signifiez.
00:51 Signe et ne discute pas.
00:54 Sinon, encore un manquement est dehors.
00:59 Après tant de pression, je signe pour prise de connaissance,
01:04 mais avec la boule au ventre.
01:06 Depuis, en arrêt, tellement je ne supporte plus ces humiliations.
01:12 Le collectif Stop 10 est né de mon expérience personnelle.
01:17 Donc, je voulais que mon histoire puisse être un exemple
01:21 pour toutes ces personnes victimes de ces pratiques abusives.
01:26 Et leur donner espoir que c'est en dénonçant qu'on pourra changer les choses.
01:31 Ce n'est pas facile, ce n'est pas évident,
01:34 mais c'est ensemble qu'on pourra y arriver.
01:36 Ici, pour le collectif Stop 10,
01:39 on a l'objectif de pouvoir dans un premier temps sensibiliser,
01:43 d'interpeller, d'accompagner et de soutenir
01:46 toutes ces personnes victimes de ces discriminations,
01:50 de ce harcèlement et de ce mobbing.
01:52 Ce type de violences sont trop présentes au sein de nombreuses entreprises belges
01:57 et je me suis systématiquement retrouvée minoritaire
02:00 dans les différents services dans lesquels j'ai travaillé.
02:03 Aujourd'hui, expatriée en Hollande,
02:07 j'ai découvert ce qu'était un environnement de travail sans violence
02:11 et bien diversifié.
02:13 Je suis valorisée et donc payée à la hauteur de mes compétences.
02:19 L'Ouanga, ingénieure, n'a pas été considérée à sa juste valeur
02:23 malgré l'occupation de poste à responsabilité.
02:27 Lors de ma convocation, devant le grand directeur après un moment d'arrêt,
02:31 j'ai pu systématiquement apporter pour chacune des accusations
02:35 une preuve probante, mais elle pévée.
02:39 Il en ressort juste, "merci, on a bien compris, tu t'es bien défendue,
02:44 c'est ok pour nous".
02:45 Une violence minimisée mais surtout banalisée.
02:48 Yamina, fonctionnaire publique depuis plus de 18 ans,
02:52 accusée sans vérification au préalable.
02:56 Suite à mon évolution en l'espace de trois mois,
02:59 j'ai pu faire valoir mes compétences et ainsi occuper une place
03:03 à un grade supérieur dans un établissement renommé.
03:07 Depuis ce moment, tout a basculé.
03:10 Le harcèlement est entré dans ma vie
03:13 et a fait de gros dégâts psychosociaux et personnels.
03:16 Entre remarques racistes et les micros agressions,
03:21 dont j'ai été victime, j'ai été jusqu'à enregistrer et déposer plainte.
03:25 J'ai obtenu gain de cause auprès de ma direction,
03:29 mais le mal était fait.
03:30 J'ai quitté l'entreprise tellement mon intégrité a été bafouée.
03:34 L'idée de mettre en place cette conférence spectacle
03:38 est tout simplement née du fait que pour sensibiliser,
03:42 pour interpeller, pour dénoncer, il faut réunir les gens.
03:47 On ne voulait pas le faire simplement autour d'une conférence.
03:51 On a voulu apporter cette situation dramatique,
03:55 cette situation percutante à travers l'humour,
04:00 à travers un peu plus de légèreté, à travers de la créativité.
04:04 On a voulu collaborer avec des artistes renommés,
04:08 tels que Pitchi Banda.
04:10 On a voulu mettre en avant un artiste
04:13 pour qui cette question, cette thématique était très importante.
04:18 On a fait appel à Treza,
04:20 qui directement, quand il a pris connaissance de l'histoire,
04:24 de la situation, il a écrit un morceau
04:28 qui décrit vraiment bien la situation.
