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L'ancien Président de la République François Hollande et député socialiste de Corrèze critique le choix d'Emmanuel Macron de nommer comme Premier ministre Michel Barnier. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien-du-lundi-09-septembre-2024-6349041

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00:00Avec Léa Salamé, nous recevrons ce matin un ancien président de la République,
00:04aujourd'hui député socialiste de la Corrèze.
00:06Il publie le défi de gouverner la gauche et le pouvoir de l'affaire Dreyfus.
00:14Jusqu'à nos jours, c'est aux éditions Perrin.
00:17Et il répondra évidemment à vos questions au 01 45 24 7000 et sur franceinter.fr.
00:24François Hollande, bonjour.
00:25Bonjour.
00:26Bienvenue sur Inter, on va parler dans un instant de ce livre qui est à la fois un
00:31livre d'histoire et un livre politique, un essai qui résonne à bien des égards avec
00:36l'actualité du pays et le paysage de la gauche contemporaine en France.
00:41Mais on va d'abord commencer par vous demander votre regard sur la séquence politique inédite
00:48que nous sommes en train de traverser.
00:50Jeudi, après 51 jours, Emmanuel Macron a donc arrêté son choix sur un premier ministre,
00:56Michel Barnier, issu de la droite LR.
00:59Comment avez-vous reçu ce choix, François Hollande ?
01:02Michel Barnier à Matignon, c'est la bonne personne au bon endroit ?
01:06J'ai considéré que le processus qui avait été engagé par Emmanuel Macron en procédant
01:12à la dissolution de l'Assemblée nationale aboutissait à ce que l'extrême droite revienne
01:18par la fenêtre alors qu'elle avait été écartée par la porte, celle que les électeurs
01:24lui avaient ouverte.
01:25Même si je ne nie pas qu'il y a plus de 30% de Françaises et de Français qui ont
01:30voté pour l'extrême droite.
01:32Mais ce qui avait été en cause, c'était le front républicain.
01:36Là aussi, il y a eu une montée de refus de l'extrême droite qui aujourd'hui se
01:42trouve arrêtée, contrariée et finalement déboutée puisque nous avons un gouvernement,
01:48ce n'est pas la personne de Michel Barnier qui est en cause, je le connais, j'ai de
01:52l'estime pour ce qu'il a pu faire au niveau européen et même au niveau national quand
01:56il a eu des responsabilités.
01:58Mais là, c'est un gouvernement qui est non seulement de droite, nous verrons sa composition,
02:03mais qui ne tient pour sa vie qu'au bon vouloir, elle l'a répété encore hier
02:10Madame Le Pen de l'extrême droite.
02:12Pour vous, c'est Marine Le Pen qui a gagné cette séquence ?
02:17C'est elle qui tire les ficelles ?
02:19C'est Marine Le Pen qui a donné, finalement, quittus pour la nomination de M. Barnier.
02:26C'est-à-dire que là où je conteste aussi ce qui a été fait depuis deux mois, c'est
02:31que comme président de la République, après cette dissolution, après ces élections,
02:37Emmanuel Macron devait d'abord tenir compte du résultat.
02:41Le résultat, ce n'était pas la gauche qui avait gagné.
02:43Elle n'avait pas gagné.
02:44Elle était la première force.
02:46Eh bien, il était assez logique de voir que la gauche était la première force.
02:51Il fallait donc nommer celles qui étaient présentées comme pouvant être premiers
02:56ministres.
02:57Vraisemblablement, l'Assemblée nationale l'aurait censurée, ce qui était annoncé.
03:01Et ensuite, il convenait de nommer un premier ministre qui puisse avoir une majorité.
03:07En tout cas, qui évite d'avoir une majorité de refus.
03:09Ce n'est pas ce qui a été fait.
03:10En réalité, Emmanuel Macron s'est érigé en faiseur de majorité.
03:14Pendant deux mois, ça lui a pris du temps à écarter celui-ci, celle-là, pour chercher
03:20une solution qui, en fait, à la fin des fins, a été celle que l'extrême droite lui a présentée.
03:26C'est-à-dire, aujourd'hui, je considère que nous avons un gouvernement qui est un
03:30gouvernement de droite, soutenu par l'extrême droite.
