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00:00Voilà, on va s'atteler à décrypter, évidemment, les enjeux après cette folle soirée avec vous, Jean-Christophe Gallien, politologue.
00:08Merci d'être avec nous. Je disais folle soirée pour tous ceux qui l'ont suivi de près ou de loin.
00:12On a vu la sidération sur les plateaux, pour les commentateurs, évidemment. Emmanuel Macron a pris tout le monde de cours.
00:18Il a fait de ce scrutin et de ce résultat un sujet national, finalement.
00:24Il le fait dans un contexte, effectivement, qui était déjà nationalisé, mais comme dans les 27 pays européens,
00:31où les enjeux étaient à 80% thématiques des enjeux nationaux, mais qui sont nationaux parce qu'Europe est nationale aujourd'hui, ça fait un.
00:38Et puis, après le reste, il y avait 20% d'internationale, la guerre à Gaza, les relations entre la Chine et les États-Unis, peu importe.
00:43Là, pour le coup, c'est une autre nature. C'est quelque chose de très différent parce que, à mon avis, ça repose sur trois paramètres principaux
00:51qui sont... Alors, selon qu'on se situe favorablement auprès d'Emmanuel Macron ou contre lui, il y a une immense majorité aujourd'hui qui se pose la question de pourquoi.
00:59C'est ces trois éléments qui touchent à, un, l'idée qu'il a le droit. Oui, effectivement, il peut le faire.
01:04Il met des horloges constitutionnelles. Constitutionnellement, il a le droit de le faire.
01:07C'est assez inusité sur une élection comme l'élection européenne, surtout le soir même, intervenir à ce point-là comme ça.
01:12Mais ça veut dire quand même que c'est un choix d'homme d'État.
01:15Alors, est-ce qu'on peut se poser en homme d'État dans un contexte où on réagit immédiatement à une élection et qu'on est dans un contexte où la France n'est pas tout à fait dans un contexte normal ?
01:25Un, pourquoi ? Parce que les élections européennes, ça veut dire qu'il y a un agenda européen qui s'enclenche immédiatement derrière,
01:29qu'un certain nombre de décisions sont prises à l'intérieur de l'appareil européen.
01:32Et quand on est en élection, il n'y a pas d'autres pays qui vont le faire.
01:34Les Belges ont voté le même jour. Ils vont construire un gouvernement, mais ça va être une autre nature.
01:38En France, là, on va avoir une élection pendant cette période, présidence de la Commission, un certain nombre de points.
01:42Donc l'agenda européen, où on était déjà affaibli par nos résultats...
01:45On l'a rappelé il y a quelques instants, c'est un agenda très serré en plus.
01:47Exactement, très serré, qui obéit à des règles.
01:49La dernière fois, ça avait duré dans la longueur parce qu'il n'y avait pas d'accord.
01:52Donc espérons pour nous, presque, que ça dure un peu longtemps pour qu'on puisse intervenir dans ces choix.
01:56Parce que ce n'est pas simplement présidence de la Commission, c'est aussi ensuite d'autres grandes décisions qui sont prises.
02:00De ce point de vue-là, il y a les Jeux olympiques qui arrivent derrière.
02:04Les Jeux olympiques, c'est un grand moment.
02:05Un grand moment qui va devenir une incarnation française à l'intérieur de l'espace mondial, pas européen cette fois-ci.
02:12Mais c'est aussi un moment qui a nécessité une grande organisation, des efforts, des sacrifices entre deux points.
02:17Et qui, là, vont être largement quand même...
02:20Tout le monde est surpris par ce choix dans le calendrier des Jeux olympiques.
02:24Je crois que c'est une des réactions notamment d'Anne Hidalgo qui a dit « surprenant » comme moment.
02:28Madame Hidalgo, les Parisiens, les Français, n'importe qui, les athlètes, peu importe.
02:32On est dans un contexte qui méritait presque une...
02:34Je ne dis pas une sanctuarisation, si vous voulez, quelque chose qui fasse une pause dans un moment,
02:39dans une intensité politique française qui a déjà été mise à ruse d'épreuve,
02:42pour des raisons de certain nombre de textes.