04:30 Le diplôme ne change pas ta couleur en société
04:33 Pour intégrer le système, désintègre ce que t'aimes
04:36 Montrer le temps, sourire tout le temps, comme magique système
04:39 Le rêve africain, à la France, il se met à nous
04:42 Peut s'envoler comme les pigeons, premiers gaos
04:46 Les harcèlements moraux, les sourires moqueurs
04:49 Ont perforé depuis longtemps mon âme et mon cœur
04:52 Ma peau, toute la couleur du deuil en permanence
04:55 Mon iris cède, mon cœur pleure et je craque par moments
04:58 J'ai le poids du monde sur l'automne, pousse la haine des gens
05:01 La colère des collègues du collège vont briser les jambes
05:05 Alors je tombe une fois, pour l'oeuvre et dix fois
05:08 Je suis fatigué, ils veulent m'achever, crucifier sur une croix
05:11 Qu'on va continuer, ça avant que je naisse
05:14 Ma père déjà, les actes racistes ont brisé ma jeunesse
05:18 J'ai victime de ce que je suis, plutôt de ce qu'ils voient
05:21 Je suis coupable sans jugement, simplement par mes pigments
05:24 Je suis une femme noire, diagrisse d'école
05:27 Mais les clichés, les regards des gens, ne peuvent plus m'empoître
05:30 Je suis un argent, je crée ma société
05:33 Mais les clichés, les regards des gens, ne peuvent plus m'empoître
05:37 Je suis Nathan, j'ai 28 ans, je travaille en cybersécurité
05:40 C'est un domaine où il n'y a pas beaucoup de gens comme des noirs
05:43 ou des personnes afrodescendantes, même du Nord
05:46 Ce que je voulais vous demander, c'est au niveau de
05:49 quand on a des personnes, par exemple, qui sont haut placées
05:52 on essaie de récolter des témoignages de collègues
05:55 ou même de discussions qu'il y a eu pendant des réunions
05:58 parce que moi je suis dans le cas de figure que vous avez raconté
06:01 on reçoit une mise à pied à un certain moment
06:04 qu'on ne nous a pas encore donné
06:07 j'ai réussi à l'esquiver, j'ai mis des prédispositions à des choses
06:10 j'ai aussi des choses que j'ai mis de côté pour me protéger
06:13 j'aimerais entendre ce que vous avez
06:16 ou ce que vous pouvez mettre en place pour ces choses-là
06:19 Humblement, ce serait de savoir en aparté
06:22 quelle est ta situation, si tu veux bien t'ouvrir à moi
06:25 et de voir, comme je l'ai fait avec l'autre personne
06:28 est-ce qu'il y a quelqu'un dans notre réseau qui est avancé dans ton domaine
06:31 parce que moi je peux te donner une réponse de généraliste
06:34 mais il faut aussi avoir des arguments de spécialiste
06:37 et donc par rapport à ça, ça peut être des coaches
06:40 ça peut être des personnes qui sont déjà dans ton domaine, déjà un peu plus avancées
06:43 et donc de pouvoir te donner ce feed-back-là si je peux t'aider
06:46 et tu mets sur la table, pour moi, ce que je disais au départ
06:49 c'est que d'une certaine façon, je réalise de plus en plus ma perception
06:52 surtout avec la crise ukrainienne
06:55 et de voir comment est-ce que dans tous ces pays
06:58 d'un seul coup, tout a été mis sur un tapis rouge
07:01 je suis content pour eux et pour elles
07:04 mais de me dire que c'était possible
07:07 et donc pendant toutes ces années, ça n'a pas été fait pour d'autres
07:10 donc pour moi, ça a été une gifle en me disant
07:13 qu'est-ce que je suis en train de faire comme travail
07:16 c'est de vous amener dans des bâtiments en feu, où vous allez être maltraités
07:19 pas considérés, qu'est-ce que je fais
07:22 et donc par rapport à ça, c'est là où je trouve qu'on a une responsabilité
07:25 de pouvoir justement vous préparer
07:28 trouver les moyens de pouvoir partager ces expériences
07:31 avant que vous ne rentriez dans ces événements en feu
07:34 on va t'attaquer sur plein de choses, le temps que tu assimiles
07:37 les points sur lesquels on t'attaque, c'est trop tard
07:40 tu n'arriveras pas à répondre
07:43 donc tu as UNIA, tu as l'OMRAX