03:32Ce qui veut dire que l'extrême droite n'est pas dans la majorité, mais l'extrême droite
03:37soutient sans participation.
03:39On va en parler, mais est-ce que vous estimez qu'il y a eu trahison démocratique ?
03:42Qu'il y a eu dérive illibérale ?
03:44Coup de force, comme l'affirment les leaders de la gauche ?
03:46Dites-vous, ce matin, qu'Emmanuel Macron s'est assis sur les résultats de l'élection
03:50législative, qu'il a volé l'élection à la gauche ?
03:52Ou ça vous semble excessif ?
03:54Non, j'en parlerai pas ces mots-là.
03:55Je dirais qu'Emmanuel Macron n'a pas procédé comme il aurait été légitime de le faire
04:01dans une démocratie parlementaire.
04:03C'est-à-dire qu'il avait non pas à être obligé de nommer Mme Castex, mais il devait
04:10au moins, pour écarter cette solution, en saisir l'Assemblée Nationale.
04:15Ce n'était pas à lui de faire, j'allais dire, les conciliabules avec les autres partis
04:20pour écarter cette solution.
04:22Je pense que cette solution n'aurait pas tenu, puisque c'était la position qu'avaient
04:27tous les autres partis, de ne pas laisser la gauche gouverner.
04:30Et la gauche n'avait pas la majorité pour gouverner.
04:32Il faut quand même rappeler ce fait-là.
04:34C'est-à-dire que la gauche, il lui manquait 90.
04:36Donc c'était juste pour respecter les institutions que vous auriez souhaité qu'il nomme Lucie
04:41Castex, alors que vous nous dites vous-même, à ce micro, qu'elle aurait été censurée
04:45deux jours ou une semaine après ?
04:47Mais c'était mettre chacun devant sa responsabilité.
04:51Ce n'est pas au chef de parti de dire ce qu'il convient de faire.
04:54C'est à l'Assemblée Nationale.
04:56Et ensuite, si elle avait été censurée, peut-être n'aurait-elle pas été censurée,
05:01à ce moment-là, il lui fallut qu'elle fasse un renoncement à une grande partie
05:05de son programme.
05:06Ce qu'elle n'était pas prête à faire, ainsi que les partis qui la soutenaient.
05:09François Hollande, au sein du PS, des voix se font entendre pour critiquer la position
05:13du parti.
05:14Par l'intransigeance des leaders du NFP, on se retrouve avec 100% de rien à déplorer.
05:19Le maire socialiste de Saint-Ouen, Karim Bouamrane.
05:23Quant à Anne Hidalgo, elle estime que le PS a empêché la nomination de Bernard Cazeneuve
05:27et qu'il est responsable, le PS, de la nomination de ce Premier ministre de droite.
05:31Vous êtes d'accord avec eux ?
05:33Le seul responsable, ou le responsable principal, même si ça n'exonère pas la direction
05:38du Parti Socialiste, c'est Emmanuel Macron.
05:41Quand je l'ai rencontré l'année dernière, je lui ai dit que, dès lors qu'il n'avait
05:47pas procédé comme il le convenait, il fallait maintenant qu'il prenne ses responsabilités
05:51et nommer une personnalité politique.
05:53Et il y avait deux personnalités politiques qui étaient à ce moment-là dans le débat.
05:58Xavier Bertrand et Bernard Cazeneuve.
06:01Voilà.
06:02Vous êtes président, vous devez choisir l'un ou l'autre.
06:05Et ça sera à cette personne, celle que vous aurez désignée, de faire sa majorité.
06:10Nous apprenons à ce moment-là qu'il a même procédé à une nomination quelques jours
06:15plus tôt dans la confidence et dans l'absence de transparence pour le président du Conseil
06:21économique et social.
06:22Ce qui est un peu paradoxal.
06:23Donc j'ai dit non, il faut que ce soit une personnalité politique et que cette personnalité
06:27aille chercher sa majorité.
06:29Mais il est vrai, pour répondre à la question, qu'il n'était pas à mon avis imaginable
06:34que le groupe socialiste, j'en fais partie maintenant, participe à une censure de Bernard Cazeneuve.
06:40Il n'était pas non plus imaginable que le groupe socialiste ou que le parti socialiste
06:45participe à un gouvernement de coalition avec la droite.
