• il y a 2 mois
Après avoir été placée en redressement judiciaire en avril 2024, Duralex s’est relevé en devenant une SCOP. Nicolas Rouffet, directeur industriel de Duralex, nous explique en quoi ce nouveau statut leur permet d’assurer leur avenir ainsi que le bien-être des salariés.
En partenariat avec le salon Produrable (9 et 10 octobre 2024).

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Transcription
00:00L'invité de Smart Impact, c'est Nicolas Rouffet, bonjour.
00:09Bonjour Thomas.
00:10Bienvenue, vous êtes le directeur industriel de Duralex, entreprise placée en redressement
00:14judiciaire en avril dernier, reprise par ses 226 avants et 24 avril 2024 pour être précis,
00:22il y a cinq mois.
00:23Si on remonte un peu le temps, vous étiez dans quel essai d'esprit ce jour-là ? Abattu
00:27ou déjà dans la perspective ?
00:28Abattu, un petit peu un coup de massue, on savait qu'effectivement les résultats n'étaient
00:33pas forcément là.
00:34L'année 2023 avait été particulièrement difficile, on n'était pas dans une grande
00:40forme, les chiffres étaient bons mais n'étaient pas suffisants, n'étaient pas suffisamment
00:44profitables.
00:45Mais ça a quand même été un coup de massue, on a eu un coup de massue, après il a fallu
00:52s'organiser, se dire qu'est-ce que ça veut dire être en redressement judiciaire, comment
00:57est-ce que tout va s'organiser, parce que là vous avez un mandataire judiciaire, vous
01:01avez toute une équipe qui vient avec vous, qui vient travailler avec vous, c'est une
01:06nouvelle façon de travailler.
01:07Donc on s'est mis dedans.
01:08Et à quel moment vous vous dites, on va reprendre l'entreprise ?
01:11C'est arrivé quelques semaines après, au courant du mois de mai, puisque finalement
01:16l'objectif de cette mise en redressement judiciaire, c'était de reprendre l'entreprise.
01:23Ils ne voulaient pas liquider l'entreprise, liquider Duralex, c'est quand même un fleuron
01:26de l'industrie française.
01:27Que cette usine soit reprise, cette marque, que cette usine soit reprise.
01:30Donc il y a des dossiers qui sont arrivés, il y a des repreneurs qui sont arrivés extérieurs,
01:34qui ont analysé, qui nous ont posé des questions, qui sont venus visiter.
01:37Et quand on a vu la plupart des dossiers où il y allait y avoir de la casse sociale, il
01:41y allait y avoir moins 50, moins 100 personnes, déjà on se dit maintenant c'est pas possible.
01:47Déjà nous à 226 on est juste, pour Duralex ça va être très compliqué, et en plus
01:53de ça, d'avoir des gens qui disent mais pourquoi dans ces services-là, ces gens-là
01:57sont payés ce prix-là, ce ne sont que des petites mains, ils devraient être au SMIC.
02:01Et en fait il y avait des attitudes, des choses, et on se disait mais en fait ça va être
02:04encore un fonds, ou encore des actionnaires qui vont prendre pour dégraisser la bête.
02:11Et donc là on s'est dit non c'est pas possible, il faut qu'on fasse quelque chose,
02:15on a commencé, voilà, et il y a des syndicats qui étaient avec nous, et qui ont dit non
02:20mais oui, qu'est-ce qu'on peut faire ? Et on s'est dit, modélez le scope.
02:23Donc le modèle scope, on rappelle en quelques mots comment ça marche, c'est une coopérative,
02:27c'est-à-dire que tous les salariés sont en quelque sorte actionnaires, propriétaires
02:31d'entreprises.
02:32Aujourd'hui, ce n'est pas 100% des salariés, on a fait une réunion avec tous les salariés,
02:40on a présenté le modèle, on s'est fait aider par des gens spécialisés dans les
02:43scopes, on a fait des réunions d'informations, et aujourd'hui sur 226 salariés, il y a
02:51138 salariés qui sont actionnaires.
02:53Il y a une partie qui sont contre, une partie qui se posent des questions, qui hésitent,
02:59et qui vont venir dans le temps quand les chiffres vont arriver je pense, mais voilà,
03:03donc en fait oui, il y a aujourd'hui 138 salariés qui sont actionnaires.
03:06Ils pourront arriver en cours de route.
03:07Bien sûr, on va rouvrir le capital et on va, on peut, voilà.
