Category
📺
TVTranscription
00:00Monsieur le Président, Monsieur le Premier Ministre, vous me permettrez de débuter mon propos en écho à ce que vous avez dit s'agissant de la situation et de la crise internationale.
00:16La France devra agir pour la paix et la sécurité face à la montée des tensions au Moyen-Orient.
00:24Nous ne pouvons ni oublier nos deux compatriotes encore otages du Hamas, ni tous les autres otages, ni ceux qui ont succombé à la barbarie des terroristes.
00:36Nous ne pouvons pas non plus rester aveugles à la souffrance des populations israéliennes, populations civiles, libanaises et palestiniennes.
00:45Sous votre impulsion, je suis certain que notre pays restera ainsi fidèle à son histoire, à ses valeurs, à sa tradition diplomatique et à ses alliés.
00:57Monsieur le Premier Ministre, en acceptant de conduire le gouvernement de la France, vous avez accepté l'une des missions les plus éminentes de la République.
01:08Dans la période la plus incertaine et certainement la plus difficile de notre histoire récente, vous n'avez pas jaugé l'abîme, mais la façon d'entamer un difficile chemin de crête.
01:22Monsieur le Premier Ministre, vous avez fait le choix d'assumer cette responsabilité, comme ces maires qui s'engagent dans leur commune quand la situation semble insoluble et les bonnes volontés introuvables.
01:36Et sur tous les bancs de cette Assemblée, de ceux qui partagent vos vues à ceux qui s'y opposent, je sais que chacun connaît et salue votre sens de l'État et de l'intérêt général.
01:50Vous avez évoqué la gravité de l'instant. J'y adjoindrai la solennité du moment, car là aussi, je crois que nul dans cet hémicycle n'ignore les circonstances qui nous ont collectivement conduits à ce moment.
02:06Notre vie institutionnelle, notre économie, notre modèle social, tous se situent au carrefour de notre destin. Si nous ne voulons pas, demain, vivre les bouleversements générés par le monde, c'est à nous, aujourd'hui, de tout changer.
02:24Par leur souffrage, les Français ont exprimé une idée claire. Ils souhaitent tout autant un changement de cap qu'un changement de méthode. La méthode, c'est celle qui a guidé tout votre parcours politique.
02:39Ce besoin d'écouter en associant, de toujours chercher le meilleur compromis possible en considérant chaque partie prenante, le citoyen comme le parlementaire, le représentant des corps intermédiaires comme l'élu local.
02:54C'est la méthode qui dit le réel sans détourner le regard et qui a le courage d'agir en conséquence, sans faiblesse, sans artifice ou faux-semblant, avec pour seule boussole le souci de l'efficacité et la volonté de servir l'intérêt supérieur de la nation.
03:16Et à propos de boussole, vous me permettrez de rappeler l'hommage que vous aviez rendu ici même le 28 avril 2009 à l'ancien président du Sénat, René Monnory. Vous aviez salué chez lui l'ouverture d'esprit comme méthode et le bon sens comme boussole.
03:33Eh bien, Monsieur le Premier ministre, gardez ce cap. Dans la période qui s'annonce, vous aurez la lourde tâche de tenir la barre avec fermeté. Face aux tumultes, seuls les enjeux qui engagent le destin de notre pays seront vos guides.
03:48Il n'est plus temps d'égrener un chapelet de mesures, et nous vous remercions d'avoir dégagé des grandes priorités. Il vous faudra agir vite, car après tant d'atermoiements, c'est désormais l'urgence qui commande. Dans cette situation, vous n'êtes comptable de rien, et pourtant, vous allez devoir apporter des réponses à tout.
04:12De même, la majorité sénatoriale, et je renvoie aux observations de notre rapporteur général, cher Jean-François Husson, a toujours mis en garde, chaque fois tenté d'infléchir les choix budgétaires qu'elle considérait néfastes. Et toujours, toujours a-t-elle proposé des alternatives. Elle n'en sera pas moins responsable.
04:34Nous aurons bien le temps, mes chers collègues, de nous occuper du bilan. Notre devoir immédiat est de nous attaquer aux solutions. Collectivement, nous avons pouvoir nous appuyer sur l'un des enseignements de la Ve République. Rien n'est perdu tant que la volonté, la clairvoyance et la ténacité s'en mêlent.
04:58En 1958, la France voyait son rang international contesté. Ses finances publiques étaient exemptes, son économie en panne et sa compétitivité disqualifiée. Il a fallu l'impulsion singulière du général de Gaulle engendrant ce sursaut collectif pour remettre sur les rails un pays redevenu conquérant et gourmand de son avenir.