06:48Mais le principe de non-censure d'un homme qui a été ministre, qui est un homme estimable,
06:56qui est un homme qui a des références, qui a des convictions, il était évident qu'il
07:03ne pouvait pas être censuré par le groupe socialiste.
07:05Et je l'ai dit à Emmanuel Macron.
07:07Je lui ai dit vous n'aurez sans doute pas une position aussi catégorique de la part
07:12du parti socialiste.
07:13Mais c'est évident qu'il ne sera pas censuré par les socialistes.
07:16Donc pour vous l'hypothèse Cazeneuve qui a échoué, c'est dû à Emmanuel Macron
07:20qui ne voulait pas fondamentalement nommer Bernard Cazeneuve ou c'est dû au parti
07:23socialiste qui aurait bloqué les choses ?
07:25Je pense que Emmanuel Macron ne voulait pas, en tout cas c'était pour lui la dernière
07:29des hypothèses, nommer Bernard Cazeneuve.
07:32Mais que la direction du parti socialiste lui a donné le prétexte pour justement ne
07:38pas le nommer.
07:39Pourquoi vous n'avez pas soutenu publiquement cet été l'hypothèse Cazeneuve ? Vous avez
07:42soutenu l'hypothèse Castet mais pas l'hypothèse Cazeneuve ?
07:45J'ai soutenu l'hypothèse Castet parce qu'elle devait être selon ce que j'estimais
07:50le rôle du président de la République, nommée et qu'elle fasse à ce moment-là la preuve
07:55qu'elle pouvait tenir.
07:56Elle n'aurait à mon avis pas tenu mais c'était sa bonne démarche.
07:59Et sur Bernard Cazeneuve, est-ce que j'avais besoin de dire que Bernard Cazeneuve, mon
08:05ami, avait mon soutien ? C'était évident.
08:08Il avait mon soutien à certaines conditions.
08:11Les conditions qui pouvaient être posées et qui l'ont été par le parti socialiste,
08:15par le groupe socialiste.
08:16Conditions qu'il respecte son gouvernement s'il était nommé, les grandes lignes ou
08:22en tout cas les directions qu'avait fixées le programme du Nouveau Front Populaire.
08:26Mais ça, ça faisait partie d'une discussion.
08:28Et puis, je pense que le fait que Bernard Cazeneuve était mon ami et qu'il avait été
08:33mon premier ministre a fait qu'Emmanuel Macron n'avait guère envie de le nommer.
08:40Ah oui, vous pensez que c'est lié ?
08:42Je pense qu'il y a effectivement un lien parce que pour lui, ça signifiait sans doute
08:46le retour au cycle qui a été interrompu en 2017.
08:50Olivier Faure exclut que des socialistes puissent participer à un gouvernement barnier.
08:55Il a raison, vous êtes sur la même ligne.
08:57Quand c'est un gouvernement au-delà de la personne de Michel Barnier, quand c'est
09:02un gouvernement qui va être de droite, sur une politique de droite et qui va être un
09:07gouvernement soutenu par l'extrême droite, dont j'ai dit d'ailleurs qu'il n'aura
09:11de durée de vie que tant que l'extrême droite la lui donnera.
09:14Et bien, comment voulez-vous que des socialistes ou des femmes ou des hommes de gauche participent
09:18à une telle équipe ?
09:19Mais faut-il encore que l'on réfléchisse à la suite ?
09:22Qu'est-ce qui se passera si éventuellement ce gouvernement ne tient pas ?
09:26Mais s'il y a une motion de censure, il devrait y avoir une motion de censure déposée
09:29par la gauche.
09:30Vous la voterez François Hollande ?
09:31Oui.
09:32Comment accepter que les Français qui ont voulu écarter l'extrême droite, qui voulaient
09:39qu'il y ait du changement, qui voulaient qu'il y ait une amélioration de leur pouvoir
09:43d'achat, une révision de la réforme des retraites, qu'il puisse y avoir une meilleure
09:49pratique des institutions, qu'il n'y ait pas de continuité avec Emmanuel Macron.
09:53Comment voulez-vous que l'on puisse donner d'autres accords ?
09:56Vous voterez la censure.
09:57Le livre.
09:58Voilà, le livre.
