Mort d'un agent municipal, insécurité... L'interview en intégralité d'Éric Piolle, maire de Grenoble

  • il y a 4 jours
Éric Piolle, maire Les Écologistes de Grenoble, est l’invité du Face à Face ce mardi 10 septembre.

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Transcript
00:00BFM TV face à face. Apolline de Malherbe.
00:09Il est 8h32 et vous êtes bien sur RMC et BFM TV. Bonjour Éric Piolle.
00:13Bonjour.
00:14Merci d'être dans ce studio ce matin. Vous êtes le maire de Grenoble, maire écologiste,
00:18et votre ville est tragiquement au cœur de la tension depuis ce week-end, dimanche matin,
00:24la mort de Lilian Dejean, qui était agent municipal de votre ville,
00:28qui a été abattu de deux balles alors qu'il tentait au départ de porter secours
00:33après un accident de la route et finalement de retenir celui qui avait provoqué cet accident,
00:39qui est d'ailleurs au moment où l'on se parle toujours en fuite.
00:43Oui, toujours en fuite. Je ne doute pas que la police et la justice mettent tous les efforts
00:52pour l'attraper et je ne doute pas qu'ils l'attraperont bientôt.
00:54Il a été identifié mais donc toujours pas interpellé.
00:58Le tueur de cet agent municipal a donc été identifié, on va y revenir dans un instant,
01:03mais on sent votre émotion depuis 48 heures d'abord parce que cet agent municipal
01:09est mort dans des circonstances d'un tragique total, voulant porter secours,
01:15et parce que vous le connaissiez, agent municipal de votre ville.
01:19Oui, vous savez quand on est maire, nous vivons en permanence avec cette idée
01:24qu'il peut se passer quelque chose pour les enfants qui sont dans les écoles,
01:28qu'il peut se passer quelque chose de dramatique pour les habitants,
01:30qu'il peut se passer quelque chose de dramatique pour nos agents.
01:33Nous vivons avec cela, toutes et tous.
01:36Quand ça arrive, quand ça bascule, c'est évidemment terrible.
01:41Terrible parce que c'est là en l'occurrence, il y a un agent public qui vient porter secours
01:47et qui est, comme tous ces agents publics partout en France, sur le terrain,
01:52dans nos vies quotidiennes, pour faire tout ce qui est parfois invisible
01:56et qui est tellement utile à la société, et il le fait en étant citoyen,
02:01comme vous pourriez le faire, comme je le fais régulièrement,
02:05en se portant le premier parce qu'il est là et qu'il passe,
02:08et qu'on ne laisse pas une situation sans venir porter secours.
02:13Mais cela arrive, monsieur le maire, dans une ville qui est aussi sous le feu de la tension
02:18parce qu'il y a ces fusillades à répétition,
02:21parce qu'il y a eu encore cet été de trop nombreuses fusillades,
02:25parce qu'il y en a eu 19 depuis le début de l'année.
02:29Est-ce que vous entendez ce qui est dit parfois,
02:32y compris sur une forme de responsabilité à ne pas avoir vu monter cette insécurité ?
02:38Personne ne peut ne pas voir monter cette insécurité en France.
02:44Personne.
02:45Mais moi je ne vous parle pas seulement de la France.
02:47Personne, bien sûr.
02:48Quand on est maire, on est responsable de sa communauté de vie,
02:51donc évidemment que nous voyons ça.
02:53Quand il y a des moments où il n'y a peu d'événements,
02:58on ne se dit pas que c'est une bonne nouvelle.
02:59On se dit peut-être que le trafic est en train de s'enquister.
03:02Quand il y a des moments de forte intensité, comme cette année,
03:05qui ont conduit à un décès, vous l'avez dit, et 19 fusillades entre deals,
03:10vous vous dites que là, peut-être que c'est une bonne nouvelle,
03:14comme l'a dit le procureur,
03:15parce que ça veut dire que les forces de police bousculent le trafic,
03:18mais que les risques sont là.
03:20Ils sont là aussi pour les habitants qui sont autour.
03:24Et donc évidemment que tout le monde voit cela.