07:46 tu as des associations qui sont là, qui peuvent t'aider
07:49 les syndicats, qui peuvent t'accompagner
07:52 il faut chercher l'information, il faut chercher de l'aide
07:55 c'est pas parce qu'on cherche de l'aide qu'on est faible
07:58 on a besoin parfois d'une béquille pour pouvoir avancer
08:01 et ces associations, ces centres sont une béquille
08:04 pour nous, personnes qui subissons le racisme et la discrimination
08:07 pour pouvoir avancer
08:10 le choix des intervenants panelistes
08:13 c'est tout simplement réalisé sur base
08:16 de leur expertise
08:19 on a fait une sélection de base
08:22 pour avoir plusieurs thématiques
08:25 des juristes, des militants
08:28 des personnes qui ont travaillé dans les domaines
08:31 ou qui travaillent ces questions-là
08:34 ou qui ont participé à des analyses, voire des enquêtes
08:37 généralement les gens qui sont victimes de discrimination
08:40 et en particulier de racisme
08:43 la première chose c'est qu'ils doutent d'eux-mêmes
08:46 et puis ils finissent par stresser, ils finissent par développer d'autres rôles de réflexe
08:49 c'était aussi important pour nous
08:52 d'avoir des personnes qui ont vécu ce genre de situation
08:55 pour pouvoir partager et expliquer
08:58 comment ils s'en sont sortis par rapport à cette situation
09:01 il y a une chose sur laquelle je repère assez facilement
09:04 dans les différents témoignages qui sont partagés
09:07 c'est que les personnes qui vont d'office
09:10 subir les discriminations
09:13 sexistes ou raciales ou peu importe
09:16 il n'y a aucun accompagnement, aucun processus qui est mis en amont
09:19 avant même que ça arrive, alors que l'on sait pertinemment bien
09:22 que ça arrivera. Donc c'est un peu comme si les gens
09:25 étaient littéralement livrés à eux-mêmes et qu'on se disait
09:28 "advienne que pourra"
09:31 c'est la guerre et on les envoie avec des lances pierres alors qu'en côté
09:34 c'est des lances roquettes. Donc ça c'est assez perturbant
09:37 et ça dit quelque chose aussi à quel point
09:40 on continue de percevoir la question des discriminations sexistes, raciales
09:43 et peu importe comme quelque chose de l'ordre du personnel
09:46 de l'interpersonnel et pas du tout comme quelque chose
09:49 de structurel et d'attendu
09:52 d'annoncé et de complètement prévisible
09:55 C'est une expérience vraiment très enrichissante
09:58 et je voudrais remercier l'ensemble des membres du collectif
10:01 Evelyne en tout particulier parce que je pense
10:04 qu'on a besoin de ce genre de moments qui nous permettent de non seulement
10:07 d'avoir déposé la parole mais aussi de s'organiser d'un point de vue
10:10 stratégique et d'un point de vue collectif
10:13 donc voilà c'est la première fois mais j'espère que ce sera
10:16 quelque chose qui va devenir coutumier et un rendez-vous
10:19 pour nous tous et nous tous, nous toutes pardon
10:22 et voilà donc combattre
10:25 les discriminations c'est aussi pour nous le fait de pouvoir créer
10:28 une société dans laquelle chacun d'entre nous aura sa place
10:31 digne et sans
10:34 que celle-ci puisse être éventuellement contestée
10:37 et permettre à nos enfants de pouvoir
10:40 s'imaginer dans chaque rôle sans limite
10:43 à part celle qu'elle et il éventuellement se donneraient
10:46 Mon premier baptême c'était à 20 ans
10:49 Je vois deux files de gens pour sortir de l'aéroport
10:52 Dans l'une des files ça se passait bien, je me dis
10:55 ici des gens respectables, ici des gens bousculables
10:58 Si vous allez du côté ça se passait bien
11:01 Voilà quelqu'un qui vient vers moi, "Monsieur qu'est-ce que vous faites là ?"
11:04 Je fais la file, vous voyez bien, il me dit "Allez de l'autre côté"
11:07 Je dis "Non, comment ce bouscule là-bas, je préfère ici, il y a des gens respectables"
11:10 Et lui il me dit "Monsieur, vous vous êtes regardé ?"