09:59Parce que toutes ces questions, évidemment, ont un lien avec votre livre où vous interrogez
10:03la relation compliquée entre la gauche et le pouvoir.
10:06Comment la gauche qui est née dans une perspective révolutionnaire peut-elle accéder au pouvoir ?
10:13Comment peut-elle l'exercer ?
10:14Vous expliquez que le pouvoir attire la gauche autant qu'il l'effraie, que la gauche est
10:19toujours tiraillée entre réformisme et révolution.
10:23On en est toujours là depuis l'affaire Dreyfus.
10:26Il y a toujours eu deux gauches.
10:28C'est ça que j'essaie de tracer dans ce récit historique.
10:32Y compris au moment même de l'affaire Dreyfus, quand une gauche radicale considère que la
10:39vie d'un juif qui, officier, est accusé de trahison, ne mérite pas le combat.
10:46Et puis une autre gauche, qui met du temps d'ailleurs, avant d'avoir cette lucidité,
10:51celle de Jaurès, qui dit non, il faut faire en sorte que nous nous battions au-delà de
10:55la question sociale, pour cette question de principe, et qui autorise un socialiste à
11:00siéger dans un gouvernement, celui de Valdecrousseau, et qui va permettre de sortir de l'affaire
11:06Dreyfus à peu près dignement.
11:08Et puis ensuite il y a eu la césure communiste-socialiste, puis ensuite il y a eu d'autres fractures.
11:15Il y a toujours eu deux gauches.
11:17Pour parvenir au pouvoir, la gauche doit être unie.
11:20Elle doit accepter que ces deux gauches travaillent ensemble pour la victoire, et ensuite, autant
11:25que possible, pour l'exercice de la responsabilité.
11:28Et pour parvenir à la victoire, il faut que le pôle réformiste, le pôle social-démocrate,
11:34le pôle socialiste, ainsi qu'il a été appelé, soit le plus fort.
11:38Parce que c'est lui qui va donner la crédibilité, c'est lui qui va donner aussi l'incarnation.
11:42Quand on songe Léon Blum, François Mitterrand, Lionel Jospin, moi-même, c'est ce pôle-là
11:48qui va donner et la crédibilité et l'incarnation.
11:50Sauf que ce n'est plus le cas là.
11:52Dans le moment que nous vivons, parce que c'est vrai que votre livre remet les choses
11:56en perspective dans l'histoire et vous vous placez dans la continuité de François Mitterrand,
11:59de Lionel Jospin, et donc de vous-même, puisque la gauche réformiste, dites-vous, a absorbé
12:05la gauche radicale pour pouvoir arriver au pouvoir.
12:08Là, le rapport de force s'est inversé, François Hollande, puisque c'est la gauche
12:11radicale qui est en tête avec, vous dites qu'il n'y a pas d'incarnation, il y en a une,
12:15ça ne vous plaît peut-être pas, elle s'appelle Jean-Luc Mélenchon et il a quand même fait
12:1822% à la dernière présidentielle.
12:21Donc la gauche radicale peut se dire non, maintenant le centre de gravité, il est chez nous
12:24et on peut arriver au pouvoir en étant chez nous.
12:26Alors non, comment ?
12:28Non, pardon de vous couper.
12:30Non, elle ne peut pas arriver au pouvoir.
12:32Elle peut être au marge du pouvoir.
12:34On l'a vu encore dans ses derniers jours.
12:37Elle ne peut pas arriver au pouvoir.
12:39Parce qu'elle ne peut pas être majoritaire.
12:41Et donc, il ne s'agit pas de nier ce qu'elle représente.
12:44Il s'agit de dire, si nous voulons que la gauche gouverne, elle doit apporter des solutions
12:52qui puissent rassembler non seulement l'électorat de gauche, ces deux gauches-là, mais au-delà
12:58pour faire une majorité.
12:59Et donc le problème que vous posez, tout à fait exact, c'est-à-dire le fait que depuis
13:042017, ce soit le pôle radical qui était plus fort que le pôle réformiste, a fait
13:10que la gauche est dans l'opposition.
13:12Et si ça ne se rééquilibre pas, ça commence à se rééquilibrer.
13:16Et mon propre engagement y a été aussi pour une part, le fait que ça se rééquilibre.
13:21Et puis demain s'inverse, va permettre que la gauche...