03:28Nous avons signé une tribune avec les élus des grandes villes il y a un an de cela.
03:34C'était le 25 septembre 2023.
03:36Dix ans au gouvernement.
03:38Nous ne pouvons pas continuer comme cela,
03:41avec cette profusion d'armes, cette profusion de trafic de drogue.
03:44Vous me parlez de la France, vous me parlez du gouvernement.
03:47Mais est-ce que vous, Éric Piolle,
03:49vous estimez que votre rapport à la question d'insécurité,
03:53dont vous avez d'ailleurs revendiqué ne pas faire forcément une priorité,
03:56parce que pour vous...
03:57Pourquoi vous dites ça ?
03:58Non, vous n'estimez pas que, par exemple,
04:00quand vous avez ironisé, quand vous avez pris votre mandat
04:03sur les caméras de vidéosurveillance,
04:06vous n'estimez pas que c'était des signaux quand même envoyés ?
04:09Absolument pas.
04:10Je pense que n'importe quel élu local,
04:12et c'est mon cas,
04:14nous sommes pleinement engagés dans la lutte pour la tranquillité de nos habitants
04:18et dans la lutte contre l'insécurité.
04:21Il n'y a pas de problème particulier à Grenoble ?
04:23Il y a un problème, évidemment, à Grenoble.
04:26Nous travaillons avec la police, avec la justice,
04:30avec le corps préfectoral,
04:32pour, sur le terrain, concrètement, voir ce que nous faisons.
04:36Mais par exemple, Éric Piolle, quand vous dites,
04:38et c'est parmi vos premiers mots,
04:40vous constatez que ces gens sont armés,
04:43en l'occurrence celui qui a provoqué l'accident
04:46et qui a ensuite sorti son arme
04:49pour tirer à deux reprises directement dans le thorax de l'ignant Dejean,
04:53face à eux, les policiers municipaux,
04:56et c'est un choix que vous avez fait, ne sont pas armés.
04:59Est-ce que vous le regrettez ?
05:01Est-ce qu'il y a des moments où vous avez des doutes,
05:03où vous vous dites, peut-être qu'il lui faudrait mieux qu'il soit armé,
05:06peut-être qu'il aurait mieux fallu des caméras
05:09qui auraient peut-être découragé cet homme de fuir, non ?
05:12Vous arrivez là, d'abord, je trouve,
05:15beaucoup trop rapidement sur les dimensions polémiques de l'événement.
05:20Nous, nous sommes là, et je suis personnellement dans une dimension...
05:24Elles sont venues tout de suite, c'est-à-dire que...
05:26Oui, évidemment, on a vu la fachosphère,
05:28on a vu M. Estrosi qui tweet plus vite que son nombre
05:30et qui tweet sur les bandeaux des chaînes de Bolloré
05:32et qui racontent n'importe quoi.
05:34Je saisirai d'ailleurs l'Arkom,
05:36on ne peut pas laisser, comme ça, raconter n'importe quoi tout le temps.
05:39Il a précisé d'ailleurs, effectivement hier,
05:41puisque je lui ai fait écouter l'intégralité,
05:43on va juste redire de quoi il s'agit.
05:45En effet, vous vous êtes exprimé,
05:47vous avez été interrogé d'ailleurs sur la question des balles pardues,
05:49ce n'est même pas de vous-même que vous en avez parlé,
05:51je précise bien les choses,
05:53et à ce moment-là, vous avez dit que vous aviez,
05:55en tant que maire, toujours l'inquiétude de la question des balles perdues,
05:58mais qu'il ne s'agissait en l'occurrence pas du tout de cela.
06:01Le mot « balles perdues » a été repris sur un bandeau,
06:04c'est d'ailleurs ce qu'a dit Christian Estrosi
06:06lorsque je lui faisais remarquer qu'il ne s'était attaché
06:08qu'à un morceau de votre phrase détachée de son contexte
06:11et qu'il avait donc réagi à un bandeau.
06:13Vous saisirez donc l'Arkom ?
06:15Oui.