02:44Voilà, on passera là-dessus et c'est important.
02:46Est-ce que c'est un homme d'État qui pratique à ce moment-là ce genre de choix ?
02:50Après, il y a un choix quasi démocratique de mon point de vue sur l'idée que,
02:54oui, peut-être le contexte politique, il était compliqué depuis des mois, des mois.
02:58Mais ça fait des mois qu'il est compliqué, majorité relative,
03:00pratiquement depuis la naissance de la majorité relative à l'Assemblée nationale en 2022.
03:04Donc ça remonte à un certain nombre de temps.
03:06Pourquoi on doit le faire à ce moment-là, dans ce contexte-là, dans un temps aussi rapide ?
03:09Trois semaines à la fois pour son propre camp et un certain nombre d'acteurs autour de lui étaient contre.
03:13Monsieur Attal, semble-t-il, qui ne dit pas grand-chose depuis un certain temps,
03:16mais d'autres aussi étaient contre.
03:17Et puis les oppositions, on les respecte un petit peu quand même, malgré tout, dans ce contexte-là,
03:21même si on veut faire de la tactique politique.
03:23Qui plus est son principal ennemi, celui qui est censé être celui qui peut être embarrassé,
03:26et peut-être le parti le plus préparé à cet univers-là.
03:29Et en plus, derrière, je pense qu'il y a, vous savez, l'agitimité du président de la République,
03:32il est personnel en France, puisqu'il a une élection directe avec les Français.
03:35Il est le président de la République française, mais il n'est pas un président du Conseil,
03:38il n'est pas un premier ministre issu d'une majorité, d'un régime parlementaire.
03:42Il a une relation directe avec les Français.
03:44Dans ce contexte-là, ça mérite quand même un regard qui n'est pas simplement de dire,
03:47voilà, écoutez, vous avez choisi ça, et bien maintenant, moi, je veux clarifier,
03:51parce que je ne comprends pas très bien votre choix, finalement, en réalité,
03:53dans un contexte où vous avez, vous m'avez élu président de la République,
03:56puis ensuite, vous m'avez donné majorité, puis maintenant, vous vous dites, finalement,
03:59qu'avec ma propre majorité, plus mes alliés, je ne pèse que 15%, et bien ça ne va pas.
04:03Il faut clarifier tout ça.
04:04Ça ne marche pas comme ça, de mon point de vue, la politique, dans un contexte de ce type.
04:07Et on peut s'interroger, que ce soit, évidemment, les acteurs politiques,
04:10sa propre famille politique, et les Françaises et les Français qui, eux-mêmes,
04:14vivent une période où, rappelons-le, dans ce contexte-là,
04:17qu'est-ce qui se passe économiquement ? C'est difficile de travailler.
04:20Notre élection, qui facilite notre élection, avant qu'on ait, ensuite,
04:23quelque chose qui touche aux Jeux olympiques.
04:24Olav Scholz, celui qui est le chef du gouvernement allemand,
04:27a exclu cette option de législative anticipée.
04:30Alors que lui-même a subi une défaite.
04:31À peu près la même défaite qu'en France, effectivement.
04:34On va peut-être regarder le tweet du chef de l'État, Emmanuel Macron, ce matin, sur son compte X,
04:38qui disait avoir confiance en la capacité du peuple français
04:42à faire le choix le plus juste pour lui-même et pour la génération future.
04:45Ma seule ambition est d'être utile à notre pays, que j'aime tant.
04:48J'aimerais recouper, aussi, à ces propos de Stéphane Séjournet,
04:51ministre des Affaires étrangères, patron du Parti Renaissance,
04:54qui lançait, hier soir, un appel, je le cite, à la mobilisation de toutes les forces républicaines.
04:58Les députés sortant du champ républicain pourront ainsi bénéficier de notre investiture.
05:01S'ils sont en accord avec le projet présenté, ils y croient encore.