13:24Demain s'inverse ? Vous semblez sûr que demain ça va s'inverser ?
13:27Demain ça va s'inverser.
13:28Demain, le rapport de force de la gauche réformiste va redevenir fort.
13:34Mais quand vous entendez la jeunesse aujourd'hui, la jeunesse est beaucoup plus attirée par
13:38les thèses de la gauche radicale, que quand vous parlez à la jeunesse de la social-démocratie,
13:44ils ne savent pas ce que c'est.
13:45Ils pensent que c'est de la mollesse.
13:46Quand vous parlez de compromis, ils vont dire « compromission ».
13:48Mais vous savez, j'ai été jeune.
13:51Ah bon ?
13:52Oui, ça peut vous surprendre.
13:54Vous souriez.
13:55Eh bien quand j'étais jeune, la gauche radicale, elle était plus forte que le pôle réformiste.
14:00Le parti communiste, il était très fort pendant des années, des années, des décennies.
14:04Et il a fallu que François Mitterrand reconstitue le pôle socialiste avec le congrès d'Épinay
14:12en 1971.
14:13Puis ensuite, j'ai été moins jeune, mais il a fallu qu'après Mitterrand, au pouvoir,
14:18il y ait Lionel Jospin qui reconstitue la gauche plurielle pour que le pôle réformiste
14:22puisse l'emporter.
14:23Et donc ça s'est toujours passé comme ça.
14:24Et donc la jeunesse, vous êtes peut-être un peu caricatural, la jeunesse est toujours
14:28poussée par une forme d'exigence.
14:30Et c'est bien légitime.
14:31Souvenez-vous de ce qu'ont pu être les mouvements sociaux de ces dernières années.
14:35Mais le rôle des responsables politiques, c'est de donner une traduction à l'envie
14:41même révolutionnaire d'une partie de la jeunesse.
14:44Mais en même temps, François Hollande, votre livre est un réquisitoire contre ce que vous
14:47appelez les faiblesses structurelles de la gauche.
14:50Et vous les listez, je vais lire ça.
14:52Sa répugnance à accepter la social-démocratie, on vient d'en parler, son attraction mortifère
14:57pour la radicalité, sa réticence à admettre pleinement le choix européen, sa dispersion,
15:02son goût pour la controverse poussée jusqu'à l'absurde, son irénisme face à des sujets
15:07majeurs comme l'immigration ou l'insécurité, sa vision anachronique du monde ouvrier et
15:11des rapports sociaux, sans oublier sa perpétuelle mauvaise conscience qui l'empêche de revendiquer
15:16avec fierté l'œuvre accomplie.
15:18Il reste quoi alors pour finir ?
15:20Il reste la politique et c'est pour ça que ce livre revient sur toutes les avancées
15:25de la gauche.
15:26La France ne serait pas ce qu'elle est aujourd'hui et sur la protection sociale, sur les rapports
15:31au travail, sur la justice fiscale, sur la laïcité, sans que la gauche ait pris le
15:37risque, parce que c'est toujours un risque, de participer et d'exercer le pouvoir.
15:42C'est parce que la gauche a revendiqué le pouvoir.
15:45C'est parce qu'après beaucoup d'hésitations, Léon Blum pensait que le pouvoir c'était
15:49comme un calice qu'il fallait absolument le boire comme si c'était une purge.
15:52Non, il a à un moment pris sa responsabilité.
15:55François Mitterrand, lui, il a été animé par la volonté de mettre la gauche au pouvoir
15:59alors même qu'il y avait un parti communiste qui était très fort.
16:02Vous pensez qu'aujourd'hui la gauche n'a plus envie de prendre le pouvoir ?
16:04Je pense que les Français ont envie qu'il y ait des changements.
16:07Faut-il encore que la gauche soit capable de nouer ses aspirations pour les porter dans
16:13un programme majoritaire ? Parce que dans des élections, il faut être majoritaire.
16:18Si on est minoritaire, c'est ce qui se passe en ce moment, même s'il y a eu, je l'ai
16:22dit, un rééquilibrage au sein de la gauche et entre la gauche et la droite et l'extrême-droite.
16:26Eh bien, il faut à un moment être majoritaire.
16:29Il faut aller chercher les sujets, y compris les plus difficiles.