06:16M. Estrosi, ce n'est pas la première fois.
06:18Vous savez qu'après les attentats de Paris,
06:20il avait accusé Anne Hidalgo de n'avoir rien fait sur la sécurité
06:23et il avait plastronné en disant qu'à Nice ça ne pourrait pas arriver
06:26grâce à tous les dispositifs qu'il mettait, etc.
06:29Six mois plus tard, nous étions tous à ses côtés,
06:32tous à ses côtés, quand Nice a été frappée d'un attentat terroriste
06:35et que la France a été frappée d'un attentat terroriste.
06:37Donc il n'a aucune pudeur, je le laisse à ses travers,
06:40mais il n'a aucune pudeur et aucune décence,
06:43y compris dans cette période de deuil.
06:45Je voudrais revenir sur cette période de deuil
06:48parce que pour tous nos agents, j'étais avec eux dimanche à 14h,
06:51j'étais avec eux à la prise de poste à 6h du matin hier,
06:54c'est un émoi extraordinaire
06:57parce que Lilian aussi était une personne rayonnante,
07:01militant CGT, engagé toujours prêt dans le service public,
07:05en dialogue avec nous, en dialogue avec moi,
07:07et que ça, ça frappe partout en France.
07:11Il y a eu des minutes de silence partout en France
07:14parce que tout le monde peut se projeter dans ces agents publics-là.
07:17Revenons maintenant sur vos deux points de vous souligner
07:22et qui sont pertinents et que j'entends.
07:24Vous savez quoi, Eric Piolle, il y a la question,
07:26et je vais y revenir, d'armer ou non la police,
07:29il y a la question des vidéosurveillance,
07:31mais il y a la question aussi des habitants.
07:33Et au fond, vous avez raison, sortons de la politique,
07:35écoutons les habitants de votre ville.
07:37Ils sont nombreux à s'être exprimés depuis hier.
07:41Ça fait mal, ça fait peur.
07:43Là, ça devient pire à pire.
07:45Ça craint.
07:46Moi, ça me fait peur.
07:47Ces bandits qui sont armés mieux que notre police.
07:50On se croirait à Chicago.
07:52Parce que là, si vous voulez, on peut aller se promener,
07:54vous allez voir les dealers, il n'y en a pas mal.
07:56Mais il faut qu'ils fassent le nécessaire, notre maire,
07:59et là, ce n'est pas le cas, il faut punir.
08:01Ce n'est pas les politiques, ça, c'est vos administrés.
08:03Oui, mes administrés d'abord.
08:05Vous pourrez noter qu'ils votent massivement pour nous.
08:07Tout à fait, vous avez été réélu.
08:09Il faut quand même dire qu'ils suivent le cap que nous proposons.
08:14Et sur ces deux dimensions que vous soulignez,
08:17l'armement de la police municipale
08:19et la question des caméras de vidéosurveillance.
08:22Vidéosurveillance, nous en avons 118 à Grenoble.
08:26Au kilomètre carré, c'est bien plus que dans beaucoup d'autres villes.
08:29C'est l'occasion aussi de tourner le cou,
08:31peut-être à certaines rumeurs, fake news.
08:34C'est vous qui aviez dit quand vous êtes arrivé
08:36que vous alliez donner les vidéosurveillances à Christian Estrosi.
08:40C'était une blague pour dire qu'effectivement,
08:42nous ne sommes pas, nous ne pensons pas,
08:44et je ne pense pas et je ne pense toujours pas
08:46que mettre une caméra derrière chaque citoyen fera avancer les choses.
08:51Je pense que notre sécurité ne peut pas se faire
08:54au détriment de notre liberté.
08:57Et je pense que nous devons utiliser les outils
08:59qui sont à notre disposition,
09:01mais que le premier outil, c'est un outil humain.
09:05En l'occurrence, ça s'est passé sous des caméras de vidéosurveillance.
09:10Au regard de l'intensification de ces fusillades,
09:13d'ailleurs, le procureur de la République de Grenoble,
09:16Éric Vaillant, dit même, je n'ai jamais vu ça
09:18depuis ma prise de poste à Grenoble il y a cinq ans,
09:20des fusillades tous les deux ou trois jours pendant presque un mois.