11:13 Et là je me regarde
11:16 Pour la première fois je découvre que je suis noir
11:19 Un jour un élève belge me dit
11:22 "Monsieur arrêtez d'exagérer, vous découvrez que vous êtes noir
11:25 et avant vous pensiez que vous étiez rouge"
11:28 J'ai répondu "Avant, je pensais que j'étais un homme tout simplement"
11:33 Merci à Pete Chibanda pour le spectacle
11:37 Merci à Treza pour le clip "Engagé"
11:40 J'étais là pour partager une partie de mon vécu
11:46 des enseignements et des observations que je tire
11:49 par rapport au travail qui est fait maintenant avec notre association
11:52 ça va faire 6 ans
11:55 la mise en relation entre des candidats et des candidates d'origine étrangère
12:00 et principalement afrodescendantes en priorité
12:03 et des grosses entreprises multinationales ou institutions à Bruxelles
12:06 C'était ça l'invitation, et puis aussi de partager
12:09 certaines données chiffrées parce qu'il y a plein d'études et de recherches
12:12 qui existent déjà depuis une trentaine d'années
12:15 et de pouvoir rendre cela plus visible par rapport au public qui participait ce soir
12:19 A toutes les personnes qui sont harcelées, prenez confiance en vous
12:22 et sachez que vous détenez aussi les clés dans vos mains
12:27 pour pouvoir reprendre le contrôle
12:29 Donc un exemple, l'outil que j'ai partagé avec vous
12:32 essayez de repérer où se trouve le problème
12:35 où est-ce que je peux agir
12:37 si je dois changer ma façon de penser, je changerai qui je suis
12:41 et je ferai entendre ma voix
12:43 Il y avait une volonté de placer au centre le ressenti des personnes
12:48 qui ont vécu des situations de discrimination au travail
12:51 et de les faire agir, de lire à voix, de faire vivre la voix du témoignage
12:57 et que ça percute et que ça interpelle aussi au sein du public
13:01 et c'est pour ça qu'il y a eu cette volonté de faire se lever les personnes
13:04 et prendre la parole d'une manière un peu forte
13:07 pour annoncer le débat et changer un peu les dynamiques de ce genre de conférences
13:11 et la rendre un peu plus active on va dire
13:14 Je ne vais pas dérouler tout ce que j'ai fait contre le racisme
13:20 et surtout pour faire de telle sorte que vous les jeunes
13:25 quand demain vous arrivez vous puissiez aussi dire
13:28 j'ai fait ça pour que le racisme ne passe pas
13:31 en aidant les autres, j'ai fait ça
13:34 et je suis même fier d'entendre toutes ces jeunes dames
13:39 qui sont quasi celles qui vont soigner ceux qui souffrent de ce problème de racisme
13:45 Je m'inquiète un petit peu de effectivement
13:47 est-ce que l'état prend ses responsabilités
13:50 pour que toutes ces personnes qui commettent des actes de racisme
13:57 il faut quelque chose, il faut que les gens se sentent inquiétés quand même
14:01 et qu'ils arrêtent d'agir en toute impunité
14:05 Aujourd'hui ces micro-agressions, ces discriminations etc.
14:09 impactent, on peut ne pas le sentir tout de suite
14:12 mais parfois avec le temps ça impacte
14:14 donc prenez soin de vous
14:17 s'organiser, aller voir les syndicats, lutter, ok mais c'est pas obligatoire
14:23 la première chose c'est de faire le point avec vous-même
14:25 de quoi j'ai besoin là
14:27 et c'est pas obligatoire, on peut et on peut le faire plus tard
14:30 Je me suis pris une vraie claque
14:32 je savais déjà que le racisme était un cancer de civilisation
14:34 je le vois sur les réseaux sociaux, je le vois tous les jours
14:37 mais les témoignages que j'ai entendus ce soir m'ont littéralement bouleversée
14:41 et je me dis plusieurs choses
14:43 lorsqu'on est confronté à ces discriminations
14:45 il ne faut jamais laisser passer
14:47 parce qu'on est tous responsables du système
14:49 chacun, à notre façon, on peut agir
14:51 et refuser ces discriminations
14:53 c'est construire ensemble une autre démocratie
14:55 On a fait ce soir un appel aux dons
14:57 pour soutenir les personnes qui sont victimes de ces pratiques abusives
15:02 pour les aider, les accompagner dans leur combat
15:05 pour faire face aux professionnels qu'elles auraient besoin
15:10 avocats, psychologues, thérapeutes
15:13 pour tenir le coup, pour essayer de poursuivre leur combat
15:18 et donc on a fait cet appel aux dons
15:20 donc si vous voulez nous soutenir, si vous voulez nous aider
15:22 si vous voulez contribuer à notre histoire
15:26 n'hésitez pas à faire un don
15:29 [Musique]