16:32Vous avez cité sécurité, immigration, la question européenne, les sujets internationaux.
16:38Il faut aller chercher à affronter la réalité, y compris dans l'opposition, pour après
16:43justifier d'exercer le pouvoir.
16:45Beaucoup de questions d'auditeurs sur le thème suivant.
16:47Alexandre qui vous salue.
16:49Bonjour.
16:50Quel choix a laissé le PS en s'alliant aveuglément à la France insoumise ? Assurément, un socialiste
16:56aurait été Premier ministre si le coup près du NFP n'avait pas été brandi.
17:00Marie, Monsieur Hollande, pourquoi ne pas peser enfin sur ce PS pour sortir de cette
17:05alliance mortifère avec la France insoumise ? Nous sommes nombreux de la famille PS à
17:09ne pas cautionner Olivier Faure.
17:11Simple supplétif de LFI.
17:13Sophie, pourquoi ne demandez-vous pas à François Hollande pourquoi le PS est inféodé à LFI ?
17:18Il récolte ce qu'ils ont semé.
17:20Voilà, trois questions sur le même thème.
17:23Votre réponse, François Hollande, à nos auditeurs.
17:26C'est une question qui, là aussi, prend sa racine dans l'histoire.
17:30L'union, il faut la faire.
17:33Sans union, il n'y a pas de possibilité de victoire.
17:37L'union avec un partenaire, longtemps le Parti communiste, ça a été aussi les écologistes,
17:44mais ils ne posaient pas les mêmes problèmes.
17:46Là, aujourd'hui, LFI, l'union doit être donc un préalable.
17:50Mais l'union, c'est un combat.
17:52C'est un combat.
17:53Il faut imposer l'union, y compris à LFI, et la dépasser en faisant en sorte que ce
18:00soient les socialistes qui soient les plus forts.
18:02Moi, je pense que si l'union a été nécessaire pour empêcher l'extrême droite,
18:08ça a été le cas pour ces élections après la dissolution,
18:11l'union ne doit pas être un corset.
18:14L'union ne doit pas être un empêchement.
18:16Pour les socialistes, ils doivent affirmer leur autonomie.
18:19Les socialistes doivent affirmer une ligne, y compris par rapport à ce gouvernement.
18:23Les socialistes doivent affirmer que si ce gouvernement devait tomber,
18:27il faudrait trouver une solution.
18:29Les socialistes ne sont pas, à mon avis, un féodé à qui,
18:32ne doivent pas être un féodé à qui que ce soit.
18:34Sinon, ils ne seront plus des socialistes.
18:36Ils l'ont été un moment.
18:38Je pense qu'ils sont en train de s'en émanciper, s'en détacher.
18:41Par ailleurs, si c'était une solution gagnante, on pourrait dire que ce n'est pas de chance
18:44pour les socialistes.
18:45Finalement, ils n'ont pas l'incarnation nécessaire.
18:48Ils n'ont pas été capables de convaincre.
18:50Ce n'est pas vrai.
18:51Je pense qu'électoralement, aujourd'hui, la force socialiste est bien supérieure
18:56à ces insoumis.
18:57Par ailleurs, il faut dénoncer chaque fois que des déclarations se font de manière intempestive.
19:02Il faut les dénoncer.
19:03Ne pas participer à cette procédure totalement infondée et irréaliste
19:09de destituer le président de la République.
19:11Enfin, ne pas attendre une élection présidentielle anticipée.
19:15Essayer de faire vivre l'Assemblée telle qu'elle est
19:18pour faire avancer le progrès.
19:20Et de ce point de vue, avoir une opposition constructive.
19:22Faudra-t-il, François Hollande, des candidats NFP aux prochaines échéances électorales,
19:26aux législatives, aux municipales ?
19:28Est-ce que c'est le ticket gagnant pour les prochaines municipales ?
19:32C'est en tout cas ce que pense beaucoup à gauche ?
19:35Non.
19:36Dans beaucoup de villes de France, il y a des socialistes,
19:40surtout avec des alliés, communistes ou écologistes,
19:42qui ne prendront pas des candidats LFI.
19:45Parce qu'ils ne sont pas d'accord sur le programme local.
