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Invitée de France Bleu Nord ce mercredi, la directrice régionale de la fondation Abbé-Pierre, Isabelle Fourot, présente le dernier rapport de la fondation sur l'état du mal-logement dans les Hauts-de-France.

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00:00Bonjour Isabelle Fauron, selon les chiffres que vous dévoilez, ce matin 300 000 personnes
00:04dans notre région vivent dans un logement qualifié d'indigne, nous avions d'ailleurs
00:08un témoignage tout à l'heure à 7h, un logement indigne c'est de l'humidité, c'est de la
00:11précarité énergétique, ce sont des installations électriques qui ne sont pas aux normes, c'est
00:14tout ça cumulé, c'est comme ça que vous qualifiez, que vous arrivez à repérer ces
00:18logements ? Oui globalement un logement indigne c'est
00:21un logement qui peut porter atteinte soit à la sécurité, soit à la santé des personnes
00:25et plus largement à leur dignité, donc on est allé nous aussi à la rencontre de
00:29personnes en situation d'habitat indigne pour comprendre un peu leur parcours et voir
00:34comment elles vivaient cette situation, et ces parcours ils sont extrêmement diversifiés,
00:39on a des locataires, si ce n'est de marchands de sommeil, de propriétaires peu scrupuleux
00:46avec des défauts électriques effectivement, des problèmes d'étanchéité et lorsque
00:52la locataire fait des réclamations c'est des menaces de la part de propriétaires d'être
00:55expulsé, de signalement auprès des services de l'enfance, etc.
00:57Et la justice qui met aussi du temps à réagir, ça aussi vous le soulignez dans votre rapport,
01:01quand effectivement des réclamations sont faites, que des locataires sont en droit de
01:04demander de vivre dans un logement indigne, ça ne se fait pas tout de suite, les procédures
01:07sont trop longues ? Oui, l'ensemble des procédures sont assez
01:10longues, alors il faut prendre des arrêtés d'insalubrité ou arrêtés d'insécurité
01:14qui prennent beaucoup de temps, suivre ensuite les prescriptions et effectivement il peut
01:17y avoir des poursuites civiles ou pénales avec des délais d'endurancement et des jugements
01:22qui sont extrêmement longs, de l'ordre de 2-3 ans dans l'agglomération lilloise.
01:26Et tant qu'on parle des locataires, il y a aussi un sujet sur les logements sociaux,
01:29qui sont gérés par des bailleurs sociaux, et là aussi les délais sont très longs
01:33parfois pour avoir une intervention pour un problème d'humidité, par exemple ça peut
01:36rester pendant plusieurs mois ? Oui, alors globalement c'est quand même
01:39moins le parc locatif social qui est concerné par la vie indigne, mais ce qu'on a effectivement
01:44constaté c'est qu'il y avait de plus en plus de signalement de la part de locataires
01:48pour des moisissures, présence de nuisibles, déficit de qualité thermique, et les bailleurs
01:54sociaux sont tellement fragilisés qu'ils ont effectivement des difficultés, fragilisés
01:57financièrement j'entends, qu'ils ont des difficultés pour assurer le maintien, l'entretien
02:02de leur logement.
02:03Ceci dit, malgré ces difficultés objectives, on note qu'effectivement il y a beaucoup
02:07beaucoup de délais de réponse, de gestion des réclamations et d'intervention, et donc
02:11on a rencontré Hélène, locataire qui signale depuis 8 ans des moisissures, on est allé
02:16chez elle, il y a des moisissures sur tout le plafond, et le bailleur n'est jamais intervenu.
02:20Et il y a également des propriétaires aussi dans votre rapport, et là on touche une problématique
02:25peut-être plus large du taux de pauvreté qui a augmenté, d'ailleurs notre région
02:28on est 3,5% au-dessus de la moyenne nationale ici dans les Hauts-de-France, là ce sont
02:32des propriétaires qui n'ont pas les moyens parfois de faire les travaux chez eux pour
02:35vivre dans un logement digne qui est le leur pourtant.
02:38C'est ça oui, effectivement on ne pense pas spontanément aux propriétaires occupants
02:41quand on parle de logements indignes, mais en fait il y a beaucoup de situations par
02:44exemple de retraités qui habitent depuis très longtemps dans leur logement qui s'est
02:48peu à peu dégradé et qui n'ont pas l'épargne nécessaire ou une retraite suffisante pour
02:52engager des travaux.
02:53C'est aussi des accès dans la propriété qui ont mis toutes leurs économies dans l'acquisition
02:58du logement et ne peuvent pas engager ces travaux.
03:00Et on voit effectivement qu'il y a beaucoup de difficultés à pouvoir monter un dossier
03:04d'aide et trouver les financements pour financer le reste à charge de ces travaux qui sont
03:09souvent extrêmement chers, on a beaucoup de travaux qui dépassent 90 000 euros pour en
03:13mettre vraiment en état la maison.
03:147h48, vous êtes dans Ici Matin et nous sommes en direct avec Isabelle Fourreau, directrice
03:19régionale de la Fondation Abbé Pierre.
03:21Isabelle Fourreau, il y a le constat que vous faites dans ce rapport, il y a aussi les solutions
03:26à apporter, les solutions que vous proposez.
03:27Le premier axe c'est la construction de logements neufs, c'est la priorité.
