Au lendemain du second tour des élections législatives, avec la victoire du Nouveau Front Populaire et le RN qui arrive en 3e position derrière le camp de la majorité présidentielle, écoutez l'interview de Aurore Bergé, Ministre déléguée chargée de l'Égalité entre les femmes et les hommes et de la Lutte contre les Discriminations.
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00:00Il est 9h19, bonjour Aureberger, vous êtes notre ministre délégué chargé de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations.
00:10Êtes-vous en capacité de faire vivre un grand groupe central et d'imposer un premier ministre ?
00:14Imposer un premier ministre, je ne sais pas si c'est le bon terme. J'espère en tout cas qu'on sera en capacité d'avoir une coalition, qu'on regarde
00:22aujourd'hui un peu froidement et avec plus de recul les résultats. Déjà on est très très loin de ce qu'on nous prédisait
00:28puisqu'au soir de la dissolution on nous prédisait notre disparition. C'est pas ce qui s'est passé, on le doit à la mobilisation qu'on a eue
00:35et de l'ensemble évidemment de nos candidats et du premier ministre. Après, je crois qu'on peut encore former cette coalition,
00:43trouver des gens raisonnables, responsables, qui peuvent vouloir partager un projet de réforme, de transformation du pays
00:50qui ne soit évidemment ni celui du Rassemblement National puisque ce risque est totalement et définitivement écarté
00:57et heureusement ni celui du Nouveau Front Populaire.
00:59Avec qui et en allant d'où à où ? Essayons d'être précis parce que vous nous dites oui, le groupe central peut exister donc on a envie de vous dire, donnez-nous la matière.
01:08Déjà il continue d'exister, les Français ont décidé que ces idées continuent à exister même si je n'ignore pas qu'on a évidemment perdu un certain nombre de députés et de sièges.
01:16Quid par exemple des Républicains ? Est-ce que les Républicains veulent rester uniquement d'une force qui serait une force réduite mais une force d'opposition et d'opposition systématique ?
01:26Ou vous vous adressez à eux directement ce matin ?
01:28Oui, oui parce que je crois que...
01:29En leur disant on a un parcours à faire ensemble dans les circonstances historiques que nous traversons ?
01:34On a des circonstances, vous le dites vous-même, qui sont des circonstances inédites et historiques.
01:37Est-ce que ça veut dire que chacun doit rester enfermé dans son parti actuel et dans son projet actuel ?
01:43Ou est-ce que ça veut dire que ces circonstances inédites doivent permettre de générer des coalitions qui le sont tout autant ?
01:48Moi je l'espère parce qu'à la fin sinon il se passe quoi ?
01:50Il se passe un Nouveau Front Populaire qui est particulièrement divisé en son sein, on le sait bien.
01:55Ils se sont alliés au moment des élections alors que quelques semaines avant ils s'entretuaient au moment des élections européennes
02:01avec une violence d'attaque notamment à l'encontre de Raphaël Lutzmann de la part de la France Insoumise.
02:07Je crois qu'il n'a pas totalement oublié et il a bien raison de ne pas l'avoir oublié.
02:11Et avec des écarts...
02:12Vous lui dites quoi Raphaël, il vient avec nous ?
02:14Je dis, est-ce que les autres sont en capacité demain de gouverner ? Non.
02:18Personne n'est en capacité de toute façon de gouverner seul, le Nouveau Front Populaire ça fait pas 289 députés.
02:23Par contre ça fait 289 députés et même bien au-delà qui s'opposeraient demain à leur projet au sein de l'Assemblée Nationale.
02:30Donc ça veut dire que de toute façon chacun doit être en capacité de créer du compromis et d'aller au-delà de lui-même.
02:37Sinon personne ne résistera et ce sera la quatrième avec des gouvernements qui seraient renversés de manière assez systématique.
02:44Si je vous dis que c'est déjà la quatrième, est-ce qu'il vous arrive de vous poser des questions sur ce qui se passe dans la tête du Président de la République ?
02:50Non mais moi je ne fais pas de psychologie, ce que je sais c'est que là où tout le monde considérait que c'était une folie
02:56et en vérité on voit bien que ça n'est pas ce qui s'est produit pour la majorité.
03:00Ça a été difficile, c'est certain que ça a été difficile mais on a un socle qui revient aujourd'hui à l'Assemblée Nationale
03:08et heureusement, et on a totalement écarté le risque d'un RN avec une majorité absolue.
03:13Encore une fois, le soir du premier tour c'est ça qu'on nous disait, ça y est, ils sont là, ils sont aux portes du pouvoir
03:18et dans une semaine ils ont gagné, ça n'est pas ce qui s'est produit.