09:23Il disait ça à la fin de l'été.
09:24C'est une guerre des gangs intenses.
09:26Est-ce qu'au regard de cette nouvelle réalité,
09:28vous voulez revenir éventuellement sur la question
09:31de l'armement de la police municipale ?
09:32Non, je suis employeur.
09:34Je suis employeur, j'ai travaillé avec eux.
09:37Vous ne vous dites pas que la situation a changé,
09:39il faut peut-être s'adapter ?
09:40Non, je crois que la police municipale,
09:42elle est là pour la tranquillité publique des habitants.
09:45Elle travaille en coopération avec la police nationale.
09:48Nous avons une convention de coopération.
09:50Nous faisons des réunions tous les mois dans chaque secteur
09:53sur la prévention et la sécurité de la délinquance.
09:55Nous travaillons, nous faisons ce travail là de terrain.
09:58Et moi, en tant qu'employeur,
10:00je considère qu'armer d'armes à feu,
10:04notre police municipale, c'est les exposer
10:07à la fois à des missions qui ne sont pas les leurs
10:10et à des risques que je ne suis pas prêt à prendre pour eux.
10:13Ils peuvent avoir certains une conviction différente.
10:16J'ai fait un an de travail avec eux
10:18pour arriver à cette conclusion
10:20parce que ça se travaille, ça se réfléchit.
10:22Mais lorsque vous constatez que le suspect identifié,
10:25mais donc toujours pas arrêté,
10:26il s'agit donc d'Abdoul D, 25 ans,
10:29connu des services de police, déjà condamné
10:31pour vol, violence, trafic de drogue.
10:33Il a fait plusieurs séjours en prison.
10:36Et le Dauphiné libéré révèle ce matin
10:39qu'il avait été condamné notamment
10:41à une interdiction de port d'armes jusqu'en 2028.
10:44Or, toute interdiction de port d'armes
10:46à laquelle il était condamné,
10:48il avait cette arme avec lui, il l'a sortie,
10:50il a tiré deux coups.
10:51Est-ce qu'honnêtement, dans cette situation
10:53où même des hommes interdits de port d'armes en nombre,
10:56il ne faut pas, à un moment, se poser quand même la question ?
10:58Donc, vous proposez d'armer nos agents
11:01de la propriété ?
11:02Je propose rien du tout.
11:03Je m'étonne que la situation,
11:04la décision que vous avez prise il y a 10 ans,
11:06dans une situation que le procureur de la République lui-même...
11:09J'ai refait ce travail-là en 2017-2018.
11:11Le procureur de la République lui-même dit
11:13qu'il n'a jamais vu une situation
11:15telle que celle que l'on connaît
11:16ces tout derniers mois qu'on a.
11:17Ces tout derniers mois, oui.
11:18Et nous avons vécu des périodes de calme
11:20qui n'étaient pas très réjouissantes non plus
11:21parce qu'on ne se disait pas
11:22c'est pas parce que le calme est là
11:24que le trafic recule.
11:25Est-ce que vous diriez, Éric Piolle,
11:26qu'aujourd'hui, il y a un problème d'insécurité à Grenoble ?
11:28Oui.
11:29Tout le monde le sait.
11:30C'est factuel.
11:31Mais là aussi, revenons sur les choses factuelles
11:33puisque vous allez là-dessus.
11:35Sur les homicides,
11:36nous sommes en-dessous de la moyenne nationale.
11:39Sur les homicides,
11:40nous sommes 30% en-dessous des Alpes-Maritimes,
11:42par exemple, du département de M. Estrosi.
11:45Donc, prenons un peu de recul.
11:47Nous faisions la semaine dernière
11:49le bilan de l'été, justement,
11:50avec le directeur de la police,
11:52puis avec le préfet,
11:53en nous disant que cet été,
11:55il y avait ces épisodes extrêmement chauds,
11:57intradiles, avec ces fusillades
11:59et que pour le reste,
12:00nous avions, au contraire,
12:01passé un été avec très peu de délinquance,
12:03avec beaucoup de travail avec les jeunes,
12:05avec des jeunes qui étaient en tension de quartier entre eux
12:08et que nous avions réussi à faire partie ensemble
12:10en séjour,
12:11accompagnés par des éducateurs spécialisés,
12:14accompagnés par des médiateurs.