05:20Vous l'avez démontré au cours de vos nombreux chantiers, notamment au cours de la difficile négociation du Brexit. Vous incarnez ce rejet de la fatalité, ce refus du renoncement.
05:32Puissiez-vous cultiver cette qualité tant les chantiers qui attendent votre gouvernement, M. le Premier ministre, sont nombreux. Le redressement du pays passe avant tout par l'indispensable maîtrise de notre endettement.
05:45Avec la charge des intérêts, nous enregistrons cette année un détournement de fonds budgétaires supplémentaire de 50 milliards d'euros. Ce mur vers lequel nous tendons irrémédiablement nous prive des marges de manœuvre nécessaires à l'instauration des réformes indispensables pour l'avenir de notre pays tout en l'affaiblissant aux yeux de ses partenaires internationaux.
06:08Pire, cette dette étant majoritairement détenue par des acteurs étrangers, elle constitue une menace intolérable pour notre souveraineté. Nous en sommes conscients. Vous héritez d'une situation en passe de devenir incontrôlable et qui nécessitera des mesures d'urgence.
06:25Néanmoins, nous devons prendre garde à certaines mesures à court terme. Nous ne rétablirons pas durablement nos finances publiques en entamant le consentement à l'impôt de nos concitoyens. Et nous découragerons par là même les investisseurs dans l'Hexagone en chamboulant une énième fois le régime fiscal des entreprises.
06:45Les choix budgétaires devront être clairs dès cette année. Dans un pays champion du monde de l'impôt et tenu à bout de bras par ses forces vives, l'assainissement durable de nos comptes ne peut advenir que par une dépense publique plus rationnelle et surtout plus efficace.
07:03Une augmentation de la pression fiscale n'est jamais une solution. Le risque d'affecter une croissance déjà fragile est grand. Nous veillerons à ce que les mesures prises en la matière aient un caractère exceptionnel et temporaire sans impacter nos classes moyennes.
07:25Monsieur le Premier ministre, il ne peut y avoir de progrès social sans équité fiscale. Comme le dit la formule consacrée, à force de sacrifier l'essentiel à l'urgence, on finit par oublier l'urgence de l'essentiel.
07:41L'essentiel, monsieur le Premier ministre, c'est pour les Français d'avoir un travail et de pouvoir en vivre dignement. Je tenais à avoir une pensée particulière à ce sujet pour nos paysans, nos agriculteurs, qui incarnent mieux que quiconque l'âme de cette France qui travaille, qui a le goût de l'effort pour subvenir aux besoins collectifs sans compter ni les heures ni les sacrifices.
08:08L'hiver dernier, tous nous ont fait passer un message. Ils veulent pouvoir vivre de leur travail sans stigmatisation ni entrave. L'essentiel, c'est encore notre sécurité et celle de nos enfants.
08:24Lentement mais sûrement, l'autorité de l'État s'est peu à peu étiolée. Aujourd'hui, la violence sous toutes ses formes se propage. Si nous n'y prenons pas garde, c'est la cohésion de notre nation et la sérénité de notre démocratie qui se trouveront un jour irrémédiablement fracturées dans les urnes et dans la rue.
08:45Bruno Rotailleau, notre nouveau ministre de l'Intérieur, auquel je veux rendre hommage, souhaite assumer cette politique de fermeté à travers le rétablissement de l'ordre et la reprise de nos frontières, nous disons enfin.
09:12Monsieur le Premier ministre, nous croyons profondément que la sécurité est la première des libertés, le premier des droits que l'État doit garantir à ses citoyens et la première des conditions pour une société apaisée.
09:25Ainsi, dans ce domaine, votre tâche sera ardue. Vous aurez à prendre des mesures concrètes et immédiates, mais également à agir sur le temps long, sur les causes qui ont permis à cette situation de prospérer. Ce n'est qu'à ce prix que nous rétablirons la confiance dans l'ordre républicain et rendrons à tant de nos concitoyens, ceux dont ils sont privés, la tranquillité.
09:48A ce stade de mon propos, je me dois d'aborder l'avenir de nos collectivités territoriales. Si depuis 200 ans, la France a connu bien des régimes, une seule entité n'a jamais été remise en cause, la Commune, parce qu'elle constitue la cellule de base de la démocratie et la patrie du quotidien.
10:13Mais nos élus locaux se sont souvent sentis déboussolés et parfois découragés devant l'empilement de normes et un partage de responsabilités trop flou. Face à cela, nous plaidons pour plus de liberté communale.