03:12Alors il faut peut-être expliquer un peu comment ça fonctionne, c'est impossible
03:17de faire des plus-values en revendant ses parts, c'est ça aussi l'un des principes
03:21de la scope.
03:22C'est pas de l'actionnariat comme on peut, voilà, qu'on fait avec un PEA par exemple,
03:26non non non, bien sûr, on a une part, cette part, voilà, on a des droits de vote pendant
03:32les assemblées générales, c'est-à-dire que chacun des salariés actionnaires, qu'ils
03:37soient ouvriers dans tel ou tel service, ou qu'ils soient directeurs, ou qu'ils soient,
03:41on a tous le même droit de vote.
03:43Oui c'est ça, une voix.
03:44C'est-à-dire que moi je ne suis directeur, je n'ai pas quatre voix de plus que quelqu'un
03:47d'autre, j'ai une voix.
03:48Ça c'est quand même très important et c'est très intéressant dans ce modèle-là.
03:51Et alors, vous avez participé dans le cadre de ce salon Pro Durable à une table ronde,
03:57où on va beaucoup parler de bien-être des salariés.
04:00Ça devient quoi ? Ça devient en quelque sorte la ligne directrice du RALEX, je ne
04:05dis pas que ça ne l'était pas avant, mais le fait d'être organisé en scope, est-ce
04:09que ça a forcément un impact sur cet objectif ?
04:13Alors effectivement, aujourd'hui, on est déjà convaincu, avant d'être en scope,
04:19convaincu que le bien-être des salariés, c'est un pilier de la réussite des entreprises,
04:24des organisations.
04:25Pour avoir des performances durables, pour atteindre des performances durables, il faut
04:30valoriser l'humain.
04:31Et je pense qu'effectivement, le modèle scope accentue cette valorisation, puisque
04:38même si d'ores et déjà on demandait l'avis de chacun, même si déjà on travaillait
04:41avec chacun, là, les gens vont se sentir encore plus impliqués et ça va forcément,
04:49inévitablement selon nous, augmenter la performance de l'entreprise.
04:53Mais est-ce que ça veut dire que le management va être différent ?
04:56Non, aujourd'hui, on reste sur l'organisation telle qu'elle était avant, c'est-à-dire
05:04qu'il y a des services, des chefs de service, des directeurs, on reste sur la même organisation
05:08qu'avant.
05:09On a toujours, même avant le redressement judiciaire, prôné un management bienveillant.
05:17Enfin, bienveillant, on va dire, un équilibre parfait entre la bienveillance et l'exigence.
05:22Voilà, on fait quand même un petit peu l'exigence pour avancer, mais c'est cet équilibre-là.
05:26Aujourd'hui, ça, ça ne va pas changer.
05:27Néanmoins, comme il va y avoir des assemblées générales, comme il va y avoir toutes les
05:33grandes décisions seront soumises à vote, par exemple, on va acheter, j'en parlais
05:37tout à l'heure avec des personnes, sur tel ou tel produit, donc ça va nécessiter
05:42des investissements.
05:43Et ces investissements-là, ça ne va pas être juste le directeur général et moi qui
05:48vont dire, tiens, on va investir, on va dépenser un million d'euros, non, ça va être soumis
05:51à des votes.
05:52Donc, effectivement, les gens vont être plus impliqués et le management, du coup, effectivement,
05:56je pense que ça va découler vers peut-être plus d'écoute encore des salariés.
06:02Les dettes, elles ont été apurées par le redressement judiciaire.
06:06En revanche, il y a des prêts bancaires, ça vous met une sorte de pression, ça ?
06:09Oui, alors, dans ce que l'on a construit avec les banques, et on s'est fait aussi
06:14de la région, de la métropole, nous ne sommes endettés qu'à hauteur de 4 millions d'euros,
06:19là où les dossiers concurrents étaient à presque 15 millions d'euros.
06:22Donc, on endette la société que d'eux, c'est quand même beaucoup, 4 millions, mais pour
06:26une entreprise qui fait en moyenne entre 30 et 35 millions d'euros, c'est raisonnable.
06:32Mais effectivement, ça met une pression, parce qu'aujourd'hui, il faut qu'on réussisse.
06:38Oui, mais alors, qu'est-ce qui se passe si les prix de l'énergie se remettent à flamber ?
06:42Parce que c'est pas la seule, mais c'est l'une des raisons des difficultés de la vie de l'entreprise.