03:20Votre projet central, il va de la droite en incluant l'ancien Premier Ministre Edouard Philippe qui vous a rejoint mais qui fait partie de la famille maintenant
03:27et il va donc jusqu'à Raphaël Glucksmann et au Parti Socialiste, je vous ai bien compris.
03:30Il y a un moment où il faut mettre des noms et...
03:32La question ce n'est pas forcément les noms et de savoir qui sortirait du chapeau miraculeusement pour devenir Premier Ministre.
03:38Ça se termine par ça.
03:39J'entends bien mais là ce que les Français se disent, c'est aujourd'hui personne n'est en capacité de gouverner.
03:44C'est ça qu'ils lisent des résultats, ils savent les lire aussi bien que nous.
03:47Et donc ils voient bien que personne n'est en capacité de gouverner seul et qu'on a un RN pour le coup dans l'incapacité de le faire et tant mieux
03:54et un nouveau Front Populaire qui ne sait pas compter jusqu'à 289 et qui n'a aucune possibilité de s'élargir, aucune possibilité de s'agrandir
04:02voire même un risque de rétrécissement puisque des divisions en sont sains.
04:06Les seuls qui sont en capacité aujourd'hui de s'élargir, ça peut être ce Bloc Central.
04:11Avec évidemment beaucoup de conditions, il faut beaucoup d'humilité à partir du moment où évidemment nous sommes les sortants de manière évidente
04:19mais nous revenons et nous revenons quand même avec beaucoup de députés.
04:22Mais on a cette capacité, nous, potentiellement à s'élargir.
04:25Si on ne le fait pas, le risque c'est un vrai risque d'instabilité parlementaire et gouvernementaire.
04:30Je ne fais pas de philosophie mais comment expliquez-vous l'incroyable bouleversement que nous avons vécu en une semaine ?
04:36Vous vous interrogez ? Vous êtes ministre ?
04:38Bien sûr, bien sûr.
04:39Il faut avoir un système de valeur quand on accepte de prendre des charges comme la vôtre.
04:43Déjà, je crois qu'il y a eu justement un système de valeur qui a tenu dans notre pays.
04:46C'est-à-dire que je suis ministre aussi en charge de la lutte contre le discrimination, le racisme et l'antisémitisme.
04:51J'ai vu énormément de Français angoissés, angoissés comme jamais en fait dans cet entre-deux-tours,
04:56qui avaient peur de ce qui pouvait arriver, qui avaient peur des majorités qui pouvaient sortir,
05:00qui avaient peur du projet politique qui allait l'emporter dans notre pays.
05:04Oui, sauf que, pardonnez-moi, mais les Européennes plus les législatives hors berger, ça fait deux baffes que vous envoient les électeurs.
05:10Non mais attendez, est-ce que c'est une victoire ? J'aurais bien normal de vous répondre que c'est une victoire.
05:15Mais ça veut dire...
05:16Vous pouvez nous demander si vous avez compris le message en fait. Et si oui, quel est-il ?
05:19Mais on nous prédisait quand même une disparition absolue.
05:21On nous disait que nos idées étaient bonnes à mettre à la poubelle.
05:23Je ne crois pas que c'est ce que nous ont dit les Français.
05:26Et après, est-ce qu'il y a un autre projet qui est en capacité d'avoir une majorité ?
05:30Je ne crois pas que le projet du Nouveau Front Populaire, par exemple, l'abrogation de la loi Isis et l'immigration,
05:34il n'y a pas de majorité à l'Assemblée Nationale pour le permettre.
05:37Les hausses d'impôts assez spectaculaires qui étaient prévues, il n'y a pas de majorité à l'Assemblée Nationale pour le permettre.
05:44Or hier, qu'est-ce qu'il se passe ?
05:46Le premier qui s'exprime pour le Nouveau Front Populaire, comme d'habitude, s'appelle Jean-Luc Mélenchon.
05:49Celui qui dit, de toute façon, c'est la France insoumise qui décide à la fin et qui gagne à la fin,
05:54c'est évidemment ce que nous redit Jean-Luc Mélenchon.
05:56Et qui dit, comme soi-disant compromis, c'est mon projet, rien que mon projet qui sera appliqué.
06:01Mais son projet, rien que son projet, ça ne fait pas une majorité dans le pays et ça ne fait pas du tout une majorité à l'Assemblée Nationale.
06:07Donc ça veut dire qu'en s'enfermant de cette manière-là, il garantit que le Nouveau Front Populaire ne puisse pas gouverner.