10:28Réaffirmer et faciliter cette liberté doit permettre aux élus communaux et intercommunaux d'être les acteurs du destin de nos territoires, conditions essentielles pour redonner du souffle à notre démocratie locale.
10:42Aussi, les orientations que vous venez d'exprimer sont elles ici agréablement reçues. Il ne s'agit pas bien sûr de satisfaire les sénateurs impliqués de longue date sur la question des compétences eau et assainissement, dit statut de l'élu, ou encore du ZAN.
11:00Mais comme vous l'avez souligné, il s'agit de simplifier la vie des collectivités territoriales et de ceux qui la font vivre. A ce propos, comment ne pas évoquer l'iniquité flagrante que constituent les déserts médicaux.
11:15Le droit de se faire soigner ne peut plus être une option qui dépend de son lieu de résidence. Là aussi, nous savons que le sujet est complexe et que les slogans ne changeront rien pour ceux de nos concitoyens qui voient s'éloigner les soins et s'allonger les mois d'attente avant une consultation.
11:32Nous observons que ce phénomène touche aussi bien nos villes que nos campagnes. En parallèle à la santé, permettez-moi d'évoquer la question cruciale du logement qui déterminera aussi la cohésion de notre société.
11:47Mais reconnaissons-le. Comment pourrait-il en être autrement ? Entre des normes rigides, des diagnostics, ces fameux DPE qui font faire sortir des centaines de milliers de logements du parc privé, et des injonctions contradictoires réclamant aux élus de construire des logements tout en leur interdisant de bâtir pour respecter le zéro artificialisation net.
12:09Cette crise, M. le Premier ministre, n'est ni surprenante ni inéluctable. Elle ne l'est pas en effet. Pas plus que les autres difficultés que traverse notre pays. Nous devrons veiller collectivement à la préservation de notre école. C'est sans doute la clé de voûte de notre pacte républicain. Il n'y a pas de savoir sans transmission et pas de promesse d'ascenseur social sans une école qui permet à chacun d'atteindre l'excellence.
12:36Je voudrais également saluer l'attention toute particulière que vous avez souhaitée porter à la santé mentale en en faisant la cause nationale pour 2025.
12:48M. le Premier ministre, nous ne pouvons pas parler de l'avenir de la France sans évoquer la situation de nos Outre-mer, trop souvent perçue comme le catalyseur des maux de notre société.
12:59Vous avez choisi de désamorcer la crise en Nouvelle-Calédonie et c'est sans doute une sage décision. Il nous faut désormais aller plus loin. Nous savons que faute de nous attaquer aux causes économiques et sociales qui nourrissent les frustrations des Antilles au Pacifique en passant par la Guyane, nous laissons couver les crises de 2020.
13:17Mais justement ces crises elles non plus ne sont pas inéluctables alors il faudra oser et nous savons pouvoir compter sur notre ministre des Outre-mer, cher François-Noël Buffet.
13:27Monsieur le Premier ministre, le Sénat s'est penché sur chacun de ces sujets. Je vous invite donc à piocher à volonté dans ces travaux. Comme le dit souvent le Président Larcher, ils sont libres de droit.
13:43Dans cette ambition, vous trouverez toujours au sein du Sénat, parmi les membres du groupe Les Républicains, un aiguillon et un allié. Nous ne nous arrêtons pas, pardon, à ceux qui misent sur l'échec.
13:59S'ils veulent censurer le retour à l'ordre public, qu'ils l'assument. S'ils s'opposent à la simplification pour les agriculteurs, pour les élus de proximité, pour la construction de logements, qu'ils l'indiquent clairement aux Français.
14:11Dans cette période, nous devons réaffirmer la pertinence du bicamérisme et je veux saluer le rôle déterminant qu'a joué notre Président Gérard Larcher en tant que Président de cette institution.
14:23Monsieur le Premier ministre, pour conclure, sachez que nous ne doutons pas de votre volonté. Votre parcours politique de la Savoie à Matignon parle pour vous. Votre attachement à la France et votre expérience sont les meilleurs dégâges de notre réussite.
14:41Vous avez aujourd'hui le courage de tenir un discours de vérité esquissant les voies qui permettront de rendre à notre pays, à nos concitoyens, les moyens de maîtriser leur destin. Aussi longtemps, monsieur le Premier ministre, que vous arparterez cette ligne de crête, aussi périlleuse soit-elle, vous nous trouverez, monsieur le Premier ministre, à vos côtés. Je vous remercie.
15:03Merci. Merci, monsieur le Président. La parole est au Président Patrick Cannaire, pour le groupe socialiste, écologiste et républicain.