06:46Oui, en 2022, quand les prix de l'énergie ont flambé, c'était très compliqué.
06:50Qu'est-ce qui se passe ici ?
06:53Alors, aujourd'hui, nous, voilà, si on repart, en fait, nous, on est déjà en train de travailler,
06:58on a déjà commencé à travailler avant la présentation du dossier au tribunal,
07:00mais aujourd'hui, nous sommes déjà en train de négocier les contrats 2025,
07:07pour le gaz et pour l'électricité, sachant qu'on consomme, nous, plus de gaz que d'électricité,
07:10mais pour ces deux énergies-là, et en fait, l'idée du contrat, c'est de fixer un prix.
07:15C'est-à-dire qu'on va payer, je ne sais pas, par exemple, le mégawatt-heure de gaz, 40 euros.
07:20S'il y a une flambée derrière, nous, on paiera toujours 40 euros.
07:23Par contre, s'il diminue, malheureusement, on paiera quand même 40 euros.
07:25C'est le principe.
07:26Mais non, aujourd'hui, c'est de signer des contrats qui nous garantissent un prix de l'énergie.
07:32Est-ce que, dans les raisons pour lesquelles Duradex a été en difficulté,
07:35il y a eu aussi un peu de, comment je peux dire ça, d'endormissement
07:39ou d'un manque d'innovation, de création, de créativité ?
07:42Oui, je pense que oui, parce que là, avec tout ce qui se passe depuis le 1er août,
07:47et encore plus depuis la rentrée, avec l'opération qu'on a lancée à 11 enfants de la cantine,
07:51en collaboration avec le Slip français, on a beaucoup de retours.
07:54On a beaucoup de messages de soutien, on a beaucoup de messages de gens.
07:57On a vu, là, pour ce week-end, il y avait, pour les journées de patrimoine,
08:04en fait, il y avait une grande exposition Duradex aux Galeries Lafayette d'Orléans.
08:08Et beaucoup de gens sont venus, ont discuté, ont échangé.
08:10Et oui, ils ont dit qu'il y avait eu comme un endormissement.
08:13Alors, il y a eu des nouveautés, des nouvelles couleurs, quelques formes, quelque chose comme ça.
08:17Mais derrière, la communication n'était pas assez forte.
08:19Et en fait, les Français, notamment les Français, avaient peut-être l'impression que,
08:23oui, Duradex s'est endormi et Duradex s'est resté le verre de cantine.
08:27Et en fait, c'est bien plus que ça.
08:28Et donc, ça va passer par des innovations, des nouveaux produits, mais aussi des partenariats.
08:32Vous avez cité celui avec le Slip français à 11 enfants de la cantine.
08:37Il y en a aussi un avec La Poste, c'est ça ?
08:38C'est ça. Pour la fin de l'année, pour Noël, donc à partir du 15 novembre jusqu'au début de l'année prochaine,
08:44voilà, un partenariat avec La Poste où pareil, on va faire un coffret de 6 verres.
08:50On part sur des mugs, sur des mugs colorés.
08:52Et ça sera disponible dans chaque point de vente de La Poste.
08:55Et l'ambassadeur de cette collaboration sera Stéphane Bern, et Stéphane Bern d'ailleurs.
09:02Pourquoi ? Parce que c'est du patrimoine d'une certaine façon ? Duradex, c'est notre patrimoine ?
09:05C'est du patrimoine. C'est un fleuron de l'industrie française depuis 1945, bientôt 80 ans.
09:12Et oui, c'est du patrimoine puisque ce qu'on disait, c'est qu'on a tous en tête,
09:17dans les années 70-90, c'était « t'as quel âge ? », on regardait dans le fond du verre.
09:23Et ça, ça fait partie des souvenirs de chacun. Et ça, c'est du patrimoine.
09:27Après, nous, charge à nous aussi de communiquer sur « Duradex n'est pas que le verre de cantine ».
09:32On a 380 modèles, on a des super verres à cocktail, à whisky, on a des mugs, on a tout un tas de choses.
09:40Il faut montrer finalement cette diversité des produits Duradex.
09:46Merci beaucoup Nicolas Ruffet. Bon vent à cette nouvelle aventure coopérative de Duralex et Bon Salon Produrable.
09:53Évidemment, on passe à notre débat. Quand la CSRD s'impose, on pourrait presque parler de révolution intellectuelle.

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