06:12Maintenant, on fait quoi ? Qui doit être Premier ministre, selon vous ?
06:15Mais ça, il faut déjà...
06:16Est-ce que c'est une réponse simple ?
06:17Réponse simple, elle est malheureusement un peu plus complexe parce qu'on saura sans doute fin de semaine ou début de semaine prochaine
06:22le rapport de force définitif qu'on a au sein de l'Assemblée Nationale.
06:25Quels sont les groupes ? Comment ils sont composés ?
06:27Vous savez, à l'Assemblée Nationale, ça se compte par groupe.
06:29Les intergroupes, les coalitions, ça n'existe pas à l'Assemblée Nationale.
06:32Donc, que pèse chacun des groupes ?
06:34Et éventuellement ensuite, que pèse chacune des coalitions pour ensuite gouverner ?
06:38Et autour de quel projet ?
06:39Si chacun s'arrête au projet qu'il a présenté aux Français,
06:42eh bien là, c'est sûr que personne, personne demain, encore une fois, ne sera en capacité de gouverner,
06:46de tenir plus d'une semaine ou de 15 jours face à l'Assemblée Nationale.
06:51Avec une femme ou un homme de gauche à la tête du gouvernement,
06:54c'est quelque chose de concevable, de négociable, d'intéressant.
06:57Ce serait bien qu'enfin on parle des projets,
06:59parce que là, on nous interroge quand même énormément sur qui ?
07:02Il n'y a personne qui se dégage de manière naturelle, évidente,
07:04sinon les noms seraient déjà sortis depuis hier soir.
07:06Ce n'est pas le cas.
07:07Donc, ça veut dire quand même, sur la base,
07:09de quel projet on peut trouver du consensus dans notre pays
07:13pour quelques mois, pour une année ?
07:15Est-ce que ça peut aller au-delà dans un pays qui n'est pas franchement habitué à faire des compromis
07:19et pas franchement habitué à créer des coalitions ?
07:22Donc, ce serait totalement inédit, neuf, mais on a une situation qui l'est.
07:26On a essayé, dans les deux dernières années, d'établir des compromis.
07:29Vous l'avez bien vu, on était nous-mêmes en majorité relative, pas en majorité absolue.
07:33Donc, ça veut dire qu'au-delà du 49-3 sur les textes budgétaires,
07:36à chaque fois, ça a été des compromis.
07:38À chaque fois.
07:39Et les textes ont pu être adoptés,
07:41mais ça veut dire qu'on a accepté aussi que les textes évoluent.
07:44Donc, le pouvoir, il est à l'Assemblée, de manière évidente, depuis 2022.
07:47Il est sans doute encore plus à l'Assemblée depuis les élections d'hier,
07:51mais ça veut dire que pour être respecté par l'Assemblée nationale
07:54et ne pas se faire renverser par l'Assemblée nationale,
07:57il faut accepter le compromis.
07:59Une dernière question, je vous cite la fin de l'éditorial de nos confrères de l'opinion ce matin.
08:02Emmanuel Macron se croyait magicien, il n'est qu'un apprenti sorcier.
08:06Écoutez, j'entends les commentaires.
08:08Vous savez, depuis hier soir, on me demande de commenter la déclaration de Gabriel,
08:11la déclaration d'Edouard Phibes, la déclaration de...
08:13Non, je vous demande d'analyser la vie politique du pays avec à la tête...
08:16Ce n'est pas ça qu'on attend de nous et ce n'est pas ça que moi j'ai envie de faire.
08:19La seule chose qui compte, moi j'ai été réélu député hier et de manière claire,
08:23et face au Rassemblement national et face à la France insoumise
08:25qui avait refusé de se désister malgré le risque du R.N. dans ma circonscription,
08:29à la fin, concrètement, c'est quoi le projet politique qu'on porte pour ce pays
08:33et avec qui ensuite on peut espérer pouvoir le conduire ?
08:36C'est ça la seule question qui devrait nous obséder aujourd'hui.
08:39C'est quoi le projet politique qu'on porte pour ce pays ?
08:42Et à ce propos, Emmanuel Macron a encore quelque chose à nous dire ?
08:44Il est président de la République, donc oui, je pense qu'il a encore quelque chose à nous dire évidemment,
08:49garant aussi la stabilité de nos institutions et je crois que dans la période, c'est particulièrement important.
08:53Merci beaucoup.
08:54Merci à vous.
08:55Je rappelle que vous êtes ministre déléguée chargée de l'égalité entre les...