12:16Et donc, au contraire,
12:17nous voyons la richesse
12:18de ce que nous proposons à la jeunesse.
12:20Nous voyons cette ambition-là.
12:21Vous avez mis en place des comités locaux
12:23de prévention de la délinquance.
12:25Ça, ils se tiennent, voilà.
12:27Dans chaque secteur,
12:28on parle de situations concrètes,
12:29de tel jeune qui est en situation,
12:31qui est en train de se faire décrocher
12:33du système scolaire.
12:34Nous réfléchissons
12:36et nous mettons en place, là,
12:38pour que les jeunes qui sont exclus
12:40temporairement du collège
12:41puissent faire des stages à la police municipale.
12:43Nous faisons partir nos jeunes
12:45avec des policiers municipaux,
12:46avec des agents municipaux,
12:47à la fondation du camp des milles
12:49pour qu'ils réfléchissent aussi
12:51à l'histoire qu'ils s'imprègnent
12:53de tous ces préjugés, ces peurs,
12:55cette montée du totalitarisme.
12:57Nous faisons tout ce travail-là
12:58qui est un travail de fond.
13:00Moi, ce que je dis
13:01à la société française aujourd'hui,
13:03parce que je vois toutes ces fake news
13:05qui n'ont aucune pudeur pour une famille
13:07dont on voit toute la fierté
13:09qu'elle avait à être frère, fils, fille
13:13de cet homme extraordinaire,
13:16toute cette dignité qui est balayée
13:18par tout cela, je leur dis
13:20regardons ce que nous voulons faire ensemble
13:22plutôt que plonger dans nos passions
13:25les plus morbides.
13:26Donc oui, je ne pense pas
13:28que ce soit une bonne idée
13:30de pousser l'armement.
13:31C'était d'ailleurs dans notre tribune
13:32l'année dernière.
13:33Nous avons un problème
13:34avec la circulation d'armes,
13:35d'armes de guerre,
13:36et ça depuis l'explosion du bloc soviétique
13:39et des points de conflit en Europe,
13:41mais aussi d'armes de poing,
13:43on l'a vu là.
13:44Et non, nous n'armerons pas
13:46les agents de la propreté urbaine,
13:48nous n'armerons pas la population.
13:50Qui c'est qui se retrouve
13:52sur cet accident de la route le premier ?
13:56C'est ceux qui sont sur l'espace public.
13:59Ça m'est arrivé trois fois
14:01il y a quelques semaines.
14:03Si cette personne me retrouvait
14:05le premier sur un accident.
14:07On ne sait pas,
14:08on va là aider,
14:10on va au front,
14:11c'est cette première ligne,
14:13et on ne se dit pas,
14:14tiens, qu'est-ce qui va se passer ?
14:16On y va parce qu'on porte secours.
14:18Au-delà de la question des armes,
14:20des caméras,
14:21il y a des choses aussi
14:23apparemment anodines
14:24que la question de l'éclairage public.
14:26J'ai eu ce matin le témoignage
14:28au 3216 sur RMC
14:30de William,
14:31il travaille à Échirol,
14:32il est agent d'entretien
14:33et il travaille du coup très tôt le matin.
14:35Il prend son travail à 3h du matin
14:37et il dit,
14:38je suis obligé de me promener
14:39dans certaines rues de Grenoble
14:40avec une lampe frontale
14:42sur le front
14:43parce qu'on a éteint
14:44pour des questions écologiques
14:46l'allumage public
14:48dans des rues qui sont devenues
14:49des coupe-gorges.
14:50Je ne reprends que ces mots.
14:51Il m'a appelé
14:52alors qu'il revenait lui-même du travail.
14:53Vous reprenez des fake news, madame.
14:55C'est une fake news ?