05:07En tout cas, ils se positionnent, en tant que tels, pour la suite.
05:11Le paré qui est fait, là, c'est lequel, aujourd'hui ?
05:15C'est législative anticipée, la majorité va la remporter.
05:18On peut se poser la question de savoir de quoi il s'agit.
05:21Est-ce que c'est de tenter de gagner une nouvelle bataille législative ?
05:26Avec qui ? Comment ? Dans quelle situation ? Je ne comprends pas ce choix.
05:31En tout cas, dans cette urgence, dans cette immédiateté, quasiment,
05:35alors que la vraie dynamique électorale, pour le coup, c'est en clair,
05:38ça n'existe nulle part dans d'autres pays européens,
05:40avec une expansion croisée, si vous voulez, qui n'est pas simplement une expansion électorale.
05:43C'est une réalité sociotypique.
05:45Dans toutes les catégories d'âge, le RN gagne.
05:49Et aujourd'hui, chez les jeunes qui sont les primo-votants,
05:52ce qui dynamise un parti politique, mais jusqu'aux retraités.
05:54Pour la première fois, 28% des retraités dans ce pays ont voté pour le RN.
05:5894% des communes ont placé en tête.
06:01Jordan Bardel n'a pas 85%.
06:03On va peut-être regarder cette carte bleu-marine,
06:05qui parle d'elle-même finalement, pas besoin de voir des chiffres.
06:08Elle se suffit à elle-même, cette carte tout en bleu,
06:11avec ses tout petits points ici et là, rouges notamment.
06:15Est-ce que ce n'est pas ignorer, dans le fond,
06:18la volonté et le choix que les Français ont fait lors de ces élections européennes
06:22et qui pourraient se transformer les 30 jours prochains ?
06:24Et vous pourriez rajouter quelque chose, si tu veux.
06:2641% des actifs du secteur privé.
06:27Ça veut dire beaucoup de choses.
06:29Il y a une expansion d'un côté et une rétraction de l'autre.
06:31Je ne juge pas, ce n'est pas un choix de fond.
06:33Mais de fait, ça veut dire quoi ?
06:35Soit vous avez envie d'essayer de résister à ça,
06:37c'était le message pas très clair hier soir.
06:40Et qui plus est, c'est dans une urgence qui n'est pas une urgence...
06:43C'est encore le renouveau du « moi ou le chaos »
06:46qui n'a pas fonctionné pendant la campagne.
06:47Ce « moi ou le chaos », ça n'a pas fonctionné.
06:49Hier soir, on est dans cette continuité.
06:52Ou alors, ou alors...
06:53Et à ce moment-là, c'est un calcul cynique,
06:55tactique, politique, comme M. Sanchez l'a fait en Espagne.
06:59Mais il avait une vraie majorité potentielle.
07:00Il s'est sauvé comme ça.
07:01Mais pour le coup, ça serait pire.
07:03C'est-à-dire qu'on veut donner quasiment les clés de la majorité.
07:06Et quelque part, dans les discours de celles et ceux
07:08qui venaient de la majorité hier sur les plateaux,
07:10c'était un peu ça.
07:11Maintenant, c'est à votre tour.
07:12Vous allez pouvoir montrer ou pas si vous êtes capable de gouverner.
07:14Donc on est capable, à ce moment-là,
07:15de donner quasiment au seul parti qui est préparé,
07:17je vous dis, pour affronter cette élection quasiment,
07:19le RN, les clés du pouvoir.
07:21Soit.
07:22Mais ça veut dire qu'on veut organiser pendant deux ans
07:24une cohabitation guérilla pour essayer de montrer
07:26que ce parti n'est pas capable de gouverner.
07:28C'est irrationnel pour moi.
07:31C'est-à-dire que, pour le coup,
07:33peut-être qu'il y avait besoin d'un moment de clarification politique.
07:36Mais pas dans cette urgence-là.
07:38Parce que ça veut dire que ça dure depuis un moment.
