SIMONE - OPINION : Noémie De Lattre, l'harmonie des genres

  • il y a 3 mois

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Transcription
00:00À 35 ans, je disais encore,
00:01ah ben je ne suis pas fémininiste, je m'épile,
00:03je ne suis pas en guerre contre les hommes, ça va.
00:05En étant à France Inter,
00:07et en faisant des chroniques,
00:09Frédéric Lopez, qui était mon boss, m'avait dit,
00:11parle-moi chaque semaine de ce qui t'a mis en colère.
00:12Et je me suis rendu compte que ce qui me mettait en colère
00:14était systématiquement lié à mon genre.
00:15Le mot féminisme est arrivé assez vite,
00:17mais j'ai commencé par le refuser encore,
00:19en disant non, je suis fémininiste,
00:21parce que je voulais dire que j'étais féminine et tout.
00:23Je subissais le sexisme comme n'importe quelle femme au monde,
00:26qu'elle s'en rende compte ou pas,
00:27mais étant blanche, privilégiée, bourgeoise, etc.,
00:30j'avais tellement de privilèges
00:31que ça venait un peu contrebalancer
00:33les discriminations que je pouvais subir en tant que femme.
00:34Et puis un jour, je suis tombée enceinte,
00:36et là, là j'ai compris.
00:39J'ai vraiment le sentiment qu'il y a une espèce de polarisation
00:42entre les hommes et les femmes,
00:42c'est-à-dire que dès que tu es une femme
00:44et que tu fais une revendication vraiment légitime,
00:47genre est-ce que je peux être en sécurité ?
00:49Est-ce que je peux disposer de mon propre corps ?
00:52Est-ce que je peux, en travaillant autant, avoir autant de salaire ?
00:54Enfin des trucs un peu genre à la base.
00:56Tout de suite, on se dit, ah t'attaques les hommes.
00:57Me too, ça veut dire moi aussi, moi aussi.
01:00Donc à aucun moment, quand je dis me too,
01:01je parle d'un homme, je parle de moi.
01:04Évidemment que ce sont les hommes qui bénéficient plus du patriarcat,
01:07on ne va pas se mentir,
01:08mais ils ne sont pas les coupables, les responsables.
01:10Ce n'est pas eux qui se sont dit, on va créer un système.
01:12Non, je veux dire, ce n'est pas les hommes d'aujourd'hui.
01:14Donc après, il y en a qui sont plus courageux que d'autres,
01:16qui se révoltent plus ou moins, qui acceptent plus ou moins.
01:18Ce truc-là d'essayer d'harmoniser,
01:20d'essayer de remettre, pour remplir une expression
01:22qui trahit cruellement mon âge, l'église au centre du village.
01:28Hashtag né en 1800.
01:29En fait, on va se détendre, on va essayer de mettre de l'humanité là-dedans,
01:32de voir du point de vue de chaque personne,
01:35de voir ce qui est subi et commencer par essayer de soigner,
01:39de réparer avant d'accuser, de punir, d'emprisonner, etc.
01:44Il y a des personnes qui vont porter plainte contre une personne en particulier,
01:47et c'est ça qui est important.
01:49La nommer, bien sûr, il y a une personne coupable.
01:52Moi, je voudrais qu'on puisse entendre les victimes,
01:55qu'on puisse entendre leur discours, entendre leur peine, les prendre en charge.
01:58Ça ne veut pas dire qu'il ne faut pas punir, mais juste dissocier.
02:01C'est deux affaires séparées.
02:02Il y a une affaire qui est à traiter, c'est le préjudice,
02:04et une affaire qui est à traiter, qui est le crime.
02:07Moi, quand j'avais 15 ans, j'avais l'air d'en avoir 25,
02:11j'étais complètement délurée, je picolais, etc.
02:13Le nombre de gars avec qui j'ai couché, en vrai, j'étais mineure, j'étais saoule.
02:16Si je veux être reconnue comme victime, je dois les accuser, et ils finiront en taule.
02:20Et si je refuse de les accuser et qu'ils finissent en taule,
02:22parce que je trouve qu'ils ne méritent pas ça, parce qu'ils n'étaient pas au courant,
02:25parce que je leur ai menti, parce que moi, je n'ai pas été élevée à dire non,
02:27parce que moi, j'ai été élevée à être disponible, à être de la chair à sexe.
02:30Avec eux, on a été élevée à prendre.
02:32Mettre ce gars-là en prison, ça n'a pas de sens.
02:33Mais sauf que si je ne fais pas ça, alors mon préjudice n'est pas reconnu, jamais.
02:38Et je n'ai pas le droit de dire que j'ai été violée
02:40et je ne serai jamais considérée comme une victime de viol.
02:42C'est comme si tu arrives à l'hôpital en disant « je me suis cassé la jambe »,
02:44et qu'on ne te soigne pas tant qu'on ne sait pas qui t'a cassé la jambe.
02:47Je ne suis pas du tout en train d'excuser, de légitimer,
02:49d'accepter les comportements sexistes, brutaux, pas une seule seconde.
02:54Et évidemment que ça doit être pris en charge, etc.
02:56Je suis en train de dire qu'on ne peut pas prendre en charge que ça.
02:58Il faut avant, à tout prix, prendre en charge notre président de la République,
03:03qui dit de la merde, qui parle de la fierté de la France.
03:05C'est les lois qui passent, c'est celles qui ne passent pas.
03:07C'est les budgets qui sont débloqués ou qui ne sont pas débloqués.
03:09C'est comment on parle dans les films, à la télé, dans les médias,
03:13des hommes agresseurs.
03:14Et par ailleurs, je vous en supplie,
03:16est-ce qu'on ne pourrait pas commencer à éduquer les garçons ?
03:19J'ai énormément évolué, et j'évolue encore,
03:22justement, effectivement, grâce au retour des gens.
03:23Les gens ont pris la peine de m'expliquer des problématiques
03:27qui m'échappent parce que je ne les subis pas,
03:29notamment sur les transidentités, sur la précarité sociale,
03:33sur la couleur de peau.
03:36Mais j'ai encore beaucoup, beaucoup de chemin à faire
03:40sur ces terrains-là.
03:42Et le fait de me rendre compte que j'avais du chemin à faire,
03:44ça m'a aussi rendue plus tolérante par rapport aux hommes
03:47et aux chemins qu'ils ont à faire sur le sexisme.
03:50En disant, ben voilà, moi je suis blanche,
03:51et effectivement, je vois comme c'est compliqué
03:54de déconstruire des siècles de racisme
03:57qui coulent dans nos veines à tous et à toutes.
03:59Voilà, je me dis, OK, ben moi ça me prend du temps.
04:02Laissons-leur le temps à eux aussi, les gars,
04:03de comprendre ce sexisme millénaire, quoi.
04:07Enfin, maniez-vous un peu, mais...

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