14:56Oui, parce que nous sommes...
14:57Il n'y a plus aucune rue
14:59qui soit éteinte ?
15:00Nous sommes une des villes,
15:01nous avons réfléchi à cela,
15:02mais qui a décidé
15:03de ne pas faire d'éclairage nocturne.
15:05Donc il n'y a pas
15:06d'extinction nocturne.
15:07Donc il n'y a pas d'extinction...
15:08Aucune ?
15:09Aucune.
15:10Il n'y a pas d'extinction nocturne
15:11à Grenoble.
15:12Nous avons divisé par deux
15:13la consommation d'électricité
15:15sur l'éclairage,
15:16nous avons divisé par cinq
15:17la pollution lumineuse.
15:20Ça se voit maintenant
15:21quand vous montez dans les montagnes,
15:22vous voyez Grenoble,
15:24mais nous n'avons pas baissé
15:26l'éclairage des rues
15:27et nous n'éteignons pas la nuit.
15:28Donc regardez un peu
15:30toutes ces fake news.
15:31Il n'y a aucune rue ?
15:32Non.
15:33Il dit qu'ils sont plusieurs
15:34et ils ont appelé...
15:35Il était 6h du matin,
15:36il revenait du travail.
15:37Oui, écoutez, j'ai fait...
15:38Pour vous, il n'y a aucune rue
15:39dans laquelle il fait sombre.
15:40Il n'y a plus une rue
15:41dans laquelle il fait sombre.
15:42Ce n'est pas plus,
15:43c'est qu'il n'y a jamais eu
15:44d'extinction nocturne à Grenoble.
15:46Jamais.
15:47Vous vous rendez compte
15:48de tout ce qu'on colporte
15:49comme fake news sur n'importe quoi ?
15:50C'est très important
15:51que vous puissiez y répondre
15:52et honnêtement,
15:53tous ceux qui habitent là-bas
15:54pourront le dire.
15:55Je suis un leader politique
15:56engagé pour essayer
15:57de transformer la société.
15:58Vous avez l'impression
15:59que tout ça, c'est politique ?
16:00Ce n'est pas que politique
16:01parce que c'était
16:02une espèce de fachosphère,
16:03mais il n'y a rien
16:04que nous puissions faire,
16:07de construire,
16:08si nous continuons,
16:09à nous répandre
16:10dans des fake news
16:12en permanence.
16:13On va bientôt se retrouver
16:15comme aux US,
16:16avec un quart de la population
16:17qui pensera
16:18que la terre est plate.
16:19Mais quand Eric Vaillant,
16:21le procureur de la République,
16:23vous dit qu'il n'a jamais vu ça
16:24depuis sa prise de poste,
16:26que c'est devenu quand même
16:27non seulement des fusillades
16:30tous les deux ou trois jours
16:31pendant presque un mois,
16:32mais une véritable guerre
16:33des gangs.
16:34Lisez tout ce qu'il dit,
16:35le procureur Vaillant.
16:36J'ai tout lu, j'ai tout écouté.
16:37Il dit que quand il était arrivé
16:38à Grenoble,
16:39il avait, il s'est dit,
16:41tiens, voilà une ville
16:42qui est connue
16:43pour être un des spots en France,
16:45loin d'être le seul,
16:46malheureusement,
16:47mais où le trafic dépasse
16:49juste le cadre local.
16:51Et nous allons éradiquer cela.
16:53Ce qu'il dit maintenant,
16:54c'est non, nous allons essayer
16:55de bousculer ce trafic
16:57pour que les habitants
16:58n'aient pas l'impression
16:59de se sentir abandonnés
17:00et que si possible,
17:01on arrive à déplacer
17:02un peu le trafic
17:03pour que les gens...
17:04C'est juste pour faire plaisir
17:05aux habitants ?
17:06Non, pas du tout,
17:07c'est hyper important,
17:08ces missions.
17:09Moi, je suis tout à fait d'accord
17:10avec ce qu'il dit.