07:40Avec un respect du tempo,
07:42à la fois politique, je vous le dis, étatique,
07:44mais aussi contextuel de ce pays pendant ce cadre-là.
07:46International aussi.
07:47La France ne vit pas toute seule.
07:49Ni en Europe, ni ailleurs.
07:50Dans un contexte qu'on connaît bien.
07:51France 24 le couvre tous les jours.
07:53Ce monde bouge de partout.
07:54Il y a des conflits partout.
07:55Des conflictualités partout.
07:57Comment la France peut s'offrir,
07:59s'offrir, c'est même se contraindre
08:01à avoir trois semaines de quelque chose qui va être
08:03finalement une élection
08:05comme un speed dating quasiment,
08:07qu'on ferait comme ça dans un coin de table,
08:09comme on recrute aujourd'hui les enseignants quasiment
08:11quand on veut faire qu'on en pénurie d'enseignants.
08:13C'est compliqué.
08:14Et c'est ou, à mon avis, un pari fou,
08:18ou du cynisme tacticien.
08:20L'un et l'autre, de mon point de vue,
08:22ne sont pas à la hauteur de la situation.
08:24Président Pierrotman a dit, M. Ruffin,
08:27hier soir, Kamikaze fou.
08:29Oui, M. Glucksmann, qui est une tâche indélébile.
08:32C'est un pari risqué.
08:34M. Ford également ce matin qui avait du mal
08:36à contredire les propos de la LFI
08:38et dont on sait pourtant
08:40les divergences ces derniers mois.
08:42Bien sûr.
08:43Parce que tous ces partis politiques
08:45qui sont normalement dans la situation de vivre,
08:48effectivement, d'être prêts,
08:49ils sont normalement prêts.
08:50Malgré tout, on sort d'une élection
08:52qui a été une vraie élection,
08:53contrairement à ce qui a été dit.
08:54Une vraie élection, on a parlé des sujets.
08:56Ce qui s'est passé autour de nous,
08:58il y a eu des tendances, il y a des gagnants et des pernants,
09:00comme dans toute élection.
09:01Il n'empêche que derrière,
09:02réaccélérer le tempo, si vous voulez,
09:04de cette manière-là,
09:05c'est à la fois obliger, évidemment,
09:07tous les partis politiques à se reconfigurer,
09:09éventuellement faire des alliances, des unions.
09:11Mais surtout, je vous le dis,
09:12quelque part, on sent bien que le message,
09:14ce n'est pas un message positif
09:17pour dire on va résister.
09:19Mais à quoi d'ailleurs ?
09:20On ne sait pas exactement ce que ça veut dire.
09:21C'est quoi l'arc républicain ?
09:22Est-ce que ça va des bords, des LR
09:25qui ne veulent pas travailler avec la majorité présidentielle
09:28ou ce qu'il en reste,
09:29jusqu'au bord des Verts et du Parti communiste,
09:33mais surtout pas LFI,
09:34parce qu'on ne pourrait pas travailler ?
09:35C'est très compliqué.
09:36On ne sait pas dire ces choses-là.
09:37Et donc, une élection, c'est une élection.
09:39Il faut la préparer.
09:40Il faut lui donner du temps.
09:41Il faut donner aux Français leur capacité
09:43de pouvoir rentrer dans cette élection.
09:45Là, on est dans un moment
09:47qui ajoute de la crise à la crise,
09:49dans un contexte où, encore une fois,
09:50nous ne sommes pas tout seuls,
09:52nous ne vivons pas tout seuls
09:53dans un moment assez historique à affronter,
09:55qui aurait mérité un petit peu autre chose
09:57comme temps de préparation,
09:59parce qu'on nous l'a assez dit.
10:00Il y a des problèmes de sécurité.
10:01Il faut faire l'union.
10:02C'est un moment de concorde.
10:03On a vu arriver la flamme olympique.
10:05Tous ces grands messages,
10:06finalement, d'un seul coup, d'un seul,
10:07ils sont évacués de la table.
10:09Est-ce que c'est ça, renverser la table ?
10:11C'est un peu dommage.