19:48Deuxièmement, s'il doit y avoir une élection présidentielle anticipée,
19:53puisque c'est en fait la stratégie de Jean-Luc Mélenchon,
19:56bloquer pour aller vers une impasse et procéder à une élection présidentielle anticipée,
20:02qui doit nous contraindre de ne pas avoir de candidats dans cette élection
20:07et de prétendre nous-mêmes à porter les aspirations du pays.
20:11S'il doit y avoir des élections législatives anticipées dans un an, c'est possible.
20:16L'union sera peut-être nécessaire, sauf s'il y a un changement de mode de scrutin.
20:20Vous vous représenterez sous l'étiquette NFP ?
20:22C'est pas ce que je fais à ce moment-là.
20:24Pardon, je ne me suis pas présenté sous l'étiquette LFI.
20:26Je me suis présenté sous l'étiquette NFP et socialisme dans le cadre du Nouveau Front Populaire.
20:30Mais je pense que l'union sera nécessaire, compte tenu du mode de scrutin.
20:34Mais là aussi, avec un rééquilibrage des circonscriptions.
20:38Tout à l'heure, on parlait de ce qu'avait été la NUPES par rapport au Nouveau Front Populaire.
20:42La NUPES, c'était 70 circonscriptions données aux partis socialistes.
20:45Mais c'était inacceptable.
20:47Il y en a eu un peu plus, 170.
20:49Mais il faudrait revendiquer le maximum.
20:51Chaque fois qu'un candidat socialiste se présente au nom de l'union, il a plus de chance qu'un candidat LFI.
20:55Michel Barnier, pour ses premières urgences, déclare vouloir ouvrir le débat pour une amélioration de la réforme des retraites.
21:04Est-ce que ça va dans le bon sens ?
21:06Et la réduction du déficit vous paraît-elle devoir être une priorité absolue du prochain gouvernement ?
21:14Sur la réforme des retraites, je pense que ça a été une des clés de la nomination de M. Barnier.
21:21En fait, Emmanuel Macron ne voulait pas changer sa réforme.
21:27Vous parliez d'autres hypothèses.
21:29Bernard Cazeneuve ou même Xavier Bertrand étaient sur une position, disons, plus exigeante.
21:34Nous verrons bien ce que proposera M. Barnier.
21:36Mais il est à penser que, sauf s'il veut répondre à tel ou tel groupe de l'opposition, qu'il n'ira pas très loin.
21:43Deuxièmement, sur le déficit, oui, il faut réduire le déficit.
21:46Moi, quand j'étais président, j'ai réduit les déficits.
21:49Ce qui est grave, c'est qu'ils se sont considérablement amplifiés depuis 2017.
21:54Mais il y a deux manières de répondre à cette question.
21:57Ou on fait des augmentations d'impôts sur les plus modestes.
22:00On réduit les dépenses publiques qui peuvent affecter la vie quotidienne des Français.
22:04Ou on fait un effort de justice fiscale tout en faisant des économies là où elles sont nécessaires.
22:09Et donc ça, ça devait être aussi le grand enjeu.
22:11Et ça sera le grand enjeu, parce que qu'est-ce qu'est le prochain rendez-vous parlementaire et politique ?
22:16C'est le budget.
22:18Et donc, si le Rassemblement National laisse passer ce budget,
22:23alors qu'on peut penser que ce budget va aggraver encore les conditions d'existence du plus grand nombre
22:28et va sûrement amplifier les injustices fiscales,
22:31je le dis ici, le Rassemblement National, aujourd'hui, est responsable de la politique qui va être menée dans notre pays.
22:37Une dernière question, Michel Barnier s'était également dit prêt à aller vers la proportionnelle. Vous êtes pour ?
22:42Je suis pour la proportionnelle.
22:44Pas pour simplement répondre à une question immédiate qui serait la difficulté de trouver une majorité.
22:50J'ai longtemps été réservé par rapport à ce mode de scrutin.
22:53Je pense qu'il est nécessaire aujourd'hui pour que précisément demain,
22:56si nous devons être dans une circonstance analogue, des coalitions soient possibles.
23:00François Hollande, merci.
23:02Le défi de gouverner la gauche et le pouvoir de l'affaire Dreyfus jusqu'à nos jours
23:06est publié chez Perrin.
23:08Merci encore d'avoir été à notre micro ce matin.

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