17:11Mais il n'est pas dans la logique
17:12des coups de menton
17:13de M. Sarkozy,
17:14de M. Valls,
17:15M. Darmanin,
17:16qui disent,
17:17ils plastronnent en disant
17:18allez, maintenant,
17:19tolérance zéro,
17:20maintenant, c'est la fermeté,
17:21maintenant, c'est,
17:22vous allez voir
17:23ce que vous allez voir.
17:24Et puis, on voit ce qu'on voit.
17:25Depuis 2002, Sarkozy,
17:26ministre de l'Intérieur,
17:28l'arrêt de la police
17:29de proximité,
17:30tout cela, nous avons vu
17:31ce que ça donnait.
17:32C'est un échec complet
17:33en termes de santé publique.
17:34L'explosion
17:35de la consommation
17:36de drogue,
17:37y compris dans vos milieux
17:38médiatiques,
17:39y compris dans les cabinets
17:40ministériels,
17:41y compris au Sénat,
17:42on l'a encore vu,
17:43partout dans la société française.
17:44Il n'y a aucun milieu
17:45qui ne soit épargné,
17:46effectivement.
17:47Le cannabis, la cocaïne,
17:48on ne prend pas en compte
17:49cette question de santé publique.
17:50Moi, je trouve ça flippant.
17:51Le Portugal,
17:52ils ont réussi
17:53à s'en sortir.
17:54Ils avaient été submergés
17:55après la révolution
17:56des œillets
17:57par une vague
17:58de consommation de drogue.
17:59Et comment ils s'en sont sortis
18:00pour vous ?
18:01En traitant la question
18:02sur le plan de la santé.
18:03Si des gens se droguent,
18:04ça veut dire
18:05qu'ils ont un problème
18:06de santé
18:07qui est lié à la performance
18:08qui est exigée
18:09dans leur travail,
18:10qui est liée
18:11à leur santé mentale.
18:12En tout cas,
18:13en englant le fait
18:14que se droguer,
18:15ça n'est pas neutre,
18:16que ce soit
18:17avec des médicaments légaux
18:18ou avec du cannabis.
18:19Pour vous,
18:20c'est plus un problème
18:21de santé
18:22qu'un problème de sécurité ?
18:23Non, parce que c'est un échec
18:24aussi en matière de sécurité.
18:25C'est un coup de menton.
18:26Vous vous rappelez
18:27de Sarkozy-Deval ce matin.
18:28On fait quoi maintenant ?
18:29Nous avons proposé,
18:30nous, maires de grandes villes,
18:31des solutions là,
18:34qui ont été d'ailleurs
18:35assez largement reprises
18:36dans le rapport parlementaire
18:37sorti en janvier dernier
18:39sur le narcotrafic au Sénat,
18:41en disant
18:42attaquons-nous
18:43à la question de la santé,
18:44attaquons-nous
18:45à la question du patrimoine
18:46des gros bonnets de la drogue
18:47parce que ça s'internationalise
18:49et maintenant les gros bonnets
18:50sont à l'extérieur.
18:51Les gros bonnets
18:52mais aussi les petits
18:53parce que par exemple
18:54que l'on tienne compte
18:55des revenus illicites de la drogue
18:57intégrés dans les revenus sociaux
18:59pour pouvoir aussi expulser
19:00ceux qui bénéficient
19:01de logements sociaux
19:02alors qu'en réalité
19:03il y a leurs revenus officiels
19:04et il y a leurs revenus officieux
19:06qui devraient être pris en compte.
19:07Est-ce que vous y êtes favorable ?
19:08Ça commence à être
19:09effectivement intégré
19:10dans certains revenus parfois
19:12et ça marche.
19:13Je rappelle quand même
19:14que c'est le président Macron
19:15qui a décidé d'intégrer
19:16le trafic de drogue
19:17dans le PIB français.
19:18Ça devrait nous faire réfléchir
19:19quand même.
19:20Quand le président de la République
19:21dit ok, bon en fait
19:22c'est un bon business.
19:234 milliards, ça fait partie
19:24de la croissance française.
19:25Peut-être que nous avons
19:26un léger problème
19:27quand on a un échec
19:28en matière de...
