L'interview en tandem de François Ozon et Josiane Balasko : " C’est passionnant de filmer des femmes avec des rides"

Marie Claire

« C’est passionnant de filmer des femmes avec des rides, qui ont un passé sur leur visage. »  Pour « Quand vient l’automne », son nouveau film en salle depuis le 2 octobre 2024, François Ozon a choisi Josiane Balasko et Hélène Vincent, de 74 et 81 ans, pour actrices principales. Le cinéaste qui met toujours les femmes à l’honneur déplorent qu’elles disparaissent des écrans après un certain âge. Rencontre en tandem, avec Josiane Balasko.

Transcript

00:00C'est un impensé, c'est quelque chose qu'on ne voit pas.

00:02Qu'on ne voit pas, qu'on n'a pas l'habitude de voir, alors que je trouve que c'est passionnant

00:06de filmer des femmes avec des rides qui ont un passé sur leur visage, dans leur corps.

00:09J'ai eu envie de filmer des femmes plus âgées, des femmes de 70, 80 ans, qui assument leur âge.

00:15Parce que je trouve que les femmes de cet âge sont un peu invisibilisées dans le cinéma français.

00:19Et que souvent les rôles qu'on donne à ces actrices, c'est souvent des rôles un peu clichés, un peu caricaturaux.

00:24La bonne grand-mère, c'est souvent des seconds rôles.

00:28J'ai toujours été la première, je sais pas si Josianne t'est d'accord.

00:32Mais je suis d'accord, oui.

00:32Et donc là, ça m'intéressait que ce soit elle vraiment le centre du film.

00:35Que ce soit les personnages principaux et qu'on montre la vie de ces femmes qui sont à la retraite,

00:41qui ont un rythme de vie différent, qui passent leur temps chez elles à faire des mots croisés.

00:47Je sais pas si c'est un geste politique, mais en tout cas c'est une volonté aussi de montrer ça.

00:50Parce que c'est un impensé, c'est quelque chose qu'on ne voit pas.

00:53Qu'on ne voit pas, qu'on n'a pas l'habitude de voir alors que je trouve que c'est passionnant

00:56avec des rites qui ont un passé sur leur visage, dans leur corps.

00:59Moi, en tant que cinéaste, ça permet de raconter beaucoup de choses,

01:01de raconter la vie de ces personnages,

01:03de ne pas être obligé de développer avec des dialogues.

01:07Voilà, quand on voit Josiane qui va voir son fils en prison,

01:11dans sa manière de marcher, tout ça, on comprend déjà beaucoup de choses, je pense.

01:15Moi, j'ai une anecdote.

01:16Moi, je me souviens, il y a une scène très émouvante, très forte.

01:19Voilà, je fais un plan sur Josiane.

01:22On est en gros plan, elle est malade, voilà, elle n'est pas en forme.

01:25Ce n'est pas la plus belle lumière au monde, mais c'est très émouvant

01:28parce qu'elles se disent des choses très importantes.

01:30Et je dis coupé et Josiane me regarde et elle me dit

01:33on était à deux doigts de se rouler une pelle.

01:35Là, ça casse tout !

01:38C'est beau que cette amitié éclote,

01:40parallèlement à celle de vos personnages, c'est chouette.

01:42Mais souvent, ça arrive sur les plateaux.

01:44On parle justement de ces rivalités entre actrices.

01:46Moi, à chaque fois que je suis allé sur un plateau,

01:47que j'ai rencontré une actrice que je ne connaissais pas,

01:49j'ai lié des liens d'amitié, de sympathie avec elle, avec Hélène encore plus.

01:54Parce que peut-être aussi, on est d'une génération qui n'est pas très éloignée.

01:57On est dans le même cas, vous voyez.

01:59Théoriquement, on devrait être, on aura dû nous foutre,

02:02aller en maison de retraite !

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