03:31Plus il y aura de logements neufs, plus il y aura de logements qui n'auront pas de problématiques
03:36d'insalubrité, c'est ça la priorité aujourd'hui.
03:38En tout cas c'est vrai que le mal logement et l'habitat indigne il se nourrit des difficultés
03:42d'accès aux logements qui sont de plus en plus importantes.
03:45Un nombre de demandeurs de logements sociaux a encore augmenté cette année et en parallèle
03:49la construction de logements s'effondre, aussi bien logements privés que logements
03:53sociaux.
03:54Donc effectivement il faut développer du logement, soit dans le bâti existant, soit
03:59de la construction nouvelle, mais il faut développer l'offre pour pouvoir répondre
04:02à des besoins qui continuent d'augmenter.
04:03Il y a aussi tout le débat autour de la rénovation énergétique.
04:07D'une part ça peut permettre de rendre des logements moins indignes, moins insalubres,
04:11mais on revient aux bailleurs sociaux où ils disent qu'on a énormément de frais
04:15à engager justement avec l'obligation de rénover les logements et ce qui explique
04:19aussi une partie du problème des bailleurs sociaux aujourd'hui qui n'ont plus assez
04:22d'argent, puisqu'ils dépensent tout en rénovation.
04:24On est quand même dans une espèce de cercle vicieux avec cette problématique.
04:27Oui, alors on a quand même beaucoup de déceptions sur le sujet.
04:30Il y avait eu un engagement du précédent gouvernement d'accompagner plus de réhabilitations.
04:36Tous les crédits ont été gelés cet été, ces 44 millions d'euros qui sont repartis
04:40à Paris en septembre, 4800 logements qui ne seront pas réhabilités finalement dans
04:45les Hauts-de-France.
04:46Et donc on déplore le manque d'engagement et d'investissement aux côtés des organismes
04:52HM pour produire et pour rénover, parce que ce n'est pas de l'investissement à perte,
04:55c'est aussi des coûts évités demain, effectivement vous le disiez, de charges d'électricité,
04:59de santé aussi.
05:00Et Michel Barnier justement, le nouveau Premier ministre, a fait sa déclaration de politique
05:04générale hier.
05:05Il a été question du logement, il a parlé du prêt à taux zéro pour relancer l'accès
05:10à la propriété.
05:11Il veut aussi que les bailleurs sociaux puissent examiner régulièrement les revenus locataires
05:14pour adapter le loyer.
05:15Il y a des choses positives que vous retenez de ce discours ? On a un nouveau gouvernement,
05:19est-ce que vous le voyez plutôt d'un bon oeil ou pas ?
05:21La difficulté qu'on a, c'est qu'on a l'impression que le niveau d'urgence sociale n'a pas été
05:26entendu.
05:27Il n'y a aucune annonce sur du soutien au logement social, il n'y a aucune annonce sur les 300
05:31000 personnes dépourvues de logement, on rappelle que c'est un chiffre qui a été
05:35multiplié par deux en dix ans, et par ailleurs il y a un recul sur les ambitions écologiques,
05:40le zéro artificialisation net, le report de l'interdiction de mise en location de passoires
05:45énergétiques.
05:46Donc c'est difficile de retenir en réalité des choses très positives de ces annonces.
05:51Pas non plus fait, parce que ça reste un gouvernement sans majorité, donc il y aura
05:54peut-être certaines mesures qui ne passeront pas.
05:56Oui, on est surtout sur des annonces de simplification de normes, qui sont des mesures un peu éculées,
06:02qui n'ont pas fait la preuve de leur efficacité pour pouvoir vraiment contrer une crise du
06:06logement qui est extrêmement grave et extrêmement durable.
06:09Isabelle Fourreau, la Fondation Abbé Pierre doit faire face depuis cet été aux accusations
06:14qui sont portées contre l'Abbé Pierre, des accusations de viol, d'agression sexuelle,
06:17est-ce que ces accusations mettent en danger aujourd'hui votre fondation et le travail
06:21que vous faites au quotidien ?
06:22Pas le travail qu'on fait au quotidien, c'est évident, on a mis en avant quelques chiffres
06:28extrêmement préoccupants, on est tous les jours alertés par des personnes en situation
06:32de précarité, on agit aux côtés des acteurs associatifs, donc le combat il reste le même
06:37et on sera là pour le conduire.
06:39Après, oui, c'est une période difficile pour nous, on va changer de nom, l'annonce
06:44a été faite, ça prendra un petit peu de temps, donc voilà, il faut se projeter dans
06:48l'avenir, mais clairement, ni nos combats ni nos revendications ne changent.
06:52C'est-à-dire que les gens que vous rencontrez arrivent à faire la part des choses entre
06:55l'Abbé Pierre, ce qui s'est passé, ces accusations très graves, et la fondation
06:59qui porte son nom, le travail que vous faites, vous arrivez à dissocier les deux ?
07:03Pour le moment, en tout cas, on a reçu beaucoup de messages de soutien et c'est vraiment
07:08encourageant pour la suite.
07:09Merci beaucoup Isabelle Faureau d'avoir accepté ce matin l'invitation de France Bleu Nord,
07:12directrice dans les Hauts-de-France, donc directrice régionale de la fondation Abbé Pierre.
07:16Bonne journée !

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