19:29Vous êtes pour la légalisation
19:30des revenus du cannabis ?
19:31De la vente du cannabis ?
19:32Je suis effectivement...
19:33Moi je n'ai jamais fumé,
19:34je ne me suis jamais drogué.
19:35Je suis arrivé,
19:36j'étais citoyen
19:37avant de m'engager
19:38contre la légalisation.
19:39J'ai regardé en étant élu
19:40finalement c'est quoi
19:41une politique publique
19:42en matière de lutte
19:43contre la drogue,
19:44en matière de lutte
19:45contre les addictions.
19:46Et je suis devenu effectivement
19:47en lisant les rapports
19:48de tous ceux qui ont échoué
19:49aux Etats-Unis
19:50dans les années 80
19:51et 90
19:52et qui fait que maintenant
19:53aux Etats-Unis
19:54on légalise,
19:55en lisant ce qui s'est passé
19:56au Portugal
19:57et comment ils sont sortis,
19:58en lisant les rapports
19:59des anciens ministres
20:00de l'Intérieur français
20:01qui disent
20:02une fois qu'ils sont passés
20:03pour ceux qui sont lucides...
20:04Qui n'osent pas le dire
20:05quand ils sont en poste
20:06mais qui disent après.
20:07Ah finalement en fait
20:08on s'est gaufré,
20:09c'est pas ça qu'il faut faire.
20:10Moi je dis juste
20:11qu'une politique
20:12qui était en échec
20:13sur le plan de la santé,
20:14qui était en échec
20:15sur le plan de la sécurité,
20:16qui était en échec
20:17sur le plan aussi
20:18de l'utilisation de nos moyens,
20:20à la petite cuillère,
20:21mais ils en ont marre aussi
20:23de côtoyer
20:24des chauffeurs
20:25qui surveillent
20:26le trafic de drogue
20:27dont ils ne peuvent rien faire,
20:28de faire des opérations
20:29place nette,
20:30je fais des stages d'immersion
20:31donc j'ai passé trois semaines
20:32à être
20:33là à la propreté urbaine
20:34dans une ville
20:35limitrophe de Grenoble
20:36avec des...
20:37Vous-même,
20:38vous Eric Kiel.
20:39Moi,
20:40j'ai fait ça aussi
20:41dans un EHPAD,
20:42j'ai fait ça dans une crèche.
20:43Je fais trois semaines
20:44à temps complet
20:45pour partager le quotidien
20:46des travailleurs de première ligne
20:47et pour sentir
20:48de façon plus
20:49corporelle, physique.
20:50C'est la fin de cette interview ?
20:51Oui, je fais ça,
20:52j'ai vu les opérations place nette
20:53le lendemain matin
20:54à 7h dans notre prise de poste,
20:55tout le monde était là,
20:56il y avait dix l'intérim
20:57qui étaient passés par là.
20:58Quand on est en échec
20:59en matière de santé,
21:00de sécurité
21:01et d'utilisation
21:02de nos moyens de police
21:03et de force de l'ordre
21:04et gardien de la paix,
21:05il faut changer de politique,
21:06il n'y a pas de secret.
21:07Ce n'est pas ça
21:08qui nous ramènera Lilian
21:09et je veux conclure là-dessus
21:10parce que j'ai vraiment
21:11une pensée
21:12pour tous les agents publics
21:14Ils sont là
21:15pour mener des tâches
21:16qui sont souvent invisibles
21:17et qui sont essentielles
21:18à la société.
21:19Merci Éric Piolle,
21:20maire de Grenoble
21:21et je précise
21:22parce que mon équipe a vérifié
21:23qu'effectivement
21:24l'éclairage n'est pas coupé
21:25mais il est réduit
21:26dans certains quartiers
21:27de votre ville.
21:28Juste pour que les choses
21:29soient précises et factuelles
21:30après les déclarations
21:31de William ce matin.
21:32Il est réduit,
21:33en termes de luminosité
21:34vous pouvez venir avec moi,
21:35vous ne le verrez pas.
21:36Merci beaucoup Éric Piolle.

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