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00:00On retrouve Fabrice Balanche, maître de conférences à Lyon 2, spécialiste du Moyen-Orient.
00:04Bonjour, merci d'être avec nous.
00:06Que cherche le Premier ministre israélien Netanyahou ?
00:09Est-ce qu'il cherche la guerre avec l'Iran ?
00:12Oui, ça c'est le but ultime, effectivement.
00:15L'Iran est vraiment en ligne de mire.
00:18Netanyahou n'attend qu'une réaction iranienne du type de celle qu'on a eue au mois d'avril,
00:24de ces 300 missiles et drones lancés sur Israël
00:28pour aller frapper directement le territoire iranien,
00:32en espérant entraîner avec lui, évidemment, les Etats-Unis.
00:35Mais là, ça sera, à mon avis, plus difficile.
00:38Est-ce qu'il faut s'attendre à d'autres opérations israéliennes dans un court terme,
00:42à une incursion au sol de l'armée israélienne ?
00:44On sait que la guerre a été un désastre pour les civils libanais en 2006
00:48et que le dernier jour de cette guerre,
00:49le Hezbollah lançait encore des salves de roquettes sur l'État hébreu.
00:54Tout d'abord, Israël va continuer ses bombardements sur le Liban
00:58pour éliminer l'arsenal de missiles qui se trouve au Liban.
01:04Peut-être qu'il a détruit, allez, maximum 10% de la capacité militaire du Hezbollah.
01:11On a plus de 100 000 missiles et roquettes.
01:14Le Hezbollah, pour l'instant, n'a lancé finalement que des roquettes
01:17et quelques missiles de moyenne portée,
01:19mais c'est rien par rapport à ce qu'il a encore en ce moment.
01:23Donc il faut d'abord qu'Israël se débarrasse de ça.
01:25Parce qu'il faut bien comprendre que ces missiles fournis par l'Iran au Hezbollah,
01:30c'était en fait la capacité de dissuasion iranienne,
01:33en attendant d'obtenir la bombe atomique,
01:36pour dissuader Israël et les États-Unis d'attaquer son territoire.
01:41Puisque pour les États-Unis, la sécurité d'Israël,
01:43c'est comme si c'était la sécurité d'un État américain.
01:46Donc il faut d'abord se débarrasser de ce stock
01:49pour ensuite éventuellement pouvoir aller frapper l'Iran.
01:53Mais cet objectif, il est atteignable d'après vous ?
01:57Oui, il est atteignable.
01:59On a trois jours de guerre.
02:00Ils ont déjà éliminé Nasrallah
02:04et puis l'essentiel des cadres du mouvement.
02:07Bon, on voit des centaines de frappes israéliennes
02:11et les explosions qui suivent, qui montrent qu'ils atteignent leurs frappes.
02:16Et là, ce qui peut se produire, c'est qu'évidemment,
02:18pour se venger, le Hezbollah utilise finalement ce stock
02:23pour frapper Israël et essayer de saturer le dôme de fer
02:27et de faire des dégâts en Israël.
02:29Mais l'argument de la légitime défense
02:31qui est donc invoqué par le gouvernement israélien,
02:33est-ce qu'il n'a pas une grande faiblesse, un écueil,
02:35qui est celui de l'absence de toute solution politique ?
02:39Bon, ça fait un an quand même que le Hezbollah lance des roquettes sur Israël,
02:46il a des discours menaçants à l'égard d'Israël,
02:48donc Netanyahou peut s'appuyer là-dessus en termes de légitime défense.
02:53Partons du principe que l'attaque étant la meilleure des défenses.
02:57Solution politique ?
03:00Non, il pense qu'il faut d'abord écraser le Hezbollah,
03:05réduire sa capacité de nuisance et ensuite éventuellement négocier.
03:10Mais pas négocier comme en 2006, avec une résolution 1701
03:14qui demandait la démilitarisation du sud de Liban, le retrait du Hezbollah
03:18et résolution finalement qui n'a jamais été appliquée
03:21puisque le Hezbollah est revenu dans le sud très facilement,
03:24malgré la présence des casques bleus.
03:26Donc là, il faut véritablement, si on veut solution politique,
03:30qu'Israël ait les assurances qu'il ne sera plus menacé depuis Liban.
03:35Mais d'anciens chefs haut placés du Shin Bet,
03:38dans le documentaire The Gatekeepers,
03:40disaient exactement le contraire
03:42et qu'ils étaient en train de préparer,
03:44qu'avec cette politique qui est suivie par le gouvernement israélien,
03:47est-ce qu'ils ne sont pas en train de préparer des futurs combattants,
03:49des futurs terroristes qui n'auront qu'un seul but,
03:53la revanche pour des générations à venir ?
03:57Ça c'est malheureusement depuis la création d'Israël,
04:02l'expulsion des Palestiniens, les différentes guerres,
04:05la guerre civique libanaise, la guerre de 2006,
04:08on a des nouvelles générations qui, en permanence, se préparent à se venger.
04:13Donc effectivement, comme je vous l'avais dit dans les émissions précédentes,
04:17au moins pour 10 ans, Israël espère être tranquille vis-à-vis du Liban.
04:24Ce qui peut se produire au Liban, et ça c'est très dangereux,
04:27c'est les conséquences de cette mort,
04:29c'est que les chiites cherchent à se venger sur les autres communautés.
04:35Il y a des chrétiens qui pourraient être accusés d'être des alliés d'Israël.
04:40On a vu par exemple un dirigeant, Samir Gemayel,
04:44il me semble, critiquer ouvertement Nassrallah.
04:47Normalement ça ne se fait pas, Nassrallah c'est le Dieu vivant,
04:49il a toujours raison, il faut être solidaire de la cause.
04:52Et là, il prend des risques.
04:55On se souvient quand il y a eu la mort de Beshir Gemayel,
04:59le massacre de Sabra et Shatila par les forces libanaises chrétiennes.
05:04On se souvient avant la mort de Kamal Jumlat pendant la guerre civile,
05:08et l'Hydrus qui massacre les chrétiens.
05:10Donc le Liban est dans une situation de près guerre civile,
05:15parce qu'en plus un Hezbollah affaibli,
05:18ça veut dire que tous ceux qui ont subi le Hezbollah pendant des décennies au Liban
05:21vont vouloir eux aussi chercher à se venger,
05:24peut-être pas en l'affrontant directement,
05:26mais en affrontant les mouvements qui lui sont proches,
05:30dans le nord Liban par exemple, je pense au PNSS,
05:33le Parti National Syrien Socialiste,
05:35qui pourrait être attaqué par des groupes sunnites anti-Hezbollah.
05:41J'ai vu que Michel Barnier, le Premier ministre,
05:44était inquiet par rapport à l'avenir du Liban,
05:46et il a raison parce qu'on peut replonger dans une situation de chaos et de guerre civile au Liban.
05:51Merci beaucoup, merci infiniment Fabrice Balange pour votre analyse sur France 24.